Friday, October 8, 2010

SAVOIR CONNAITRE


L'escroquerie  en trente et une leçons
A quoi reconnaît-on un escroc ?
Voici une liste de trente et une caractéristiques, techniques et anecdotes. Un escroc donné ne présente pas nécessairement toutes les caractéristiques à la fois.

1.Il a plein de relations importantes dont il peut te faire bénéficier. En gros, ce sont des gens dont il a un jour serré la main. Les grands escrocs ont vraiment des relations haut placées. Parfois ces relations savent qu'il est un escroc, parfois pas.

2.Il te raconte sa vie ou des passages de celle-ci, parce que soi-disant il a confiance en toi. Ses "relations" y jouent souvent un rôle important. Un bon escroc est toujours un peu mythomane.

3. Il s'occupe de choses très importantes et n'a visiblement aucun intérêt à te jouer des tours, vu que ce qu'il traite avec toi est bien moins important que ses affaires courantes. D'ailleurs comment oserais-tu demander des preuves à un homme aussi important ? (Les personnes honnêtes se font généralement instinctivement un plaisir de donner des preuves et garanties, quelle que soit leur position.)

4. Tout ce qu'il te raconte comporte toujours une part de vrai.

5. Ce qu'il y a de bien, c'est qu'au fil des conversations il se découvre des tas de points communs avec toi. C'est vraiment, ce qu'il pourrait entreprendre avec toi est exactement le genre de choses que tu rêvais de faire.

6. Régulièrement, il te demande de lui expliquer en détail tes idées, qui semblent le passionner.

7. Il te rend de petits services et t'en demande de temps à autre.

8. Il t'a bien spécifié : "Entre nous deux, pas de cachotteries".

9. La relation d'amitié que tu as avec lui peut devenir passionnelle. Les maquereaux, par exemple, fonctionnent souvent de cette façon avec leur cheptel. Ils écoutent les filles, s'intéressent à leurs problèmes, se montrent tendres et fragiles, font des projets d'avenir avec elles.. Ils les rendent folles de passion, puis les convainquent de coucher avec des clients pour réunir l'argent nécessaire à la réalisation de leurs rêves.

10. Quand enfin il démarre quelque chose avec toi, tu es prié d'apporter ta contribution financière. Pourtant ce qu'il te demande est très inférieur au volume des affaires qu'il dit traiter.

11. L'escroquerie est l'art de la disproportion. Si tu faisais la comparaison de ce que représente en argent tout ce que tu donnes à l'escroc par rapport à ce qu'il te donne en retour, tu constaterais que tu es largement perdant. Mais tu ne feras pas ce calcul. Un escroc débutant ne fait pas non plus ce calcul. Soit il t'a donné un petit quelque chose, soit il a intensément rêvé de te donner un grand quelque chose. Dans les deux cas il en éprouve une fierté infinie. Fort de ce mérite ineffable, c'est bien la moindre des choses s'il se sert en retour... abondamment.

12. L'escroc te fera participer à de nombreuses réunions où seront débattues en staff les dernières nouvelles, les nouveaux espoirs. Ces nombreuses séances de travail sont harassantes et lourdes d'émotions. L'escroc te maintient dans un état de stress qui t'épuise et émousse ton esprit critique. Tu vas y perdre la santé, mais c'en vaut certainement la peine. Qu'importe si tu n'as plus l'esprit clair, il s'occupe de tout.

13. La preuve que tu as vraiment besoin de lui : il a régulièrement des contacts enthousiasmants avec de grandes organisations ou des personnes importantes au sujet de vos affaires. Ces contacts sont toujours sur le point d'aboutir. Dans les sectes, ces personnes importantes peuvent être des anges, les extraterrestres ou Dieu lui-même.

14. Au stade où elles devraient commencer à se concrétiser, les bonnes nouvelles de l'escroc s'estompent et font place à de nouveaux espoirs qui te maintiennent en haleine.

15. Il te demande le plus grand secret sur les affaires traitées : "Les espions sont partout et la concurrence n'hésiterait pas à envoyer ses tueurs.". Mais il dit que dès que tout marchera bien il pourra user de ses relations pour faire connaître ce que vous avez fait.

16. Il te présente des tas de documents officiels et provenant de grandes organisations, qui témoignent de son importance. Supposons qu'un procès ait lieu contre toi et l'escroc. Ces documents feront parties des pièces à conviction. L'escroc t'expliquera que c'est la preuve d'une conspiration contre lui. Même les experts du tribunal ont été achetés : ils disent tous que la plupart de ces documents sont des faux.

17. Chose étrange, toutes les opérations qu'il prépare se déroulent suivant le même schéma.

18. Tes relations avec lui rendent des tas de personnes jalouses : elles n'arrêtent pas de te dire de te méfier de lui. Heureusement, c'est un homme remarquable : rien ne le démonte. Il assure.

19. Les gens honnêtes savent que c'est en étant honnête qu'on va le plus loin dans la vie. L'escroc, lui, sait que c'est en t'expliquant que c'est en étant honnête qu'on va le plus loin dans la vie, qu'il arrivera le mieux à t'escroquer.

20. Il t'initie à quelques trucs "bénins" mais pas tout à fait légaux. Si possible il te fera commettre une légère irrégularité : documents antidatés, manipulations bizarres de comptes en banque, signatures de documents... Ce truc est très prisé des maquereaux, qui ne craignent ainsi plus que leurs protégées ne les dénoncent.

21. Quand vous vous séparerez, lui détiendra des tas de documents signés par toi, attestant entre autres de ce que tu lui dois, mais toi tu n'auras rien de lui.

22. C'est lui qui aura fait l'escroquerie, mais c'est toi qui ira en prison.

23. Si tu te mets à attaquer l'escroc, il va contre-attaquer en te collant un procès sur le dos. Dans ce procès, tu seras précisément accusé de ce que tu reprochais à l'escroc. Ce pour deux raisons. Primo, parce que l'escroc préfère rester dans un domaine qu'il connaît bien. Secundo, parce que cela jette un flou.

24. Certains escrocs n'ont qu'une seule technique et attendent que la victime appropriée passe à leur portée pour la mettre en oeuvre. D'autres escrocs disposent d'un répertoire de techniques auxquelles ils donnent des noms enchanteurs; "la valise roumaine", "la double vente", "la trappe", "la carambole"... Les grands maîtres n'ont pas de techniques : ils sont ouverts au monde, se renseignent, observent. Ils inventent une technique sur mesure suivant les circonstances et les victimes qui passent à leur portée.

25. L'escroc joue parfois sur un phénomène assez pernicieux : il sait que beaucoup de gens partent du principe que tous les industriels, hommes d'affaires... sont des bandits. Si un conflit t'oppose à l'escroc, ces gens vont considérer l'affaire comme un conflit entre deux malfaiteurs. Si un de ces malfaiteurs prétend être honnête (toi, en l'occurrence), c'est qu'il est manifestement particulièrement tordu et mérite le plus d'être puni.

26. Certains escrocs se vident de tout scrupule en se disant que tu avais l'air tellement heureux quand il te faisait miroiter monts et merveilles.

27. Un escroc considère qu'il a droit à certaines choses. Si par exemple il a réussi à faire en sorte que ta voiture devienne la sienne, il se comportera comme si c'est réellement la sienne et que tout est bien. Il se doit d'avoir une voiture, comme tout le monde. Le fait que maintenant il en a une est conforme à l'ordre naturel des choses.

28. Un escroc débutant ne réfléchit pas comme un escroc professionnel. La caractéristique principale d'un escroc débutant est qu'il croit réellement tout ce qu'il dit. Il se raconte des histoires et veut en faire profiter tout le monde. Un fait touchant est par exemple que quand il essaye te t'emprunter de l'argent, il a d'abord passé des jours entiers à rêver qu'il allait te rendre dix fois la somme empruntée.

29. Si un de tes amis sait que la personne avec qui tu fais affaire est un escroc, il ne te dira rien. Il se sentira déçu que tu fréquentes de telles personnes. Il te croyait honnête et constate qu'il s'est trompé. Dans le meilleur des cas il se dira qu'il vaut mieux que tu apprennes par toi-même ce qu'est un escroc. Mais en aucun cas il ne te mettra en garde.

30. Tu te laisseras attraper par l'escroc, malgré le fait que tu as lu ceci.

31. Si tu fais lire ce texte à l'escroc, il dira qu'il est excellent.

Les intégristes réprouvent la Lumière parce qu'ils ne veulent pas que les individus qui sont sous leur contrôle réfléchissent. Ils ne veulent pas qu'ils évoluent et finissent par les quitter. Il faut qu'ils restent dépendants. Donc ils recourent à la censure, la désinformation et l'obscurantisme.
La Lumière et l'Ombre sont liées. Les deux doivent coopérer, l'un est nécessaire à l'autre. Ils forment un tout. Il faut vouloir savoir. Il faut savoir ce que l'on veut. L'action part du rêve. Le rêve est un acte. Le savoir donne le pouvoir. Savoir est un travail. Savoir les choses aide à éviter de céder à un excès d'Ombre.
Lumière et Ombre peuvent aussi être antagonistes. L'Ombre peut empêcher la Lumière. Dans un état dictatorial, la presse, les arts et l'enseignement sont muselés. Chez un individu, la volonté d'obtenir quelque chose peut lui faire oublier de tenir compte des besoins, intérêts et émotions d'autrui. Inversement, la Lumière peut empêcher l'Ombre. Une personne qui accumule des connaissances dans le désordre risque de finir apathique, sans plus aucun ressort. Il faut continuellement mettre en pratique le savoir et le rationaliser pour qu'il reste efficace. Un peuple dont le mode de vie est trop raffiné peut devenir incapable de faire la guerre pour se défendre.

La confiance, l'espoir, la foi, la séduction, le plaisir, la douleur, la bonté, l'affection, l'identité, le choix, la passion, la stratégie, les scrupules, le charisme, l'instinct, la tendresse, la culpabilité, la rationalisation, l'organisation, la manipulation, la ruse, l'apprivoisement, les valeurs, le jugement, la construction, la rigueur scientifique, l'honnêteté, la probité, la persévérance, la mesure, l'indignation, le secret, la sagesse, la Justice, la prudence, la parole, l'humour... sont des concepts qui font une synthèse de la Lumière et de l'Ombre. La dopamine a un rôle dans le cerveau entre Ombre et Lumière.
Pour les tribus africaines l'Univers a été créé par un dieu unique. Chez les grecs c'est le dieu Ouranos (il a engendré les autres dieux). Pour les juifs, les chrétiens et les musulmans c'est Dieu (Allah en arabe, YHWH dans la Torah). Pour les francs-maçons c'est le Grand Architecte. Tout cela est un seul et même dieu, le dieu des monothéistes, sur lequel chaque religion porte une lumière un peu différente. Il est à la fois l'Ombre et la Lumière. D'après les tribus africaines Dieu est lointain, virtuellement inaccessible. Pour les juifs, Dieu est proche, on peut dialoguer avec lui. Mieux comprendre Dieu et avoir permis de l'approcher en pensée serait un apport des juifs à l'Humanité.
Dans le symbole du Yin et du Yang la Lumière et l'Ombre s'interpénètrent. Le Yin et le Yang stipule que l'harmonie vient de l'équilibre entre la Lumière et l'Ombre. Le point noir dans le blanc signifie que le germe de l'Ombre se trouve dans la Lumière. Le point blanc dans le noir signifie que le germe de la Lumière se trouve dans l'Ombre.
Le symbole des quatre éléments peut être pris comme une subdivision de la Lumière et de l'Ombre. L'Eau est le savoir, l'Air est le mouvement, la Terre est le pouvoir, le Feu est la volonté.
L'Islam donne 99 noms de Dieu, qui sont autant de définitions de ses aspects. Elles ressemblent un peu aux listes de mots contenus dans ce texte pour caractériser l'Ombre et la Lumière. L'Islam pousse à trouver encore d'autres "propriétés" de Dieu : on dit aux croyants que le 100ème nom de Dieu est tenu secret parce qu'il confère un grand pouvoir à celui qui le trouve.

Dans la religion chrétienne, la mère symbolise la Lumière, le père symbolise l'Ombre et l'enfant se doit d'être la synthèse des deux. Ou encore : le Père symbolise la Lumière, le Fils symbolise l'Ombre et le Saint Esprit symbolise le passage entre les deux.

Dans la série de films "La Guerre des Etoiles", le côté clair de la Force symbolise un usage équilibré de l'Ombre, éclairé par la Lumière. Tandis que le côté obscur de la Force symbolise l'excès d'Ombre.

Un bon chef sait ce que chacun de ses hommes peut faire et le lui fait faire. Toute personne doit être son propre chef.

Certaines personnes rêvent avec beaucoup de force et de conviction de ce que vous allez faire pour elles. Même en sachant consciemment que vous avez bien fait de ne pas leur obéir, vous ressentirez un sentiment de culpabilité.

On recommande aux automobilistes, dans le cas où leur voiture partirait en glissade sur une route humide ou enneigée, de regarder dans la direction où ils voudraient aller et non dans la direction qu'ils voudraient éviter. De même, ceux qui construisent des choses sont ceux qui ont une vision claire de ce qu'ils rêvent, de l'avenir, de ce qu'ils voudraient que les autres soient ou fassent. Se contenter de critiquer, de contempler une situation inappropriée, ne mène en général à rien. Cela peut même accélérer la survenue des problèmes.

L'Ombre et la Lumière peuvent paraître opposés. Par exemple le fait de ne pas comprendre un chef violent fait qu'on le craint donc qu'on lui obéit ; l'absence de Lumière permet la démesure de l'Ombre. Lever des contraintes qui pèsent sur un artiste peut améliorer la qualité de ses créations ; moins d'Ombre permet plus de Lumière. L'excès d'Ombre de certaines religions a empêché les progrès médicaux dans certains pays pendant des siècles. Des enseignants péremptoires, qui affirmaient connaître toutes choses, ont freiné les progrès de la Science. Il ne faut pas se limiter à ces exemples. Leurs inverses sont vrais aussi. On n'a jamais autant inventé la démocratie que sous la dictature de Louis XIV. Une forme de contrainte est souvent nécessaire à la création artistique. Si un artiste se donne tous les moyens d'expression, par exemple les meilleurs pinceaux et tous les tubes de couleurs possibles, il produira de jolies chos mais ces oeuvres n'auront pas de force, pas de saveur. Si l'artiste limite volontairement ses moyens, par exemple s'il décide de n'utiliser que le blanc et le noir, son travail deviendra beaucoup plus difficile. C'est de cette difficulté que naîtront l'expression et l'émotion. L'artiste devra travailler dur, se creuser la tête, pour trouver un moyen de s'exprimer malgré les contraintes qu'il s'est imposées. Quand il aura trouvé ce moyen, quand il l'aura concrétisé sur la toile, le résultat sera fort, imposant. En Science, il peut être bon qu'un professeur énonce clairement des théories, qu'il les affirme en détails précis et les pose comme un bloc de granit. C'est ce qui permettra à ses élèves de remettre les théories en question, d'aller plus loin. Ils pourront s'attaquer aux détails, parce qu'ils ont été mentionnés de façon précise par le professeur. Un professeur qui se contente de dire "on est sûr de rien", "on travaille sur la question"... empêche les progrès de ses élèves. En disant "on travaille sur la question", il signifie à ses élèves que des personnes plus compétentes qu'eux sont sur le coup, donc qu'il ne sert à rien de se pencher sur le sujet. En disant "on est sûr de rien", d'une certaine façon il signifie que tout ce que ses élèves pourraient trouver viendra se raccrocher à la théorie existante, qui est ouverte. Donc que le mérite des élèves sera moindre. La déontologie est très importante ici : un bon professeur se doit aussi d'expliquer à ses élèves qu'aucune théorie n'est sûre. Il doit reconnaître tout de suite quand ses élèves apportent quelque chose de concret. Il doit chercher des arguments en leur faveur. Il ne faut pas se contenter d'affirmer clairement les choses, il faut aussi aider ceux qui veulent les remettre en question. Il faut que les élèves puissent revendiquer leurs victoires.

La dépression nerveuse, la paranoïa, la schizophrénie, la mégalomanie, la mythomanie, la timidité, la malhonnêteté, l'intégrisme, l'autoritarisme, l'anorexie, l'escroquerie, se prendre au sérieux, l'inquisition, la corruption, le mensonge, la kleptomanie, la haine, la perversion, le fait de ne pas arriver à faire comprendre à des hôtes qu'il faut qu'ils partent parce que vous avez du travail, le fait de croire que tout acte inadéquat doit entraîner une punition, le fait de croire que si une personne fait une chose inadéquate c'est nécessairement qu'elle a décidé de le faire et qu'elle a les moyens de faire autre chose, le fait d'être choqué par ce qui ne vous encense pas, un maquereau qui imagine qu'une fille travaille pour lui et qui le lui impose par la force, le fait d'avoir bien compris qu'on n'a pas le droit de faire une chose mais par un lent processus d'autopersuasion se convaincre qu'on peut quand même, le fait de se faire une fête de fixer un rendez-vous à une personne et puis l'oublier ou bien stresser au moment du rendez-vous au point de ne pas s'y rendre, un voleur de grand chemin qui rêve à son futur butin au point de finalement ne faire que reprendre son bien... Ce sont là des désordres de la Lumière et de l'Ombre. Les personnes qui en sont atteintes ont un problème de rêve et d'image de soi. Certaines fonctions de leur cerveau fonctionnent de façon exagérée ou inappropriée, ou ne fonctionnent pas assez. Ces fonctions ont toutes leur raison d'être. Elles sont nécessaires à la survie. C'est souvent une bonne chose de se demander quelle est le rôle normal d'une fonction qui pose problème chez quelqu'un, quelle est la raison pour laquelle la Nature l'a créée. Chez les enfants ces troubles ne sont pas graves. Ils ne peuvent de toute façon rien faire de grave puisqu'ils n'ont pas de responsabilités. Leurs cerveaux étant en perpétuelle construction et transformation, si l'environnement s'y prête le problème sera rapidement résorbé. Il est une manifestation tout à fait normale de leur croissance. Chez les adultes, par contre, dont le cerveau est plus figé, les véritables guérisons sont plus difficiles à obtenir.
Dans le cadre de ce système symbolique, un menteur est une personne qui croit pouvoir tricher avec Dieu, qui croit pouvoir se jouer de Lui. Une personne qui refuse de donner de l'affection est une personne qui se bat contre Dieu. Une personne qui ne se trouve pas digne de recevoir de l'affection et qui ne se rend pas compte de l'importance de l'affection qu'elle peut donner aux autres, est une personne qui croit qu'elle ne compte pas aux yeux de Dieu.
De grandes abominations ont été commises par des chefs qui avaient de grands desseins, une Ombre imposante, mais qui manquaient de morale et de sagesse. Ils avaient peu de Lumière. Dans un premier temps leurs actions brutales leurs permettent d'obtenir des résultats impressionnants. Ensuite tout s'effondre.
Parfois on confond Lumière et Ombre. Par exemple chez certains professeurs un étudiant obtiendra ses notes en fonction de sa volonté à réussir et non en fonction de sa maîtrise du savoir. A l'inverse, lors de certains interviews d'embauche on choisira les candidats en fonction de leur savoir, souvent inutile, au lieu de les choisir en fonction de ce qui compte réellement : leur volonté d'obtenir des résultats dans leur travail.
Un certain endoctrinement dit que les personnes qui font des études ont la Lumière et que les ouvriers ne l'ont pas. En réalité la Lumière est autant dans le chef d'un ouvrier qui trouve le moyen d'ajuster des pièces que chez un mathématicien qui réussit à résoudre une équation nouvelle. C'est la même démarche. Réciproquement il existe des ouvriers sans créativité et des mathématiciens qui ne font que réciter des formules ou appliquer des procédures.

Le rêve, le passage à l'acte, s'occuper d'autrui... ces choses procurent un plaisir immense. Elles sont donc dangereuses, peuvent engendrer de nombreux problèmes. Le rôle de la religion, de l'éducation, est de permettre aux gens de faire pour un mieux. Hélas, souvent on se contente d'interdire et de cacher.

Certaines personnes ne posent aucun acte sans avoir l'approbation de ceux qui les entourent. Il leur faut des ordres. Ces personnes-là ne s'attirent la sympathie de personne. Elles sont transparentes, inexistantes. D'autres au contraire passent à l'acte, d'autorité, en toutes circonstances. La qualité de leurs actes dépend de leur niveau global d'expérience, de morale, d'intelligence, de culture et de sagesse. Il sont vénérés par les personnes qui ont un niveau plus bas qu'eux et sont considérés comme des criminels par les personnes qui ont un niveau plus élevé. Il sont incompris par les personnes qui ont un niveau beaucoup plus bas qu'eux et sont considérés comme des victimes par les personnes qui ont un niveau beaucoup plus élevé. Deux personnes qui ont un niveau bas prennent souvent des décisions incompatibles entre elles. Un travail d'endoctrinement et d'encadrement est nécessaire pour constituer un groupe homogène de personnes ayant un niveau bas. Les personnes ayant un niveau élevé, même si elles proviennent de cultures très différentes, prennent des décisions souvent très compatibles entre elles. Tout au moins ces personnes instruites arriveront-elles à s'entendre sur les choses à faire. Elles arriveront à créer l'accord sur les projets, voire l'unité. Le judaïsme symbolise cela en expliquant qu'à la mort l'âme rejoint Dieu, pour ne plus former qu'un tout où il n'existe plus de désaccords. C'est l'état ultime de Paix. Un juif se doit de s'éduquer toute sa vie, afin que le jour où il cesse d'exister, il arrive le plus instruit possible dans le "grand tout". L'intérêt des symboles résidant uniquement dans leur application dans le quotidien, cela signifie qu'une véritable éducation, une véritable instruction de tout le peuple, apportent la paix et la prospérité. Ce principe n'est pas élitiste, en ce sens qu'un analphabète qui arrive à bien gérer son troupeau de chèvres et son chien est un savant.

Les partis politiques de Gauche sont davantage portés à la Lumière. Les partis politiques de Droite sont davantage portés à l'Ombre. C'est parce que ces deux pôles sont nécessaires et indissociables que les pays démocratiques pratiquent l'alternance entre les partis politiques. Ces pays oscillent entre la Gauche et la Droite au fil des années, tout comme les pensées d'une personnes oscillent entre la Lumière et l'Ombre au fil des secondes ou des semaines. Quand les habitants d'un pays n'ont pas un niveau d'éducation assez élevé pour comprendre ce qui se passe, ils seront portés vers la Droite. C'est à dire vers les règles et les lois, que l'on peut appliquer sans vraiment comprendre. Si leur niveau d'éducation est suffisamment élevé, ils seront portés vers la Gauche : vers la gestion intelligente et compréhensive des choses. Quand il se passe des événements graves, ils seront portés vers la Droite, qui agit vite et fort. Quand tout va bien, il préféreront la Gauche, qui est plus douce à vivre, qui n'impose pas des règles inadaptées et destructrices. Le rôle de la Gauche est de tirer les conséquences des dégâts causés par l'aveuglement de la Droite. Le rôle de la Droite est d'agir quand la Gauche n'arrive plus à proposer de solutions convaincantes. La Droite applique alors des règles inventées auparavant par la Gauche. Quand le niveau d'éducation de la population baisse, elle est naturellement portée vers la Droite. Pour survivre, la Gauche est perpétuellement obligée de travailler à éduquer les gens : leur faire découvrir qui ils sont, leur apprendre le Monde, leur apprendre les autres... Il faut qu'un nombre suffisant de gens aient le niveau nécessaire pour réaliser que les idées de Droite sont de méchantes bêtises. Ce que la Gauche doit au moins veiller à faire, c'est que quand le pays glissera vers la Droite les gens aient malgré tout le niveau nécessaire pour affronter les problèmes en ne faisant pas trop de dégâts ni de massacres. La Droite prétend savoir les choses tandis que la Gauche cherche à comprendre les choses.

La Lumière est sensée éclairer celui qui veut Agir. Pour tenter de faire le tri entre les actions qui devraient être faites et celles qu'il faudrait éviter, les humains ont développé les notions relativement abstraites de "bien" et de "mal". Les personnes politiquement de droite pensent être capables de faire le tri entre ce qui est bien et ce qui est mal. Les personnes politiquement de gauche pensent être capable d'organiser ce qui amène le bien et d'éviter ce qui amène le mal.

D'après les psychologues il y a deux attitudes de base face à une situation : l'attaque ou la fuite. L'attaque peut être le simple fait d'accepter de prendre en charge un problème. Le fuite peut être un simple refus. L'attaque et la fuite sont des réflexes innés, que l'on n'a pas besoin d'apprendre. Ils ressortent de l'Ombre. Mais apprendre à retrouver son calme après l'attaque ou analyser correctement les conditions d'une fuite, ce sont des choses qu'il faut apprendre à faire et qui ressortent de la Lumière. Si on n'est pas capable de retrouver son calme après l'attaque, on vivra perpétuellement en état d'attaque --en état de stress. L'organisme finira rongé. Si on n'est pas capable d'analyser correctement une fuite ou un échec d'attaque, on reproduira les mêmes erreurs. Certaines personnes tentent de contourner le problème en évitant systématiquement les situations de stress. Leur monde s'écroulera faute de labeur et de réalisations, l'inactivité les détruira. D'autres personnes encore recourent à des drogues pour se calmer après ou pendant l'activité. Si elles savent gérer la drogue elles vivent parfois plus sainement que des personnes qui n'ont pas appris à se calmer. Mais rien ne vaut le calme par le contrôle naturel de l'esprit. Plus difficile encore est ce qu'il faut apprendre à faire quand on ne peut ni attaquer ni fuir. Il faut apprendre à renoncer, à accepter. Une personne qui ne peut ni attaquer ni fuir et qui n'a pas appris à accepter, encourt des problèmes psychologiques graves voire des maladies somatiques qui peuvent causer sa mort. C'est une part du travail des religions que d'apprendre aux hommes à accepter. Certaines expliquent aux hommes qu'ils sont insignifiants face aux choses du Monde et ne peuvent donc intervenir sur tout. D'autres expliquent que toute situation est planifiée par une conscience supérieure et doit donc être acceptée. Ces choses que les religions expliquent sont des "trucs" psychologiques qui donnent de plus ou moins bons résultats. Ils ont des effets secondaires pervers : ils entraînent une déresponsabilisation, des abus... Par exemple certaines religions utilisent leur art de faire accepter les choses aux gens pour leur faire accepter les situations les plus ignobles : maladie, esclavage, souffrances inutiles... elles vont même jusqu'à éliminer physiquement les personnes qui ont les moyens intellectuels nécessaires pour résoudre ces problèmes. Beaucoup de personnes utilisent des drogues pour accepter la réalité, pour l'oublier ou en inventer une autre. La seule bonne approche est d'apprendre à accepter les choses par la volonté de l'esprit, sans recourir à des prétextes douteux ni à des drogues. Il faut beaucoup de travail et de Culture pour être capable de se calmer, d'analyser et d'accepter les choses de façon saine.

Le rôle d'un parent est d'imposer le Monde à son enfant. C'est un travail d'Ombre. Il faut parfois brimer l'enfant, le contraindre, pour le forcer à voir le Monde tel qu'il est et lui apprendre à y vivre, à l'affronter efficacement. Si cela n'est pas fait, l'enfant risque de réinventer le Monde dans son imaginaire et de s'y offrir une place merveilleuse. Devenu adulte cet enfant continuera à rêver. Il risque de devenir un bandit qui impose ses rêves, de se droguer, de se suicider parce qu'il ne peut concilier la réalité de ses besoins à ses rêves... Un parent doit aussi faire un travail de Lumière : il doit accepter, approuver et féliciter l'enfant pour ses qualités. Il doit lui permettre de les développer, d'en faire des projets, de s'insérer avec brio dans la réalité. Il doit confier l'enfant à d'autres personnes, qui sauront découvrir et développer encore d'autres qualités chez l'enfant. La plus importante des qualités qu'un parent doit affirmer chez son enfant est le fait-même que c'est son enfant. Beaucoup de parents essayent de faire ces travaux d'Ombres et de Lumière mais s'y prennent mal. Ils inventent de toutes pièces des raisons de brimer leurs enfants, sont violents ou clament des qualités de leurs enfants qui n'existent pas ou qui n'ont pas été développées. Ils écrasent leurs enfants ou ils font se développer à outrance leurs rêves stériles. Parfois les deux en même temps. Pour être un parent acceptable, il faut avoir une Lumière et une Ombre correctement développés. Cela peut même suffire en soi, car le plus important pour les enfants est l'exemple qu'on leur donne.

Une personne qui croit savoir ce qu'il faut faire, qui croit avoir une bonne idée, une bonne pulsion, en éprouvera de la jouissance. Elle aura envie de passer à l'acte. C'est pour cette raison que l'on dit que le Diable est séducteur, charmeur. Il est appétissant, attirant, rassurant... Il pousse à passer à l'acte. Mais si pour une autre personne cette idée ou cette pulsion est une mauvaise idée, qui entraîne des problèmes et des souffrances, alors pour cette personne le Diable apparaîtra laid et repoussant. Cette deuxième personne tendra donc à stopper l'acte. Cela ne permet pas de savoir qui a raison. L'un comme l'autre peuvent se tromper. Tout les deux peuvent se tromper. Ou même aucun des deux. L'Ombre est nécessaire dans certains de ces cas pour qu'une personne se lève et affirme les choses.

Quand les employés d'une entreprise ont trop peu de Lumière pour comprendre leurs rôles et les enjeux, ils n'auront que peu ou pas d'Ombre pour travailler. Le rôle du chef est alors important. D'une voix ferme il doit stresser ses employés, leur insuffler l'Ombre nécessaire à un travail diligent. Par contre si les employés ont un bon niveau de Lumière, une attitude autoritaire les fera partir ou diminuera sensiblement leur rendement. Il vaut alors mieux que le chef soit un employé comme les autres, avec un rôle centralisateur.

Les personnes qui ont dévoyé la religion se permettent de canaliser la Lumière. Elles présentent à leurs adeptes une image adaptée de la réalité. Elles leur occultent des raisons d'avoir peur ou en amplifient d'autres. Elles leur inventent des explications des choses et un semblant de savoir qui donnent une grande joie. Tout en leur apprenant à ne plus penser à d'autres choses. Par exemple avec des phrases comme "Ce qui est, est." ou "Toute idée, toute invention, est le fait de Dieu. Nous ne sommes rien.". Dans certaines de ces sectes les adeptes vivent un paradis artificiel permanent. Dans d'autres sectes ils sont rongés de peurs. Parfois les deux en même temps. Mais dans tous les cas ils réalisent les ambitions de ceux qui les gouvernent. Celui qui impose la Lumière impose aussi l'Ombre.

Il est normal qu'un jeune enfant martyrise un insecte ou un petit animal, qu'il s'amuse des réactions de la bestiole sans aucune conscience de sa douleur. Il n'a pas d'empathie, tout comme quelques années auparavant il n'avait même pas la parole. Le rôle des adultes est d'éviter ces événements aux maximum. Mais cela ne permet pas de dire que l'enfant est mauvais. La Lumière est une chose qui se développe avec l'âge, qui s'apprend, qui se révèle ou fil des événements. Certains adultes n'ont jamais acquis l'empathie. Ou elle a été tuée en eux. Ils peuvent alors être des bandits qui font souffrir autrui ou des chefs d'états qui ordonnent l'extermination de peuples entiers par simple calcul politique.

Les christs et les antéchrists sont des personnes qui ont de grandes idées et de fortes convictions. Ils savent les imposer à des foules entières, par leur charisme. C'est un mélange irrationnel d'une forte dose de Lumière et d'Ombre. Ce sont des gens qui apportent des choses à l'humanité. Ils causent aussi beaucoup de malheurs. Il faut beaucoup de temps et de travail avant de digérer les affirmations des christs et des antéchrists. Le mérite d'un christ ou d'un antéchrist peut résider dans le fait qu'il a permis de comprendre qu'il faut faire le contraire de ce qu'il a enseigné. Si les opinions de la personne sont jugées globalement positives, on la qualifiera de christ. Si elles sont jugées globalement négatives, on la qualifiera d'antéchrist.

Un excès d'Ombre vient hélas souvent en réponse à un manque de Lumière. Par exemple on attend d'une personne qu'elle perçoive les émotions ou les problèmes de son entourage. On attend d'elle qu'elle se comporte en fonction. Si une personne a besoin de repos ou de recueillement, il faut le sentir et ne pas lui adresser la parole. Si on le fait quand-même, la personne donnera une seconde chance en disant explicitement les choses : "S'il te plaît, laisse moi seul.". Si on ne sent et ne comprend toujours pas, alors cela peut finir par la violence : un départ, des cris, des propos blessants voire des coups. En général, si on est arrivé à ces extrêmes, on ne comprendra toujours pas. Mais on obtempérera et peut-être se mettra-t-on à réfléchir ou à se renseigner, à apprendre. Le manque de Lumière peut aussi être dans le fait de la personne qui voulait rester seule : si elle ne se rend pas compte que son désir d'être seule avait été compris. A l'échelle d'un pays le recours à un excès d'Ombre faute de Lumière peut avoir des conséquences dramatique. Si le niveau d'éducation dans ce pays baisse trop et que la survie des habitants devient donc difficile, une petite partie des habitants va se saisir par la force des privilèges et des biens. Les autres habitants seront réduits en esclaves ou en chair à canon.

Un excès d'Ombre mène à une régression de la Lumière. Par exemple dans les dictatures on interdit et on élimine les livres qui ne sont pas en accord avec la doctrine du dictateur.

Le serpent se mord la queue. Un excès de Lumière ou d'Ombre est très proche d'un manque de Lumière ou d'Ombre. Un fonctionnaire qui par un excès d'Ombre se tient trop rigoureusement au règlement, manque d'Ombre pour faire des choses utiles. Un jeune qui par un excès de Lumière a le savoir nécessaire pour faire une expérience dangereuse, a par là-même un manque de Lumière pour faire cette expérience en sécurité. On ne lâche les enfants dans le Vaste Monde que quand ils ont acquit assez de Lumière pour savoir qu'ils n'en ont pas assez.

"Le" Savoir est une chose. Mais il y a "les" savoirs. Notre cerveau sait beaucoup de choses. Il s'avère à l'usage que ces choses peuvent être contradictoires. Il en résulte des conflits, des paradoxes, des tensions dans nos pensées. Nous ne savons plus quoi faire, nous sommes préoccupés. Cela peut nous mener à de graves problèmes physiques et mentaux. Des gourous nous proposent des solutions simplistes. Il vaut mieux aller trouver des personnes de bon conseil : parents, amis, auteurs de livres, autorités spirituelles ou psychologues. Il nous faut mieux discerner les choses, apprendre des choses nouvelles qui permettent de mettre de l'ordre. Simplement apprendre les mots qui permettent d'exprimer ce qu'il y a en nous. Il nous faut déterminer ce qui est important et ce qui l'est moins, comprendre qu'une chose vaut dans certains cas mais pas dans d'autres. Accepter le simple fait que certaines choses n'ont ni réponse ni solution. Il nous faut ranger les choses dans notre tête d'une façon appropriée à la façon dont notre propre cerveau travaille. Si nous essayons de mettre dans notre cerveau une version simplifiée de ce qu'il y a dans le cerveau d'une autre personne, nous serons forcément moins performant. Les informations qui se trouvent dans les cerveaux des autres sont une nourriture vitale pour le nôtre mais il ne faut pas oublier de la mâcher et de la digérer. Ensuite seulement ce qu'il y a dans notre cerveau deviendra intéressant pour les autres. Cela formera un grand tout qui peut se rendre utile.

Fondamentalement le mal n'existe pas. Tout le monde essaye de bien faire, même les dictateurs et les maladies. Si une personne fait du mal à une autre personne, c'est parce qu'elle ne se rend pas compte de ce qu'elle fait ou qu'elle croit qu'il y aura du bien au bout du chemin. Une personne ivre de vengeance, désireuse de faire souffrir un Monde entier, veut au fond d'elle-même redresser un tort ou punir une injustice, ce qui est bien. Dans la Nature il y a beaucoup de choses qui peuvent faire souffrir : les maladies, les accidents... Mais la Nature n'a pas de conscience. Elle ne prend pas la décision de faire souffrir. Il n'y a que des phénomènes météorologiques, des animaux qui se nourrissent ou se défendent. Si nous pouvons ressentir la douleur c'est parce que cela nous permet d'apprendre et d'éviter ce qui nous détruit. Les notions de mal, de Diable méchant ou de Dieu punisseur, ont été inventées par les hommes. Ils subissent des douleurs et des revers, il leur faut trouver des mots pour en parler. Le problème est que ces notions de mal sont à leur tour utilisés par l'homme pour faire le mal. En croyant que le mal est une intention dans les homme ou dans la Nature, certains hommes créent plus de mal encore. Ils croient qu'ils doivent détruire ou réprimer ce qui "contient" le mal. Certains disent que l'homme contient le mal parce qu'il éprouve du plaisir en faisant ce qui est interdit. Une meilleure explication est que l'homme est un explorateur. Il éprouve du plaisir à explorer. C'est grâce à cela qu'il apprend à connaître son environnement et qu'il devient plus apte à y survivre. Faire ce qui est interdit est une des formes d'exploration. Ce n'est pas l'interdit qui donne du plaisir, c'est l'exploration. Il faut apprendre aux enfants à explorer en nuisant le moins possible à autrui. Les empêcher d'explorer ne peut mener qu'au mal.

A la base, l'Ombre pousse à la lutte entre les individus. Les puissants exploitent les pauvres. Le fort détruit le faible. Les grandes bêtes mangent les petites bêtes et les très petites bêtes mangent les grandes bêtes. L'Amour inverse l'action de l'Ombre. Par Amour, une maman lionne ne mange pas ses petits. Ils constituent pourtant un repas de choix. Elle passera des mois à chasser pour eux et à les protéger. Dans les pays civilisés, les politiciens mettent leur volonté au service de la population. On se dévoue pour les plus faibles au lieu de les écraser. Une armée est beaucoup plus puissante et a moins de pertes au combat si chaque soldat fait passer la vie de ses camarades avant la sienne. Dans les dictatures l'Amour est perverti : on fait croire à la population que le dictateur éprouve de l'Amour pour le peuple alors qu'il ne fait que l'exploiter.

L'humain est grégaire. Il est fait pour vivre en bande. Son instinct le pousse à s'assimiler à une bande. C'est au sein d'une bande qu'il vivra ses actions et qu'il partagera un certain savoir. Son affection ira vers les membres de sa bande. Dans un pays, tout est souvent question d'affrontements ou d'arrangements entre bandes. Que l'on soit membre d'un syndicat, d'un parti politique ou d'un groupe d'industriel, on n'est jamais qu'un membre d'une bande. Cette bande a ses intérêts et arrive ou non à s'entendre avec les autres bandes. Tout dépend du niveau d'éducation. S'il est bas, il y aura beaucoup d'affrontements. S'il est élevé, des arrangements constructifs seront possibles. Certains systèmes philosophiques, par exemple celui de l'Empire Romain, essayent d'amener tous les humains à se sentir membres de la même grande bande. On est citoyen romain, quel que soit son rang social ou son origine ethnique. Cela rend les choses plus simples. Cette idée a été élargie à toute l'Humanité par le christianisme et a été adoptée par l'Empire Romain pour tenter de préserver son intégrité. Ces super-bandes n'ont pas toujours une structure très stable. Beaucoup d'individus en leur sein se sentent abandonnés à eux-mêmes et vont alors spontanément reformer de petites bandes. Ces petites bandes seront par exemple des fonctionnaires qui s'associent entre eux pour voler l'état ou ces bandes armées qui sévissent dans les pays en voie de développement. Ils reconstruisent des règles et des conventions de bande, souvent sans même s'en rendre compte. C'est instinctif. Nous sommes génétiquement programmés pour cela. Le système en place est responsable de la formation de ces petites bandes néfastes. D'abord parce qu'il a cherché à détruire les petits bandes, y compris les familles. Par exemple en imposant un ordre moral carcéral aux familles. Ensuite parce qu'il a réduit le niveau d'instruction des individus volontairement, pour mieux les manipuler. Dans un monde civilisé, il faut respecter la formation des bandes. Il faut apprendre aux individus à former les bandes les plus positives possibles. Pour bien faire un individu ne doit pas appartenir à une bande bien précise. Il doit plutôt être membre d'un grand nombre de petites et de grandes bandes ; sa famille, la famille de son conjoint, ses collègues de travail, son syndicat, son parti politique, sa religion, son pays, sa Planète... Concilier une affiliation sincère à toutes ces bandes est à priori complètement schizophrène. A condition d'avoir beaucoup d'éducation et du temps libre pour méditer, on peut y arriver.

Une bonne obligation est une obligation librement consentie. Une personne qui s'astreint à un entraînement sportif rigoureux peut en retirer de grandes satisfaction. Un bon soldat a compris que la Guerre est une chose horrible mais qu'elle peut être nécessaire. Il n'est pas mauvais qu'il existe des écoles ou les enseignants sont durs, à condition que les enfants les choisissent librement et puissent les quitter tout aussi librement. Par contre les obligations imposées, surtout à des personnes qui ne les comprennent pas, peuvent avoir des effets catastrophiques. Un des problèmes de l'Occident est que jusqu'à la moitié du XXème siècle les enfants avaient l'obligation "d'aimer" leurs parents. Après on est passé çà l'obligation pour les parents "d'aimer" leurs enfants. On est passé d'un extrême à l'autre. A aucun moment il n'y a réellement eu de l'amour. Ce ne sont que des obligations, de la crainte, des angoisses voire de la détresse et des abus. Dans les sociétés plus évoluées, un dialogue est possible entre parents et enfants. Alors il peut y avoir une entente, du respect, de l'amour...

On me demande parfois la différence entre un pirate et un hacker. Essentiellement un pirate est négatif et un hacker est positif. Le pirate utilise tout et n'importe quoi pour son profit immédiat. Que ce soit pour gagner de l'argent ou du prestige, il abuse des ordinateurs d'autrui, il vole des données ou de l'argent... Il se fiche complètement de la Loi et des intérêts des autres. Le pirate accumule des connaissances uniquement dans le but d'obtenir un meilleur rendement de ses attaques. Certains pirates connaissent assez bien la Loi mais c'est pour mieux en abuser. Un hacker, au contraire, cherche à protéger les intérêts des autres. Un hacker est une personne qui se documente et qui expérimente, parce qu'elle veut devenir la plus compétante et la plus efficace possible, en toute généralité. Il peut arriver qu'un hacker viole la Loi mais il ne fait que dans des circonstances bien précises. Par exemple pour essayer des choses, sans que cela nuise. Il peut aussi le faire si c'est nécessaire pour respecter l'esprit de la Loi. Cela veut dire que certes il viole la loi mais en réalité il ne fait que mieux l'appliquer. Les hackers connaissent souvent mieux la Loi que la plupart des gens. Ce sont donc des personnes plus fiables que la moyenne. Leur seul problème est qu'ils font un peu peur, comme les sorciers. On ne comprend pas toujours ce qui leur passe par la tête mais on est épaté par leurs capacités.

Transmettre le savoir aux autres n'est pas toujours une chose évidente. Certaines entreprises, par exemple, sont spécialisées dans des choses que leurs clients pourraient facilement faire eux-mêmes. Il s'agit parfois de choses aussi simples que de faire un réglage dans un logiciel. Un enfant de douze ans pourrait le faire. Mais le client n'est pas au courant. Il croit que c'est une chose de haute technicité et est bien content de payer une fortune pour qu'un technicien vienne le faire. De telles entreprises peuvent devenir riches à centaines de milliards, en exploitant la naïveté et les peurs des clients. D'autres entreprises, qui prennent le temps d'expliquer les choses à leurs clients, font faillite. Elles touchent beaucoup moins d'argent et perdent leurs clients... Elles disparaissent et laissent la place au premier type d'entreprises. Si cette politique est bien la plus intéressante à court terme pour une entreprise, elle ne l'est pas pour la Société dans son ensemble. Sur le long terme, un pays survivra mieux s'il a beaucoup d'entreprises du deuxième type, qui distribuent leur savoir. Pour que le deuxième type d'entreprise survive, il n'y a qu'une seule solution : le niveau culturel des habitants du pays doit être suffisamment développé pour qu'ils comprennent tout cela et favorisent le deuxième type d'entreprise. C'est un exemple de ce qu'on appelle la dignité.

L'organisation est à la base des civilisations. Elle est également à la base d'un individu. On est un travailleur à partir du moment où on s'organise chaque jour pour travailler, on investit chaque jour du temps et des pensées pour bien faire son travail. On est un amoureux si on s'organise tous les jours pour passer du temps avec l'être aimé, pour s'occuper de lui. Cette organisation peut éventuellement être consacrée par la cérémonie du mariage. On est un toxicomane si on s'organise au jour le jour pour se procurer sa drogue et en vivre les effets. La routine est la mort de l'organisation, parce qu'elle est la perte de la composante de Lumière de l'organisation.

Les mots "compétence et "maîtrise" sont utilisés parfois en terme de Lumière, parfois en terme d'Ombre. Une "compétence ministérielle" veut dire que le pouvoir sur un domaine donné est confié à un ministère. Pourtant le Ministre et son cabinet peuvent être très incompétents dans la compétence qui leur est confiée. De même, si les gardes dans une prison ne maîtrisent pas leur métier, ils seront obligés de recourir à la violence pour maîtriser les détenus.

On croit qu'une personne qui commet un acte illégal ou nuisible en éprouve du plaisir. On se dit qu'un démon jouisseur en elle hurle de rire à l'idée du mal qui est fait et que la personne en profite. Je crois plutôt que la personne est anesthésiée, que ce soit par la fatigue, l'ignorance, la drogue ou un problème neurologique quelconque. Elle peut éprouver du plaisir, voire une violente envie, à faire ce qu'elle fait. Mais ce plaisir ne vient pas de la transgression. Dans beaucoup de cas il n'y a aucune émotion liée à ce que la personne est en train de faire. C'est le noeud du problème : la personne ne se rend pas compte de ce qu'elle fait.


L'intelligence de Dieu

Les croyants disent que Dieu est un être qui a crée le Monde et qui a imposé des lois aux hommes. Les athées disent que le Monde est apparu tout seul et que la vie sur Terre est le fruit des simples lois de la chimie. L'objet de ce texte est de proposer un point de vue qui permet de comprendre les positions des uns et des autres.
Un point important pour moi est que Dieu est un symbole. Qu'est-ce qu'un symbole ? Pour l'expliciter, prenons comme exemple un symbole moderne : la Croix Rouge. La Croix Rouge symbolise la volonté de millions de personnes de venir en aide à ceux qui sont blessés. Cette institution est connue de tous et joue un rôle très important. Pensez à un père de famille perdu dans une guerre, dont l'enfant est en train de mourir dans ses bras, pensez à ce qu'il ressent en voyant au détour d'une rue une tente blanche marquée d'une croix rouge. La Croix Rouge est un symbole fort. Mais elle ne symbolise pas quelque chose qui ressemblerait à une essence subtile qui imprégnerait le monde. Elle ne symbolise que la volonté et le talent des médecins, des infirmiers et des fonctionnaires qui travaillent pour la Croix Rouge. Si vous êtes blessé, peindre une croix rouge sur un mur et allumer des bâtons d'encens au pied du mur ne vous apportera rien. Si le sigle de la Croix Rouge n'existait pas, cela n'empêcherait pas les hommes de se porter assistance entre eux. Le sigle a été crée pour symboliser cette assistance, parce que cela permet aux hommes de mieux penser l'assistance. C'est un symbole fédérateur. Il suffit de dire "Croix Rouge" et toute le monde a compris exactement de quoi vous voulez parler. C'est une convenance d'esprit.
Dieu est le symbole de l'intelligence et de la volonté, de toutes les formes d'intelligence et de volonté. Il symbolise tout autant l'intelligence et la volonté des humains, que celles des animaux ou celles de la Nature. Il symbolise celles d'un parent attentif qui devine ce dont un enfant a besoin et celles d'un savant qui construit une nouvelle machine. Il est le symbole universel de l'intelligence et de la volonté.
La Nature a-t-elle donc une intelligence ? Si je regarde une souris et que je vois ce dont elle est capable, je dis que oui. La Nature a produit cette souris. A l'heure actuelle, aucun savant humain ne pourrait assembler quelque chose d'aussi performant qu'une souris. Les robots les plus au point ne lui arrivent pas à la cheville. Comment la Nature s'y est-elle prise pour créer, pour penser cette souris ? Cela, par contre, nous le savons. Charles Darwin, les paléontologues, les chimistes et les thermodynamiciens nous l'ont expliqué. C'est la Sélection Naturelle et les lois de la chimie. La Nature est comme un gigantesque cerveau dans lequel des millions d'hypothèses sont testées en même temps. Une souris naît par erreur avec une queue plus longue... si cela lui permet de mieux survivre, zou, elle aura plus de descendants. Ces descendants hériteront de cette queue plus longue. Après quelques centaines d'années toutes les souris de la région auront la queue un peu plus longue et seront plus performantes, améliorées. C'est ainsi que la Nature "pense" les animaux.
Mais cette Nature a-t-elle une conscience ? Ma réponse est non. La Nature ne sait pas ce qu'elle fait. Elle n'a ni plan d'action, ni intention. On ne peut pas dialoguer avec elle, on ne peut pas lui poser de questions. Elle est un énorme mécanisme aveugle, inconscient et très lent. Elle a mis des centaines de millions d'années pour créer les souris, en utilisant ce "laboratoire" démesuré qu'est la surface de la Terre. La Nature est prodigieuse, mais elle n'est pas très efficace. Dans quelques dizaines d'années, les savant seront capables de créer de toutes pièces des êtres plus performants que les souris, en seulement quelques mois de travail.
La Nature a-t-elle une volonté ? Ma réponse est oui. Elle n'a pas de but, car elle n'a pas de conscience. Mais elle a une volonté, dans le sens où elle a un moteur. Ce moteur, c'est l'énergie de la lumière qui vient du soleil et la tendance spontanée des éléments chimiques à dilapider cette énergie. Les souris existent parce qu'elles détruisent les plantes qui ont poussé grâce à la lumière du soleil. Les plantes existent parce qu'elle permettent une absorption plus rapide de la lumière et sa dégradation en lumière infra-rouge. Irrépressiblement, la lumière du soleil pousse les produits chimiques présents à la surface de la Terre à créer une Vie biologique sans cesse plus efficace dans l'art de dilapider l'énergie contenue dans cette lumière.
La Nature a-t-elle conscience du bien et du mal ? Non, puisqu'elle n'a pas de conscience. Tout ce qui arrive n'est que le fruit de ce gigantesque mécanisme aveugle. Il n'a ni haine ni pitié. Quand un ouragan dévaste une région, la Nature n'a pas eu l'intention de nuire. Elle avance sur son chemin, c'est tout. Ce sont les humains qui ont inventé les principes de bien et de mal, parce que cela leur permet de tenter de définir certaines choses.
Lors du Big Bang, l'Univers avait-il une volonté et une intelligence ? Une volonté, certainement. La même que celle d'un explosif. Une volonté monstrueuse, irrépressible. L'intelligence, par contre, je n'en vois aucune, même aveugle. L'Univers me semble parfaitement bête à sa naissance. Juste après le début du Big Bang, on peut peut-être parler d'une forme extrêmement rudimentaire d'intelligence, puisque les particules comme les électrons et les protons sont capables de se localiser réciproquement dans l'espace pour s'attirer ou se repousser. Ensuite, lentement, l'intelligence va se construire. L'intelligence simple de la Sélection Naturelle, d'abord, puis les mécanismes de réaction basiques des unicellulaires, puis l'intelligence de plus en plus structurée des animaux... pour en arriver à un maximum actuel qui est l'intelligence de l'homme. Enfin, quand je dis l'homme, c'est parce que je ne connais rien de mieux. Peut-être y a-t-il des extraterrestres plus doués que nous ? Et même si l'on ne tient pas compte des extraterrestres, définir l'homme comme un sommet est délicat. Pour certaines choses bien précises, des animaux comme les dauphins, ou tout simplement les ordinateurs, sont remarquablement plus performants que l'homme. Mais, globalement, tous hommes, dauphins, ordinateurs et extraterrestres confondus, la capacité d'intelligence ne fait qu'augmenter dans l'Univers. D'après les astrophysiciens, notre univers finira sous forme d'un ensemble froid d'astres morts, donc dénué de volonté. La volonté diminue-t-elle dans l'univers depuis le Big-Bang ? L'intelligence augmente-t-elle dans l'Univers alors que la volonté diminue ? Cela mériterait une étude scientifique. A priori, si toute volonté disparaît, il ne peut pas subsister d'intelligence active, seulement une mémoire.
"Dieu" est le symbole de tous ces mécanismes d'intelligence et de volonté, que ce soit la force du Big Bang ou la réflexion d'un joueur d'échecs, la pulsion l'un vers l'autre de deux êtres amoureux ou l'amour d'un ami. Il représente l'ensemble. Dieu, c'est nous, la Croix Rouge, les animaux, la Nature... Ce symbole est nécessaire aux humains, pour mener leurs réflexions, pour se parler entre eux. Par exemple, une part importante du travail d'un chef d'entreprise est de réussir à canaliser les intelligences et les volontés de ses collaborateurs. Pour cela il doit comprendre, savoir reconnaître et savoir assembler toutes les formes différentes d'intelligence et de volonté. Les textes de religion qui parlent de Dieu sont donc pour lui une base d'informations techniques. En psychanalyse, on utilise les notions de "Mère symbolique" et de "Père symbolique" pour parler de l'intelligence et de la volonté. Ces symboles ont permis à de nombreux psychiatres de mieux percevoir l'esprit de leurs patients et de parler de ces choses avec eux.
Le symbole de Dieu joue donc un rôle important chez les hommes. Il est pour eux un support de réflexion, un concept générique, une façon de penser. Mais la Nature et l'Univers, eux, n'en ont cure. Ils se portaient très bien avant que l'homme invente Dieu et considère la force d'expansion du Big Bang comme une forme de volonté. Le principe de fonctionnement de l'intelligence de l'homme veut qu'il trouve des liens, des similitudes, entre des multitudes de choses différentes. Cela lui permet de ranger ces choses "dans un panier commun". Cela lui permet de mieux mémoriser ces choses ou de les associer plus facilement entre elles pour inventer des machines. Par exemple, le mécanisme de la Sélection Naturelle de Darwin est utilisé dans certains programmes informatiques pour "inventer" des systèmes. On a ainsi donné le mécanisme de l'intelligence de la Nature à des ordinateurs. Tout comme la Nature, ces ordinateurs font leurs calculs sans avoir de but ou de conscience. Ils sont simplement poussés par les commandes que leurs donnent les hommes et par le courant électrique qui les traverse. Il n'y a que les hommes pour considérer que les ordinateurs et la Nature font ainsi preuve d'intelligence. Les ordinateurs et la Nature, eux, ne considèrent rien du tout. Ils procèdent. Dieu n'est pas l'Univers. Dieu est une façon pour les hommes de décrire l'Univers, de le comprendre. Ou, mieux encore : de le ressentir.
Le symbole de Dieu est aussi la source de beaucoup d'abus. L'histoire des religions en est un terrifiant ossuaire. Combien de fadaises affligeantes n'a-t-on pas fait gober à des milliards de personnes et combien de choses vides ou criminelles ne leur a-t-on pas fait faire ? Il appartient à chacun d'entre nous d'être assez intelligent et d'avoir la volonté d'éviter ces dérives. Une erreur que font souvent les religieux est de croire, parce que Dieu est entre autres le symbole de l'intelligence et de la volonté des hommes, que l'Univers à sa création a été gouverné par une intelligence semblable ou supérieure à celle des hommes. C'est un amalgame.
Quel est l'avenir de l'intelligence ? Dans l'immédiat, ce sont les ordinateurs. Les ordinateurs sont déjà capables de mémoriser plus d'informations que n'importe quel homme. Déjà maintenant, un Système Expert Médical peut permettre à un médecin de diagnostiquer chez un patient une maladie dont il n'avait jamais entendu parler et d'ébaucher en quelques minutes un traitement approprié. Bientôt, les ordinateurs seront capables d'utiliser les informations avec plus d'inventivité et d'efficacité que les hommes. Ils seront plus intelligents que nous et plus rapides. Dans les années à venir, l'augmentation de l'intelligence dans notre partie de l'Univers sera donc due aux ordinateurs, construits par les hommes. Cela représente de grands avantages pour les hommes. Mais aussi de grands risques. Tout comme le feu, les ordinateurs intelligents pourront servir à construire ou à détruire. Si les ordinateurs sont bien programmés et que nous en faisons un usage sage, il nous permettront d'avoir des choses merveilleuses. Si les ordinateurs sont mal programmés ou utilisés par des personnes dangereuses, ils seront les instruments de choses horribles. Un ordinateur intelligent peut permettre à un organisme malintentionné d'inventer de nouvelles armes. Il peut permettre de prendre le contrôle de toute une population simplement par la parole. Imaginons un séducteur sans scrupules qui se sert d'un ordinateur intelligent pour analyser les moindres gestes et les moindres odeurs de ses proies et qui utilise les conseils de l'ordinateur pour arriver à ses fins. Il y a des pays où beaucoup de gens possèdent une arme de guerre et où les accidents sont rarissimes. Et il y a des pays où quelques personnes possèdent une simple arme de poing et où les accidents sont légions. Les hommes doivent atteindre un niveau d'éducation suffisant pour que chacun ne risque plus d'être victime d'un ordinateur intelligent. Et puisse disposer d'un ordinateur intelligent sans être une menace pour les autres. Que ce soit notre intelligence ou celle des ordinateurs, "Dieu" est à la fois un outil pour nous et une responsabilité.
Si nous avons été conçus par un Dieu aveugle et sans conscience, quelles sont les lois qu'il nous impose ? A mon sens, simplement les lois qui sont contenues dans nos gênes. Ces gênes qui ont été lentement sculptés par la Nature, au fil de centaines de millions d'années. L'expression de ces gênes fait que naissons avec un ensemble de pulsions. Tout comme un mixer sort d'usine avec la pulsion de tourner dès qu'on presse le bouton. Nous avons la pulsion de manger, celle de boire, celle de procréer, celle de respecter notre voisin, celle de ne pas manger quand nous n'avons plus faim, celle de rejeter l'eau quand nous savons qu'elle est empoisonnée, celle de ne pas procréer si nous ne sommes pas dans un bon environnement pour accueillir nos enfants et celle de demander justice quand notre voisin commet des abus. Une pulsion intéressante est celle qui nous pousse à croire en Dieu. Il y a un très grand nombre de pulsions en nous, plusieurs pages ne suffiraient pas à en faire le détail. Il faut beaucoup de temps à un homme pour faire un inventaire de ses différentes pulsions, apprendre à les vivre et lever les contradictions qui peuvent exister entre elles.
Pour reconnaître et structurer nos pulsions, nous disposons d'une grande quantité de textes oraux, écrits et informatisés. Ils sont le précieux héritage que nous ont légué nos ancêtres. Ils contiennent nombre de renseignements et de conseils pour nous permettre de cultiver nos pulsions et trouver un équilibre entre elles. Beaucoup de ces textes ont été écrits avec l'intention explicite d'aider ou de guider les générations futures. Ces textes présentent aussi un danger. Ils ont toujours leurs limites et sont souvent mal interprétés. Nous ne connaissons pas toujours l'état d'esprit de leurs auteurs et les contraintes auxquelles ils étaient soumis. Parfois ils sont écrits par des personnes malveillantes ou irresponsables. Ils peuvent être utilisés par des personnes malintentionnées qui jouent de nos pulsions immatures pour nous exploiter.
Qu'en est-il de l'âme ? Pour moi, toute chose qui a une volonté ou une intelligence possède une âme. La mémoire étant une forme d'intelligence, une pierre a donc une âme, puisqu'elle porte en elle toute son histoire. La matière de cette pierre, sa couleur, sa dureté, par là l'usage qu'on peut en faire, tout cela découle de son passé et constitue son âme. Une porte a une âme, puisqu'elle a été conçue pour jouer un rôle précis. Si elle a été conçue intelligemment, elle sera agréable d'emploi. Elle porte cette intelligence en elle. Les oeuvres d'art ont beaucoup d'âme, puisqu'elles reflètent la volonté et l'émotion que leur créateur a voulu exprimer. Nous pouvons ressentir l'âme de tout ce qui nous entoure. Celle des objets inanimés, celle des animaux comme celle de nos semblables. Notre éducation compte pour beaucoup dans cette perception. Deux personnes différentes peuvent percevoir l'âme d'une chose de façon différente. Mais en communiquant entre nous, nous pouvons comprendre nos perceptions réciproques. Qu'advient-il de l'âme d'une chose après sa mort, après sa destruction ? En soi, rien. Ce qui est détruit est détruit. Mais il perdure les conséquences du fait que cette âme a existé. Un reflet de l'âme des écrivains que nous avons lu vit en nous. Il n'est pas nécessaire que nous nous souvenions de l'origine d'un âme pour qu'elle perdure. Si un village est fleurit, c'est parce qu'un jour, peut-être il y a cent ans, un des habitants de ce village a décidé de fleurir sa maison. Personne ne se souvient de lui, mais c'est son âme qui perdure au travers de la floraison de tout le village. L'âme de toutes choses, aussi insignifiante soit-elle, perdure au travers des temps. Un simple caillou sur lequel nous avons trébuché entraînera des conséquences pour l'infinité des temps. "Dieu", qui est l'Univers entier, est donc la somme de toutes les âmes au fil des temps. On peut donner un sens aux notions de paradis et d'enfer, mais uniquement de notre vivant. Un homme heureux est au paradis, son âme est sereine. Un homme angoissé est en enfer, son âme est torturée. Un homme malhonnête entraînera un enfer pour d'autres personnes et cet enfer peut perdurer au-delà de sa mort. Un homme bon entraînera le paradis pour d'autres personnes et ce paradis peut perdurer au-delà de sa mort. Ces notions sont souvent très relatives. La jungle est "l'enfer vert" pour certains et "le paradis écologique" pour d'autres...
Le Bouddhisme

Il n'existe pas de définition stricte du bouddhisme. Le présent texte est simplement un énoncé de ma compréhension du bouddhisme.

Le Bouddha n'est pas considéré comme un dieu ni même comme un messager divin. Siddharta Gautama, qui prête son image et son enseignement comme base de la définition du Bouddha, est un humain comme vous et moi. Il est le symbole d'un principe, d'une chose qui ne peut être atteinte mais que l'on se doit de tenter d'ébaucher par des définitions pratiques.

Le bouddhisme est une religion en ce sens qu'il définit "une voie de salut". C'est à dire un chemin vers le Paradis. D'après le bouddhisme un individu est condamné à mourir et à revenir sur Terre le nombre de fois qu'il faudra jusqu'à ce qu'il ait atteint le niveau spirituel nécessaire pour s'extraire de la vie terrestre. Chaque fois qu'il meurt il se réincarne dans un individu différent. S'il n'a pas bien travaillé son bouddhisme, à sa réincarnation suivante il sera un être plus vil, peut-être même un animal voire un animal répugnant. En quelque sorte on lui fait recommencer son année une classe plus bas. Par contre s'il a bien travaillé il passera dans la vie suivante à un niveau plus élevé. Le "néo-bouddhisme" moderne se départ de cela et ne s'intéresse qu'aux aspects philosophiques, sociaux et intellectuels du bouddhisme. La réincarnation est alors plutôt considérée comme une métaphore du lent apprentissage et de l'éveil de chaque individu, avec ses erreurs et ses succès au fil du temps et des progrès.

Le bouddhisme est un édifice imposant. A l'heure actuelle, les chercheurs les plus avancés en psychologie et sciences humaines redécouvrent des choses qui font partie du bouddhisme depuis des siècles.

Le bouddhisme ne prône pas un standard, une référence. Le Bouddha lui-même a dit "Ne cherchez pas à faire comme moi". Le bouddhisme, c'est avant tout le développement de chaque personne en particulier. Etre bouddhiste, c'est d'abord être soi-même.

Beaucoup de religions sont très dogmatiques. Etudier la religion revient à potasser et ressasser ses dogmes. Le bouddhisme, au contraire, est né lorsque des personnes ont décidé de quitter leur enclos et se sont mis à observer le Monde autour d'eux. Le bouddhisme est né de la symbiose d'une grande force spirituelle et de l'observation humble de la Nature.

Le précepte le plus fondamental du bouddhisme est sans doute celui-ci : évoluez. En effet, les mauvaises choses viennent de personnes qui sont restées bloquées à un stade donné de leur évolution et persistent à voir les choses d'une certaine façon. Un adepte du bouddhisme se doit de perpétuellement se remettre en question, apprendre de nouvelles choses, voir les choses sous d'autres angles, s'adapter. Chacun a énormément de choses à apprendre dont il ne soupçonne parfois même pas l'existence. Cela demande du travail et de la sueur. Il faut enterrer ce que l'on était, même s'il en coûte, pour renaître meilleur, mieux adapté à la réalité et aux autres.

Un des enseignements que l'on peut tirer du bouddhisme est que pour changer une personne il faut lui apprendre les choses nécessaires pour qu'elle puisse se comporter différemment. C'est un travail bien plus long et compliqué que de se contenter de faire des reproches ou de faire preuve d'une patience stérile.

Chez les bouddhistes, la douleur est un signe de manque de maturité, d'inadaptation. La douleur ne doit pas être refoulée ou masquée par des artifices. Au contraire, elle doit être prise en compte, étudiée. Elle disparaîtra quand la personne aura évolué. La douleur n'est pas non plus considérée comme un passage obligatoire. La prévention est la meilleure politique. (Certaines écoles bouddhistes, par exemple d'arts martiaux, utilisent la douleur comme outil d'endurcissement. Mais il s'agit alors d'une pratique structurée, à laquelle les élèves ont librement consenti.)

Le bouddhisme explique qu'une personne qui n'est pas instruite, une personne qui n'a pas eu une certaine évolution spirituelle, sera condamnée à souffrir dans la vie. Elle ira de problèmes en problèmes, sera victime de toutes les situations et engendrera des problèmes pour les autres. Mais contrairement à d'autres religions le bouddhisme ne considère jamais un cas comme désespéré. Il apporte nombre de conseils, voies, anecdotes, légendes, supports de méditation, symboles... qui permettent de retrouver la voie de la spiritualité.

Les bouddhistes n'étant pas des refoulés, ce sont donc généralement des personnes fiables. Ils n'ont pas un tissus de frustrations dans la tête qui pourrait les amener à poser des actes déplacés ou impulsifs. Le fait qu'un bouddhiste ne refoule pas ses émotions ne veut pas pour autant dire qu'il cède systématiquement à ses pulsions : il est à l'écoute attentive de toutes les émotions et pulsions qui naissent en lui, mais il les gères en se servant de son coeur et de sa raison. Il ne passera à l'acte que s'il y a lieu de le faire. Les pulsions qui ne peuvent être assouvies seront "classées sans suite" de façon judicieuse et propre.

Comme il n'est pas toujours possible de prendre le temps de réfléchir, les bouddhistes veillent à cultiver leurs réflexes. Un exemple simple : les arts martiaux. On y apprend à avoir instantanément les bons gestes. On y apprend aussi à développer son intuition, savoir percevoir un grand nombre de petites informations fluettes et en tirer des conclusions. Lors d'un combat avec les yeux bandés, on détermine la position et les gestes de l'adversaire en utilisant le son de chaque bruissement de tissus, chaque bruit de respiration. Sans réfléchir, on "voit" l'adversaire. Des études modernes ont montré à quel point ces mécanismes sont puissants : ces bruits sont trop faibles pour être entendus consciemment, mais le cervelet, partie primitive et très rapide du cerveau, les perçoit tout de même et les utilises pour fabriquer une image de la position de l'ennemi. Ensuite, cette image est transmise à la partie évoluée, consciente, du cerveau. Ni le combattant aux yeux bandés, ni un spectateur éventuel, n'entendent le moindre bruit, mais pourtant le combattant "voit" son adversaire. Imaginez ce que cela donne si on aborde de la même façon la vie dans la nature ou la communion avec les autres êtres humains ! (On tend à conférer cette aptitude aux ordinateurs par l'intermédiaire des systèmes à réseaux de neurones.)

Le sourire du Bouddha, que vous avez certainement déjà vu sur une statue ou une image, est l'équivalent du mot "Islam" en arabe : la paix, l'harmonie, la sagesse, l'intelligence. Peu importe qui la statue représente, ce qui compte, c'est son sourire, l'évocation de cet état d'esprit.

Les religions vous disent que toute chose est l'oeuvre de Dieu et que Dieu est en toute chose. Le bouddhisme ne vous dira pas que c'est faux. D'ailleurs même les athées considèrent que les religions ont raison, si l'on part du principe que "Dieu" est une façon générale de parler de "La Vie". Mais le bouddhisme, pragmatique, vous recommande et vous apprend à aller plus loin, à voir chaque chose telle qu'elle est. La belle jeune fille est peut-être en réalité une mangeuse d'hommes qui vous ruinera... Ce quasimodo dans son coin est peut-être la seule personne qui vous aiderait si vous tombez malade... Le "troisième oeil" voit les choses telles qu'elles sont, au delà des apparences.

Le système occidental pratique le culte du but. "Il faut se fixer des objectifs", disent ils. Une des conséquences est que certaines personnes vont vouloir raccourcir le chemin qui mène au but, au point de bâcler le travail ou recourir à des pratiques malhonnêtes. Le bouddhisme au contraire se réfère plutôt à l'action, "être en train de faire". C'est le présent qui compte, le fait qu'on y est bien et qu'on y mène des actions sensées. "Un long voyage commence par un premier pas". Un bouddhiste sait tirer parti des étapes intermédiaires d'un travail, voire n'envisage pas de fin à son travail. Les occidentaux abusent du proverbe "vise plus haut que la cible, la flèche tombe en volant". Ils se fixent des objectifs inatteignables pour en fin de compte ne rien faire. Un bouddhiste, au contraire, envisage aussi le bénéfice qu'il peut tirer d'un résultat éventuellement différent de ce qui était initialement prévu.

Les textes sacrés des religions contiennent beaucoup de préceptes très précis. Trop précis. Il faut avoir un certain niveau pour arriver à se détacher de ces préceptes et plutôt percevoir un état d'esprit. Les textes bouddhistes, au contraire, pratiquent avec génie le paradoxe et le non-sens. Ils sont beaucoup plus rigolos et permettent d'aller plus loin. Il existe bien sûr des textes bouddhistes qui disent clairement les choses, mais ils n'ont pas structure de loi. Le bouddhisme de base fournit une liste de "choses qu'il faut apprendre à ne pas faire", mais cette liste est une mise en garde constructive et non un commandement.

Dans beaucoup de religions, la méditation est résumée à la notion de "prière". Le bouddhisme au contraire est ouvert à l'infini potentiel du champ de la conscience et de l'inconscient. Il en résulte une liberté plus grande de l'individu et une construction de la personnalité plus solide.

Vous avez sans doute déjà remarqué que les religions sont parfois un peu opposée à ce qui est "logique". Les religieux parlent de "pièges de la logique" et "l'importance de l'irrationnel". Chez les bouddhistes c'est tout le contraire : ils adorent la logique. Ils la cultivent comme un art. Les moines bouddhistes se livrent entre eux à des joutes de logique. Discuter avec un bouddhiste est un plaisir d'intelligence et d'honnêteté intellectuelle.

Les religions ont tendance à proposer une "norme" qui correspond à l'état d'esprit de ses fondateurs. Ils disent ce qui est bien et en quelle quantité. Les bouddhistes préfèrent expliquer que toute chose est bonne, et son contraire. L'important est d'être en mesure de déterminer ce qu'il est bon de faire suivant les circonstances qui se présentent. Par exemple un bouddhiste ne prône ni le pacifisme ni la guerre, mais il apprend à être un pacifiste et il apprend à être un guerrier. Etre un pacifiste fera de lui un guerrier redoutable. Etre un guerrier fera de lui un pacifiste convaincu.

Le Bouddha enseigne la voie du milieu. Aucune chose n'est spécifiquement mal ni spécifiquement bien. Par exemple il est vain de se demander s'il faut verser toute la journée de l'eau à une plante ou s'il ne faut jamais lui donner d'eau. La bonne question est plutôt : "Quelle quantité d'eau faut-il donner à une certaine plante, suivant la nature du sol et les conditions météorologiques ?" Il est vain de se demander si les plats salés sont meilleurs ou non que les plats sucrés. Il faut se permettre de manger des deux, ou les mélanger... L'équilibre naît de la complexité d'une construction simple et esthétique. Cela demande beaucoup de culture, de rencontres et de pratique.

Beaucoup de personnes se considèrent "en charge" de quelque chose. Ils ont la responsabilité de... ils ont le devoir de... il faut que... Cette charge les mine, tous leurs instants sont corrodés par le poids de leur responsabilité. A force de se torturer, de se rendre malades, ils finissent par ne plus être à même d'assumer leurs obligations. Ils accumulent les erreurs, tout s'écroule. Si par exemple ils étaient entrepreneurs, leur entreprise fera faillite. La douleur qu'ils ressentiront sera immense. Ils considèrent que la faillite confirme qu'ils n'ont pas été assez responsables, qu'ils n'ont pas été suffisamment tendus à assumer leur charge. Après la culpabilité vient une immense sensation de liberté : maintenant ils ne sont plus responsables, la faillite est derrière eux. Alors ils recommencent, ils reprennent un travail, une autre charge. Leur vie est une longue charge entrecoupée de catastrophes suivies de brèves sensations de liberté. Les bouddhistes prônent une autre approche. Ils conseillent le "lâcher prise". Le lâcher prise est le fait de, au moins quelques instants, ne plus se considérer comme en charge de rien. C'est le fait de s'asseoir et de nier toute responsabilité, être libre. Il faut le faire régulièrement : tous les jours ou toutes les semaines, quelques instants ou quelques semaines. On pense à des choses diverses, ou on ne pense à rien... Cela permet de décompresser, de guérir, d'entrevoir des choses nouvelles. Les personnes qui font cela ne mènent pas leur entreprise à la catastrophe. Ils ressentent la liberté avant que la faillite n'ait lieu, ainsi elle n'aura jamais lieu. En caricaturant on peut dire qu'un bouddhiste ne se sent jamais responsable de rien. Il reste assis, c'est tout. De temps à autres, sans qu'il sache trop pourquoi, il se lève pour faire quelque chose. Il cède à une pulsion naturelle qui le mène à poser un acte, et il le pose bien.

Le bouddhisme aussi a ses déviances, chez les personnes imparfaitement instruites. Par exemple certains deviennent tellement détachés des choses qu'ils n'ont plus aucun lien avec le monde. Un autre exemple : ceux qui entendent de façon primaire le précepte comme quoi il ne faut pas refouler ses pulsions. Ils deviennent des abuseurs froids. Tout est une question de compétence.

Un bouddhiste recherche l'illumination. C'est le fait, après avoir appris beaucoup de choses, après avoir fait beaucoup d'expériences et après avoir ressentit ce que l'on a en soi, de savoir les choses. Un illuminé perçoit les situations et sait instinctivement ce qu'il doit faire. On le reconnaît au fait que tout son visage est un grand sourire calme. Une personne donnée peut être illuminée pour certaines choses et pas pour d'autres. L'expression de la culture française qui correspond le mieux est "il a le chic".

On peut reconnaître un bouddhiste au fait qu'il ne se laisse pas trop tracasser par les petites contingences de la vie. Il a un certain détachement vis à vis des choses. Il fait ce qu'il a à faire.

Un bouddhiste atteint le stade de l'impassibilité. C'est par exemple le fait de ne pas être broyé d'envie de saisir une liasse de billets que l'on vient de trouver. Ou le fait de ne pas fondre en lamentations en découvrant un massacre. Ce qui n'empêche pas d'amener la liasse au bureau de police, ni de partir à la recherche des auteurs du massacre pour les mettre méthodiquement hors d'état de nuire. L'impassibilité peut être atteinte lorsqu'on a une conscience bien construite de ce que l'on est, des capacités qu'on a, de qui on est.

Un bouddhiste est sujet à l'émerveillement. C'est la faculté de pouvoir, comme un enfant, observer les choses de la vie, s'en étonner.
Bouddha a résumé ainsi son enseignement : "J'enseigne comment souffrir et comment sortir de la souffrance.".
La compassion est une vertu cardinale du bouddhisme. C'est le fait de ressentir ce que ressentent les autres, comme si vous le viviez vous-même. Joies, douleurs, angoisses, états d'âmes... Par extension, c'est le fait de ressentir quels sont les rêves, les espoirs et les besoins des autres. On devient capable de compassion au terme d'un long apprentissage. Il faut avoir connu soi-même la joie, la douleur, les angoisses... Avoir soi-même rêvé et espéré. Il faut avoir beaucoup vécu avec d'autres êtres humains et avec des animaux. Il faut que votre cerveau devienne capable de tirer des informations des moindres gestes d'une personne : de son timbre de voix, de sa respiration, d'un faible mouvement de la tête, d'un infime mouvement des sourcils... Il faut se renseigner sur les gens, apprendre leur histoire, les écouter parler. La compassion n'est pas le fait de comprendre l'état d'esprit de l'autre (ce qui est déjà très bien), c'est le fait de ressentir la même chose que lui, dans vos tripes, comme si vous étiez lui. S'il a l'esprit obscursi, vous vous sentirez lourd, l'esprit obscursi. En même temps le bouddhisme vous enjoint à ne pas vous prendre pour l'autre, à garder votre identité propre. L'égoïsme est aussi une vertu cardinale... c'est ainsi que vous aiderez le mieux l'autre, que vous lui apporterez le plus de choses. Si par exemple une personne est découragée et insensible aux choses, ce n'est pas en devenant vous aussi morne et insensible que vous pourrez faire quelque chose pour elle. Au contraire, vous chasserez vigoureusement cet état d'esprit de votre tête et vous lui communiquerez cette attitude dynamique.

Le bouddhisme enseigne à accepter le fait que toute chose va disparaître un jour. Que ce soit en un éclair ou au fil des siècles. Que ce soit après quelques secondes de vie ou après des milliers d'années.
Les bouddhiste parlent de "petits maîtres". Un petit maître est tout chose, minérale, végétale, animale ou philosophique qui vous apprend quelque chose sans le faire exprès.
Rien n'étant parfait, le bouddhisme a aussi ses déviances. Par exemple certains adeptes mal formés poussent la notion de détachement trop loin. Ils deviennent des personnes froides, insensibles à autrui. Ils se permettront même parfois de tuer ou de violer. Ce sont des psychopathes qui croient trouver une légitimité dans le bouddhisme. Un autre problème est qu'à force de discourir du fait que toute chose est périssable et la douleur inévitable, certains bouddhistes finissent par vous offrir des bonbons, euh, non, pardon : ils finissent par devenir pessimistes. Ils ne font plus rien de mal parce qu'il ne font plus rien du tout. Ils perdent le dynamisme qui fait le jus de l'espèce humaine.

On peut comparer le sport cérébral au sport physique. Il faut de l'entraînement pour les deux. Il y a aussi des différences. Un point commun intéressant est la douleur. Tout le monde a entendu parler de la douleur de l'athlète arrivé à sa limite. Qui n'a pas eu un point de côté en courant ? J'ai souvent été étonné de voir des personnes refuser qu'on leur explique quelque chose ou qu'on leur pose un problème. Dans cette réaction il y a de la peur, parfois même de la panique. Cela ne peut s'expliquer que s'il y a une douleur. C'est une douleur qui n'est pas socialement reconnue, une souffrance muette. On n'a pas appris de mots pour l'exprimer. On ne peut donc avoir que des réactions de violence quand elle survient.

Je vois une différence entre mes amis. Il y a ceux qui affrontent bravement le fait de penser et il y a ceux qui s'effondrent. Au début je me disais que les uns sont intelligents et les autres non. Après j'ai modifié mon impression. Je crois plutôt que les uns sont entraînés à penser et pas les autres. On peut être "bête" et apte à penser tout comme on peut être "intelligent" mais suer au moindre problème à résoudre. Il y a quelques temps je me suis mis à faire du sport un peu sérieusement. Cela ne s'est pas bien passé au début. Je m'amochais la santé en courant trop longtemps, je faisais des crampes... J'en étais rapidement arrivé à ne plus avoir envie de faire du sport. Puis j'ai appris à courir, à doser mon effort, à arrêter à temps, à sentir quand c'est le bon moment... Alors je n'ai plus eu mal en faisant du sport et je n'ai plus eu peur de faire du sport. Je suis un piètre sportif. Je ne cours pas plus de quelques kilomètres et pas bien vite. Mais je suis un vrai sportif parce que je sais faire du sport, efficacement. En y pensant, je me rend compte que pour penser aussi j'ai de la discipline : des réflexes pour me protéger, des critères pour éviter les réflexions inutiles, l'art de me calmer quand je patauge... Depuis l'enfance, sans vraiment m'en rendre compte j'ai développé toute une série de réflexes et d'habitudes pour ne pas me faire un point de côté en réfléchissant...

Cette écologie de l'effort est quelque chose d'important. Des civilisations se sont construites sur l'art de l'effort physique. Certains prétendent que l'Europe est sortie du Moyen-Âge grâce au joug, ce système qui permet aux animaux de trait de fournir un effort plus important pour charruer ou tirer un attelage. La brouette, qui permettait à un ouvrier de transporter deux fois plus de moellons, n'a-t-elle pas permis de construire de plus grands immeubles, de plus grandes usines ? On dit que les civilisations antiques se sont construites sur la main d'oeuvre des esclaves. Un ami suppose que les grands édifices comme les pyramides sont construits par des peuples qui maîtrisent des sources d'énergies faciles et abondantes comme le blé. La force physique et l'endurance des soldats ne sont-elles pas des facteurs d'expansion ? Dans le même esprit je crois que l'épanouissement de l'art de penser détermine le niveau d'une civilisation. On nous parle de communisme, de capitalisme, de dictature, de démocratie, de vie tribale, de vie communautaire, de village global, d'individualisme, de fondamentalisme, de libéralisme... Ne sont-ce pas que des mises en page, des systèmes qu'un pays adopte comme un individu change de chemise ? Ce qui compte réellement, c'est le niveau culturel. En fonction de l'aptitude à penser on tendra à adopter tel ou tel système politique. Si une population est globalement stupide elle tendra à adopter un intégrisme borné (pléonasme). Le lien entre niveau intellectuel et système politique n'est pas automatique. Tout le monde a entendu parler des horreurs du communisme. Il n'empêche que dans certaines parties de l'Union Soviétique le niveau de vie fut élevé. Dans ces quelques endroits les gens étaient civilisés et tout le monde vivait bien, communisme ou pas communisme. En Belgique le niveau des libertés est très élevé. Je vois pourtant des familles bourgeoises où la vie est immonde, parce que les membres de ces familles ont un niveau intellectuel très bas. Je ne crois pas non plus que certains peuples "méritent la dictature". L'expérience a montré que si un pays est pris en charge pendant quelques années sa population peut apprendre à penser la démocratie. Il n'y a pas de règle absolue ni de recette miracle mais je pense que globalement tout revient à l'aptitude à penser et que penser cela s'apprend.

Quand un individu est désorienté par le monde dans lequel il vit, il peut finir dans une secte. Là on pense à sa place, on le soulage de son lourd fardeau. Beaucoup de sectes font travailler durement leurs adeptes, pour pas ou peu de salaire. C'est presque les travaux forcés. Pourtant les adeptes ne se plaignent pas. Ils paniquent si on menace de les extraire de la secte. La douleur mentale de penser semble bien plus effrayante que la douleur physique de travailler. On dit que les esclaves bien traités sont en meilleure santé que leurs maîtres. Les esclaves n'ont pas de soucis, on pense pour eux. Leur maître, lui, doit planifier, prévoir, craindre... il stresse. Cela le ronge, le détruit.

Toute personne que l'on oblige à faire quelque chose est susceptible de se révolter. Je n'ai jamais vu de réactions aussi violentes que de personnes qu'on essaye de forcer à réfléchir. Un patron ou un enseignant que vous obligez à réfléchir peut entrer dans une colère noire. Je crois qu'il y a malheureusement une tendance à s'organiser pour ne pas devoir réfléchir. Je me souviens quand j'étais à l'école primaire. Nous avions un instituteur de la vieille école. Il nous obligeait à réfléchir. Les problèmes de maths que nous devions résoudre étaient chaque fois différents. C'étaient des petites machines bien ficelées, qu'il fallait percer à jour, des puzzles chaque fois différents. Il y avait souvent des points communs avec des problèmes précédents mais chaque problème avait sa particularité, il fallait abattre une nouvelle cloison de notre esprit pour le résoudre. Cet instituteur nous aidait dans ce travail. Nous pouvions compter sur lui. Dans le secondaire j'ai eu un prof de maths qui a aussi donné des problèmes de math, pendant trois mois d'affilée. Mais lui c'était un professeur de l'enseignement dit "Rénové". Tous les problèmes avaient exactement la même structure. Un jour c'étaient des petits pois dans des bocaux, le lendemain des passagers dans un bus, le surlendemain des biscuits dans une boîte... superficiellement on avait l'impression que les problèmes étaient différents. En réalité c'était toujours le même petit puzzle. De surcroît plus simple que ceux vus à l'école primaire. On n'apprenait rien. Personne ne s'en est plaint sauf moi. On m'a prié de ne pas la ramener. Trop d'établissements d'enseignement supérieur sont une caricature du genre. Les cours sont un simple débit d'informations. Le travail des étudiants consiste à formater cette information et la restituer à l'examen. Pour chaque cours le travail est le même. Les étudiants développent une petite machine dans la tête qui sert à faire ce travail et puis c'est tout. Le seule difficulté pour passer d'un cours à l'autre est que les mots de vocabulaire sont différents. Au final ces étudiants sont totalement incapables de faire quoi que ce soit. Ils n'ont aucune compréhension de ces matières, aucune pratique. Je connais des étudiants qui sont devenus de bons professionnels. Mais c'est parce qu'ils avaient une démarche d'étude de leur côté, indépendante de l'enseignement officiel. Le rôle de l'enseignement a plutôt été de les freiner dans leurs études, de leur prendre leur temps. C'est un gigantesque arrangement entre les professeurs, les étudiants et les parents : faire un maximum de show avec un minimum d'efforts cérébraux. Quand il faut de vrais résultats alors on compte sur un de ces rares étudiants qui ont étudié par eux-mêmes. C'est un complot d'état, organisé par le peuple, contre le peuple.

Cette façon de fonctionner entraîne des pertes énormes dans l'économie du pays, à cause des erreurs de gestion et des gaspillages. Tout cela pour éviter de consommer un peu de glucose en cogitations cérébrales. On dit que les américains tendent à élire un Président qui leur ressemble, donc une personne d'une intelligence très moyenne. Je me demande s'ils n'élisent pas plutôt la personne qui les fait réfléchir le moins. Peu importe si cela leur coûte une guerre sanglante ou menace de détruire la Planète. Je qualifie un de mes amis d'horloger suisse de l'informatique. Il a une connaissance encyclopédique de son métier. Il est capable de produire des logiciels compacts, efficaces et d'une fiabilité à toute épreuve. Il peut écrire à lui seul tous les logiciels de gestion d'une entreprise et qu'il n'y ait virtuellement aucun bogue dedans. A ses débuts il a travaillé dans une grande administration. Cette administration avait des procédés d'une lourdeur extrême pour son informatique. Ils utilisaient des logiciels inadéquats et incompatibles entre eux. Quand ils créaient un logiciel, cela demandait plusieurs mois de travail à plusieurs personnes, en utilisant des ordinateurs hors de prix. Un de ces logiciels leur avait demandé six mois de travail à deux personnes, sur des ordinateurs ayant une valeur de 50.000 €. Chaque calcul réalisé par ce système prenait une minute. Ayant vu ça, mon ami est revenu le lendemain avec son ordinateur portable à 2.000 €. Pendant la soirée il avait fait un équivalent du système. Son système à lui ne prenait que deux secondes pour faire un calcul. Il a fait une démonstration. Les directeurs de l'administration ont accueilli cela avec la plus extrême mauvaise fois. Son système n'a bien sûr jamais été utilisé. Mon ami s'est dit que les directeurs devaient être corrompus, qu'ils touchaient un pourcentage sur le prix des ordinateurs ou qu'ils avaient besoin de gonfler les budgets. Après réflexion, je me demande si ce n'est pas tout simplement ce problème de douleur de réfléchir. Leur façon de procéder demande peu de travail de réflexion. Ils se contentent de faire de réunions avec des petits fours et de discuter entre eux de "ce qu'il serait bien de faire". Comme des adolescents fantasques. Ensuite ils donnent des ordres, ouvrent le robinet à pognon et attendent qu'un résultat tombe. S'ils travaillaient comme mon ami, avec le même budget ils pourraient faire des choses extraordinaires. Ils décrocheraient des distinctions internationales. Inversement ils pourraient obtenir les résultats actuels avec un budget dix fois moindre. La différence pourrait servir à soigner les enfants hospitalisés ou à alphabétiser les enfants dans le Monde. Pour cela il faudrait que les cerveaux de ces directeurs consomment pour bien une centaine d'euros en glucose.

A ce stade de l'exposé vous pourriez avoir l'impression que j'entends par "travail du cerveau" tout travail purement intellectuel. Il faut élargir le concept. Aimer demande aussi de gros efforts cérébraux. Pour comprendre une personne et avoir des idées pour contribuer à sa vie, il faut un grande culture, un lourd entraînement. Il faut savoir lire les émotions et les états d'esprit de la personne dans ses intonations de voix, ses gestes infimes... Cette personne va occuper notre esprit exactement comme un jouer d'échec passe sa journée à imaginer des combinaisons de jeu possibles. Nous avons tellement d'éléments en tête que plusieurs heures après avoir quitté cette personne, nous sommes capables de deviner, de sentir dans quel état d'esprit elle se trouve probablement.

Il y a un parallèle intéressant entre l'intellect et l'affectif : tout deux existent en version "épurée". Les intellectuels ne résolvent pas que des problèmes concrets : ils s'intéressent aussi aux puzzles. Les puzzles, ce sont des problèmes qui ne semblent servir à rien. On pourrait les qualifier d'inutiles. Ils illustrent simplement l'un ou l'autre principe intellectuel. C'est en jouant avec des puzzles que les intellectuels se développent le ciboulot. Cela les rend performants et polyvalents pour résoudre ensuite les problèmes concrets. L'équivalent des puzzles dans l'affectif, c'est la tendresse. A priori, les câlins ne servent à rien. A quoi cela sert-il de prendre une personne dans ses bras ou de lui offrir une fleur ? Montrez cela à un reptile, il vous dira qu'il trouve toute cette activité bien vaine. En fait il ne se pose même pas la question. Il ne se demande pas à quoi ces mammifères jouent. Il ne sait pas que cette souris qui s'était laisser attraper facilement, était distraite parce qu'elle était en chaleur. Ces émotions et cette chaleur que l'on ressent en faisant des gestes de tendresse "inutiles", c'est une version épurée des choses concrètes que l'on peut faire pour l'autre. Par exemple lui faire à manger ou le défendre en cas de danger. Les femmes comprennent cela mieux que les hommes. Certains hommes trouvent les femmes barbantes "parce qu'elles n'acceptent de se laisser peloter que si on leur rend des services". Ils n'éprouvent pas de plaisir à s'occuper d'une femme. Ils n'éprouvent donc en réalité pas de plaisir à lui faire des câlins, ils ne peuvent pas profiter du feu de l'instant. Ils ne font qu'assouvir une pulsion.

Tout comme on peut avoir mal à réfléchir, on peut avoir mal à aimer. Une scène de la prostitution est un client qui demande ce qu'il peut avoir et à quel prix. Un moment typique est quand la professionnelle répond "Non, ça je ne fais pas.", avec un petit geste de la main. C'est une négociation en tout bien tout honneur. Une chose que j'ai remarqué chez les femmes modernes est qu'elles peuvent presque accepter n'importe quoi comme pratiques. Certaines vous expliquent : "moi, c'est quand on veut, toujours prête...". Elles acceptent aussi de travailler pour amener de l'argent au ménage, elles se plient aux pressions sociales... Elles sont un peu l'équivalent des paysannes dures à la tâche du temps jadis. Mais si vous leur demandez de la tendresse, de prendre du temps pour vous comprendre, de vous faire un vrai câlin tout doux du fond du coeur... là elles font ce petit geste de la main : "Non, ça je ne fais pas.". Avec une impression de dégoût sur le visage. Dans certains milieux bourgeois la tendresse est assimilée à une perversion tout spécialement retorse. Certains hommes de ces milieux vont voir les prostituées uniquement pour avoir un peu de tendresse, un peu d'intérêt. Ils ne couchent pas avec. Et ils les payent ce qu'on paye un ingénieur ou un cadre pour un travail intellectuel d'envergure.

Il y a beaucoup de choses qui gravitent autour de l'intellect et du cérébral. Par exemple le rêve. Le rêve est nécessaire parce qu'il permet d'entrevoir les envies et les possibles. Avant d'imaginer une solution pour améliorer le rendement d'un moteur fusée il faut par exemple avoir joui du rêve d'un astronaute se posant sur une lune lointaine. Avant d'offrir un dîner à une personne aimée il faut avoir rêvé l'emmener au galop sur un cheval. Un chef de village qui fait constituer des greniers de réserve de millet, il rêve que sa tribu va passer une saison sèche en ayant bien à manger. Hélas le rêve peut prendre le pas sur le réel. Certaines personnes ne font plus que rêver. Elles rêvent du succès de leur entreprise pendant que la comptabilité périclite. Elles rêvent de l'avenir flamboyant de leurs enfants pendant que ceux-ci respirent des sachets de colle pour palier au manque d'affection. C'est un rapport malade entre le rêve et le réel. Voyant que ses rêves ne se réalisent pas un chef d'entreprise va encore plus puiser dans les caisses, pour essayer d'acheter son rêve malgré tout. Voyant qu'entre deux sachets un enfant n'est pas poli avec les visiteurs, il lui sera infligé une punition bien sentie. Le danger avec le rêve, c'est qu'il donne du plaisir sans jamais faire mal. Il ne demande pas d'efforts. Les conséquences des rêves mal gérés peuvent être abominables. On peut y perdre une jambe ou la vie. Mais au moment-même tout se passe bien. Pourtant, quand on sait faire la différence entre le rêve et la réalité, quand on est habilité à réfléchir et qu'on a de la culture, on peut faire des rêves bien plus beaux encore.

Les besoins charnels sont des pulsions de base. Un nouveau-ne a la pulsion de téter le sein de sa mère. Il suffit que le mamelon s'approche pour que la bouche du nouveau-né se mette à téter. C'est un réflexe moteur, dont le nouveau-né n'a pas conscience. C'est bien pratique. Sinon il faudrait le nourrir de force. La Nature fait bien les choses. Plus tard, quand l'enfant devient conscient de ce qui l'entoure et de ses besoins, il perd ce réflexe et mange de façon consciente, réfléchie. Il apprend à choisir sa nourriture. Plus tard encore il apprend à la cuisiner lui-même. Heureusement qu'il perd le réflexe de succion. Imaginez un adulte qui aurait gardé ce réflexe. Dès que quelque chose s'approche de sa bouche il se mettrait à téter... Imaginez aussi un nouveau-né à qui on présenterait régulièrement quelque chose à téter mais sans jamais qu'il en sorte de nourriture. Il tomberait vite malade... Il faut respecter la Nature. Un autre réflexe de ce type est la formidable envie qu'ont les adolescents de se faire des gros câlins. Cela leur procure des sensations inouïe. C'est excellent pour les mener à s'intéresser aux autres et plus tard peut-être à former un couple et avoir des enfants. Mais se sauter les uns sur les autres n'est pas la finalité. La finalité, c'est d'apprendre à aimer : comprendre les autres et avoir envie de leur permettre de mener leur vie. Le problème est qu'on ne leur a pas appris à aimer au départ, quand ils étaient enfants. Pire : ils n'ont aucune autonomie affective. Ils vivent dans la terreur d'être abandonnés. Les rapports "amoureux" entre ces adolescents ou jeunes adultes sont donc catastrophiques. Certains tiennent des discours sur une sexualité débarrassée de tout engagement affectif : "Le sexe par plaisir.". Ils ne sont jamais réellement satisfaits par leur ébats et développent des déséquilibres psychologiques. A l'autre extrême il y a les possessifs, qui manipulent et enferment leur partenaire. Ils veulent le garder à tout prix et rêvent de lui donner la Terre entière. Il n'y a là non plus aucune affection. Les dégâts sont au rendez-vous. Pour palier à leurs vides et les angoisses ces jeunes prennent de la drogue ou adoptent un endoctrinement religieux ou politique. Qu'ils soient des consommateurs journaliers de drogues ou radicalement anti-drogue, ce sont deux extrêmes stériles. L'équilibre n'est pas entre ces extrêmes, il est au-dessus : là où il y a de l'affection, de l'amour. Là où on est capable de vivre ce que qu'on fait et de réfléchir à ce qu'on fait. Il n'y a qu'une façon d'aimer mais elle peut s'exprimer de manières très différentes. N'en déplaise à certaines religions qui prétendent énoncer des normes.

Un troisième besoin charnel est la jalousie. Si vous voyez un camarade qui a réussi à construire une belle voiture téléguidée, un instinct de jalousie peut naître en vous. Vous aussi vous aimeriez posséder un bel objet comme cela. Vous aimeriez qu'on vous regarde avec admiration comme on le regarde quand il exhibe son petit bolide. Si vous vivez dans un monde équilibré, votre réflexe sera de vous procurer vous aussi une voiture téléguidée et d'apprendre à la faire rouler. C'est excellent parce qu'ainsi vous apprendrez de la mécanique, de l'électricité et même un peu de chimie. Après un an de hobby vous aurez acquit sans le faire exprès un bon petit bagage technologique et philosophique. Vous méritez l'admiration que l'on vous porte maintenant. Quid si la jalousie s'exprime par d'autres voies ? C'est la catastrophe. Certains iront détruire la voiture de l'autre. D'autres payeront très cher pour avoir une voiture préassemblée. Ils ne construisent pas leur voiture eux-mêmes et n'ont donc aucun mérite. Ils se contentent de payer. Certains poussent le vice jusqu'à acheter une voiture toute faite et à la faire conduire par un autre. Tout en prétendant avoir les mérites parce qu'ils ont payé. Quelle horreur. Un monde où la jalousie est bien canalisée n'est pas simple à construire. Il faut que celui qui possède une voiture accepté de la prêter un peu à celui qui n'en a pas encore, pour qu'il apprenne. Il faut qu'il accepte de lui de expliquer ce qu'il sait. Si une personne n'a pas l'argent pour s'acheter une voiture, il faut qu'elle pense à faire une chose différente, qui apporte autant de plaisir et de prestige mais qui coûte moins. Idem si on n'a pas les capacités intellectuelles pour assembler une voiture. A la place on peut par exemple prendre un chien. Et le rendre heureux en étant un maître sévère mais chaleureux. L'idéal est quand on arrive à un travail de groupe : tout le monde fait un peu de tout mais l'un se spécialise plutôt dans la gestion financière, l'autre dans la construction de voitures, un troisième dans la conduite sur champ de courses et la quatrième pour s'occuper du chien. C'est le principe du Village Schtroumpf.

On dit de la civilisation occidentale qu'elle est basée sur la maximisation des profits. Je me demande si elle n'est pas plutôt basée sur la minimisation du travail cérébral. La conception des objets que nos industries fabriquent demande un solide travail intellectuel. Mais ce travail est fourni par une infime minorité. Les autres se contentent de visser les boulons d'après les plans. Trop d'industriels se contentent de maximiser leurs bénéfices à court terme. Ils ne sont pas concernés par le bien-être de l'Humanité ou par l'Ecologie. A la Bourse on ne se soucie que d'augmenter son capital, sans se soucier des famines et des massacres que l'on cause là-bas au loin. Maximiser les bénéfices, c'est un mode de pensée très simples, qui ne se soucie pas de l'ensemble des problèmes et des rêves. Je ne suis pas contre la Bourse. Je trouve même que c'est une idée géniale. A la bourse, tout le monde peut être propriétaire. On voit les entreprises évoluer, on peut participer de loin aux décisions de leurs directeurs... Je n'imagine pas un monde civilisé sans Bourse. Ce qu'il faudrait, c'est que les petits actionnaires aient une intelligence des choses. Il faudrait qu'ils prennent leurs décisions en fonction des intérêts à long terme de leur pays ou de l'espèce humaine. C'est comme pour aller voter. Le vote délinquant, c'est voter pour la personne qui vous a promis quelque chose ou pour le parti pour lequel on vous a donné l'ordre de voter. Des votes acceptables sont de voter pour le parti dont les idées vous sont le plus favorable ou de voter pour le parti ou les personnes que vous pensez bons pour le pays. On me dit souvent que jamais les gens ne joueront en Bourse dans l'intérêt commun, que l'appât du gain à court terme sera toujours le plus fort. Ce n'est pas vrai. La fièvre de l'or est très puissante c'est vrai. Elle procure un plaisir intense, très addictif. Mais quand une personne a appris à utiliser son cerveau, elle en retire un plaisir plus fort encore. Apprenez des choses aux enfants dans les écoles, donnez-leurs de vrais câlins, la Bourse deviendra automatiquement plus saine.

L'Economie de Marché est un simple bon sens. C'est le système adapté à l'espèce humaine. Même les chimpanzés utilisent l'Economie de Marché, à leur façon. Le problème est que l'économie de marché est facilement pervertie. Prenez par exemple la Consommation à Outrance. Le principe de la Consommation à Outrance a été inventé par les économistes après le Crash Boursier de 1929. Ils sont arrivés à la conclusion que le Crash est survenu parce que les gens n'achetaient que ce dont ils avaient besoin. Conclusion : il faut pousser les gens à acheter sans cesse et à jeter ce qu'ils possèdent. D'où la publicité, les produits fragiles, la Mondialisation Sauvage, l'extinction des ressources et la pollution planétaire. Je sais pas moi, c'est comme si on imaginait un monsieur qui gonfle des ballons avec de l'air comprimé. Il a un problème : les ballons explosent avant qu'il puisse les décrocher du tuyau. Vous, vous penseriez à réduire le débit d'air ou à trouver un moyen de décrocher les ballons du tuyaux plus vite. Et bien pas le monsieur. Il réfléchit comme un économiste. Alors il décide que la solution c'est de percer des trous dans les ballons avant de les mettre sur le tuyau. Comme cela ils se vident d'une partie de leur air pendant qu'ils gonflent. Donc ils n'explosent plus. A cause des trous les ballons se vident de leur air en quelques minutes et les enfants doivent sans arrêt venir chercher de nouveaux ballons. Pour fabriquer tous ces ballons on exploite et on tue tous les arbres à caoutchouc de la forêt. Dit comme ça cela paraît dément. Pas pour les économistes. Ils aiment les solution simples et de bon sens...

Dans une dictature la gestion du pays est très simple : le bakshish. Quoi que vous fassiez, il faut soudoyer un fonctionnaire ou corrompre un politicien. Un homme honnête aimerait créer une entreprise dont la comptabilité serait claire et les clients respectés. Dans une dictature ce n'est pas possible. Pour recevoir le moindre colis postal vous devez payer un facteur ou un douanier, parfois dix fois la valeur du colis. Ne parlons pas de ce qu'il faut payer au contrôleur des contributions ou au Maire de la Commune. Cela cause des frais énormes. Pour survivre vous êtes obligé de pressurer vos ouvriers et de tromper vos clients. Dans une dictature vous êtes contraint de vivre dans la saleté. Cet argent va dans les poches des fonctionnaires et des politiciens. Ils en reversent une grande partie aux fonctionnaires et aux politiciens au-dessus d'eux. L'argent monte ainsi, jusqu'au dictateur ou au familles dirigeantes. Ils se servent de cet argent pour assurer leur train de vie. Ce sera une télé couleur pour le douanier et un cinquième yacht pour le dictateur. Leur activité professionnelle est simple : écraser, détruire toute personne qui menace ce système. Dans une démocratie, chacun doit également payer beaucoup d'argent à l'état. Mais on paye cet argent sous forme d'impôts, qui sont mieux définis et moins injustes que les bakshishs. L'argent de ces impôts servira en grande partie à financer des services à population. Etre politicien ou fonctionnaire dans une démocratie est plus compliqué que dans une dictature. Vous devez travailler, comprendre les problèmes des gens... Vous risquez de perdre votre place à chaque élection. Les Elections Libres constituent une différence de taille entre dictature et démocratie. Une démocratie n'est pas pour autant le contraire d'une dictature. Il y a des fonctionnaires inutiles et de la corruption dans une démocratie aussi. Il y en a moins. Réciproquement il y a des dictatures où de véritables services publics sont organisés, certes moins efficaces que dans une démocratie. Tout le monde a intérêt à vivre dans une démocratie, même les puissants. La majorité des fonctionnaires et des politiciens d'une dictature vivraient mieux, avec moins de danger pour leurs vies et leurs familles, si leur pays devenait une démocratie. C'est malheureusement trop compliqué pour eux. La menace de mort ou de déchéance permanente leur cause moins de souffrance que de devoir réfléchir. Ils n'ont pas appris à utiliser leurs cerveaux. Ils n'ont jamais appris à lire un poème. En Belgique, un élément de dictature est que la classe dirigeante pense l'économie de façon très simple : "Les gens doivent aller à l'usine ou au bureau et payer des impôts.". C'est leur recette du bonheur. Tout ce qui est entraide et petits boulots est réprimé. Il existe des régimes comme le bénévolat ou les travailleurs indépendants. Ce sont des carcans qui en ont détruit plus d'un. Les belges sont travailleurs mais une partie de la population est carrément empêchée de travailler par le système. On ne peut pas sortir de chez soi et saisir un travail qui se présente. Il faut travailler en cachette ou accepter de ne rien faire.

Comment mettre en route le cerveau des enfants ? Un ami a fait une expérience : dans une école, à une moitié d'élèves il a donné des cours de jeu d'échecs. A la fin de l'année, ceux qui avaient appris à jouer aux échecs avaient des notes sensiblement meilleures en maths. Faire travailler les cerveaux des enfants, ce n'est pas compliqué quand on sait s'y prendre. Faire du théâtre, apprendre à aimer un animal domestique, apprendre à construire soi-même ses jouets... Pour les cours de langue, j'ai pensé à un exercice très simple : on donne à l'élève un paragraphe écrit par un auteur donné. L'élève doit ajouter une idée dans le paragraphe, comme si c'était l'auteur du paragraphe qui avait introduit cette idée dans le paragraphe dès le départ. Il doit essayer de se plier au style et au mode de pensée de l'auteur, pour que la couture soit invisible. Tout cela sont des choses qui ne coûtent pas ou peu d'argent. Pourtant elles n'existent pas dans les écoles. Tout ce qui ne sert pas de façon directe au travail en usine ou dans une administration est banni. Une erreur dans l'enseignement actuel consiste à découper le savoir en tranches. On décidé qu'un enfant ne peut prendre connaissance de ceci ou de cela qu'à tel ou tel âge. Et si à tel âge il n'est pas capable de faire ceci ou cela, et bien c'est un raté. Les enfants se retrouvent donc à apprendre des choses sans savoir à quoi elles vont servir. Ils doivent les apprendre sans pouvoir s'en servir, en ne faisant que semblant de s'en servir. Inversement quand ils sont jeunes adultes et qu'on leur apprend enfin certaines choses, ils ne peuvent pas les comprendre parce que leurs cerveaux n'y ont pas été préparés plus tôt dans l'enfance. Quel gâchis. Suivant son âge, le cerveau d'un enfant se concentre sur des aspects différents des choses. Après la naissance il apprend d'abord à comprendre et utiliser ses bras et ses jambes, ainsi qu'une communication de base avec ses parents. Puis il s'intéresse au comportement élémentaire des objets et commence à apprendre les relations avec les autres enfants. Ensuite il commence à percevoir et apprendre les textures des objets : élasticité, poids, rugosité... Vers 4-6 ans il est dans "l'âge magique". A cet âge il croit tout ce qu'on lui dit. Il est une éponge qui absorbe le monde sans le moindre esprit critique. De 7 à 10 ans il commence à faire un tri dans ce qu'il croît et peut apprendre à manipuler les idées et les objets de façon efficace. Si à 12 ans il n'est pas capable de construire des choses, il y a un problème. De 12 à 18 ans il continue à apprendre et se perfectionner mais surtout il acquiert un corps d'adulte et des besoins d'adulte. Il apprend le Monde Extérieur. A 18 ans le cerveau a en gros terminé de se construire. Il pourra apprendre de nouvelles informations tout au long de sa vie. Mais il ne pourra pas apprendre de nouvelles façons de penser. A 18 ans, le cerveau contient beaucoup de choses mais dans un désordre indescriptible. Il n'est donc pas fiable. Alors commence un long travail pour mettre de l'ordre. En se confrontant à la vie réelle, le jeune adulte élague son cerveau comme on élague un arbuste qui a poussé au hasard. Entre 25 et 50 ans suivant les cas, le cerveau devient robuste, sérieux. On peut lui confier des responsabilités. Tout cela pour dire qu'il se passe des choses différentes à des âges différents. Cela ne veut pas pour autant dire qu'on ne doit montrer certaines choses à l'enfant qu'à tel ou tel âge. C'est le contraire. Il faut lui montrer tout à tous les âges. Mais il faut savoir qu'il n'en absorbera que certains aspects à chaque tranche d'âge. Un enfant qui n'a pas pu jouer avec des morceaux de bois dans son parc ne deviendra pas habile de ses mains à 12 ans ni à 18. Un enfant qui n'a pas vu de belles animations vidéo de la Théorie de la Relativité d'Einstein à l'âge magique, n'y croira pas si on lui en parle la première fois à 19 ans. Il fera semblant d'y croire et ne sera jamais un bon physicien. Dans l'enseignement actuel, on fait faire des choses aux enfants dès qu'ils sont capables de les faire. Mais on ne prépare pas cela cinq ans à l'avance et on ne tient pas compte de ce qu'ils feront cinq ans plus tard. Plus tôt une école arrive à faire faire certaines choses à des enfants, mieux elle est considérée. Peu importe si pour cela elle torture les enfants et bloque leurs cerveaux.

Prenons une personne qui ne s'est jamais intéressé aux voitures et qui doit apprendre à conduire. Au début, la première fois qu'on l'assied au volant et qu'on commence à lui expliquer, elle va avoir l'impression que c'est insondablement difficile. J'ai vu plus d'un apprenti conducteur presque paniquer. Si l'instructeur est bon, tout se passera pourtant très bien. Il va lui montrer comment il conduit la voiture, lui donner quelques explications sur des points précis et lui faire faire les gestes essentiels. En une heure de temps elle aura à peu près compris comment ça se passe. Elle fera toujours caler le moteur et gripper le changement de vitesses. Il faut recommencer le lendemain, après une nuit de sommeil. Après
Le Chaud et le Froid
Un individu, une famille, un clan, une société ou une civilisation peuvent connaître deux états opposés :
L'état Chaud, c'est ce que peut vivre une petite tribu dans la forêt quand tout va bien. Il n'y a pas d'ennemis, pas de maladies. Il n'y a pas vraiment de chef. Chacun peut se blottir bien au Chaud dans les bras des autres, leur prête beaucoup d'attention et essaye de les comprendre et de leur donner ce dont ils ont besoin. Chaque membre de la tribu est le bienvenu, quoi qu'il ait fait de sa journée.

L'état Froid, c'est la guerre et la détresse, la survie dans un environnement hostile. Il faut sacrifier des individus, d'autres finissent estropiés. Les individus ne s'occupent pas beaucoup les uns des autres. Ils sont concentrés sur les ordres que hurle le chef. Chaque acte est jugé et éventuellement puni.
Certains disent que le Chaud est le Paradis, le Froid est l'Enfer. Cela me semble naïf. Certaines personnes raffolent des situations de guerre. L'action, le suspens, l'autorité... cela leur donne des sensations fabuleuses. C'est leur Paradis. Le Chaud les ennuie. Des grands chefs de guerre comme Alexandre le Grand et Napoleon Bonaparte sont vénérés par leurs soldats. Les civilisations très Chaudes sont fragiles ; elles sont exterminées ou réduites en esclavage par le premier envahisseur venu. Des tribus ont été ravagées par une simple maladie, parce que les personnes saines venaient se blottir contre les malades pour leur donner du Chaud. La contagion a fait le reste. Le Chaud ne peut être considéré comme le Paradis que par des personnes obligées de vivre dans le Froid. Par exemple un peuple réduit en esclavage par ses chefs. Les chefs se servent du mirage du Chaud pour manipuler ce peuple.

On dit aussi que les femmes sont Chaudes et les hommes sont Froids. Ce n'est pas vrai pour toutes les femmes. Il faut entendre le ton cassant sur lequel certaines parlent à leurs maris quand ils ne se plient pas aux objectifs. Parfois jusqu'à ce que mort s'ensuive. Beaucoup d'hommes ne peuvent trouver amitié et compréhension que chez un ami homme. S'il faut prendre un symbole du Chaud, pourquoi pas une femme tenant un enfant dans ses bras. Mais faire des hommes un symbole du Froid...

Le Chaud comme le Froid sont utilisés pour contrôler le peuple :
Les prêtres du Chaud vendent des drogues aux gens pour les tenir calmes. Ils font des listes des drogues autorisées et des drogues interdites. Ils font des promesses et disent de belles paroles pour consoler et rassurer. Ils installent des objets hypnotiques dans les maisons.

Les prêtres du Froid inventent des ennemis pour faire peur. Cela leur permet d'édicter des objectifs et des obligations.
Une société qui ne fait que du Chaud ou que du Froid est condamnée à la destruction. Il faut un équilibre entre les deux. C'est pour cela que la majorité des dirigeants "soufflent le Chaud et le Froid". Ils gèrent cela comme on choisit la température de son bain, en modulant les robinets d'eau chaude et d'eau froide. Ils montrent des ennemis du doigt tout en rassurant le peuple.

Le jeu entre le Chaud et le Froid dépend du niveau culturel d'une société. Considérons par exemple le sang versé :
Si les individus sont très peu éduqués, les superstitions et les à-prioris l'emportent. Il se passera tout et n'importe quoi. Il suffit de faire un geste inhabituel pour être accusé d'un crime. Des clans se jettent les uns contre les autres et s'exterminent à moitié. C'est ce qui s'est passé pendant la Première Guerre Mondiale. Après la lutte et les flots de sang, les survivants rentrent chez eux, apaisés.

Si le niveau d'éducation est un peu plus élevé, les chefs s'organisent et essayent de limiter les dégâts. Au lieu d'exterminer des populations entières, ils se contentent de sacrifier quelques individus. Cela suffit à calmer les autres. Par exemple chaque année on prend une vierge, on fait une belle cérémonie, on lui donne un message à transmettre aux dieux et on la jette au crocodiles. Quand il y a des problèmes, on choisit quelqu'un, peu importe qu'il soit innocent ou coupable, on l'accuse de tous les maux et on le fait lapider par la foule. Cela permet à chaque lanceur de pierre de faire gicler le sang. Dans certaines régions les conflits entre tribus se règlent par un affrontement armé mais on arrête le conflit au premier mort ou blessé grave. Dans les sociétés actuelles il peut devenir difficile de faire des sacrifices. Certains trouvent toujours bien un moyen. Des sectes sacrifient des enfants en leur refusant des soins médicaux. En façade ils se prétendent civilisés : en refusant par exemple les transfusions sanguines, ils refusent de faire couler le sang... Dans les faits il s'agit bien de sacrifices humains et c'est bien la notion de sang versé qui est en jeu. Dans certains pays on met à mort les criminels tout en sachant pertinemment qu'une partie des condamnés sont innocents. La subtilité est poussée à son extrême quand on refuse une mort digne aux malades incurables qui souffrent. Officiellement on refuse le sacrifice puisqu'on refuse de mettre fin à la vie de ces personnes. La réalité est qu'on se sert d'elles pour impressionner le peuple, en les condamnant à mourir dans la déchéance et les souffrances. Un certain pays atteint des sommets en envoyant des astronautes dans l'Espace en utilisant un véhicule dont les experts disent qu'il n'est pas fiable et qui a déjà tué 14 astronautes. Les astronautes étant une élite, il s'agit peut-être là d'une variante du sacrifice de la vierge. J'ai une photo de 7 astronautes prêts à embarquer. Il sont assis à une table comme les apôtres sur une peinture de la cène. Le progrès démocratique réside peut-être dans le fait qu'on prend le risque de les sacrifier tous les 7 au lieu de ne sacrifier que celui du milieu... Dans ce pays aussi, certains groupes religieux considèrent que la peine de mort est nécessaire pour contrôler les enfants. Par exemple ils n'acceptent pas que l'on donne aux jeunes filles un vaccin qui les protège d'un virus qui peut déclencher un cancer, sous prétexte que ce virus se transmet par voie sexuelle. Si la menace de mort n'existe plus, les jeunes filles auront un comportement sexuel débridé, disent-ils... On peut se demander quelle opinion ces religieux ont de leurs enfants, des femmes, de leur système d'éducation et de leur capacité à donner de la tendresse à leurs enfants.
Quand le niveau monte encore, on n'accepte plus les sacrifices humains. On sacrifie à la place des animaux ou des objets, des plantes... On organise par exemple des cérémonies où un animal est accusé des problèmes de la communauté et égorgé en public.

Dans les sociétés très évoluées, la notion de sacrifice n'est plus acceptée. On ne cherche plus de boucs émissaires. On demande à chacun de prendre ses responsabilités et on recherche les vraies causes des problèmes. C'est le monde de la Recherche Scientifique et des Procédures Judiciaires. Le christianisme consacre symboliquement cela en faisant du Christ "l'Agneau de Dieu". Il est le dernier sacrifice, donné par Dieu à l'Humanité, afin que plus jamais personne ne soit sacrifié. A la messe tous les dimanches on rappelle ce dernier sacrifice avec un peu de pain et de vin et on s'en contente. L'Inquisition n'était donc pas un mouvement chrétien, les Croisades non plus.
Le Paradis est dans l'équilibre entre le Chaud et le Froid. On se met dans l'esprit du Froid pour sortir de chez soi et partir chasser du gibier. Quand on revient à la maison, on retrouve le Chaud de la famille et on guérit ses blessures. L'harmonie est dans cette perpétuelle respiration entre le Chaud et le Froid. Si on est bien chaud douillet dans sa famille, on affrontera bien le Froid. Plus on se fait mal dans le Froid, mieux on profitera du Chaud une fois revenu à la maison. Une personne qui n'a pas droit à du Chaud à la maison voit ses capacités s'effondrer et peut même attraper des maladies graves. Certains médecins guérissent leurs patients juste en dialoguant avec eux, parfois en trouvant un excuse pour les toucher. Il existe de nombreux détraquements de cet équilibre. Certains dominants ne donnent un peu de Chaud à leurs victimes que si elles ont obéi dans le Froid. Un ami me racontait le malheur de sa vie : il est resté coincé entre le Froid du père et le Chaud de la mère. Quand il était jeune enfant son père était régulièrement très dur avec lui, il le punissait sévèrement. Ensuite sa mère le consolait. Elle le prenait dans ses bras et lui parlait doucement. Il est devenu accro à cette consolation. Malgré son âgé de 60 ans, il cherche perpétuellement à se faire punir. Quand il discuté avec des amis, il se montre buté, il refuse de comprendre les arguments des autres... cela débouche sur des hausses de tons et des reproches. Il peut s'échanger des noms d'oiseaux, il y a de l'énervement et des menaces... Après il se montre dépité, malheureux... et se trouve quelqu'un pour le consoler. Il a raté sa vie professionnelle à cause de cela, causant ratages après ratages à la recherche d'un peu de consolation après. Un exemple notoire de confusion entre le Chaud et le Froid est le sado-masochisme. Certaines religions ont condamné le corps et les sensations charnelles. Le corps est revenu par la fenêtre, sous forme de punitions corporelles "spéciales". Officiellement, la flagellation est une punition, donc elle est conforme à la religion. En réalité elle est donnée d'une façon qui crée un lien corporel entre le pseudo-punisseur et le pseudo-puni. De là le plaisir que les deux peuvent en ressentir. Les autorités religieuses ont vite appris à se servir de ces méthodes. Dans certains cas on administre de véritables punitions, qui causent une véritable souffrance et détruisent l'individu. Dans d'autres cas on administre la "punition" de sorte à ce qu'elle crée ou maintiennent un lien de Chaud entre les personnes. En façade, tout le monde est puni et traité de la même façon... L'Inquisition a poussé ce système à un haut degré de perversion. Certaines salles de torture n'étaient équipées d'aucun instrument destiné à réellement faire souffrir ou estropier le supplicié. On y "travaille" la personne pour créer un lien charnel. C'est une forme de viol. L'Inquisiteur s'impose à sa victime, il casse sa personnalité et l'assujettit, en s'imposant au corps de la victime. Il impose son Froid par du Chaud déguisé en Froid.

Les tribus les plus arriérées et les plus sanguinaires ont aussi leurs moments de Chaud. On ne peut pas pour autant dire qu'elles vivent en harmonie. Elles font vivre leurs membres dans un excès perpétuel de Chaud ou de Froid, donc en Enfer. Elles oscillent entre des périodes de Froid exagéré et des moments de Chaud inadéquats. La Culture, la Spiritualité, l'Education, le Dialogue... servent à construire, à tisser un savant équilibre entre le Chaud et le Froid. C'est alors qu'on parle de "raffinement" et de "civilisation". Ces équilibres sont fragiles et demandent une attention permanente. Il faut toujours être prêt à s'adapter aux changements.

Le travail des chefs est difficile et parsemé de pièges :
Quand un chef a réussi à trouver un équilibre, lui ou ses successeurs vont tendre à figer la société dans cet équilibre. Ils vont par exemple limiter le niveau de l'enseignement, pour que la société ne puisse pas évoluer vers un nouvel équilibre, différent. Dans ce niveau différent les chefs en place ne trouveraient plus leurs marques. Ils n'arriveraient plus à gérer la société et perdraient leurs privilèges. Certains chefs poussent la plaisanterie jusqu'à déclarer leur équilibre "sacré". Toute personne le mettant en doute est considérée comme sacrilège, insane, ignoble...

Si la société s'est formée pour se protéger d'une situation de guerre, les chefs vont tendre à la maintenir en situation de guerre.

Quand un groupe de chefs est en place, il y a toujours un autre groupe de candidats chefs qui essaye de les chasser pour prendre leur place. Le deuxième groupe propose un équilibre différent. En général ce nouvel équilibre est soit un peu plus évolué que celui en place, soit un peu moins évolué. Dans les démocraties cela donne l'alternance entre les partis de Gauche et les partis de Droite. Un ami vietnamien m'a expliqué que selon lui le seul avantage du Communisme était d'être un système différent du Capitalisme. Il permettait à un groupe de candidats chefs de prendre les armes. Que l'équilibre communiste soit meilleur ou non leur importait peu.

Les chefs peuvent se désolidariser du reste de la population et construire leur petit Paradis entre eux, aux dépends du reste de la population.
On observe que dans des coins opposés de la Planète des hommes peuvent arriver à des équilibres très similaires. Il n'est pourtant pas aisé de prédire quel équilibre choisira un groupe d'humain largué à un endroit donné. Suivant le hasard, la météorologie, leur tempérament, leur niveau culturel et technologique, la personnalité des gourous... ils peuvent évoluer vers l'un ou l'autre équilibre radicalement différents.

Le Chaud et le Froid sont aussi une simple question de chimie. L'adrénaline est produite par l'organisme dans les situations de Froid. L'ocytocine est produite dans les situations de Chaud. Les drogues ont diverses actions sur l'état de Chaud et de Froid d'une personne. Un ami m'explique régulièrement que la nicotine est une drogue redoutable parce qu'elle est à la fois un calmant et un excitant. Elle induit l'équilibre de façon artificielle, pour ceux qui n'ont pas appris à le trouver par eux-mêmes.

Le Libre Arbitre est la possibilité pour chaque individu de trouver son équilibre par lui-même. Ce n'est possible que dans les civilisations évoluées, où l'on apprend une quantité de choses de la vie aux enfants. Le Libre Arbitre donne à chaque individu une chance de fournir son meilleur rendement. Dans les civilisations faiblement cultivées, les individus laissés à eux-mêmes risquent fort de faire n'importe quoi et surtout des choses destructrices. On est obligé de les soumettre à un ordre.

Dans les civilisations avancées, l'art du Froid consiste à faire des choses spectaculaires mais en gérant les risques : sport, challenges technologiques... On propose beaucoup de choses aux amateurs de Froid mais en imposant des règles de sécurité, la surveillance par des moniteurs compétents...

L'Enseignement est un haut lieu du Chaud et du Froid. Il faut beaucoup de Froid pour casser lentement les murs de l'ignorance. Il faut des flots de Chaud pour s'entraider, partager les progrès. Il peut y avoir des dérapages. Dans beaucoup d'établissements on fait travailler les étudiants comme des bêtes mais à des choses qui ne servent à rien. On donne l'illusion du Froid. Un bon professeur a une grande capacité de Chaud envers ses étudiants. Il les comprend, il peut les tenir par la main et les rassurer pour les mener sur les chemins escarpés. Hélas c'est souvent l'inverse qui se produit. Ils ne donnent pas grand-chose aux étudiants mais leur demandent beaucoup de Chaud : ils doivent chercher et comprendre ce que le professeur a envie d'entendre, la façon dont il veut être vénéré, la façon dont il rêve que l'on réponde à ses examens... Presque plus aucun Chaud n'est investit pour maîtriser la Connaissance. Il n'y a qu'une illusion d'enseignement, une grande comédie.
Un ami et moi nous occupons parfois d'un enfant de 7 ans. Quand je fais une remarque à cet enfant, il m'écoute avec beaucoup d'attention. Il essaye toujours de me faire plaisir. Il fait des efforts pour tenir compte de ce que je lui dit. Je n'ai vraiment aucun problème avec lui. Par contre avec mon ami c'est une catastrophe. S'il fait une bêtise et que mon ami le gronde, cinq minutes après il recommence. Il se fout complètement de ce que mon ami lui dit. Pourtant cet ami passe pas mal de temps avec lui et se montre autoritaire. Il lui fait rendre de petits services... lui dit qu'il aimerait parfois le frapper... Un jour la situation était caricaturale. Mon ami faisait des reproches à l'enfant sur son comportement des heures passées. L'enfant était rivé sur mon regard. Ce que l'ami disait ou pensait de lui importait peu, par contre il était tétanisé à l'idée de ce que moi j'en pensais. D'où vient cette différence entre mon ami et moi ? Je crois que la première erreur de mon ami est de ne souffler que le froid. Il se contente de subir, de faire des reproches, de menacer et de donner des instructions. Il a un blocage à l'idée de montrer de l'affection à cet enfant, peut-être à cause de ce que cet enfant lui fait régulièrement subir. C'est un cercle vicieux. Plus mon ami se montre froid, plus l'enfant sera indifférent à lui et lui fera subir des problèmes. La deuxième erreur est que mon ami invente des raisons de gronder l'enfant. Son intention est louable : il veut discipliner l'enfant, pour son bien. Mais un enfant sent rapidement quand on lui dit des choses qui sont fabriquées de toutes pièces. Il ne vous prend plus au sérieux. Tout cela est spontané et instinctif. Il n'y a aucune stratégie ni aucune intention chez cet enfant. Simplement son cerveau fonctionne de cette façon, inconsciemment. De même il n'a jamais décidé de faire attention à ce que je dis. Son cerveau se met naturellement en état de stress et d'attention quand ma voix devient grave. Il s'est construit un lien fort entre ma voix et son attention. Pourquoi ? Parce que je lui donne beaucoup de chaud et que je ne souffle le froid que quand il y a lieu. Je joue avec lui, je lui explique des choses... Son jeu préféré est de se "battre à main nues" contre moi. Cela donne des "pugilats" et des "luttes" épiques. Cela développe sa motricité... J'essaye de régulièrement lui montrer quelque chose de nouveau. Je sais beaucoup de choses sur cet enfant : ce qu'il aime, les règlements de ses parents, ses habitudes... J'en tiens tout le temps compte. Je fais respecter les règlements tout autant que je respecte les envies et les besoins de l'enfant lui-même. Je lui demande son avis. Quand je le gronde, je suis très ferme. Parfois je lui confisque quelque chose pour quelques heures. Mais je ne l'ai jamais menacé de quoi que ce soit. Je lui explique les règles et s'il fait une bêtise j'applique ce qui a été dit sans chercher à discuter. Au début j'ai dû être ferme avec lui plusieurs fois et le laisser mariner dans son jus. Maintenant ce n'est plus nécessaire. S'il fait un bêtise, je lui en fais le reproche avec calme, je vois que cela le touche beaucoup, je lui demande confirmation qu'il a bien enregistré et tout de suite après on peut recommencer à jouer. Si je fais une bêtise, par exemple si je le gronde pour rien, je m'en excuse tout de suite. Je lui explique que je me suis trompé ou que j'ai mal compris ses intentions. Le plus important dans tout cela est d'avoir le cerveau qui fonctionne. Certains croient s'en tirer en appliquant bêtement des méthodes : être ferme avec les enfants pour les discipliner ou à l'inverse leur laisser tout faire pour qu'ils apprennent. Cela ne fonctionne pas. La bonne méthode est de faire un peu de tout suivant ce qui est approprié. Il faut entretenir le dialogue et ne pas chercher à manipuler. Un enfant ne vous reprochera jamais de vous être fâché, si c'est une émotion sincère que vous aviez. Si vous aviez tort de vous fâcher, ce n'est pas grave, du moment que vous étiez sincère. Par contre si vous trichez, par exemple si vous faites semblant de rester fâché ou si vous faites semblant d'être content, les choses vont mal tourner. Si vous êtes sincère quand vous vous fâchez contre l'enfant, vous l'êtes aussi quand votre visage s'éclaire de joie lorsque vous rencontrez l'enfant, quand vous écartez grand les bras pour lui faire une grosse poutoune. Cette sincérité-là est le fondement de l'identité humaine. Vous devez montrer le bon exemple, en vous intéressant aux autres et en reconnaissant vos erreurs. Et savoir qu'un enfant apprend les choses, donc qu'il fait des essais et des bêtises. Parfois il doit essayer et se tromper plusieurs fois avant d'avoir compris. C'est normal. Il faut le laisser faire. Pour être capable de tout cela, il faut une certaine maturité. Par exemple pour être capable de montrer ses émotions. Beaucoup d'adultes immatures montrent les émotions qu'ils croient qu'ils doivent avoir. Si on les a endoctrinés qu'un enfant c'est merveilleux et qu'il faut le laisser faire, ils vont sourire et sincèrement se croire convaincus que tout va bien. Pendant ce temps la rancoeur et les reproches contre l'enfant s'accumulent en eux. Cette masse deviendra de la haine, qui débouchera sur des petites ou des grandes atrocités. Les plus "doués" peuvent arriver à estropier l'enfant tout en gardant le sourire et en lui disant combien il est gentil.

Chaud et froid ne doivent pas forcément être alternés. Ils peuvent aussi être mélangés. Par exemple quand on aide un enfant à faire ses devoirs, il acceptera des injonction à faire des efforts, même des efforts pénibles, si en même temps il reçoit de l'affection. Les enfants sont primaires. Il est plus difficile de leur faire accepter le froid en leur faisant miroiter le chaud. Il est même déconseillé de promettre une récompense à un enfant en échange de bons résultats scolaires. Donner du chaud à un enfant ne permettra pas de lui faire faire n'importe quoi. Il y a des limites, propres à la nature et aux capacités de l'enfant. Mais un parent qui a bien compris cette composition, peut arriver à des résultats impressionnants. Et que l'enfant en redemande. A la base, un enfant trouve sa satisfaction dans l'approbation et l'affection de ses parents. Un bon parent se doit de graduellement apprendre à l'enfant à trouver aussi sa satisfaction dans le travail bien fait et les résultats concrêts qu'il offre.

Prenons par exemple le cas d'un professeur qui nous a crié dessus en nous affirmant quelque chose. Au moment où cela c'est passé, nous n'étions pas d'accord avec ce qu'il affirmait. Nous nous sommes même senti assez mal. Mais, plusieurs mois ou plusieurs années après, voilà que nous nous mettons à affirmer la même chose que lui. Pire : nous l'affirmons avec violence, comme lui.

Pourquoi adoptons nous le même comportement que les personnes qui nous ont brutalisés ? Voici quelques réponses possibles. Certaines d'entre elles se rejoignent, elles sont un éclairage différent d'une même réalité.
Si quelqu'un nous engueule, c'est une agression envers nous. Si nous ne comprenons pas ce comportement méchant, si nous ne comprenons pas cette chose qui nous a fait souffrir, alors la seule solution pour surmonter cette douleur est de devenir plus fort que la personne qui nous a fait souffrir. Nous espérons dominer notre peur en devenant pire que notre agresseur. Nous ne comprenons pas comment est construite l'arme qui nous a blessé, mais nous apprenons quand même à l'utiliser. Ainsi nous devenons l'esclave de ce comportement malsain, sans nous en rendre compte.

Nous essayons de nous consoler des souffrances endurées. Nous nous disons qu'en fait ces souffrances étaient une épreuve utile, que nous ne nous sommes pas fait engueuler pour rien. Donc, nous nous disons que le comportement de l'agresseur était en fait une bonne chose. Alors, nous nous mettons à faire comme lui, pour vraiment nous persuader que c'était une bonne chose. Nous nous mettons à engueuler d'autres personnes. Et nous expliquons à tout le monde qu'il faut faire comme cela.

Tout être humain doit adopter un comportement. Quel qu'il soit. C'est vital : si nous n'avons pas de comportement alors nous ne sommes rien. Oui mais, quel comportement faut il adopter ? Pour répondre à cette question, notre cerveau va en partie essayer de copier le comportement d'autre personnes autour de nous. Forcément, il aura plus tendance à adopter le comportement de quelqu'un qui nous a fort marqué ou impressionné. Même si c'est un mauvais comportement. Si nous avons été marqué par une personne qui nous a engueulé...

Ce n'est pas nous qui adoptons le comportement de la personne qui nous fait souffrir : c'est le contraire. C'est la personne qui nous adopte. Elle a senti que nous lui ressemblons. Alors elle nous saute dessus et nous impose ce qu'elle a dans la tête. Elle veut faire de nous une copie d'elle-même, pour se sentir moins seule ou simplement par réflexe. Elle agit comme un enseignant, mais pour de mauvaises choses.

Quelqu'un qui est peu cultivé est souvent bloqué face aux problèmes de la vie. Sa réaction face à l'inconnu sera de devenir violent, foncer dans le tas. Si nous avons vécu parmi des personnes violentes, nous avons donc vécu parmi des personnes qui ne savent pas ce qu'elles doivent faire pour résoudre les problèmes de la vie. Elles n'ont donc rien pu nous apprendre pour que nous puissions résoudre nos propres problèmes. Donc, comme nous n'avons pas appris à résoudre nos problèmes, nous devenons violents dans les situations difficiles.

L'école, les administrations, le système en général, cassent les individus. Une fois démolis, réduits à quelque chose de rudimentaire, il est possible de les placer à des postes simples et bien définis au sein d'une hiérarchie. La violence verbale est une des nombreuses techniques utilisées pour casser un individu. Ces individus qui ont été cassés ne sauraient plus vivre en dehors des structures dans lesquelles on les cases. Ils se doivent donc de garantir les intérêts de la structure. Notamment ils se doivent de l'aider à s'alimenter en chair fraîche. Ils vont donc à leur tour faire usage de violence verbale à l'égard d'autres individus afin qu'ils puissent aussi prendre place dans la structure.

D'après des travaux scientifiques récents (Pour la Science, août 1998), si un enfant subit un stress tout au long de son enfance il en gardera des déformations irréversibles dans le cerveau. Ces déformations le prédisposent à la dépression nerveuse. Le stress peut être du à plusieurs choses ; situation de guerre, absence de nourriture... mais il peut aussi être du à des parents grossiers qui ne manquent pas une occasion d'engueuler et de punir l'enfant, qui le maintiennent sous la menace perpétuelle de recevoir des coups et d'être privé de nourriture. Devenu adulte il aura une tendance à la dépression. Ce sera donc une personne incapable de s'organiser, anxieuse, vite dépassée par ce qui lui arrive. Il sera donc fréquemment désagréable avec son entourage. Parfois sa réponse aux situations angoissante sera d'engueuler les personnes avec lesquelles il a affaire, par exemple pour masquer son incapacité.

Lorsqu'on arrive pas à communiquer, on crie. A fréquenter des personnes qui ne savent pas communiquer on n'apprend pas à communiquer. Donc on crie.

Comme beaucoup d'animaux, pour survivre les humains ont tendance à s'organiser en groupes. Si le niveau culturel global du groupe est faible, il est nécessaire qu'il soit mené par un chef fort, un chef qui sait imposer sa volonté. La sélection naturelle a donc fait en sorte que le fait de commander procure du plaisir. Elle a également fait en sorte que le fait d'obéir soit un réflexe automatique, qui procure du plaisir si les ordres sont bien donnés. Certains individus découvrent par hasard que le fait d'imposer leur volonté à autrui est une pulsion qu'ils ont en eux et qu'elle leur procure du plaisir. Mais ils expriment cette pulsion dans des circonstances tout à fait inadaptées. Ils donnent des ordres inutiles, inappropriés voire dangereux. Donner l'ordre en criant et voir leur victime se courber et obéir par réflexe leur procure une jouissance. La victime ressentira le plaisir de son tortionnaire, elle comprendra instinctivement que commander est une source de jouissance. Plus tard, elle peut devenir donneur d'ordres à son tour.

Beaucoup de personnes sont incapables d'exprimer leur affection par des paroles tendres ou par des gestes doux. Cela n'empêche qu'ils éprouvent concrètement des sentiments pour d'autres personnes, qu'ils veulent les protéger et les mettre en garde contre les dangers. Ils disent alors ces mises en garde de façon brusque, sèche. S'ils ont l'impression de ne pas être compris il les répéteront... en parlant plus fort. Crier sur une personne peut donc être une manifestation de l'affection que l'on a pour elle. Une manifestation détraquée mais une manifestation tout de même. Dans certaines familles, crier, menacer, geindre, faire des coups fourrés sont les seuls moyens qu'une personne a pour faire sentir aux autres qu'ils comptent pour elle et pour tester si à leur tour ils ont des sentiments pour elle. Cela met les liens en évidence. A priori, une réponse à une marque d'affection de cette sorte ne peut être qu'une marque d'affection de la même sorte. Seule des personnes qui ont un niveau spirituel élevé peuvent répondre par une marque d'affection "positive" ; un compliment, une attention, un baiser, un cadeau...

Certaines personnes ont des croyances bizarres. Par exemples elles croient instinctivement que vous savez tout faire parfaitement, que vous êtes télépathe et que vous comprenez instantanément ce que l'on attend de vous. Donc, si vous faites ou dites quelque chose de travers, c'est que vous le faites exprès : vous avez intentionnellement mal fait les choses. Vous méritez donc d'être puni, d'être vertement engueulé. C'est une forme de paranoïa. Autre exemple : les personnes qui vous veulent du bien et qui croient que c'est en vous hurlant dessus quand vous faites une erreur que vous apprendrez plus vite à vous corriger et à faire les choses comme il faut. En général elles obtiennent plutôt l'effet contraire, voire elles bloquent complètement leurs victimes. Seuls les grands pédagogues peuvent utiliser l'engueulade et obtenir des résultats, dans certaines circonstances. Au contact de ces personnes vous apprendrez peut-être peu de choses, mais vous allez adopter leurs croyances même sans vous en rendre compte. Elles sont vos maîtres. Vous deviendrez donc à votre tour un paranoïaque qui veut du bien aux autres.

Si vous avez été engueulé, si quelqu'un vous a hurlé dessus pour vous imposer quelque chose, vous avez donc été victime de violence. Votre subconscient sera très préoccupé par cela. Il ne sait pas quoi en penser. Alors il vous amènera à reproduire le même comportement face à d'autres personnes, dans l'intention de voir quelle est la réaction de ces personnes. En quelque sorte, il leur pose la question "Que pensez-vous de ce comportement ?". L'idéal est de rencontrer une personne qui peut exprimer, expliquer de façon claire, compréhensible et satisfaisante ce qu'elle en pense. Soit pour se défendre, soit parce qu'elle comprend la situation. Mais des réponses plus rudimentaires seront également mises à profit par votre subconscient : il observera attentivement une personne qui fuit devant vous, une qui se soumet, une qui vous décoche un coup dans l'estomac... il en tirera des conclusions.

Dans la vie, nous développons des emplâtres, des attitudes construites de toutes pièces pour guérir de frustrations ou de manques. Si par exemple nous n'avons pas réussi à apprendre une nouvelle langue, nous nous mettrons à penser qu'apprendre cette langue n'était pas une nécessité, voire que c'était une chose inutile. Ainsi nous nous sentons mieux. Il faut du temps pour construire ces emplâtres, mettre au point ces attitudes. C'est une véritable technologie. Comme nous sommes de nature généreuse, nous allons avoir tendance à partager ces choses avec nos proches. Si par exemple vous décidez un jour d'apprendre une langue, vous serez surpris d'entendre des personnes vous expliquer et vous affirmer que cela ne sert à rien et que vous ne pourrez de toute façon pas y arriver. Vous pourriez croire que ces personnes sont mal intentionnées à votre égard ou négatives. Il n'en est rien : elles ont simplement le réflexe de vous donner quelque chose qu'elles ont mis elles-mêmes beaucoup de temps à mettre au point. Elles veulent vous aider, vous rendre service, en toute sincérité. Si vous êtes effectivement capable d'apprendre cette langue, il ne faut bien sûr pas les écouter. Mais tenez compte du fait que ces personnes n'ont eu aucune mauvaise intention à votre égard, que du contraire. Il en va de même dans l'attitude d'engueuler quelqu'un. C'est en réalité un geste que la personne fait d'abord vis-a-vis d'elle-même. On n'engueule d'ailleurs en général que les personnes qui font quelque chose que l'on se reproche à soi-même. Elle vous donne quelque-chose qu'elle a subconsciemment construit pour elle-même. Votre subconscient est susceptible d'adopter cette chose, cette attitude de l'engueulade, s'il sent qu'il y a là une solution à ses préoccupations, un moyen.

Pour comprendre ce qu'il y a dans un objet, une méthode parmi d'autres est de taper dessus, le casser. Chez les enfants, c'est un réflexe inné. C'est pour cette raison qu'ils cassent leurs jouets. Cela leur permet de comprendre ces jouets, de les assimiler en eux. Un enfant n'aura vraiment reçu le cadeau que vous lui avez fait que quand il l'aura cassé. Quand on est face à une personne en chair et en os, taper dessus et la casser ne sert pas à grand chose. A moins d'être un futur chirurgien, peut-être. Pour comprendre ce qu'il y a dans l'esprit d'une personne, c'est sur son esprit qu'il faut taper. Cela se fait non par les gestes mais par la parole, en l'engueulant. Engueuler une personne, c'est comme une araignée qui injecte ses sucs digestifs dans le corps de sa proie. Ensuite, une fois que les sucs auront digéré la viande à l'intérieur de la proie, elle pourra se repaître du liquide qui coule hors du cadavre. C'est fou ce que l'on peut retirer comme informations d'une personne engueulée avec art. Mais, forcément, elle va comprendre la méthode. Et l'appliquer à son tour, quand une proie se présentera.

Un homme mature et sage ne se fâche que dans des circonstances très graves. Sa colère fera comprendre aux personnes autour de lui qu'il faut agir, cela leur causera une grande émotion. Un petit enfant par contre se fâche pour tout et n'importe quoi, à la première frustration venue. Un adulte qui se fâche tout rouge pour des choses de faible importance est donc une personne immature, restée dans l'égocentrisme de l'enfance. Une particularité que j'ai pu observer de nombreuses fois est qu'une telle personne n'ose pas se fâcher quand elle est en présence d'une personne mature et sage. Son cris reste bloqué dans sa gorge. Elle est instinctivement dominée par cette personne. Donc, si une personne immature s'est fâchée tout rouge contre vous pour une broutille, c'est que vous êtes vous-même une personne immature. Donc vous êtes susceptible vous aussi de vous fâcher tout rouge pour des broutilles.

Le cerveau humain est une machinerie complexe. Certes il est fait de pages blanches sur lesquelles ont peu écrire bien des choses. Il est surtout et d'abord fait de structures fonctionnelles toutes faites, qui nous ont été imposées à la naissance. Un exemple d'école est le réflexe de téter le sein de la mère. Le nourrisson n'apprend pas à le faire : ce réflexe est gravé et câble dans son cerveau, comme les pistes et les composants d'un circuit électronique qui sort d'usine. Un certain nombre de ces mécanismes précâblés ont la particularité qu'ils doivent être mis en route un jour, par un phénomène extérieur. Un grand classique est l'éveil à l'amour charnel, qui doit se faire par un contact physique un jour. C'est le sens du doux baiser que le Prince Charmant donne à la Princesse endormie. Pour un certain nombre de ces réflexes, l'enclenchement se fait simplement en sentant instinctivement ce réflexe fonctionner chez une autre personne. C'est le cas du réflexe de la colère. Donc, si vous rencontrez un colérique qui vous fait subir sa colère, cela peut déclencher le réflexe en vous. Si ce réflexe est déclenché quand vous êtes déjà adulte et si vous n'avez pas appris à gérer la colère, cela peut faire de vous un colérique particulièrement nuisible. C'est pourquoi il ne faut pas de façon obtuse refouler la colère chez les enfants. Il faut aussi leur donner la possibilité de voir des personnes qui ont de bonnes raisons de se mettre en colère, il faut les emmener dans la vraie vie. Ainsi le réflexe de la colère se développe en eux de façon mesurée et harmonieuse.

En général la personne qui engueule est plus âgée que la personne engueulée. Une première raison à cela est simplement le rapport d'autorité : le vieux à l'ascendant sur le jeune. Mais il existe une autre raison, plus subtile : les vieux sont sensibles à plus de choses que les jeunes. Ils sont conscients de plus de choses, ils donnent de l'importance à plus de choses. Quand un vieux essaye d'attirer l'attention d'une jeune sur un problème, le jeune ne sent souvent pas de quoi le vieux veut parler. Eventuellement il comprend très bien les explications du vieux. Mais il ne les sent pas. Cela le laisse indifférent. Cela ne le touche pas. Il a bien compris ce que le vieux dit mais il ne se sent pas concerné : cela ne lui procure aucune émotion pour ou contre. Le vieux peut essayer de susciter l'émotion chez le jeune. Il peut lui raconter des anecdotes, mettre des situation en voix et en image... Souvent le jeune continue à être indifférent. Pour réussir à faire comprendre au jeune qu'il y a une émotion importante en jeu, la seule solution peut finir par être de s'énerver, de hausser le ton. Quand un vieux a fait un bon coup de gueule sur un jeune, le cerveau du jeune subit une forte émotion et se met à se poser des questions. Il a enfin associé le problème évoqué par le vieux et une émotion. Il y aura encore du travail pour que son cerveau cerne la bonne émotion, celle qui est réellement associée au problème. Ce jeune deviendra vieux... et devra lui aussi engueuler des jeunes.
Attention : nous adoptons le comportement de la personne qui nous a fait souffrir ou le comportement exactement contraire. Parfois les deux à la fois. Mais tous les deux sont mauvais. Par exemple, une personne qui a été trop surveillée par ses parents va soit aussi trop surveiller ses enfants, soit ne pas les surveiller du tout. On passe d'un extrême à l'autre.

Parfois, ce que nous adoptons est non seulement le comportement de la personne qui nous a fait souffrir mais aussi le comportement qu'il nous a dit d'adopter. C'est la situation la plus extrême. Elle se présente par exemple quand des parents vous ont privé d'affection tout en vous disant avec insistance ce que vous devrez faire plus tard quand vous serez grand. Devenu adulte, vous aller obéir en dépit du bon sens aux injonctions qu'ils vous avaient donnés. Vous espérez inconsciemment racheter une faute que vous n'avez pas commise. Ainsi, croyez vous, l'affection qui vous a été niée vous sera rendue. Il est impossible de raisonner avec les personnes piégées dans ce mécanisme : le manque d'affection de l'enfance marque l'individu au plus profond de sa chair. Ces personnes n'iront d'ailleurs pas vers une personne qui pourrait leur donner de l'affection : elles en ignorent le langage pour ne l'avoir jamais appris. Une personne affectueuse leur semblera même plutôt bizarre et inquiétante. Une personne qui se comportera comme les parents leur semblera au contraire le partenaire idéal pour enfin recevoir de l'affection. Car c'est l'affection des parents qu'elles désirent. En obéissant aux injonctions des parents, on se retrouve dans une situation où on est encore davantage privé d'affection. La douleur sera si forte que l'on deviendra soi-même un monstre avec ses enfants.

Les cris et les engueulades sont des événements saisissants, qui ne passent pas inaperçus. Mais tout est relatif : dans certaines cultures, parler de vive voix est normal. Vous pouvez avoir l'impression que deux espagnols sont sur le point de s'égorger puis les voir se quitter avec de grands sourires et des gestes amicaux. Ils ne s'engueulaient pas du tout. Réciproquement, des paroles qui semblent anodines peuvent contenir une grande violence. Dans certaines familles ou dans certaines entreprises, une bonne partie des choses que l'on se dit de façons naturelles sont en réalité autant de coups destinés à rabaisser ou à sonder l'autre. Dans les familles ou les entreprises plus harmonieuses, les paroles sont plutôt destinées à confirmer les liens de solidarité et d'entraide.
Une activité fondamentale du cerveau humain est la constitution de l'image de soi. C'est elle qui influence le plus notre vie.

Qu'est-ce que l'image de soi ?
C'est comment on se voit, ce que l'on croit être, ce que l'on croit qu'on est capable de faire, comment on croit que les autres nous voient, la photo de nous-mêmes que nous avons en tête, quel rôle nous croyons jouer... C'est aussi une photo de famille, sur laquelle nous sommes entourés de nos parents, de nos amis...

Dit plus platement, c'est le dessin que nous ferions sur une feuille de papier si on nous demandait de nous dessiner nous-mêmes. C'est ce que nous écririons si l'on nous demandait de nous décrire nous-mêmes. Attention : nous n'avons pas toujours conscience de ce que nous croyions être. La description que nous ferons consciemment est toujours incomplète et partiellement déformée.

Ici l'image de soi est présentée comme quelque chose de technique et précis, de presque visible. En réalité elle est le plus souvent perçue par les humains sous la forme d'un ensemble d'émotions et d'impressions subjectives, qu'ils peuvent vivre ou subir de façons différentes suivant leur caractère et leur culture.

Plutôt que d'essayer de construire une explication de comment ce phénomène fonctionne, le présent texte est une suite d'exemples. Au fil de ces exemples, vous pourrez à la fois juger de l'importance du mécanisme et apprendre à le découvrir dans d'autres situations.
Le personnel

Des expressions dénotent bien l'importance de l'image de soi : "Se voir comme ceci ou comme cela.", "Est-ce que tu te vois marié avec elle ?", "Je me vois mal aller tous les jours remplacer les plombs.".

L'image de soi reflétant aussi le physique, des personnes qui perdent un bras cherchent parfois à se suicider. Il y a rupture grave de leur image de soi. La situation est résolue quand on réussit à intégrer ce changement de morphologie dans une nouvelle image de soi, changée, adaptée. Si on n'arrive pas à intégrer le changement, si on le refuse, le nie, alors on peut sombrer dans la folie; une réalité parallèle.

Un deuil est le temps nécessaire pour réadapter son image de soi lorsqu'elle a perdu quelque chose. Il faut un certain temps à notre cerveau pour se "recaser", se redéfinir. Cette période doit parfois être ponctuée de cérémonies. La nouvelle image comportera souvent un "souvenir" de l'ancienne.

Les rites initiatiques sont l'inverse du deuil : ils marquent l'ajout de quelque chose à l'image d'une personne.

Parfois, une inadaptation de l'image de soi peut traîner pendant des années, "sans que le deuil ne soit fait". On peut être inconscient de ce problème. C'est en discutant avec un interlocuteur compétent que l'on peut mettre à jour cela et enfin commencer le processus du deuil. Dans certains cas, on peut faire le contraire : reconquérir ce qui manquait. Si par exemple une personne vous manquait inconsciemment mais elle est toujours en vie et vous pouvez prendre l'initiative d'aller la voir, aucun deuil n'est nécessaire. De même, si vous étiez névrosé parce que vous n'avez pas réalisé une chose, il est peut être toujours possible de la réaliser, ou de réaliser quelque chose d'équivalent.

Les ouvriers qui sont choqués lorsqu'ils apprennent qu'ils vont devoir changer d'emploi (parfois on les voit littéralement trembler) sont des ouvriers pour qui leur outil occupait une place pilier dans leur image d'eux-mêmes. Le changement d'outil est un rupture importante de l'image. Ils s'identifiaient à l'outil, l'outil faisait partie d'eux-mêmes. Au contraire un ouvrier qui s'identifie comme étant un ouvrier, aura beaucoup moins de problèmes. Qu'il soit un ouvrier qui fait ceci ou un ouvrier qui fait cela, ce sera d'importance secondaire. Si quelqu'un vous dit "Je suis compagnon du tour de France", vous pouvez être sûr que changer d'outil ne lui pose pas de problème.

Si un SDF refuse d'aller voir un médecin, c'est parce que dans son image de lui-même il ne le vaut pas. La société a gravé en lui le fait qu'il ne vaut rien, ne mérite rien. Il agira en fonction de cette image, jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Toucher quelqu'un est un levier très puissant pour modifier l'image qu'il a de lui-même. Les récepteurs de la peau sont connectés directement à des parties fondamentales du cerveau. C'est pour cela qu'un viol peut être aussi destructeur. C'est également pour cela que des psychothérapeutes qui touchent leurs patients peuvent obtenir des résultats très important dans la reconstruction de leur image.

Les personnes qui tiennent à un objet, un animal, le font généralement parce qu'ils intègrent cet objet ou cet animal à l'image d'eux-mêmes. Rares sont les personnes qui aiment réellement un animal, qui le considèrent comme une image séparée, différente, avec laquelle ils communiquent.

Un des tests principaux pour les astronautes est "Dites de vingt façon différentes qui vous êtes.". Ce test est destiné à éviter que ne se reproduise une histoire comme celle qui suit. Tout au début de l'histoire de l'astronautique, un professeur d'université américain a organisé un vol en ballon stratosphérique. Un de ses assistants était le passager du ballon. Il y avait un poste de radio à bord, et de nombreuses expériences à réaliser. Le ballon a décollé. Quand il a atteint les hautes altitudes, le contact radio a été rompu. Les personnes au sol ont été très inquiètes. Quand le délais au bout duquel les expériences auraient du être terminées fut écoulé, le ballon n'est pas redescendu. Tout le monde était convaincu qu'un accident grave était arrivé. Au bout de plusieurs jours le ballon est tout de même redescendu. L'assistant était vivant. Il a expliqué ceci : "Lorsque je suis arrivé à haute altitude, j'ai vu le vide, le noir de l'espace. La terre, ronde avec les nuages, était tout en dessous de moi. Je n'ai plus pu bouger. Je vous entendais m'appeler à la radio, mais je ne pouvais réagir. Ce n'est qu'au bout de plusieurs jours que j'ai réussi à bouger pour actionner le mécanisme de descente du ballon."

Les sectes nous offrent une image de nous-mêmes plus simple, plus facile à appréhender.
L'image que nous pouvons construire de nous-mêmes est fortement influencée par notre culture ; tant par notre type de culture que par notre niveau culturel. Nous ne pouvons pas avoir une image de nous-mêmes nous montrant des choses que nous ne connaissons pas. En d'autres termes : pour pouvoir voir qu'on est quelque chose, il faut savoir que cette chose existe. La culture nous pousse autant à remarquer que nous sommes quelque chose qu'à nous faire fournir les efforts nécessaires pour devenir de nouvelles choses.

Les valeurs du milieu culturel dans lequel nous vivons auront une très grande importance pour l'image de nous-mêmes que nous construirons. Nous jugerons et choisirons cette image en fonction de ces valeurs. C'est pour cela que certains parents choisissent les fréquentations de leurs enfants avec tant de soins.

Les insultes sont blessantes parce qu'elles attaquent ce que nous avons de plus précieux : l'image de nous-mêmes. Dans certain pays, les insultes méritent la mort. L'étude de l'impact des diverses insultes est riche d'enseignement. Par exemple le fait que les insultes attaquant la mère soient les plus mal prises indique que pour l'insulté sa mère occupe une place importante dans l'image qu'il a de lui-même; "je suis le fils de ma mère".
Les chaînes, ce sont les choses auxquelles on est lié pour conserver une image se soi . Le remords vient de la volonté de reconstruire une image de soi acceptable. On est prêt à passer plusieurs années en prison pourvu que l'on puisse retrouver une bonne estime de soi.

Certains payent très cher pour "aller au bout eux-mêmes". C'est à dire peaufiner l'image qu'ils ont eux-mêmes, la développer et la structurer. Affronter la réalité ! Trekking, saut en parachute... tout est bon. Quand cette démarche touche à des domaines importants comme la famille ou le travail, on peut alors utiliser l'expression consacrée "se réaliser". On peut "se réaliser" en devenant maman, par exemple. On devient quelque chose de précis, quelque chose de très important.

Les publicitaires nous vendent une image de nous-mêmes. "Si vous achetez cette voiture, vous êtes intelligent." "Si vous nous versez 1000 FB, vous êtes gentil." Nous sommes prêts à dépenser des fortunes. Celui qui n'a pas besoin de cela pour avoir une image de soi fera de grosses économies.

Les gens ont parfois tendance à n'acheter que des choses chères. La raison en est que ces choses sont destinées à rehausser leur image d'eux-mêmes. Dès lors ils préfèrent ajouter à leur image quelque chose qui a de la valeur. Ils veulent aussi, plus généralement, se construire une image qui reflète le fait qu'ils méritent des choses chères. Ceux qui ne tombent pas dans ce système ont atteint un haut niveau de sagesse.

Certain publicitaires nous vendent des produits en utilisant des images diamétralement opposées aux effets de leurs produits. Regardez le physique sain et sportif des mannequins sur les pubs de cigarettes et de boissons sucrées. Puis regardez quels sont les effets de ces produits sur leurs consommateurs : peau détruite, mobilité amoindrie voire très amoindrie, obésité, fatigue mentale récurrente... pour ne citer que les séquelles visibles.

La violence des grandes villes est d'abord un affrontement d'images de soi. La violence physique n'est qu'un moyen de véhiculer les lutes d'images. Un nain qui a une bonne image de lui-même triomphera d'un colosse mal dans sa peau. Les pratiquants d'arts martiaux le savent bien : s'ils apprennent à se battre, c'est surtout pour être plus sûrs d'eux-mêmes, savoir s'affirmer, et ainsi savoir éviter le combat. Certaines écoles n'enseignent quasiment plus de gestes de combat, hormis quelques réflexes de base, et mettent l'accent sur l'affirmation de la personnalité. Il en va de même pour les tags. Ils sont vécus comme une violence par les autorités de la ville et les propriétaires des biens dégradés. Mais de la part des tagueurs ils s'agit davantage d'une tentative naïve de s'affirmer, d'intégrer l'image de la ville à eux-mêmes et d'imposer leur image à la ville.

Une façon très efficace de permettre à quelqu'un de prendre conscience du fait qu'il existe est de le toucher. C'est en caressant adroitement, en faisant vibrer chaque partie du corps de votre amant, en attestant de son existence, en montrant la gourmandise qu'il vous inspire, que vous permettrez à son subconscient de construire une solide image de soi charnelle. Il en résultera une grande plénitude.

La méditation permet d'harmoniser, simplifier, rationaliser et généraliser son image de soi. (Un terme décrivant ce processus est "relaxation", dans le sens que lui donnent les mathématiciens, physiciens et certains informaticiens.)

Le rire est signe du fait que l'on construit l'image de soi. Un enfant qui rit est un enfant qui est en train d'intégrer son environnement à l'image de lui-même. Un nourrisson rit quand sa mère le cajole parce qu'en le touchant elle construit sa relation avec lui, elle s'intègre à l'image qu'il a de lui-même. Le rire peut aussi servir de signal de "trop-plein". Si sa mère le cajole trop fort et trop longtemps, le rire deviendra forcé, plaintif, signalera que la mère en fait trop, qu'elle sature les circuits. Une blague nous fait rire quand elle touche un point paradoxal, litigieux ou dissimulé de notre image de nous-mêmes et du monde. La blague nous amène à travailler sur ce point paradoxal et peut-être nous amène à la résoudre ou à mieux le classer.

Le fait de pleurer est le signe d'un "effondrement" de l'image de soi. Quelque chose a disparu de notre image de nous-mêmes.

Les images de lui-même et du monde qu'un individu se fait dans sa tête correspondent à plusieurs plans différents : plusieurs "photos" différentes. Ces "plans" ont la particularité d'être partiellement superposables et interchangeables. Quelque chose qui est présent dans un plan peut entraîner l'apparition de quelque chose de correspondant dans un autre plan. Prenons par exemple le cas d'une vieille dame qui vint en consultation chez son médecin parce qu'elle avait le bras droit paralysé. Grâce à quelques tests le médecin détermina que le problème ne venait pas d'une problème physique. Le système nerveux n'avait subit aucun dommage. Le problème venait du fait que cette dame avait perdu son mari quelques mois auparavant. Il comptait beaucoup pour elle. Il occupait une place importante dans l'image que la vieille dame avait des personnes qui l'entourent, sa "photo de famille". Mais elle a aussi une photo "d'elle-même", d'elle entourée de parties de son corps : ses bras, ses mains, ses jambes, ses seins, son ventre sa bouche... La disparition de son mari de la première "photo" s'est répercutée sur la deuxième "photo" par une disparition de l'image de son bras droit. Elle n'avait plus de bras droit. Donc elle ne pouvait plus le sentir ni le faire bouger. Son médecin l'a orientée vers un psychiatre. (Vous connaissez certainement l'expression "Les bras m'en tombent". Elle signifie que l'on ne se sent tout d'un coup plus capable d'intervenir, même s'il ne s'agit pas d'une intervention manuelle.)

Un de mes amis est un vieux monsieur dépressif. Il juge qu'il a râté sa vie. Il se fait beaucoup de reproches, il n'a plus d'espoir. Mais il ne parle presque jamais de lui-même ; il parle du Monde. Il projette son image de lui-même sur le Monde entier. Il dit que tout va de plus en plus mal. Il monte en épingle tous les faits divers tristes. Quand L'ONU ou une autre organisation prend une initiative, il dit d'une voix cassante que cela ne sert à rien, que c'est voué à l'échec. Ses rares moments d'enthousiasme sont quand il prône une politique fasciste. Il dit alors qu'il faut discipliner les gens, qu'il faut être très sévère. C'est la politique qu'il aurait voulu appliquer à lui-même. Il croit inconsciemment que s'il avait su faire cela il serait arrivé à des résultats.

Nous condamnons ou rejetons des personnes à qui nous attribuons des défauts ou des fautes que subconsciemment nous nous reprochons à nous-mêmes. A l'inverse, nous essayerons d'attirer à nous des personnes auxquelles nous attribuons des qualités qui en réalités nous sont propres. Tout est une question de télescopage entre l'image de nous-mêmes et les images que nous avons des autres.

En thermodynamique, l'énergie que contient un système dépend de la quantité d'information qu'il contient. Si les molécules sont ordonnées, on pourra en retirer de l'énergie. Si par contre elles sont dans le désordre, on ne pourra en retirer aucune énergie. On peut prendre cela comme image pour l'effet de l'image de soi sur une personne. Si une personne a une image de soi simple et précise, ordonnée, elle aura beaucoup d'énergie pour réaliser ce que cette image de d'elle-même lui dicte. Si par contre son image de soi est un mélange touffu d'informations contradictoires, elle se sentira vide et sans énergie pour faire quoi que ce soit.

Ce qui rend un masochiste heureux quand il reçoit des coups est peut-être le fait que ces coups "renseignent" son subconscient sur l'existence des différentes parties de son corps. Cela lui permet "de prendre conscience de son corps", donc de s'en faire une image. (D'après certains auteurs, une séance réussie implique des sévices sur presque toutes les parties du corps.) Dans ce cadre ci la douleur et le plaisir auraient donc la même fonction : permettre de sentir que l'on existe.

L'image de soi est plus importante que tout. Lors des événements de mai 68, qui remettaient en cause la structure de la société, les sociologues se sont amusés à constater que les "bourgeois" avaient beaucoup moins peur de perdre de l'argent que de perdre leur position. S'ils étaient "directeur de ceci" ou "membre de cela", certains d'entre eux étaient prêts à tout pour garder ce titre ou cette situation.

Le succès des entreprises américaines tient en partie au fait qu'en leur sein la position et le rôle de chacun sont mieux définis et plus fonctionnels. Leur sens de l'organisation a des répercussions directes sur l'identité de chaque membre de l'entreprise, lui donne de l'énergie. A l'inverse, les systèmes qui définissent strictement le rôle de chacun sans tenir compte des pulsions et des aptitudes réelles des personnes, voient les personnes s'étioler, s'effondrer comme des pantins.

"Qui sommes-nous, d'où venons-nous, où allons-nous ?" Ce sont là les préoccupations de sciences comme l'ethnologie, l'histoire, la philosophie... Elles sont véhiculées par les arts, la littérature... Toutes ces disciplines sont donc d'une importance fondamentale.

Image de soi... tout est image. La culture véhicule un grand nombre d'images. Qu'un héros de roman ou de bande dessinée soit un pirate, un détective, un pilote d'avion... il est une image, une représentation qui véhicule certains concepts, certaines pulsions, certaines émotions. Les acteurs les plus appréciés du publics ne sont pas toujours ceux qui jouent le mieux ; ce sont ceux qui permettent à chaque personne du public de s'identifier au personnage qu'ils jouent. Ce sont par exemple des acteurs dont le visage a des traits peu marqués, ou dont le jeu est sobre.

Les vantards sont généralement des personnes qui ne savent pas faire grand-chose. Ceci ne veut pas dire que quelqu'un d'efficace est nécessairement quelqu'un d'effacé. Une enquête a révélé que les cadres d'entreprise qui se disaient créatifs l'étaient réellement. Il y a un juste milieu. Celui qui se vante trop et celui qui se déprécie ont ceci en commun qu'ils ont un problème avec leur image d'eux-mêmes.

Quand on avale une substance indésirable, si le corps s'en rend compte il déclenche immédiatement le mécanisme du vomissement. Il se passe la même chose si nous voyons quelque chose d'atroce, que nous voulons rejeter à tout pris. Quelqu'un qui voit un cadavre mutilé, par exemple, s'il n'a pas l'habitude, vomira quelques minutes plus tard.

Toute Personne a inconsciemment l'impression d'avoir une protection autour d'elle. Cela fait partie de son image de soi. Un peu comme les "boucliers d'énergie" dans certains romans de science fiction. C'est cette "protection" qui nous donne de l'assurance dans la vie, qui fait que nous allons gaiement de l'avant. Certaines choses améliorent l'image que nous avons de ce "bouclier". Par exemple la pratique d'un art martial ou le fait d'avoir une famille unie. Ou un simple gri-gri. D'autres choses au contraire détériorent cette image. Comme le fait d'avoir été passé à tabac ou d'avoir été l'objet d'injures. Dans la Rome Antique, il était interdit de frapper un Citoyen de Rome. Son "bouclier" était respecté, même dans un interrogatoire de police. Par contre il était presque recommandé de frapper les esclaves. Il y avait des circonstances où on les frappait "à tout hasard". Cela faisait partie de la négation de leur statut d'être humain, pour les conforter dans le statut d'objet, sans bouclier. Quand deux personnes s'aiment, elles ouvrent leurs boucliers l'une envers l'autre, pour pouvoir fusionner. Cela demande du temps et suit une certaine procédure.

Un enfant sera motivé par ce qui le valorise, ce qui lui donne une bonne image de lui-même, de l'estime de lui-même. S'il obtient de bons résultats dans une matière à l'école et qu'il est félicité et estimé pour cela, il sera motivé et travaillera volontiers cette matière. Par contre s'il obtient de mauvais résultats et est critiqué voire injurié, il se désintéressera complètement de cette matière, éprouvera toujours un profond ennui à la travailler. Je connais deux cas de personnes qui étaient très bonnes en mathématiques et qui un jour ont été déconsidérées à tort par leur professeur. Dans un cas le professeur a refusé d'entendre les réponses proposées par l'élève parce qu'il savait qu'il était très fort et voulait entendre les autres élèves. Dans l'autre cas l'élève voulait faire un sans-fautes aux interrogations pour avoir un 100% sur son bulletin, mais le professeur l'a compris et lui a enlevé un point une fois sur deux à chaque interrogation ou devoir, pour qu'il tombe à 95%. Dans les deux cas la moyenne des deux élèves a chuté dramatiquement. (D'autres motivations pour les enfants sont le jeu, l'envie de faire plaisir, la compréhension de l'utilité de la matière, la routine, le mimétisme...)

Les mythes fondateurs sont souvent anthropomorphistes. Ils racontent que les êtres qui ont créé le Monde ressemblent à des personnes ou à des animaux. Cela permet à celui qui entend ces mythes de ce faire une image du Monde qui ressemble à une image de photo de famille. Ainsi il se sent au sein de ce Monde en partie comme au sein de sa famille. Il intègre le Monde à son image de soi.

L'image de soi peut varier au fil de la journée ou suivant l'endroit où l'on se trouve. Car des faits, des décors et des souvenirs différents se présentent à notre esprit. La chimie interne de notre cerveau varie aussi au fil du temps et nous pousse à des états d'esprit et à des souvenirs différents. Le cerveau est un ensemble très complexe, capable de synthétiser des images de soi très différentes.

Si on a l'impression que l'image de soi est cohérente et qu'elle est en accord avec le monde qui nous entoure, on en éprouvera du bien-être. Pour acquérir le bien-être, faut-il changer son image de soi ou faut-il changer le Monde ? Faut-il avoir l'image de soi la plus diverse possible, pour avoir de nombreuses sources différentes de bien-être ? Ou faut-il chercher à avoir l'image de soi la plus simple possible, afin qu'il soit facile de la rendre cohérente au Monde ? Chaque personne, chaque système culturel y répond à sa façon. Le bonheur naît de la réalisation de ce qui était déjà dans l'image de soi. Une jeune fille ressent un immense bonheur de trouver un jeune homme qui lui permet de réaliser cette image de couple qu'elle avait en elle depuis toujours. Le rire naît de petits tiraillements de l'image de soi : de la découverte de petits paradoxes, de raccourcis, de petites choses cachées... que ce soit une blague qui surprend ou une plume qui chatouille. La peur naît de choses qui peuvent modifier l'image de soi. La terreur naît de choses non répertoriées dans l'image de soi. La nausée naît de modifications de l'image de soi jugées mauvaises. Les cellules de l'organisme humain contiennent en permanence des molécules qui causent la nausée quand elles sont libérées dans l'organisme. Si des cellules sont détruites de façon anormale, brutale, par quelque bactérie, virus ou poison que ce soit, les molécules de nausées se déversent des cellules détruite et rendent la personne malade. Ainsi la personne est obligée de se mettre à l'abri et de s'interroger sur la cause de la nausée, de se poser des questions sur ce qui a attaqué et menace de modifier son corps, sur ce qu'elle doit essayer d'éliminer et d'éviter à l'avenir. Un événement externe, que la personne rejette de son image, peut aussi causer la nausée. Comme par exemple la vue d'un cadavre ou une odeur de vomi.

L'Astrologie, qui prétend déduire la personnalité d'une personne à partir de la position des astres, est considérée par les scientifiques comme une grosse farce. On a essayé de vérifier si l'Astrologie était fondée, par exemple en comparant la date de naissance et le métier d'un grand nombre de personnes. Si les astrologues disaient vrai, alors les personnes nées à telle ou telle date devraient plutôt exercer tel ou tel type de métier. Le résultat est qu'il n'y a aucun rapport. Les astrologues disent des bêtises. En fait on a tout de même trouvé un rapport, mais uniquement chez les personnes qui croient fermement dans l'Astrologie. Forcément : elles arrangent leur vie en fonction de ce que leur dit l'Astrologie. L'Astrologie peut donc influencer les gens. Mais les astres, eux, n'ont aucune influence sur les gens. Pourtant je trouve que la lecture d'un livre d'Astrologie est intéressante. Parce que c'est un catalogue d'un grand nombre de caractères humains. On peut y apprendre des choses sur ce qu'on peut être ou ce que les autres peuvent être. Cela permet d'étoffer son image de soi et des autres.

L'image de soi est ce qui entoure l'individu. C'est le paysage autour et à l'intérieur de lui. C'est aussi les images de soi passées et futures. La culpabilité est le souvenir d'avoir fait de mauvaises choses. Ces choses sont du passé mais elles font toujours partie de l'image de soi. L'inverse est la fierté : le souvenir d'avoir fait de bonnes choses. Ces souvenirs de honte ou de fierté peuvent même se transmettre de génération en génération. Certains nobles culpabilisent encore aujourd'hui du fait qu'il y a huit siècles l'un de leurs ancêtres a fui lors d'une bataille. L'espoir provient des images de soi que l'on imagine dans le futur. La peur provient des images de soi que l'on arrive pas à imaginer.

On a peur de ce qu'on ne comprend pas. On a aussi peur que de ce qui ne nous comprend pas. Dans les deux cas il y a un danger potentiel. Nous cherchons donc à avoir une image de ce que nous rencontrons. De même nous préférons que les personnes que nous rencontrons aient une image de nous : de nos besoins, de nos préoccupations... Nous ne sommes en sécurité que si elles développent en elles une image de ce que nous sommes. Ici le mot "comprendre" prend son deuxième sens : contenir. Une personne qui nous comprend contient en elle une image de nous-mêmes. Bien sûr si cette personne est malintentionnée il faut éviter qu'elle nous comprenne : il faut éviter qu'elle ait des renseignements sur nous qu'elle pourrait utiliser pour nous nuire. A moins que nous ne soyons bien armé. Auquel cas la personne malintentionnée comprendra en nous comprenant qu'il vaut mieux nous laisser en paix. C'est le sens de la version occidentale des arts martiaux orientaux. En toute généralité, une personne qui nous comprend réellement est rarement un ennemi.

Pour bien soigner un patient, un médecin doit avoir en lui une image la plus complète possible du problème du patient. C'est ainsi qu'il peut appliquer ou inventer une thérapie adéquate, trouver les bons remèdes... Souvent le simple fait que le médecin ait construit en lui cette image du problème du patient, suffit pour que le patient se sente mieux ou même aille réellement mieux. C'est pour ces raisons que les vrais médecins prennent le temps de parler avec leurs patients. Ils écoutent et retiennent aussi des choses qui n'ont pas de rapports directs avec le problème de santé.

Beaucoup ne comprennent pas que l'on puisse s'intéresser à des oeuvres artistiques qui parlent de violence et de démons. Comment peut-on écouter un chanteur qui hurle que des marées de démons sanglants vont déchiqueter l'humanité ? Pire : il dit que ces démons y prennent du plaisir et qu'il faudrait faire comme eux. Ne vaut-il pas mieux parler d'amour ? Les petites fleurs ne sont-elles pas de meilleures sources d'inspiration ? La réponse est que dans notre image de nous-mêmes il y a toutes ces choses en même temps : les monstruosités autant que les douceurs, les nôtres comme celles des autres. L'Art de l'horreur est tout aussi nécessaire que l'Art de la douceur. l'Horreur apporte beaucoup de choses à ses auditeurs. Tout d'abord une consolation, un réconfort. L'horreur, nous la vivons au quotidien. Même quand il n'y a ni coups ni sang il peut y avoir beaucoup de violence dans nos relations avec les autres, avec nous-mêmes et avec nos souvenirs. En évoquant ces symboles de l'immonde l'artiste reconnaît l'existence de nos problèmes. Ils nous permet de les faire bouger, de les penser avec plus de communication. Il apaise nos tensions et nous rends plus sereins. Ensuite, l'artiste nous permet de sentir les pulsions de destruction qu'il y a en nous. Ces pulsions ne sont pas mauvaises en elles-mêmes. Dans la vie il faut savoir détruire, parfois. Ces pulsions sont dangereuses. Il faut donc apprendre à les connaître. Il faut les vivre de façon virtuelle grâce à l'artiste. Ainsi le jour où nous serons face à une situation réelle nous serons en terrain connu, nous aurons la possibilité de moins nous laisser dominer par nos pulsions. Nous serons une personne plus saine, qui ne cède à ses pulsions qu'avec mesure, après un débat intérieur entre toutes les pulsions. Cela nous rends efficaces et constructifs. En réalité les pulsions de douceur peuvent être dangereuses aussi. Une mère qui couve trop ses enfants ou un homme qui court trop les femmes peuvent causer des désastres. L'important est de maintenir un équilibre entre les symboles. Il faut apprendre et développer de concert toutes les pulsions et les sentiments. Dans notre société certains ne voudraient plus avoir que des symboles de douceur : un Dieu bon et sage, des personnages de dessin animé sympathiques... Les méchants sont présentés comme attendrissants ou pas réellement dangereux. C'est une propagande qui cause des malheurs effroyables. Si on ne parle que de douceur, on la banalise et on réfute l'existence de l'horreur. Donc les deux notions deviennent floues. Cela vide les individus de leur substance, les rend manipulables et dangereux. C'est une des causes des guerres interminables que nous connaissons. Un chanteur punk qui prône l'ultra-violence et le meurtre généralisé est un contrepoison à cette propagande. Il contribue à rétablir la sanité. Le Gouvernement Belge aurait-il retiré ses paras du Rwanda s'il avait eu une bonne culture de l'Horreur humaine ? Quelques tableaux de violence sanglante accrochés dans les couloirs du Parlement Belge auraient peut-être évité le Génocide de 800.000 Rwandais.

L'image que nous nous faisons d'une chose peut grandement influencer la façon dont nous allons vivre cette chose. Si nous sommes convaincu (si on nous a convaincu) que nous allons sentir un malaise si une personne nous touche, nous risquons effectivement de ressentir ce malaise si elle le fait. Mais si nous sommes convaincu que cela va nous faire du bien, si la même personne nous touche nous pouvons en ressentir beaucoup de bien-être. Il y a là tout un jeu de persuasion ou d'endoctrinement. Certaines personnes ont été persuadées pendant toute leur enfance qu'être touché par une autre personne est mal. Cela entraîne des conséquences graves. Entre amants il y a tout un jeu pour persuader l'autre de ce qu'on veut lui faire ressentir avant de faire de faire le geste qui va effectivement causer cette sensation. Une même attitude ou un même geste peut aussi bien servir à punir une personne qu'à lui faire du bien. Tout dépend du contexte. La communication prend là une grande importance. Une personne peut mal prendre un geste alors que ce geste était destiné à faire du bien. Il vaut donc mieux s'expliquer avant de faire le geste, au plus tard après pour s'excuser. Un geste peut ne pas faire le bien que l'on voulait. On peut se tromper de bien et cela aussi peut créer des quiproquos.

Un lecteur me demande quelle est la différence entre l'image de soi et l'estime de soi. A la base, l'image de soi est absolue. Par exemple si on a un jour volé un pain, ce fait est inscrit dans l'image de soi. Il n'y a pas à discuter : un vol a eu lieu. Mais cela peut avoir des interprétations très différentes dans l'estime de soi. On peut penser qu'on est quelqu'un de bien, parce qu'on a volé ce pain pour donner à manger à une personne qui avait faim ; on a une bonne estime de soi. Au contraire, on peut penser qu'on n'aurait jamais dû commettre ce vol, ce délit inexcusable. Alors on a mauvaise estime de soi, on se sent dans la peau d'un méprisable voleur. L'estime de soi dépend de l'interprétation que l'on fait des choses. Elle dépend donc de notre éducation, de notre système culturel, de notre intelligence... Elle peut changer au fil du temps : on peut être fier d'avoir fait une chose et un peu plus tard en ressentir de la honte. L'estime de soi est subjective. Un gangster peut avoir une haute estime de lui-même parce que des courtisans lui font sans cesse des compliments. Un honnête travailleur peut avoir l'impression qu'il ne vaut rien parce que son patron a décidé de le persécuter. L'estime de soi se construit à partir de l'image de soi. Mais deux personnes qui ont des images de soi semblables, peuvent avoir l'une une haute estime de soi, l'autre une mauvaise estime de soi...

La notion de choix est importante dans l'image de soi. Dans la vie, il arrive des moment où on peut faire des choix. Par exemple le choix de faire un certaine type d'études, ou d'émigrer, ou d'épouser une personne... Faire un choix, c'est accepter de mourir en partie. Avant de faire le choix, on avait plusieurs voies possibles ; plusieurs images de soi potentielles. Après le choix, il ne reste plus qu'une seule image de soi. Si la choix a été fait par une personne consciente et mature, il sera assumé. Elle pourra accepter sans souffrir les conséquences pénibles de son choix. Elle fera fructifier ses bons côtés. Tout lui semblera à sa place. Hélas parfois des choix sont faits par des personnes qui ne sont pas encore capables de les comprendre. Ou bien la personne ne fait aucun choix, on le fait pour elle. Dans ces cas-là, la suite est souvent désastreuse. On voit bien chez ces personnes qu'elles n'étaient pas prêtes pour faire ce choix. Elles continuent à explorer les autres voies, à en parler avec regret... elles ne gèrent pas correctement la voie prétendue choisie. Pour faire de vrais choix, il faut savoir les choses. Il faut avoir de la culture, de la maturité. (Certaines personnes prennent cela comme prétexte pour faire de choses discutables. J'ai par exemple vu le cas d'un homme qui explique à sa femme qu'il n'est pas prêt pour la vie conjugale, qu'il doit encore faire des expériences avec d'autres femmes... Il ne sera jamais prêt pour la vie conjugale. C'est un égoïste, qui ne fait que s'amuser avec les autres femmes et n'apprend rien.)

Un ami et moi-même ne prenons jamais de photos des paysages ou des personnes que nous rencontrons. Ce qui nous intéresse, c'est de faire entrer ces paysages et ces personnes en nous. Nous voulons nous construire des émotions qu'ils représentent. Si nous prenons une photo, que nous mettons ensuite dans un album ou dans un cadre au mur, l'émotion reste en l'air, elle est perdue. Quand nous sommes face au paysage ou à la personne, nous savons que c'est le moment où nous devons tout prendre, nous intéresser pleinement. Cela ne veut pas dire que nous sommes contre la photo. Nous adorons les peintures ou les photos faites par de petits ou de grands artistes, si ces oeuvres contiennent des émotions. Il nous arrive aussi de garder un petit objet qui est lié à un événement ou à une personne. Cet objet n'est pas la chose, il n'en est pas non plus une image. Il est un lien vers cette chose et nous seuls le savons. Parfois, nous passons nos petits objets en revue pour revivre nos émotions.

Le courage est le fait d'accepter un changement ou un risque de changement de l'image de soi. L'inconscience est le fait de ne pas se rendre compte que ce changement va avoir lieu ou qu'il pourrait avoir lieu.

Dans les tribus primitives on croit que toutes choses dans le Monde ont été créés par des êtres surnaturels. Ils ont des mythes pour expliquer chaque détail de ce qui les entoure. Par exemple tel amas rocheux est le résultat de l'affrontement entre tel et tel être surnaturels. Ils sont morts d'épuisement au combat, se sont effondrés et leurs corps se sont transformés en rochers. Pour expliquer que les serpents existent, un mythe peut par exemple raconter qu'en mourant tel être surnaturel a pondu des oeufs qui ont explosé et ont libéré les serpents qu'ils contenaient. Les membres d'une tribu peuvent se rendre là où cela a eu lieu et célébrer des rites pour obtenir qu'il y ait plus de serpents (ils sont très bons à manger). Ces lieux sont donc très importants pour ces tribus. En gros, les êtres surnaturels ont libéré des "essences" dans le Monde. Par exemple l'essence de l'arbre. Cette essence est contenue dans les graines. La preuve : il suffit de planter une graine pour qu'un arbre naisse. Pour influencer les essences, il peut parfois suffire de les invoquer. Répéter sans arrêt le mot "serpent" est sensé accroître le nombre de serpents. Inversement, un drame en Afrique est que beaucoup de personnes encore croient qu'en prononçant le mot "SIDA", le SIDA va venir. Donc ils interdisent de parler du sida, de faire de la prévention. Ce mode de raisonnement est sans doute encore présent dans les sociétés modernes, de façon inconsciente. Une photo de star contient l'essence des émotions que cette star véhicule. A plus forte raison les objets qu'elle a touchés dans sa vie. C'est peut-être la raison pour laquelle les objets personnels des stars s'achètent aussi cher. Si vous possédez un collier de perles ayant appartenu à Marylin Monroe, vous possédez l'essence de la séduction amoureuse... Marylin Monroe et un être surnaturel du passé, dont il ne reste que des graines. Cela explique peut-être aussi les prix élevés des objets d'art africain authentiques. (Au grand dam des ethnologues, qui ont besoin de ces objets authentiques pour analyser leurs symboles et tenter de comprendre les tribus. Les objets faux contiennent aussi des symboles mais mélangés n'importe comment, sans plus aucune signification.)

Lorsque de jeunes enfants passent à la télévision, le présentateur leur parle de leur famille et leur pose des questions sur elle. Il fait cela parce que c'est le centre d'intérêt principal des enfants et de familles qui regardent l'émission mais aussi pour recomposer l'image de soi de l'enfant et donc le rassurer. Il le met à l'aise pour qu'ils puisse par exemple chanter ou présenter quelque chose. Sur le plateau, sous les projecteurs et devant les gradins remplis de spectateurs, l'enfant perd ses repères. Le présentateur va donc le faire parler de sa famille, lui montrer où se trouve sa famille dans la salle, pour reconstituer son image de soi.
Le social

Celui qui impose leur image d'eux-mêmes aux autres est celui qui a le pouvoir.
Un encouragement, un compliment, sont des rehaussements de l'image de soi.
Vouloir imposer par la force une image de lui-même à quelqu'un est un crime.
Aider quelqu'un, de façon objective et constructive, à construire une image de lui-même, est certainement une des plus belles choses qui soit. Il ne suffit pas de donner des qualificatifs "tu es intelligent", "tu es beau"; il faut donner des éléments précis, argumenter, apprendre des choses à l'autre... c'est une activité très riche.

Faire des compliments à autrui est un acte très grave, très importante. Il ne doit pas être entrepris à la légère : nous prétendons influencer l'image que l'autre a de lui-même. C'est un art délicat impliquant une prise de responsabilité non négligeable.

Un très beau cadeau est d'apprendre à connaître une personne et développer en nous une image d'elle. Ainsi, en venant nous trouver, elle pourra retrouver cette image d'elle-même qu'elle aura peut-être perdue. Nous l'assurons également ainsi de survivre à la mort, à l'intérieur de nous. Ce développement d'une image d'autrui en nous peut aller très loin, surtout si nous associons l'image de l'autre à notre image. Combien de personnes ayant perdu un être cher ne se mettent pas à adopter son comportement, au moins pour un temps. Nous sommes l'autre, nous voyons au travers de ses yeux. Notre image est son image.

Faites attention à ce que implique ce que vous dites. Si par exemple vous terminez une lettre par "En vous présentant mes salutations distinguées et en vous remerciant pour votre réponse", en première lecture on peut en déduire que vous êtes très poli. En deuxième lecture on peut aussi déduire que vous partez du principe que votre correspondant doit répondre. D'après vous il est donc (en caricaturant) une machine à répondre dévouée à votre service, ce qui est quelque part un peu insultant. Bon nombre de conflits sont nés de la sorte sans même qu'aucune des deux parties ne comprenne pourquoi. Les couples, notamment, sont spécialisés dans l'échange de petites phrases anodines mais lourdes d'implications.

Nous pouvons être très énervants pour des personnes chez qui nous allons chercher une image de nous-mêmes. Il appartient à ces personnes de refuser poliment, éventuellement, mais surtout pas de nous démolir. Nous pouvons être mortellement haineux envers les personnes qui nous auront renvoyé une mauvaise image de nous.

La meilleure façon d'obtenir une chose est de la demander. Ainsi on offre une image de lui-même valorisante à celui qui donne.

Les amis sont très importants dans la constitution de l'image de soi. Ils vous aideront à la compléter, la peaufiner. Un véritable ami ne vous démolira jamais mais cherchera à vous permettre d'obtenir la meilleure image possible. Un faux ami vous renverra de vous-même une image trop flatteuse ou fausse. Un ennemi cherchera à détruire en vous votre image de vous-même, la déformer dans le mauvais sens.

La séduction est le fait de donner envie à quelqu'un d'ajouter une image à son image de soi. C'est un art. Par exemple, au moment ou on propose une image à quelqu'un pour qu'il l'adopte, il risque de comparer cette image avec sa propre image. Si cela lui donne l'impression que son image à lui est moins bien, il peut en souffrir et dès lors rejeter, nier, l'image qu'on lui propose. La séduction est un levier infiniment puissant. Dans les écoles, par exemple, si les professeurs étaient tenus de faire en sorte que la matière séduise les élèves, qu'ils aient envie de la faire vivre en eux, la face du monde en serait changée.

Si quelqu'un vous a inclus dans son image de lui-même, en tant qu'ami par exemple, puis qu'il s'avère que cette image ne reflétait pas la réalité, il peut s'en trouver extrêmement blessé. Il a en tête une photo de lui-même, sur cette photo vous vous trouvez à côté de lui, votre bras sur son épaule. Puis un jour il découvre que cette image est fausse : il se rend compte qu'en réalité vous ne faites pas partie de la photo. Alors, à l'endroit où vous étiez, il n'y a plus qu'un grand vide béant. Ce vide est une blessure, comme si on avait arraché un morceau de chair.

Si de quelque façon que ce soit vous venez à compromettre l'image de soi d'une personne, sa réaction sera de vous rejeter. Un exemple simple : supposons que vous remarquiez un automobiliste qui ne semble pas vouloir s'arrêter au moment où vous vous apprêtez à traverser une rue. Vous décidez alors de "lui donner une leçon" et vous traversez résolument la rue, l'obligeant à freiner sec pour ne pas vous écraser. Votre but est évident : vous voulez lui rappeler que son image de lui-même doit être "Tu es un automobiliste bienveillant, tu dois t'arrêter pour les piétons". Certains automobilistes le comprendront et vous seront reconnaissant de les avoir rappelés à l'ordre. Mais beaucoup d'autres le ressentiront d'une autre façon. Leur esprit entendra : "Moi piéton j'ai le pouvoir sur toi et je vais en profiter joyeusement." "Automobiliste maudit dont l'emploi du temps n'a pas d'importance." "La loi et la politesse te donnent l'obligation de t'arrêter et tu ne voulais pas le faire, beuh que tu es moche." Leur réaction sera de vous diaboliser. Ils deviendront dans leur tête de nobles chevaliers des temps moderne, adorateurs éclairés de la technologie et de la performance. Un seul ennemi : ces piétons sournois, lâches, qui ne méritent que la transformation en street pizza.

Quand vous rencontrez quelqu'un, il faut vous présenter : lui donner une image de vous-même qu'il peut assimiler.

Pourquoi brûlait-on les sorcières ? Parce qu'elles jetaient de mauvais sorts ? Si on approfondit la question on se rend compte que les "sorcières" étaient des femmes qui rendaient d'immenses services : elles soignaient les gens, elles les écoutaient, les conseillaient. Alors pourquoi les brûlait-on ? Et bien justement, on les brûlait parce que elles s'occupaient des problèmes des autres. Elles étaient le "réceptacle" de ces problèmes. Brûler une sorcière, c'est comme écrire ses problèmes sur un bout de papier et puis le brûler. C'est une purification de l'image de soi-même, le refus d'associer des malheurs à l'image de soi-même. Les problèmes étant inhumains, l'image que les gens ont de la sorcière est donc inhumaine. Lui faire du mal est une injustice abominable et une grande bêtise, mais cela ne leur vient pas à l'idée. De plus, faire disparaître les sorcières servait les intérêt des hommes d'église. Leur métier consiste à faire accepter leurs malheurs aux gens en associant leur image à celle de Dieu. Tout en utilisant des méthodes très différentes, ils sont en concurrence directe avec les sorcières. Comme elles sont plus honnêtes, beaucoup plus instruites et plus travailleuses, les sorcières leur faisaient une concurrence déloyale. Il n'y avait pas de problèmes entre les "sorcières" et l'Eglise au Moyen-Age, lorsque l'Eglise dominait tout. C'est à la Renaissance que les problèmes ont commencé, lorsque le pouvoir de l'Eglise s'est mit à vaciller.

Avoir des amis, c'est avoir une image de soi-même dont ces amis font partie. Etre seul, c'est avoir une image de soi-même vide. Le vide est angoissant. Certains sont tellement peu sûrs d'avoir des amis qu'ils sont obligés d'être en permanence en leur compagnie pour être rassurés.

Il y a deux sortes de fréquentations. Il y a ceux qui nous permettent de mieux savoir qui nous sommes. Par l'exemple qu'ils donnent, par leur culture, par leur affection, ils nous permettent de mieux nous définir nous-mêmes. Après une rencontre avec eux nous nous sentons sûrs de nous, pleins d'énergie pour entreprendre des choses. Et puis il y a ceux qui brouillent notre image nous-mêmes. Ils ne s'intéressent pas à nous, leurs questions créent la confusion en nous, ils ne nous apprennent rien d'utile. Après une rencontre avec eux nous nous sentons vides, perdus.

"Il me pompe mon énergie" se dit d'une personne qui rend notre image de nous-mêmes floue, contradictoire. Si en même temps nous lui avons permis d'avoir une image de soi plus claire, elle se sentira forte, pleine d'énergie. Si la rencontre a lieu entre personnes positives, cela permettra à chacun d'améliorer la qualité de son image de soi. Il y a création d'énergie. "Il me donne de l'énergie" se dit d'une personne qui nous aide à mieux nous définir, savoir qui nous sommes. Cela peut même se dire d'une personne qui ne dit rien, ne fait rien : si le calme dont elle fait preuve déteint sur nous, cela nous permet de réfléchir, de méditer, de nous retrouver nous-mêmes, savoir ce que nous avons à faire. Nous aimons beaucoup les acteurs de cinéma qui nous permettent de nous identifier à eux. Attention : on peut avoir une image de soi claire, en retirer beaucoup d'énergie, alors que cette image de soi est fausse et néfaste, nous mènera au désastre. Les meneurs d'hommes savent jouer là-dessus. Ils nous regardent droit dans les yeux, nous font un grand sourire confiant. Cela nous gonfle d'énergie. Ils nous disent que nous sommes supérieurs, que nous avons des droits. Ils nous présentent les choses d'une façon simple et compréhensible.

Un truc simple pour obtenir un service de quelqu'un est de lui dire qu'on pourrait demander ce service à quelqu'un autre. Cela fonctionne sur base de l'image "superman" que chaque occidental essaye d'avoir de lui-même. Superman règle les problèmes tout de suite et sans l'aide personne. Afin de préserver cette image de soi, il sera prêt à faire n'importe quoi. (Si la victime connaît le truc, on obtiendra l'effet inverse; ce sera plutôt une douche froide, parce que son image de soi se trouve ravalée au rang d'objet utilitaire manipulé.)

Les sociétés qui déprécient les individus ou qui les obligent à se déprécier eux-mêmes sont tout aussi peu performantes que les sociétés qui exaltent les performances des individus. L'Italie fasciste ou le communisme soviétique, par exemple, sont d'adroits mélanges de ces deux extrêmes. Avec les résultats que l'on sait.

Le libre arbitre consiste à laisser chacun construire son image de lui-même et le laisser juger par lui-même du résultat.

Dans certaines tribus primitives, l'individu fait totalement partie de sa tribu. A tel point qu'il n'existe presque pas lui-même. Son image de soi est strictement basée sur la tribu. Il n'existe pas, seule existe la tribu. Si par exemple un individu d'une tribu est grossier avec un individu d'une autre tribu, ce n'est pas une offense d'individu à individu, mais de tribu à tribu. Si un individu part travailler à l'extérieur pour envoyer de l'argent à sa tribu, il n'y a aucun risque qu'il garde l'argent pour lui-même. Cela n'aurait pas de sens.

Prendre quelqu'un dans ses bras, c'est former un seul corps avec lui. C'est la façon la plus complète de lui dire "Tu fais étroitement partie de mon image de moi-même" ou "Nous formons une seule image".

Il existe depuis peu aux Etats-Unis des associations de particuliers qui prétendent lutter activement contre les actes pédophiles en permettant à chacun de savoir si un pédophile habite dans son quartier. Parfois ils vont de leur propre initiative signaler le fait aux habitants. Ces méthodes simples, brutales et défoulantes sont très critiquées par les juristes et les psychologues. Le système correctionnel américain a mis au point un ensemble de thérapies et d'aides à la réinsertion qui donne des résultats très importants. Alors qu'avant jusqu'à 80% des pédophiles récidivaient, il ne s'agit plus maintenant que de 2 à 3%. Les initiatives des associations privées, par contre, n'auront virtuellement aucun effet (elles empêchent tout au plus les pédophiles de récidiver dans leur propre quartier), elles auront même l'effet inverse : en rejetant les pédophiles repentis de la société, elles ne peuvent que contribuer à faire rechuter certains d'entre eux, par désoeuvrement. Il est une chose qui doit être méditée : les membres de ces associations se font les chevaliers défenseurs de la pureté de l'enfance. Ils prennent leur pied en faisant cela. Mais un pédophile est également quelqu'un qui est séduit par la pureté de l'enfance, qui veut se l'approprier et qui en retire une jouissance. A la base, pédophiles et membres des associations ont le même moteur, le même maître. Les menaces que ces associations veulent faire peser sur les pédophiles sont très semblables à la façon dont un pédophile persécute sa victime. Tous deux souffrent d'un cruel manque d'éducation, ce qui les empêche de se rendre compte de ce qui est bien. Ils font des raisonnements courts et simplistes et se laissent mener par leurs pulsions. Les enfants qui auront grandit dans un monde gouverné par ces associations seront doublement prédisposés à devenir des pédophiles. La seule solution pour éradiquer la pédophilie est de créer un monde où les parents ont les moyens intellectuels et matériels de donner à leurs enfants tout l'amour qu'ils ont pour eux, où les enfants reçoivent une éducation riche et où ils auraient (enfin) le droit de vivre une véritable enfance, faite de jeux, de rêve et de développement de leurs capacités. Une personne qui a eu une telle enfance, dont l'enfance n'a pas été détruite par un système puritain, autoritaire et borné, n'a aucune tendance à tomber fou de passion devant un enfant. Il n'a aucun besoin d'essayer de s'approprier ce qu'il lui a pleinement été donné la possibilité d'être. En permettant aux pédophiles d'évoluer, d'apprendre, de comprendre, de devenir meilleurs, les psychologues leur donnent une chose qui leur avait été refusé pendant leur enfance. Les résultats ne seront jamais aussi bons que s'ils avaient pu le faire étant enfants, mais c'est dans cette attitude que réside la seule voie. Les psychologues sont une sorte de bons parents. Les membres des associations, eux, prétendent lutter contre les actes des pédophiles en leur infligeant un traitement qui ressemble très fort à ce qu'ils ont déjà subit étant enfant et qui est la cause de leur détraquement. C'est pour le moins surprenant...

Certaines personnes ont une vision très claire et très forte de ce qu'ils croient qu'est l'image d'eux-mêmes des autres. Ou de ce qu'ils voudraient que soit l'image que d'autres personnes ont d'eux-mêmes. Le simple fait de fréquenter ces personnes fait que ces images vont effectivement s'imposer à nous. Notre image de nous-mêmes va devenir ce que ces personnes rêvent. Nous allons ensuite nous comporter conformément à ce que dictent ces images. Cela peut être en bien (un directeur d'école qui se comporte en bon père de famille) comme en mal (un chef de secte ou un industriel esclavagiste). Parfois ce mécanisme a lieu de façon désordonnée, irresponsable. Par exemple quand le système judiciaire qualifie une personne de criminel alors qu'elle n'en est pas encore véritablement un. C'est à cause de cela qu'elle va le devenir.

Quand vous avez affaire à un groupe de personnes, vous devez tenir compte du fait que ce groupe forme une image complexe, comme le plan d'une machine. Chaque personne du groupe occupe une fonction donnée et a des moyens de communication donnés avec les autres membres. Le groupe fonctionne comme une machine, un système, et vous devez essayer de respecter cet ensemble. Chaque membre du groupe tire son image de soi de la position qu'il occupe au sein du groupe. Si par exemple un membre se définit comme protecteur des autres membres, vous devrez invoquer sa protection même quand c'est inutile. Sinon, c'est comme si vous introduisiez une poutrelle dans les rouages de la machine. Vous subirez une contre-attaque de ce membre - même si vous n'avez rien fait de mal par ailleurs - et aussi des autres membres.

Beaucoup de problèmes sociaux résultent du fait qu'une personne ou un groupe croît instinctivement qu'une autre personne ou un autre groupe n'apprécie pas ou son image de soi. Beaucoup de prétextes ou de motifs seront invoqués pour justifier les affrontements, en réalité tout revient à une appréciation d'image de soi réciproque. Le jeu social consiste à passer son temps à rassurer les autres sur l'appréciation que l'on a de leur image. Là aussi des moyens et des méthodes très diverses existent : inviter, flatter, offrir, parler, se préoccuper...

Dans les systèmes matriarcaux, les dettes n'existent pas. Car chacun reçoit ou prend les choses suivant ses besoins. Si une personne prend beaucoup plus de choses qu'une autre, c'est qu'elle en a besoin. De toute façon chacun est aimé et considéré et cela est bien plus important que les contingences matérielles. Par les caresses et les conversations chacun reçoit une bonne image de lui-même au sein de la tribu. Dans une société patriarcale par contre les dettes jouent un rôle angulaire. Chacun mémorise avec précision les dettes que d'autres ont contractés auprès de lui. Par exemple untel m'a emprunté un mouton, untel m'a emprunté cinq oeufs et à untel j'ai emprunté une hache. Ces dettes sont une composante très importante de l'image de soi. Une personne envers qui beaucoup de personnes ont une dette aura une image de soi ronflante. Dans son image de soi, il possède virtuellement toutes ces choses qu'on lui doit. Dans beaucoup de ces tribus on crée une dette implicite de tous les membres envers le chef. Même si le chef n'a rien prêté à personne, tout le monde à une dette inextinguible envers lui et doit donc régulièrement lui rendre un service ou lui donner quelque chose. Le remboursement d'une dette est un acte aussi important que le jour où elle a été contractée. Parfois le souvenir d'une dette remonté à plusieurs générations. Mais une dette ne doit pas forcément être remboursée avec un objet de même nature que l'emprunt. Le prêteur peut par exemple accepter de se faire rembourser d'un mouton par cinq poules. La valeur étant considérée comme égale. Ou une personne qui rembourse un mouton par trois poules ne devra plus que deux poules. Plus fort encore sont les transferts de dettes ; les remboursements croisés. Par exemple si une personne A a une dette d'un mouton envers une personne B, cette personne B peut aller trouver une personne C et lui proposer : "Donne-moi cinq poules et je transfère sur toi la dette de la personne A. C'est à toi qu'elle devra un mouton et plus à moi.". Ce système est très performant. Mais il devient rapidement très complexe. Les transferts de parts de moutons et de quartiers de poules finissent par former une comptabilité inextricable. Alors un des objets qui a cours dans la tribu finit par devenir une référence de dettes. Par exemple une petite rondelle de métal ou un coquillage. Au lieu de comparer la valeur de toutes les choses entre elles on se contente d'exprimer la valeur de chaque chose en fonction du nombre de rondelles de métal ou de coquillage qu'elle vaut. Cette référence unique simplifie grandement les choses. Si un mouton vaut dix coquillages et une poule vaut deux coquillages, alors un mouton vaut autant que cinq poules. Cela rend aussi beaucoup plus simples les remboursements croisés. Il n'est plus nécessaire de mémoriser qui doit quoi à qui et quelles sont les valeurs réciproques des choses. Chacun se contente d'avoir des rondelles de métal ou des coquillages dans sa besace. Et de mémoriser combien de rondelles de métal d'autres lui doivent. Si une personne désire un mouton ou tout autre objet, elle n'a qu'à l'échanger contre des rondelles de métal, sans se poser plus de questions. Ou éventuellement elle peut contracter un dette envers le vendeur de l'objet, mais simplement exprimée en nombre de rondelles de métal. Cela permet de faire des échanges à beaucoup plus grande échelle ou avec des inconnus et de garder des comptes précis. C'est donc une base des civilisations. Dans les civilisations évoluées, l'unité d'échange n'a même plus de valeur propre. Il n'est pas nécessaire d'utiliser un morceau de métal ou un coquillage qui ont une valeur en soi. On se contente de dire des chiffres, que l'on mémorise électroniquement ou en gardant des feuilles de papier imprimées dans un portefeuille. Au point de vue de l'image de soi, cet argent a quelque chose de magique. Car quand on possède des unités d'argent, à priori on peut les échanger contre n'importe quoi. Donc une personne qui a beaucoup d'argent peut considérer que virtuellement tout peut lui appartenir, que tout peut faire partie de son image de soi. Ce pouvoir immense fait de l'argent une drogue. Plus le chiffre de l'argent que l'on possède est élevé, mieux on se sent, car plus vaste est son image de soi potentielle. C'est malheureusement aussi un jeu de dupes. Car tout ne peut pas s'obtenir avec de l'argent. Et en accumulant de l'argent-drogue de façon anarchique certains détruisent la vie d'autres personnes. Comme toutes les drogues, l'argent nécessite un certain niveau de maturité, de responsabilité, des usages et des lois, un contrôle mutuel des individus, une prise en charge sociale. Et puis surtout il faut se rappeler du fait qu'une société moralement riche et équilibrée n'est ni matriarcale ni patriarcale. Elle est un savant mélange des deux. Donc il faut qu'existent des règles de transfert ou d'annulation de dettes qui ne relèvent pas de la comptabilité exacte mais du coeur, des sentiments humains. L'interaction du matriarcat et du patriarcat a aussi des aspects discutables. Par exemple l'échange de caresses matriarcales contre de l'argent patriarcal. Cela ne peut être évité, mais doit être socialement géré.

Quand vous payez un euro à votre épicier pour une barre chocolatée, vous attestez ainsi de son rôle dans la communauté. De même si vous allez demander quelque chose à un élu local ou un conseil à un vénérable vieillard. Vous permettez à ces personnes de vivre leur image d'eux-mêmes, d'être eux-mêmes. Parfois, sans le faire exprès, on peut faire une chose qui compromet ou menace de compromettre l'image de soi d'une de ces personne. C'est un peu comme si on la menaçait de mort. A l'inverse, certains escrocs font semblant de jouer le jeu de procurer leur image de soi à ces personnes, pour mieux les manipuler. Soyez sincères.

Le matriarcat veut que tous soient égaux, que l'on connaisse chacun, que l'on ne juge personne ni en bien ni en mal et que l'on fasse ce qui est bon pour chacun. Le patriarcat veut une hiérarchie bien définie, que la personnalité de l'individu n'entre pas en compte et que l'on soit châtié ou récompensé suivant ses actes. Confucius a tenté de faire un amalgame des deux. D'une part il a crée une hiérarchie stricte, basée sur l'âge. Les plus vieux commandent aux plus jeunes. La justification de ce système est la suivante : avant, dans le passé, les choses allaient mieux. Or, qui est le plus proche du passé, donc du paradis ? Les personnes âgées... CQFD. Ce système est carcéral pour les jeunes mais tout le monde est sensé s'y plier. Gouvernées par les vieux, les sociétés confucianistes n'évoluent pas. D'autre part Confucius à prôné l'absence de jugement de l'autre. Il faut à tout prix éviter d'atteindre à l'image de soi des autres. Aucune injure, ni même aucune critique, ne peut être proférée à l'encontre d'autrui. Il faut "respecter" à tout prix son prochain. Ainsi la paix sociale est garantie ; tout le monde est gentil avec tout le monde. Pour cette deuxième raison les sociétés confucianistes n'évoluent pas. Si personne ne peut être critiqué, personne ne peut s'améliorer.

Il y a une pulsion en nous qui nous pousse à faire assimiler notre image de nous-même à un maximum de personne. C'est pour cela qu'acquérir la célébrité est généralement considéré comme un grand succès. On mesure l'importance d'une personne au nombre de gens à qui elle a fait assimiler son image d'elle-même. Une anecdote amusante est celle d'un homme qui devait défendre un projet devant une assemblée. Au lieu de parler de son projet il a énuméré les personnes et les associations qu'il connaît. L'assemblée était captivée. A priori on essaye de se faire connaître d'autrui pour ses qualités. Mais certaines personnes qui n'y arrivent changeront de tactique et se feront connaître par des actions choquantes. C'est le résultat qui compte, le nombre de personnes qui ont entendu parler de vous.

Les groupes humains ont tendance à former une hiérarchie. Que ce soit dans une bande de jeune ou dans une entreprise, il y a le chef, les lieutenants et la valetaille. Il y a souvent beaucoup plus que ces trois niveaux et les rapports de force peuvent être de natures différentes entre personnes différentes du même groupe. C'est un édifice très complexe. Dans les société civilisées on essaye de rationaliser les choses en définissant clairement la structure de la hiérarchie. Beaucoup de membres du groupe essayent de monter dans la hiérarchie. Mais le plus important est de garder la position que l'on a. La plupart sont prêts à tout pour cela. Leur position est ce qui est le plus important dans leur image d'eux-mêmes. Menacer de les faire descendre dans la hiérarchie, cela peut être pire que de les tuer. Cette importance de la hiérarchie est telle que presque tout, même ce qui n'a rien à voir, va être mis au service de cette photo que constitue la hiérarchie. Si vous trouvez que des choses sont absurdes dans un groupe ou qu'on vous tient des propos bizarres, demandez-vous si cela ne sert pas tout simplement à marteler la forme de la structure hiérarchique. Par exemple si on vous demande de faire un travail inutile, cela peut être juste pour vérifier que vous acceptez votre place de travailleur ou pour vous le rappeler.

L'opinion de certaines personnes nous est nécessaire pour construire notre image de nous-mêmes. La vision qu'elles ont de nous, la façon dont elles nous ressentent, les émotions que nous leur procurons, coulent vers nous et s'étalent dans notre image de nous-mêmes, comme par un effet de vases communiquants. Parfois cette image nous est plutôt imposée par ces personnes, à notre insu ou à notre corps défendant. En bien ou en mal, ces personnes elles-mêmes font automatiquement partie de notre image de nous-mêmes. Si nous aimons cette vision qu'elles ont de nous, nous nous rapprocherons d'elles, pour que la sensation devienne plus forte. Ce désir de rapprochement peut être très intense, nous rendre comme fous. Nous aspirons de tout notre être à cette image qui coule vers nous. Par contre si nous voulons rejeter cette perception, nous allons rejeter ces personnes elles-mêmes. Nous allons partir ou les faire partir. Le rejet ne veut pas nécessairement dire que ces personnes sont néfastes. Cela peut simplement être dû au fait que nous désirons changer l'image que nous avons de nous-mêmes, là faire évoluer. La vision de ces personnes s'impose à nous et nous empêche de le faire.

Les images de soi des personnes et des groupes se modifient au fil du temps. Une chose importante pour les humains est de "acter" ces changements et ces nouvelles images. C'est le rôle des cérémonies, publications de bans, diplômes, déclarations, remerciements, procès...

Pour beaucoup de personnes, l'argent est de l'argent. Il n'a pas d'odeur. Quelle que soit la source d'une somme d'argent, elle peut servir à payer n'importe quoi. Ces personnes-là ont souvent des problèmes d'argent. Des personnes plus organisées considèrent au contraire que chaque source ou réserve d'argent est différente et est destinée à un usage différent. Certaines personnes par exemple considèrent que les revenus de leur emploi de fonctionnaire sert à payer les frais vitaux comme le loyer et la nourriture. Tandis que les sources d'argent plus occasionnelles comme des ventes ou des contrats servent à payer le superflu. Ils n'imagineraient jamais prendre un euro sur le compte du salaire de fonctionnaire pour s'acheter même un livre à deux sous. Ainsi, chaque source ou réserve d'argent touche à un aspect différent de leur image de soi : elle engendre des rêves différents. Parfois la ventilation est assez folklorique. On décide que tel argent servira à ceci et tel argent à cela, sur une base arbitraire. On voit ainsi des personnes riches à millions qui expliquent en toute sincérité et détresse qu'elles n'ont pas d'argent pour manger jusqu'à la fin du mois. C'est l'autre extrême. Pour bien faire, il faut accepter les transferts entre les comptes, mais de façon structurée : il faut établir des règles sérieuses, en débattre chaque fois avec toute la famille et considérer cela comme un événement fort. Considérer que des paquets différents d'argent sont intrinsèquement différents est une base de l'honnêteté. Pour un vrai employé de banque, l'argent de la banque n'a aucun rapport avec son propre argent, son salaire. Alignez devant lui un billet de banque de 5 € et trois de 10 €, tous issus du coffre de la banque. Ajoutez un cinquième billet de banque de 10 €, tiré de son portefeuille. Demandez-lui quel billet est l'intrus dans ces cinq billets, il montrera du doigt le billet de 10 € sorti de son portefeuille. Les tribus africaines ont assimilé ces distinctions en créant carrément des monnaies différentes. Il y a les pièces de monnaie pour payer la nourriture et les outils, il y a les pièces de monnaie pour payer l'achat de femmes et il y a les pièces de monnaie pour acheter des fonctions sociales. Ce sont des circuits monétaires indépendants, qui obéissent à des règles différentes.
Les conservateurs sont des personnes qui veulent que leur image de soi et celle de la Société reste inchangée. Les progressistes cherchent à améliorer ces images, ce qui implique de les changer. Ni le conservatisme ni le progressisme ne sont intrinsèquement bons ou mauvais. Ce qui compte est d'être progressiste ou conservateur quand il faut l'être. Inversement être conservateur ou progressiste peut nuire, quand c'est inapproprié.
La volonté d'appartenir à un groupe est un des instincts humains les plus puissants. C'est variable suivant les individus mais pour certains l'entièreté de leur emploi du temps et de leurs émotions sont centrés sur l'appartenance au groupe. Ils veulent séduire ou dominer les membres du groupe, devenir une figure incontournable du groupe... Ils sont prêts à des actes extrêmes s'ils devaient être menacés d'être rejetés du groupe. Le groupe peut ne rien leur rapporter et même leur coûter très cher, peu importe. Il y a une phase dans l'adolescence où l'individu se tend vers son groupe "d'amis". Ils apprend la vie en bande. Ensuite son comportement social est sensé devenir plus mature, plus équilibré.
Les lois font partie de l'image de soi d'une personne. Ce sont ses limites, les frontières de son terrain d'action. Il est bon que ces lois soient bien définies afin que la personne ait une image nette des frontières. Si les lois sont imprécises ou changent tout le temps, elles deviennent floues pour la personne et lui causent un stress.

Un enseignant est une personne qui joue un rôle important pour la construction de l'image d-eux-mêmes des enfants. Certains enseignants négligent complètement ce rôle, d'autres exagèrent et imposent aux enfants des images déplacées dont ils mettent des années à se défaire. Certains enseignants se font respecter en menaçant les enfants de leurs donner des images négatives. D'autres enseignants se font aimer en donnant des images positives d'eux-mêmes aux enfants. Il faut avoir de la culture, de l'expérience et de l'amour pour être capable de jongler de façon honnête et constructive avec les images des enfants.

Quand on offre quelque chose à une personne, on s'offre aussi soi-même. Si le cadeau est accepté, on est accepté soi-même. Il y a là tout un langage. En offrant un objet, on peut s'offrir comme ami, comme relation, comme partenaire de travail... Si un cadeau est accepté, on n'est pas sûr de la partie de soi-même qui est acceptée. On peut croire être accepté comme ami alors qu'on n'est accepté que comme relation d'affaire... Dans la mafia les cadeaux sont codifiés. Par exemple si on veut faire affaire avec un parrain de la mafia on peut lui offrir un panier avec des fruits et une bouteille d'alcool. Si le parrain n'est pas intéressé par votre proposition il refuse le cadeau poliment. S'il refuse le cadeau avec violence, le message est clair. Dans ma ville quelques traiteurs sont spécialisés dans la confection de paniers cadeaux pour la mafia.

Tout peuple a ses émotions et ses valeurs. Il tend à leur donner une représentation, sous forme de symboles : des statues, des images, des mots, des paraboles... Quand deux peuples essayent de s'entendre, ils vont échanger leurs symboles. C'est une fécondation mutuelle. Chacun essayera d'expliquer ses symboles à l'autre. Ils se découvriront des émotions et des valeurs communes et apprendront chacun de nouvelles choses. Quand un peuple assujettit un autre peuple, il assujettira aussi ses symboles. Il les détruira, les tournera en ridicule, les ramènera et les exposera comme un butin... En n'essayera pas de les comprendre et on expliquera qu'il n'y a même rien à comprendre, que ce peuple vaincu est sans intérêt. Le vainqueur imposera ses symboles au vaincu, tout au moins une partie de ses symboles, qu'il juge sans danger. Parfois, les intellectuels du peuple vainqueur étudient malgré tout les symboles du vaincu. Eventuellement au départ dans le but de mieux comprendre le vaincu pour mieux l'exploiter. Il peut alors se produire une infection du vainqueur par le vaincu : au fur et à mesure que les intellectuels du vainqueur apprennent à ressentir les symboles du vaincu, ils vont découvrir combien mieux ils rendent compte de leurs émotions, à quel point ils sont riches...

Il y a un rapport étrange entre l'argent et les câlins. Tous deux sont des portes ouvertes sur des infinis. L'argent est une porte ouverte sur le monde extérieur. Si vous possédez de l'argent, vous êtes supposé pouvoir acheter n'importe quoi ou pouvoir vous déplacer vers n'importe quelle destination. Les câlins sont une porte ouverte sur l'infini du monde intérieur. Ils vous permettent de vous explorer vous-mêmes et de comprendre les autres. Argent et câlins peuvent être liés. Le roux a écrit : "L'argent est le nerfs de la guerre et des amours". Une famille se structure souvent autour d'une source d'argent. Certains parents donnent des câlins à leurs enfants, d'autres leur donnent de l'argent de poche. Une différence entre les deux est qu'on est jamais rassasié par l'argent. Si on n'a que cela, on en voudra toujours plus. Les câlins, par contre, permettent d'atteindre une plénitude.
Les parents

Les premiers intervenants dans la constitution de l'image de soi sont nos parents. Ce sont eux qui jettent les bases, qui nous fournissent les premières briques de construction et "nous apprennent le métier de maçon". Ce qu'ils nous apportent de plus important est le concept "tu es notre enfant", avec tout ce que cela a de sacré et d'intangible. S'ils font mal leur travail, les conséquences seront désastreuses.

Une des chose les plus importantes dans ce processus est le fait que l'enfant comprenne qu'il ne se définit pas par ses qualités mais par son essence. Il n'est pas l'enfant de ses parents parce qu'il est beau. Il est l'enfant de ses parents, un point c'est tout. Plus tard, cela se muera partiellement en "Je suis moi, je n'ai besoin de fournir ni preuves ni épreuves pour cela". Cela lui permet d'être libre de décider quand il est bon de fournir un travail, de rendre un service. Il ne sera l'esclave de personne. Il sera donc un travailleur d'élite.

Les voleurs sont souvent des personnes dont les parents ne se sont pas occupé. Ils ne s'accordent donc aucune valeur, ils n'ont pas de dignité.

Un "truc" efficace pour fabriquer des enfants surdoués au jeu d'échec consiste à leur offrir un jeu d'échec ou un livre d'échec comme récompenses chaque fois qu'ils en "méritent" une. Ainsi pour eux le monde des échecs sera ce qu'il y a de plus élevé. Ils feront tout pour construire une image eux-mêmes conforme à ces valeurs. Instinctivement, ils réfléchiront tout le temps, de toutes les façons possibles, à comment s'améliorer en tant que joueur pour avoir une meilleure image d'eux-mêmes/joueurs. (Pour la même raison, à mon opinion les parents qui offrent de l'argent comme récompense à leurs enfants les préparent à une vie bien pauvre. L'argent de poche est indispensable, mais la façon de le donner doit être "absolue"; l'argent doit être un outil, pas une valeur.)

Le supplice de la goutte est bien connu des psychologue : les parents qui disent tous les jours un petit quelque chose à leur enfant pour le diminuer. A vingt ans, le résultat est catastrophique. Plus subtil est le supplice du fil de fer : un compliment, une critique, un compliment, une critique... la victime, balançant d'un côté à l'autre, finira par casser, comme un fil de fer que l'on plie plusieurs fois dans un sens puis dans l'autre. Autre technique : se faire accepter par quelqu'un en ouvrant le débat avec un compliment, puis attaquer avec des critiques.

Les personnes qui gèrent mal l'image qu'ils formaient avec leurs parents vont avoir tendance à épouser quelqu'un qui ressemble mentalement à un de leurs parents, pour reformer une image complète eux-mêmes. Ces problèmes d'images arrivant souvent quand un des parents avait un problème mental, les enfants épouseront donc une personne avec le même problème mental et en subiront les conséquences.

Les parents ne se rendent pas compte à quel point leur image de soi sera ce que leurs enfants adopterons. Ce serait exagéré, mais on pourrait presque dire qu'il ne sert à rien d'éduquer, il suffit d'être éduqué soi-même. Les enfants copieront. Par exemple : un parent qui se sacrifie trop, qui n'a plus de vie propre, va montrer à ses enfants une image qu'ils vont hélas adopter. Devenus adulte ils ne vont pas non plus pouvoir profiter de la vie; ils seront au service des autres, considérés comme des monstres envahissants. Il n'y a pas d'enfants mal élevés, il n'y a que des parents mal élevés.

Il est indispensable qu'un enfant sache mettre la table. C'est un art qu'il faut lui apprendre. Mais l'obliger à mettre la table tous les jours, aura pour seul effet que, devenu adulte à son tour, il obligera aussi ses enfants à mettre la table tous les jours. Dès lors, pourquoi lui apprendre à mettre la table puisque de toute façon ce seront ses enfants qui devront la mettre ?

Parfois, par réaction, les enfants adoptent une image diamétralement opposée à celle de leurs parents. Cette opposition n'est souvent qu'une apparence : le fondement de leur comportement sera tout de même une copie de l'image de leurs parents. Par exemple je connais un jeune homme qui est devenu fanatiquement sale et antisocial. Sa mère l'a traumatisé à force d'être fanatiquement pieuse et conformiste. A priori ils sont le contraire l'un de l'autre, mais dans le fond ils font exactement la même chose : rechercher fanatiquement l'approbation d'autrui.

L'image qu'on a de soi doit correspondre à la réalité. Il ne faut pas mentir à un enfant en lui affirmant qu'il a des capacités qu'il n'a pas réellement. Or pour acquérir certaines capacités, il faut énormément de temps et de travail. C'est à cela que l'école est sensée servir. En réalité on ne fait souvent que semblant d'apprendre des choses aux enfants. On leur fait tout un cinéma avec sons et lumières, mais on ne développe que fort peu leur esprit. Ensuite on leur discerne des diplômes, on prétend qu'ils ont acquis de nombreuses capacités, comme le veut la Constitution. Les jeunes adultes ainsi diplômés sont très dangereux. Ils sont les complices d'un système qui ferme volontairement les yeux sur leur incompétence. En contrepartie ils seront les garants forcés de ce système, prêts à tous les crimes pour le défendre, pour défendre leur propre image usurpée de personne instruite. C'est un jeu de dupes.

"Il faut tuer le maître", "Il faut tuer son père". Que veut on dire par là ? Tout simplement que l'enfant, ou le disciple, se considère "lié" à celui qui lui apprend les choses, à celui qui lui sert de modèle. Dans son image de lui-même, le maître, ou le père, est là, derrière lui, à côté de lui, plus grand que lui, son bras sur ses épaules, qui lui donne des conseils ou des instructions précises. Dans le cas d'un enfant, c'est une nécessité vitale. Les parents doivent impérativement "donner" leur cerveau à leur enfant. L'enfant n'a ni sens critique, ni mesure, ni références. Il ne comprend pas les dangers. Son cerveau est matériellement incapable de gérer les problèmes. Le cerveau du parent se "greffe" virtuellement à celui de l'enfant pour lui donner ces capacités pour pouvoir rester en vie et en bonne santé. Cela se fait par le biais de paroles simples, de gestes précis. Si le parent a de la maturité et du coeur, l'enfant accepte cela de façon naturelle. Il en ressent le besoin. Il ne le remettra en question que par jeu, en réalité pour mieux en profiter encore. Mais un jour l'enfant doit cesser d'être enfant, le disciple doit cesser d'être disciple. Alors il doit effacer le maître ou le parent de son image de lui-même. Tout au moins il doit le reléguer plus loin, lui donner une position différente. Dans certaines écoles d'arts martiaux, pour symboliser ce fait le disciple décapite une effigie du maître. Et le maître de savourer le plaisir du travail accompli... Il appartient alors à l'enfant ou au disciple de découvrir et développer des choses qui lui sont plus spécifiques et que son éducateur ne connaissait pas. Il part d'une base commune à lui et à son éducateur, imposée par son éducateur. Ensuite il devient graduellement lui-même. (Dans les bonnes écoles ces deux phases sont interpénétrées. Alors le maître est aussi le disciple de ses disciples.)

Il est bon de toujours se demander s'il n'y a pas moyen d'avoir plus. C'est là une des pulsions de base de la nature humaine. C'est une excellente pulsion, à condition qu'elle soit soumise à une autre pulsion : celle qui veut que l'on doit chercher à se satisfaire de ce que l'on a. Il faut savoir être heureux des choses telles qu'elles sont. Certaines personnes ne savent pas faire cela. Toute leur vie est une souffrance, une longue plainte. Rien ne va, rien n'est comme il faudrait. Quelqu'un qui fonctionne ainsi n'a jamais assez. Avant était toujours mieux (le confucianisme est un système politique et social basé sur cette perversion). Il ne tarit pas de reproches envers nombre de personnes. Quand on l'écoute attentivement on se rend compte qu'il raisonne comme un enfant capricieux : il boude, il râle, il dénonce, il geint... Il n'a pas réussi à sortir de l'enfance. Il n'a pas encore aimé suffisamment fort pour avoir envie de devenir adulte, sans doute parce que lui-même n'a pas été aimé suffisamment lorsqu'il était enfant. Il n'a pas appris ce que aimer veut dire. A condition de bien l'écouter il est possible de comprendre comment fonctionnait sa famille quand il était enfant. Son image de lui-même est intimement liée à l'image qu'il a de sa famille. Il fait une projection de cette image de sa famille sur le Monde entier. Les agents de police, les juges et les conducteurs de bus sont des projections de son père. S'il avait un père faible, il jouera à tromper les forces de l'ordre. Si son père était trop sévère il se plaindra de la "surveillance" que ces personnes exercent sur lui. Parfois il fera les deux choses en même temps, puisqu'un qu'un père faible peut se montrer trop sévère par peur ou pour essayer de compenser. S'il reproche à quelqu'un où à quelque chose de ne pas lui donner assez, c'est qu'il projette l'image de sa mère. Quand ses critiques sur quelqu'un deviennent virulentes, acides, haineuses, c'est qu'il projette sur cette personne l'image de lui-même. Plus précisément : il projette l'image de lui-même que ses parents lui ont donnée, lui ont imposée. S'il vous dit que les choses doivent aller "vite", c'est que ses parents lui ont souvent dit de faire les choses "vite". S'il vous dit qu'il faut lui dire exactement ce qu'il doit faire, c'est que ses parents lui donnaient des instructions précises. S'il se brouille avec son logeur et se fait expulser, cela veut dire que ses parents l'ont prié de partir lorsqu'il a eu un certain âge. Sa vie est un éternel recommencement de son enfance. Doit on dire que sa relation avec ses parents était mauvaise ? Ou doit-on dire qu'elle n'a pas suffisamment évolué, mûrie, au fil du temps pour l'amener à l'âge adulte, à l'indépendance d'esprit ? Certains parents traitent un adolescent comme s'il était une nouveau-né, sous prétexte qu'il n'est pas un adulte... Quel est le remède ? Il n'y en a qu'un seul : il faut qu'il aime. Il faut qu'il ait une passion, que ce soit pour une autre personne, pour un métier ou pour une cause politique. Alors il voudra de toutes ses forces que l'image de cette personne, de ce métier ou de cette cause fasse partie de lui. Un clou chasse l'autre, cette nouvelle image remplacera l'image de sa famille. Il voudra se rendre utile à sa passion, devenir performant. Il voudra fournir des résultats. Il sera obligé d'acquérir de la discipline. Il apprendra à donner, il apprendra à communiquer. Il sera confronté à la réalité, il ne pourra plus faire semblant. Il sera forcé de comprendre les choses, forcé de comprendre pourquoi elles sont là, forcé de comprendre pourquoi elles sont ainsi. Il apprendra donc à les accepter, à faire avec. Quand il aura réussi à bien intégrer sa passion à son image de lui-même, alors il s'aimera lui-même. Il s'aimera en tant que père de famille, en tant que travailleur ou en tant que citoyen responsable. (Les extrêmes se touchent. Quelqu'un qui ne se plaint jamais, qui ne fournit aucun effort pour se sortir de certaines situations, peut aussi être une personne restée en enfance.)

La mère sacrificielle s'identifie complètement à son enfant. Son image d'elle-même n'est constituée que de ce qui concerne sont enfant. Elle lui donnera tout et exigera tout de lui en retour. Si l'enfant fait mine de s'écarter des projets que sa mère a conçus pour lui, elle le remettra dans le droit chemin à coups de barre à mine. Elle obtient assez facilement la complicité de son entourage : "Quelle mère dévouée. Comment son enfant ose-t-il se plaindre ?". Si elle aimait réellement son enfant, donc si elle s'intéressait à ses vrais besoins, elle constaterait que pour une grande partie de la journée l'enfant préfère qu'elle lui "lâche les basquets". Forte de ce temps libre, elle peut se tourner vers d'autres activités : un amant, un hobby, un métier...

Nous savons que nous allons vieillir puis mourir. Notre image de nous-mêmes va disparaître. Une façon de la rendre éternelle est d'avoir des enfants. Ils font partie de notre image de nous-même, ils portent en eux une part importante de nous-mêmes. Quand nous mourrons, eux continueront à exister, puis leurs enfants, et ainsi de suite. Ce que nous étions se répartira fil des génération, entre un très grand nombre de personnes, mais existera toujours.

A la base de l'image de soi d'une personne, il y a les mythes fondateurs. Ce sont les mythes de la tribu ou de la religion. Par exemple pour certaines tribus les humains sont les enfants chéris des dieux, ou sont des dieux eux-mêmes, tout au moins des copies des dieux. Dans d'autres tribus les humains sont détestés des dieux, ont été punis par eux ou ont commis des crimes. Cela a une répercussion sur ce que les enfants à qui l'on impose ces mythes penseront d'eux-mêmes. Un mythe fondateur plus personnel, privé, est l'histoire des parents, pourquoi l'enfant est né, dans quelles circonstances. Si les parents s'entendent bien (fussent-ils divorcés), l'enfant aura une image harmonieuse de sa genèse. Si les parents se font des coups fourrés et des trahisons, l'image que l'enfant aura de lui-même sera nettement moins bonne. Il y interaction entre les mythe de la tribu et le mythe de la naissance de la personne. Un mauvais mythe personnel peut être compensé par un bon mythe de tribu. A l'inverse un mauvais mythe de tribu peut dégrader le mythe personnel. Par exemple dans certaines religions on enseigne que le père d'un enfant sacré n'était pas le compagnon de sa mère mais un esprit ou un dieu. Les enfants nés dans ces tribus auront tendance à mettre en doute la paternité de leur père et à se méfier de leur mère.

Le prénom donné à un enfant est très important. C'est le nom de la photo qu'il est. Choisir tel ou tel nom n'a pas grande importance, du moment que ce nom est socialement approprié. Mais il deviendra le lien vocal de la définition de soi.

Cela dépend des circonstances et des personnes mais la généalogie peut être un puissant support de l'image de soi. Savoir qui sont ses ancêtres. Certains enfants adoptés déploient des efforts énormes pour au moins savoir qui sont leurs parents directs. C'est un besoin fondamental. Dans certaines tribus africaines et dans certains milieux sociaux les ancêtres sont connus sur plusieurs siècles. Parfois plus de mille ans. Il existe une véritable technologie de la généalogie. En Afrique on gardait un morceau du crâne des ancêtres sur de nombreuses générations, dans une réceptacle spécial pour lequel a été construite une case spéciale. Lors des initiations on expose à chaque adolescent les morceaux de crânes de ses ancêtres et on les nomme, on dit leurs exploits. Plus une personne est importante, plus elle tend à connaître ses ancêtres loin dans le temps. Cette filiation peut aussi se reporter sur la fonction de la personne. Les papes catholiques par exemple connaissent leurs ancêtres de fonction jusqu'au Christ, il y a deux mille ans. Cela fait partie du prestige de l'église, de sa force. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles la généalogie est si importante. C'est d'abord un réflexe biologique, un moteur instinctif et irrationnel avec lequel nous sommes nés. Aucune justification logique n'est nécessaire sur ce point. Ce moteur, cet instinct est là et il fonctionne. D'autres raisons sont que si les ancêtres sont illustres une partie de leur prestige rejaillit automatiquement sur nous. Ils font partie de notre image. Dans certains cas c'est un avantage objectif, si cela nous inspire et nous pousse à les égaler. Dans d'autres cas malheureusement cela donne un prestige à des personnes qui ne le méritent pas. Une troisième raison de l'importance de la généalogie est qu'instinctivement nous pouvons penser que ces personnes veillent toujours sur nous. Avoir une armée d'esprits derrière soi, cela compte. Ou cela peut servir de moyen de pression sur nous. Auquel cas la généalogie nous est imposée. En Chine par exemple une grave humiliation que la police peut infliger à une personne est de lui faire dire qu'elle regrette ce qu'elle a fait et que ses ancêtres ont honte d'elle. C'est un moyen facile pour les touristes étranger pour être relâchés par la police. Il vous suffit de dire officiellement que vos ancêtres ont honte de vous à cause de ce que vous avez fait. Cela a un grand impact sur la police chinoise. Si vous avez une éducation occidentale, cela ne vous coûte souvent pas grand-chose. (C'est peut-être une des raisons pour lesquelles la Chine pense dépasser l'Occident un jour.)

Une amie m'écrit ceci : " L'enfant détruit (en fait refoule) tout ce qui en lui d'élans n'est pas ratifié par les parents car seul le regard parental "officialise" (c'est très fort) la validité selon lui de ces élans. S'il voit briller leurs yeux, il recommence, insiste jusqu'à bien cerner ce qui semble les fasciner dans ce qu'il fait. Son obsession est d'être DESIRABLE en tout, il évalue ainsi et trie. D'où l'importance de l'attitude des parents.". C'est par ce mécanisme que l'enfant construit son image de soi et des choses en fonction de l'image des choses de ses parents. C'est le mécanisme de transmission. Si les parents sont matures et bienveillants, tout ira pour un mieux. Même les problèmes et les malheurs seront un carburant tourné en bien. Un problème que rencontrent beaucoup d'individus est que ce mécanisme de quête d'approbation perdure à l'âge adulte. Tout adulte se doit d'être sensible aux opinions et émotions d'autrui. Mais chez certains c'est une véritable assuétude. Il ne peuvent vivre que télémanipulés par l'approbation d'autres personnes, sous peine de douloureuses angoisses. Ils sont incapables de penser, découvrir, aimer ou décider par eux-mêmes. Beaucoup de systèmes d'éducation jouent malheureusement là dessus. Ils créent des individus prétendus libres mais qui sont en esclavage psychologique.

Quand des parents meurent ils font toujours partie de notre image de nous-mêmes. Un parent se doit même de donner à son enfant l'image de lui-même la plus complète possible et la plus expressive d'amour, pour continuer à être un soutien pour son enfant après la mort. L'image que l'on emporte de ses parents dépend des systèmes culturels. En Asie les parents défunts sont souvent présentés comme des âmes qui s'ennuient et qui jugent leurs enfants avec de la haine, voire leur font des tours méchants. En Europe l'âme des défunts est sensée être bénéfique : hormis quelques cas de fantômes dérangeants, les âmes des défunts sont plutôt des conseillers discrets que l'on peut invoquer en priant. En Afrique les âmes des défunts restent un temps parmi les vivants et font des choses qui dépendent essentiellement du caractère que la personne avait de son vivant. On fait même des "procès" pour déterminer si une personne était bénéfique ou maléfique de son vivant. Par exemple à fin de savoir si des problèmes survenus dans la tribu depuis son décès ne pourraient pas être de son fait. Si le jugement est que oui, les ossements de la personne seront détruits ou éloignés du village.

Pour constituer son image de soi un enfant se réfère aux personnes qui l'entourent. Un jeune enfant se réfère essentiellement à ses parents. Il pense comme eux. Tout au moins il adopte de façon superficielle les opinion, jugements et valeurs de ses parents. Il est incapable de comprendre ces choses avec la même profondeur intellectuelle et culturelle que ses parents. On peut presque dire que ses parents lui servent de machines à réfléchir et qu'il se contente des conclusions. Plus tard il tendra à adopter les images de son instituteur ou de son institutrice. Ces images-là sont assorties d'explications simplifiées mais fonctionnelles, qu'il peut donc adopter de façon plus "intelligentes". A l'adolescence commencent les crises d'identité et la socialisation forcée. L'enfant prêtera alors une très grande importance à l'opinion de ses "copains". Une jeune fille peut laisser tomber son petit ami parce que ses copines trouvent qu'il n'est pas sexy. Un adolescent peut regretter d'avoir les parents qu'il a simplement parce que ses camarades de classe trouvent que "Ils sont nazes tes parents.". Parfois l'enfant se référera à un adulte en particulier, un "mentor". Cela peut être un enseignant, un membre de la famille ou un étranger. Dans certains cas il peut même tomber dans une secte, où on lui dira avec une extrême précision ce qu'il doit penser de chaque chose. On ne devient "adulte" que quand on a appris à juger des choses par soi-même tout en tenant toujours compte de l'opinion d'autrui. Ce processus entre la prime enfance et l'âge adulte doit obligatoirement être géré par la Société. C'est un travail difficile. Il faut que l'enfant ait au moins des parties de réponses à ses questions avant que ces questions ne se posent ou ne deviennent des menaces pour lui. En même temps il faut éviter d'engluer l'esprit de l'enfant trop tôt avec des réponses et donc des questions qu'il n'est pas encore capable de gérer. Il peut mal les interpréter, en concevoir des terreurs, bloquer son esprit ou perdre beaucoup de temps. On ne peut pas non plus savoir quelles réponses exactement il faut donner à un enfant parce qu'on ne sait pas comment son esprit fonctionne ni ce qu'il deviendra à l'âge adulte. On est dans le flou. Il faut donc en toutes chose rester mesuré et laisser l'enfant déambuler les choses par lui-même. Il ne faut pas essayer d'accrocher son esprit à un rail, ni le vider sans cesse de son énergie pour qu'il ne puisse plus rien faire par lui-même, comme on le fait dans les écoles. Les rails sont parfois utiles mais pour de courts trajets. Le plus important est de dialoguer avec l'enfant : accepter ses pensées donc son image de lui-même, ne pas forcément essayer de les comprendre en tous points, le laisser poser des questions, lui montrer régulièrement des choses nouvelles et lui proposer de comprendre en partie les pensées d'autres personnes.

Les très jeunes enfants n'entendent pas les mots que vous dites mais le ton sur lequel vous les dites. Les jeunes enfants quant à eux n'ont pas d'humour. Il ne faut pas trop essayer d'être ironique avec eux ou de faire du second degré. Cela peut les blesser cruellement ou dénaturer votre relation avec eux. Ils prennent à la lettre toutes les images que vous évoquez. A partir d'un certain âge ils acquièrent la capacité d'entendre au-delà des mots et des intonations. Suivant que vous avez ou non un rapport de confiance avec un enfant il percevra vos remarques de façon complètement différente. La position que vous occupez dans son image de lui-même joue un rôle fondamental sur la façon dont son système nerveux traduit ce que vous dites. Si un enfant a peur de votre arbitraire, s'ils sent que vous ne vous intéressez pas à ce qu'il est, tout peut être une cause de malheur pour lui. Supposons qu'il est en train de faire ses devoirs pour l'école. Une simple remarque sur sa façon de se tenir pourra le plonger dans un abîme d'inquiétude et lui enlever tous ses moyens pour continuer à faire ses devoirs. Par contre si vous avez un bonne relation avec lui, s'il sait que vous savez qu'il sait que vous savez quelle est son image de lui-même et que vous y attachez de l'importance, vous pourrez lui faire une remarque d'une grossièreté extrême, sur un ton qui briserait une roche. Il rigolera et vous remerciera d'un clin d'oeil parce que cela lui donne un petit coup de fouet qui lui permet de terminer ses devoirs plus vite.

Dans la plupart des familles on s'extasie quand un petit enfant reçoit un cadeau. Un quart de seconde fait la différence entre deux sortes de familles. Dans le premier type de familles on s'extasie avant que l'enfant ne se réjouisse du cadeau reçu. La famille impose à l'enfant le fait qu'il faut s'extasier quand on reçoit un cadeau. On lui apprend les émotions qu'il doit mimer dans telle ou telle circonstance. Devenu adulte il n'aura aucune connaissance de ses véritables émotions. Il sera conformé au Système, peu performant, souvent malade et potentiellement dangereux. Dans le deuxième type de famille on s'extasie un quart de seconde après que l'enfant ait commencé à se réjouir du cadeau. On fait cela pour montrer à l'enfant que les joies sont partagées et reconnues par tous. A l'âge adulte l'enfant sera riche de ses propres émotions. Il ne fera pas toujours ce qu'on lui dit mais quand il fait quelque chose il le fait bien. Il aura toujours tendance à respecter les émotions des autres.

Un problème chez certaines mères est qu'elles rêvent leur enfant comme étant parfait. Surtout si c'est un garçon. Elles vont imposer cette perfection au reste du monde. Aucune critique de leur enfant ne sera acceptée. Il aura de droit de faire ce qu'il veut, en particulier de déranger autrui. Un bon père essayera de corriger cette situation. S'il n'est pas à la hauteur, il y a plusieurs dérives possibles. Certains pères se désolidarisent simplement du problème et ne s'occupent plus de leur enfant. Ils se contentent de cultiver une rancoeur. Par exemple une sorte de jalousie stupide pour ce prétendu Paradis que la mère rêve pour l'enfant. Une autre dérive consiste à avoir une réaction opposée à celle de la mère : diaboliser l'enfant. Le père fera sentir à tout instant à l'enfant à quel point il est mauvais. Du regard, des mots... il écrasera l'enfant. Un extrême consiste à ne plus adresser la parole à l'enfant (ce qui rejoint la première dérive mais avec beaucoup plus de violence). Ces situations peuvent évoluer de plusieurs façons. Si l'enfant ne trouve pas des facteurs régulateurs en dehors de ses parents, il devient un monstre. Exigeant ou renfermé, il est aliéné à la société. Quand il commencera à commettre de vrais délits, certaines mères ont la réaction de rentrer dans leurs souliers. Elles se couvrent de honte et s'effacent. D'autres mères maintiennent le cap et clament que la Société entière est le mal, que leur enfant doit être défendu contre cela envers et contre tout. Le père, lui, souffrira beaucoup de la mauvaise image que son fils renvoit de lui-même. Pour des personnes matures, élever un enfant est plus simple. Elles savent que l'enfant n'est ni bien ni mauvais. C'est juste un petit individu dont le système nerveux n'est pas encore au point. Alors il faut contenir l'enfant, l'empêcher de faire n'importe quoi, tout en lui laissant de solides libertés quand cela ne dérange personne. C'est dans le tissage entre ces lois que ce construira le système nerveux de l'enfant et qu'il deviendra lui-même adulte. Une personne adulte sait qu'il ne faut pas chercher à poser l'acte parental parfait. Il ne faut pas culpabiliser. Ce n'est pas grave si on est parfois injuste avec l'enfant (à son avantage ou à son désavantage). Ce qui compte est d'être de bonne volonté et se poser des questions.

Les enfants sont un miroir effroyable de l'image d'eux-mêmes de leurs parents :
On peut avoir très mal quand on constate ou croit constater qu'un enfant fait les mêmes erreurs ou mauvais choix que l'on croit avoir fait soi-même.

Les enfants ne vivent que par leurs parents et observent tout d'eux. Ils arrivent parfois à sentir ce qui fait mal aux parents. Ils réussissent même à exploiter des peurs de leurs parents qui datent de leur enfance.

Beaucoup de parents ont un terrible sentiment de responsabilité. Ce que leurs enfants deviennent, ce qu'ils font... déteint de façon lacérée sur l'image d'eux-mêmes des parents.

Une bonne solution à ces problèmes d'image est la Communauté. Il n'est pas bon que des enfants soient enfermés avec leurs parents. Il faut au contraire qu'ils soient partagés entre les familles du village ou du quartier. Si les enfants forment un groupe et qu'un peu tous les adultes sont responsables de ces enfants, les choses iront beaucoup mieux. Certains parents redoutent cela parce qu'ils craignent que leurs enfants soient mal influencés par la Communauté. C'est un problème concret. J'ai vu plusieurs adolescents mal tourner et il me semble que leurs fréquentations y ont contribué. On peut diminuer le problème en s'impliquant soi-même dans l'éducation de l'ensemble du groupe d'enfants. Si on est connu du groupe d'enfant comme un adulte intéressant et responsable, qui mérite d'être respecté, le risque que ses propres partent en dérive décroît.
Un des rôles des parents est d'accompagner les deuils de leurs enfants. Cela peut être aussi simple que de dire au revoir à un animal de compagnie quand on part en vacances. L'enfant retrouvera l'animal à son retour, cela n'empêche que pour un jeune enfant quitter l'animal peut être un déchirement. Cela fait partie de l'apprentissage de la vie. Certains parents trouvent des trucs pour éviter que l'enfant ne comprenne qu'ils partent sans l'animal. Cela évite des adieux déchirants. Je ne suis pas convaincu que ce soit une bonne idée. Je ne sais pas si c'est bon pour la confiance de l'enfant en ses parents. Ils ne faut pas créer le drame en présentant la séparation comme une catastrophe. Mais au moment du départ il faut tout de même prendre acte auprès de l'enfant qu'il va y avoir séparation momentanée et lui laisser un peu de temps pour dire au revoir. Une fois en voyage, on peut lui faire miroiter les prochaines retrouvailles.
Le couple

Très dangereuse est la personne dont l'image d'elle-même implique de façon dominante le couple qu'elle forme avec une autre personne. Elle peut tuer si l'image est rompue : c'est le crime passionnel.

Une personne équilibrée a une image de soi propre, qui tient par elle-même, à laquelle elle AJOUTE l'image de ce qu'est le couple. Si l'image du couple se brise, il restera au moins à cette personne son image d'elle-même.

Une des techniques pour draguer, utilisée par les filles, consiste à arriver chez un garçon en pleurs. Elles offrent ainsi la possibilité au garçon d'obtenir une meilleure image de lui-même en devenant un consolateur, un protecteur. Le garçon est aussi rassuré par le fait qu'il n'encourt aucune obligation; il est là pour donner, pas pour demander ou s'engager.

Au delà des prétextes, les ruptures sont la conséquence de conflits d'images. Ce qui est nécessaire à l'image de soi de l'un n'arrive plus à être concilié avec ce qui est nécessaire à l'image de soi de l'autre. La situation tourne au dialogue d'aveugles.

Notre physique, notre look, sont l'expression de l'image que nous avons de nous-mêmes. C'est pour cela que des fortunes colossales peuvent être payées pour un vêtement, un bijoux. Un homme qui offre un bijoux à une femme lui offre par là même une image d'elle-même. Il lui offre même plusieurs images d'elle-même : il l'a compare à ce bijoux, il lui attribue une valeur élevée, il lui permet de montrer à autrui qu'elle a de la valeur... Pour les mêmes raisons certaines femmes détestent les bijoux et méprisent ceux qui en offrent. Question de point de vue. Offrez lui plutôt une image de vous-même ! Par exemple un
Totoro.

Quelqu'un de séduisant est quelqu'un qui a une image de soi cohérente. Peu importe qu'il soit "beau" ou "laid", qu'il ait une jambe ou deux jambes, s'il a une image de soi bien formée dans sa tête; honnête, juste et assumée avec force, alors il sera quelqu'un qui plaît, qui attire les autres. Pourquoi ? Sans doute parce qu'il a des choses à apprendre aux autres, des choses à leur faire découvrir sur eux-mêmes. Il est un "maître".

Pour qu'un massage soit réussi, le masseur doit être bien dans sa peau. Il doit avoir l'esprit clair. Il en va de même pour les caresses. Les caresses de quelqu'un qui a une bonne image de soi procureront un plaisir intense.

Pourquoi les personnes hautaines sont-elles admirées par certains ? Un hautain est une personne qui fait semblant de ne pas chercher l'approbation des autres. Il n'essaye pas de lire dans leurs regards ce qu'il doit penser de lui-même. Les faibles d'esprit en déduisent que cette personne doit donc avoir une très bonne opinion d'elle-même. Une opinion magiquement bonne. Donc ils sont très attirés par cette personne. En réalité, une personne hautaine est toujours une personne creuse. La construction d'une personnalité passe par l'interaction avec les autres (à condition de ne pas tomber dans certains pièges).

Une relation est souvent basée sur un "modus vivendi". Chacun des deux a un certain rôle. Par exemple l'un des deux est celui qui explique les choses à l'autre, et l'autre est celui qui pose des questions et écoute les réponses. Si un jour ce modus vivendi est rompu, cela peut tourner à la catastrophe. Par exemple si celui qui se faisait tout expliquer se met à trouver des choses par lui-même. L'autre peut le prendre très mal, se sentir menacé au plus profond de son image de soi. Il peut devenir très blessant; "Tu vois, tu t'es trompé.", "Attention, laisse moi faire, sinon...". Le plus souvent inconsciemment, il essayera par tous les moyens de retrouver sa place de donneur d'explications. Certains couples n'ont survécu à ce genre de mutations qu'en apprenant à tisser leur union sur d'autres bases.

Une des méthodes de drague les plus efficaces dans les discothèques consiste à s'approcher d'une fille à quelques mètres, puis de faire passer son regard sur elle, lentement, de bas en haut, avec l'air de penser "Waw ce qu'elle est chouette !". La fille, voyant ce manège, frétillera instantanément de bonheur et de satisfaction. On lui montre qu'on a une très bonne image d'elle et donc on lui donne une très bonne image d'elle-même. Il suffit après de continuer de s'approcher d'elle et lui adresser la parole. La conversation démarrera tout de suite sous les meilleures auspices.

On a donné aux hommes une mauvaise image d'eux-mêmes en leur disant qu'ils étaient des brutes assoiffées de baise. Beaucoup d'entre eux ont corrigé le tir. Ils se sont fait une obligation d'apprendre à éviter toute pulsion sexuelle en présence d'une femme. Du coup certaines femmes s'en trouvent dérangées "J'ai beau lui montrer le bout de mes seins, lécher mes lèvres, faire des allusions, il reste de marbre. C'est vraiment une lopette !". Il est dommage qu'elles arrivent à cette conclusion. Elles ne se rendent pas compte du fait qu'au contraire elles ont quelqu'un de bien devant elles. Elles devraient plutôt apprendre à sortir du schéma excitation-baise traditionnel et aller à la rencontre de cet homme, communiquer, le comprendre, le respecter, construire quelque chose avec lui, construire une image du couple à laquelle on peut se référencer, lui permettre de se construire une image de lui-même encore plus belle.

L'image que les femmes veulent avoir d'elles-mêmes est à l'origine de biens des comportements étranges. Cela concerne tout autant leurs réactions au fil de la journée que leurs choix de vie. Elles essayent perpétuellement de s'organiser une image d'elle-même et changent régulièrement d'optique.

Certains disent que "Une femme canalise les énergies pour les transmettre à son mari. Elle s'habille, se parfume et va se promener et rencontrer des personnes pour recueillir cette énergie. Revenue à la maison, elle la donnera à son homme.". Comment peut-on traduire cela en termes d'image de soi ? Disons que la femme en se rendant jolie, en étant sociable, s'attire les sourires, l'approbation des autres personnes. Elle acquière ainsi une image favorable d'elle-même. Elle sera sûre d'elle-même, elle aura de l'assurance. Rentrée à la maison elle partagera cette assurance avec son homme, elle la lui transmettra. Il se sentira à son tour sûr de lui, aura une bonne image de lui-même et sera donc fort et résistant contre les problèmes qu'il rencontre à son travail. (Ceci explique pourquoi une femme dépense beaucoup d'argent en robes et en artifices et pourquoi son homme doit considérer cela comme un investissement rentable.) (Dans certains couples ce mécanisme est maladif. L'homme pousse la femme à le tromper, à plaire à d'autres hommes. Chaque fois qu'elle l'a trompé, il la gifle pour la culpabiliser et la garder près de lui, puis il se montre très gentil et caressant pendant quelques jours. Il absorbe toute la séduction qu'elle a recueillie avec l'autre homme. Une fois le capital écoulé, il la renvoie séduire un autre homme.)

On dit que les femmes aiment les hommes puissants ; hommes d'affaires ou chefs d'Etat. Une des raisons à cela est que ces hommes sont sûrs d'eux-mêmes. Ils ont une très bonne image d'eux-mêmes. Il n'est donc pas nécessaire de sans arrêt les rassurer et les consoler.

Le coup de foudre est le fait de croire découvrir l'image de soi chez un autre. Par après, l'image de l'autre devra réellement apparaître. Certains sont déçus, d'autres s'en trouvent enrichis.

Aimer, c'est le fait de voir le mieux possible l'image de l'autre, la comprendre, en avoir une vision claire et parfaitement acceptée. Aimer procure beaucoup de plaisir, surtout si l'on se met à agir en fonction de ce que l'on a perçu de l'image de l'autre, dans l'intérêt de l'autre.

La passion, c'est ressentir le besoin d'ajouter l'autre à l'image qu'on a de soi-même, vouloir faire en sorte qu'il fasse partie de notre image de nous-mêmes. La passion peut être suscitée par l'autre "de façon générale", elle peut aussi être suscitée par des caractéristiques particulières : son intelligence, sa volonté, sa sensualité, son assurance, un trait de caractère... La passion peut être trompeuse : on peut se tromper dans ce qu'on croit voir en l'autre. Mais on peut aussi ne pas se tromper; la passion amoureuse, cela existe. Si on est passionné par une chose chez quelqu'un, cela veut dire que cette chose existe aussi en nous-mêmes. Sinon nous n'aurions pas pu la "reconnaître". Dans un premier temps la passion nous permet de nous rendre compte de cette chose qui est en nous. Dans un deuxième temps, elle nous donne la possibilité de développer cette chose en nous-mêmes et la maîtriser.

La passion a sa réciproque : le rejet. Une personne qui est dégoûtée par un clochard, qui détourne le regard avec une expression de dégoût rien qu'en en voyant un, est en réalité une personne qui se sent sâle à l'intérieur d'elle-même.

La haine, c'est le fait de voir l'image de l'autre, et la rejeter.

Pourquoi la passion peut-elle être suivie d'une volonté intense de détruire l'autre ? Peut-être parce que le subconscient estime ne pas être arrivé à mener la passion à maturité : il estime ne pas avoir réussi à "prendre" pour lui-même ces qualités de l'autre qui sont à l'origine de la passion. Alors il emprunte une deuxième voie : se mesurer à l'autre. S'il parvient à détruire l'autre il aura la preuve d'avoir réussi à faire mieux que lui.

Il existe en nous une pulsion qui nous pousse à ajouter une autre personne à notre image de nous-mêmes. Nous sommes faits pour vivre en couple, la "place" du conjoint dans notre image de nous-mêmes est prévue d'origine dans notre cerveau. "N'importe qui", à la limite, peut convenir pour prendre cette place. Au besoin, le subconscient inventera des justifications pour convaincre le conscient de prendre la personne qui se présente.

Pour ajouter l'image de l'autre à son image de soi, encore faut-t-il savoir quelle est l'image de l'autre. C'est pour cette raison que des personnes qui commencent une histoire sentimentale se parlent longuement. Chacun explique à l'autre qui il est, quels sont les éléments qui constituent son identité. Ils se posent des questions et se répondent. Ils disent spontanément tous les éléments qui pourraient avoir une importance. Certaines personnes ont "compris" ce mécanisme et, hélas, le pervertissent ou le manipulent. Certains par exemple constituent une image d'eux-mêmes "prête à emporter", bien ficelée, qu'ils proposent telle quelle à chaque "amoureux" potentiel. Parfois même assortie d'une photo réalisée à cette effet.

Certains considèrent l'homosexualité comme une chose naturelle alors que d'autres la considèrent comme une dégoûtante ignominie. Un élément parmi d'autres qui permet de comprendre cette différence de perception est la nuance entre "l'amour d'image" et "l'amour réel". En amour d'image, on se contente de réaliser l'image de soi que la société nous propose. Un homme épousera une femme simplement parce que son milieu lui a inculqué qu'à partir d'un certain âge il faut former un couple. Il se sent bien dès l'instant où il est marié avec une femme, il a réalisé l'image demandée. Peu importe la personnalité de cette femme du moment que son comportement cadre globalement avec l'image. Dans cette image, il est profondément marqué qu'un couple est constitué d'un homme et d'une femme. Cela commence avec Adam et Eve, en passant par Marie et Josef, puis Ginger Rogers et Fred Astaire ou Jean Gabin et Michèle Morgan. Pour des personnes de ces milieux, un couple constitué d'une femme et d'une femme ou d'un homme et d'un homme sera une grave anomalie, une rupture de l'image, qui engendre un profond malaise, un dégoût. Par contre en amour réel la situation est différente. En amour réel on s'intéresse à la personne, on apprend à la connaître, à l'aider, à la soigner, à connaître ses particularités... L'amour réel est un puissant travail intellectuel qui se passe entre deux personnes. Dans ce cas, que l'autre soit un homme ou une femme est d'importance secondaire. Le principal, c'est que c'est une personne, avec ses besoins, ses faiblesses, ses dons, ses manies, le parfum de son âme... Pour les personnes capables d'amour réel, l'homosexualité n'a rien de choquant. Ce qui compte, c'est de s'occuper d'une autre personne. C'est ce qui procure le bonheur le plus intense dans la vie d'un être humain. Parce qu'on ajoute à son image de soi l'immense image qu'est l'autre personne. Que cette personne soit un homme ou une femme est un détail. On pourrait croire que dans les milieux où prime l'amour d'image il y a moins de relations homosexuelles. C'est souvent le contraire. Parce que l'amour d'image empêche l'amour réel et que toute personne aspire à l'amour réel. En amour d'image vous ne pouvez pas réellement prendre l'autre dans vos bras et le câliner. Car un véritable contact physique briserait l'image, vous imposerait ce que l'autre est réellement. Vous percevriez que c'est une personne complexe, qui ne correspond pas à l'image, en bien comme en mal. C'est quelque chose d'effrayant. Seul l'amour réel permet de supporter cela. Dans un monde où l'amour d'image règne, seul un amour homosexuel peut vous permettre d'accéder à l'amour réel. Parce qu'une personne du même sexe sera un peu plus simple à comprendre et surtout parce qu'il n'y a pas d'image qui s'interpose entre vous et elle. Ainsi, même pour des personnes qui n'avaient pas de penchant naturel à cela, l'homosexualité devient la seule façon de connaître l'amour, de se rapprocher de Dieu. C'est bien sur aussi la raison pour laquelle les couples homosexuels sont souvent de meilleurs parents. L'amour d'image détruit les enfants. L'amour réel les construit. (Le raisonnement tenu dans ce texte peut lui-même être perverti. Dans certains milieux homosexuels sectaires on endoctrine les gens au fait que seul l'amour homosexuel a un sens. On retombe bien évidemment là dans l'amour d'image.) En amour d'image on peut se suicider ou tuer, quand l'image ne convient pas. En amour réel c'est presque impossible puisque l'on ressent l'importance que l'on a et la douleur que l'on pourrait causer aux autres. En amour d'image un divorce se déroule souvent dans l'indifférence ou dans la haine. En amour réel un divorce se déroule avec amour. Car même si l'on ne vit plus ensemble il est impossible de ne pas continuer à se préoccuper de l'autre, de ses intérêts.

Une autre tentative d'explication de l'homosexualité sont que l'on cherche à reconstituer le lien que l'on avait avec le parent de même sexe. On veut instinctivement reconstituer cette image et les perceptions qui y étaient associées. C'est peut-être plus souvent vrai pour les femmes, dont les relations homosexuelles sont parfois dévorantes, passionnées, comme la relation exclusive d'un enfant à ses parents. Encore une explication est que l'on recherche en l'autre une image de soi-même, un miroir narcissique. Forcément cela fonctionne mieux avec une personne du même sexe. Ces phénomènes ont peut-être une influence mais il est actuellement admis que l'homosexualité est une question de nature. On naît ainsi, prédisposé à l'homosexualité. Une personne née franchement homosexuelle n'aura jamais d'émotions pour une personne de l'autre sexe. Bien sûr des éléments du vécu peuvent influencer. On considère qu'une personne n'est jamais tout à fait hétérosexuelle ou tout à fait homosexuelle. Une personne qui est entre les deux peut se croire homosexuelle parce que le premier partenaire à vraiment lui donner du plaisir et un sentiment passionnel est par hasard une personne du même sexe. C'est alors un peu superficiel comme conclusion. De même une personne plutôt homosexuelle peut se croire hétérosexuelle parce qu'elle a rencontré une personne de l'autre sexe vraiment géniale. Il existe aussi par exemple le cas de femmes qui ont été à ce point dégoûtée par le comportement de certains hommes que la seule pensée d'un organe masculin les rend malade. Cela leur inspire une telle répugnance que l'homosexualité devient la seule façon d'avoir une vie de couple.

Un petit enfant est complètement dépendant de l'approbation de ses parents. Son univers, son image de soi, n'existe qu'au travers de ses parents. Une dépendance semblable existe entre les conjoints. Mais elle est sensée être plus mature. Chacun doit être capable d'exister par lui-même. Il doit être capable de survivre indépendamment de l'autre. Il se donne à l'autre, requiert sont approbation, pour être en communion avec lui, pour former quelque chose de meilleur encore.

Les relations affective à la façon des occidentaux sont fausses en ce sens que chacun des partenaires imagine l'autre comme étant idéal. Il s'invente une image de l'autre. Cette déviance est alimentée par la culture de masse occidentale. Quand on rencontre une personne et qu'un sentiment se crée, le cerveau produit des hormones qui donnent des sensations de bonheur ou de jouissance. Les occidentaux profitent simplement de cet état, sans rien donner en échange. Ils se comportent comme des toxicomanes, ils pervertissent l'amour en essayant de profiter des hormones de bien-être. Au fil du temps le cerveau produit moins d'hormones et l'anesthésie cesse. Chacun commence à se rendre compte de la personne qu'il a en face de lui et ne comprend pas cette personne. C'est rapidement la guerre. Chaque défaut de l'autre devient une arme pour l'écraser, on l'utilise pour l'humilier et pour justifier des exactions. Certains arrivent à s'arranger à l'amiable mais le plus souvent c'est la ruine mutuelle. D'autres cultures voient les choses de façon totalement différente. Dans l'amour tantrique, par exemple, avant de se faire des gros câlins on peut commencer par se faire des reproches. On dit à l'autre toutes les frustrations qu'il a pu causer au fil de la journée, ce en quoi on le trouve minable... Le but n'est pas d'écraser l'autre mais de lui permettre de se justifier. La plupart des reproches sont en effet infondés. Pour le reste, on montre à l'autre qu'on accepte ses particularités, que l'on apprend à vivre avec on qu'on l'aide à s'améliorer s'il le désire. Les hormones de bien-être servent à favoriser cette attitude d'amour. Comme les hormones sont cette fois-ci bien utilisés, leurs effets sont beaucoup plus forts. Ce n'est plus du bricolage, c'est du véritable bonheur. Si ensuite on passe à de gros câlins, ce qui se passera peut dépasser l'entendement.

Ce qu'un autre est, est toujours un peu insupportable. Ses manies, sa bêtise naturelle, ses odeurs, ses bruits... Quand on tombe amoureux d'une personne, des glandes dans notre cerveau se mettent à produire des endomorphines, qui nous rendent explosés et broyés du bonheur le plus chaud, le plus goûtu qui soit. Cela nous permet de supporter la personne. Tout ce qui concerne cette personne fera pouet pouet sur les petites glandes. Nous serons complètement accros à cette personne. Tout particulièrement les détails les plus nuisibles de cette personne nous rendront fous de bonheur, ou deviendront invisibles. Le problème est que système des glandes ne fonctionne pas éternellement. Donc un jour on se retrouve privé d'anesthésie, comme un patient qui se réveillerait sur la table d'opération avec le ventre grand ouvert et les tripes à l'air. Il s'ensuit des hurlements et des expressions de dégoût sans nom contre la personne précédemment adorée. Je me demande si on ne remue pas le couteau dans la plaie justement parce que ce sont les détails les plus répugants de la personne qui nous causaient le plus de bonheur. Un drogué en manque est prêt aux pires horreurs pour tenter de retrouver quelques parcelles de bien-être. Quand un couple fonctionne, il survit à la fermeture des glandes. Il trouve un autre bonheur, plus profond et plus spirituel à être ensemble. Pour réussir cela il y a tout un travail. Il faut s'adapter l'un à l'autre, apprendre à se comprendre l'un-l'autre... Il faut apprendre à goûterle plaisir que l'on a à s'occuper de l'autre et à le comprendre... C'est par exemple la raison pour laquelle les vrais couples ont parfois des éclats de voix et des scènes. Ce sont autant de petits procès qui permettent à chacun de poser des questions difficiles, de tester l'autre, d'obtenir justice... De fil en aiguille les liens se tissent. Les petits procès peuvent aussi dégénérer et on voit alors des couples qui s'aiment éclater dans un fracas.

Quand on est en couple avec quelqu'un, l'imprégnation de l'image de soi qui se crée peut devenir malsaine. Elle peut être à la fois trop forte et mal placée. Il en résulte une peur très dure d'être abandonné. J'ai vu des lâcheté grave commise à cause de cela. Par exemple laisser le conjoint maltraiter un enfant ou en abuser. Bien des crimes sont commis uniquement pour cette raison. Parfois, l'attachement se fait à une communauté plutôt qu'à une personne en particulier.
Les pathologies

Orgueil, vanité, arrogance, névrose, nationalisme... sont des pathologies de l'image de soi. D'où l'expression populaire utilisée parfois à l'égard de personnes qui en souffrent : "Pour qui se prend-il ?".

Une priorité est d'avoir une vue d'ensemble de soi, une vue générale. Les personnes dont l'image de soi est morcelée ont de gros problèmes.

Ce qui fait de l'héroïne une drogue aussi forte est qu'elle donne l'illusion d'avoir une image de soi et du monde cohérente et idéale. Elle impose le message "Tout va bien". En particulier elle dit : "Tout fonctionne comme il faut", "Il n'y a plus de problèmes", "Il n'y a plus de barrières". Pour quelqu'un qui souffre d'avoir une image de soi mal ficelée, c'est une aubaine. Un mot d'argot désignant une prise d'héroïne est d'ailleurs "fix". Le verbe anglais "to fix" signifie "réparer". Les effets de l'héroïne peuvent sembler contradictoires : elle peut rendre très actif tout comme elle peut rendre apathique. Ces deux extrêmes s'expliquent par le même phénomène sous-jacent. En disant "Tout va bien, tout est comme il faut" elle permet de se relaxer. On n'est plus obligé d'être vigilant, on peut se reposer. En disant "Il n'y a plus de barrières, il n'y a plus d'obstacles" elle permet de passer à l'acte. Celui qui était persuadé de ne rien pouvoir faire se lèvera et entreprendra ce qu'il veut sans avoir d'appréhensions. (Un ami me demandait pourquoi je ne consommais pas d'héroïne, je lui répondis ceci : "Quand je vais bien, je n'éprouve pas le besoin qu'on me dise que je vais bien. Quand je vais mal, je n'aime pas qu'on me mente. C'est une question d'honnêteté intellectuelle.")

La douleur est le fait que l'image de soi est rompue, remise en cause. Pour se protéger de la douleur, il existe deux méthodes :
L'anesthésie. Il existe plusieurs types d'anesthésies :

L'anesthésie chirurgicale. Si l'on endort votre bras avant de couper dedans, votre cerveau ne peut plus recevoir l'influx nerveux l'informant de l'intrusion du scalpel. Donc il n'est pas au courant du fait que l'image physique du corps est atteinte. Donc il ne souffre pas. (C'est pour cette même raison qu'à l'aide d'un drap l'on cache l'intervention au yeux du patient.)

L'anesthésie mentale. Quelqu'un qui a été correctement endoctriné a une image de lui-même inébranlable. Insensible à la réalité, quoi qu'il arrive cette personne ne souffrira pas, parce que son image de soi ne peut être atteinte. Cette méthode à bien sûr ses limites ; on ne peut pas résister à n'importe quoi.

La souplesse. Si votre image de vous-même est par exemple "je suis un travailleur qui rentre chez lui le soir et doit trouver un foyer accueillant", il est évident que vous allez beaucoup souffrir. Il suffira d'un visiteur inopportun, d'un quelconque changement de programme, pour que votre image soit perturbée. Par contre, si votre image de vous-même est par exemple "je suis quelqu'un dont le rôle est d'adapter son image de soi en fonction des événements", rien ne pourra vous blesser. Quoi qu'il arrive, vous aurez toujours une image de vous-même cohérente.
Un mythomane est quelqu'un qui a une image de lui qui ne correspond pas à la réalité. C'est une sorte de drogue, un paradis artificiel naturel.

Les racistes sont des personnes qui plaquent sur les étrangers (les différents) une mauvaise image qu'ils ont en fait eux-mêmes, inconsciemment. Je n'ai jamais rencontré personne plus haineuse envers "ces étrangers qui profitent de notre système social" qu'une amie qui est au chômage et est une fainéante notoire. En réalité, les étrangers sont pour la majorité des personnes organisées et travailleuses dont nous avons tout à apprendre. (L'inverse du racisme existe aussi. Certains n'hésitent pas à conférer des qualités fantasmagoriques aux habitants de contrées éloignées.)

Les grands dictateur comme Staline sont des personnes qui associent l'image du pays à eux-mêmes. Il ne forment plus qu'un, sont la même chose. Ce qui menace le pays le menace, ce qui le menace menace le pays. Certains fonctionnaires font cette identification entre eux-mêmes et leur administration. Pour eux, toute personne qui semble nier l'ineffable divinité de l'administration les offense personnellement et devra être détruite.

Les personnes qui ont une image d'eux-mêmes qui n'est pas satisfaisante au vu de la réalité, essayeront parfois de redessiner la réalité dans leur tête pour qu'elle correspondent mieux à ce qu'il faut pour qu'une meilleure image eux-mêmes en découle. En d'autres termes; comme nous voulons avoir une image de nous-mêmes la mieux possible, nous changerons notre vision du monde et des valeurs pour que notre image de nous-mêmes y trouve une position plus valorisante.

Le travail d'un psychologue consiste parfois simplement à faire remarquer à son patient que son image de soi est tout à fait acceptable, qu'il n'a pas besoin de la nier ou de déformer sa vision du monde.

Il faut faire attention aux liens de cause à effet. Des manquements dans l'établissement de l'image de soi peuvent occasionner beaucoup de problèmes différents : boulimie, fainéantise, irritabilité, associabilité, malhonnêteté, timidité, exubérance... Or, il arrive qu'une personne ayant des manquements à l'image d'elle-même présente plusieurs problèmes en même temps. Boulimie et fainéantise, par exemple. Les gens ont tendance à réagir face à cela en disant par exemple "Il est fainéant parce que il est boulimique.". C'est faux et dangereux. Faux parce que les deux problèmes ne découlent pas l'un de l'autre mais au contraire découlent chacun de son côté d'un même manquement à l'image de soi. Dangereux parce que agresser ces personnes en leur disant "Tu ferais bien de te remuer un peu.", va leur confirmer qu'ils sont nuls, donc détériorer davantage leur image eux-mêmes, donc les rendre encore plus fainéants et boulimiques (et donc "justifier" encore plus l'opprobre de leurs agresseurs). Si on veut réellement aider quelqu'un, cela demande un travail autrement plus compliqué que bêtement lui passer un savon.

Quelqu'un qui n'arrive pas développer une certaine image de lui-même peut être tenté de vouloir développer son image dans un autre domaine. Par exemple, quelqu'un qui n'arrive pas à se réaliser en tant que père de famille sera parfois amené, sans s'en rendre compte, à se réaliser en tant que bête de travail. D'où un cercle vicieux, puisque le fait de se consacrer entièrement à son métier l'éloignera encore plus de sa famille. Il faut éviter cela. Il faut faire un équilibre entre les deux mondes, ils s'en trouveront alors tous les deux renforcés. (En réalité il ne faudrait même pas que les deux mondes soient séparés.)

Le suicide est une idée souvent idiote pour effacer une image de soi qui ne convient pas. (Seule l'euthanasie, pratiquée dans des cas extrêmes de souffrances incurables, sous contrôle médical, peut parfois se justifier.)

La dépression est le fait d'essayer en vain de recomposer une image de soi. On essaye de progresser, de réaliser quelque chose, mais cela ne marche pas. On se heurte la tête contre un obstacle, on se ronge à essayer de faire quelque chose. On constate qu'on est capable de rien. Notre image de soi se lézarde, se fissure, tombe en poussière. La souffrance peut en être extrême. On se détruit peu à peu, on devient une loque. Un dépressif peut être très jovial et généreux avec des inconnus (qui ne font pas partie de son image de lui-même) et une heure après être totalement apathique, indifférent voire agressif avec des personnes qu'il connaît bien (qui font partie de son image de lui-même). (Cette approche psychologique de la dépression est utile pour comprendre et aider un dépressif. Mais une médicalisation est le plus souvent nécessaire aussi. La dépression passe par de graves troubles neurochimiques dans le cerveau. Le cerveau est par exemple à court des neurostransmetteurs chimiques qui lui permettraient de fonctionner et donc de gérer les problèmes. Dans beaucoup de cas la médicalisation peut se limiter à soigner son alimentation, prendre du ginseng et faire une cure de millepertuis. Si en plus on prend du temps pour parler de ses problèmes, apprendre de nouvelles attitudes mentales, apprendre à mieux vivre avec les autres... On peut résoudre le problème de la dépression sans utiliser de médicaments "lourds". Ces médicaments lourds restent nécessaires dans beaucoup de cas, au moins pour passer le cap le plus difficile.

La plupart des serial killers et les violeurs ont un problème avec la notion de féminité. Tuer une femme, la violer, est pour eux à chaque fois une façon de réaliser une "victoire" sur la féminité. Soit ils croient se l'approprier, soit ils croient s'en libérer. C'est en détruisant l'obstacle ou en le possédant, qu'on se montre plus fort que lui. Chaque fois qu'ils posent un acte ils éprouvent une petite jouissance. Evidemment, cette façon de faire ne résout par leur problème. Cela ne leur apprend rien, ne les fait pas évoluer, ne leur fait pas découvrir ce qui est en eux. Ils n'apprennent pas à être comme une femme, ils ne développent pas la femme qui est en eux, ils ne l'ajoutent pas à l'image d'eux-mêmes. Quant un serial killer tue, il veut tuer l'image de sa mère possessive qui reste collée, engluée à sa personnalité, à son image de lui-même. Il peut brièvement ressentir une jouissance d'y être arrivé. Mais en réalité il n'a fait que confirmer la place que prend sa mère. Ces personnes ne peuvent donc pas améliorer leurs relations avec les femmes. C'est pour cela qu'ils recommencent sans arrêt. Ils sont comme un disque rayé qui rejoue sans arrêt le même sillon. Beaucoup d'entre eux ont eu pendant l'enfance ou pendant l'adolescence un problème grave avec une ou plusieurs femmes. Chaque fois qu'ils tuent une femme ou qu'ils la violent, ils transfèrent sur elle l'image de la femme avec laquelle ils n'ont pas pu avoir une relation constructive. Ils n'arrivent pas à inclure la féminité à leur image d'eux-même, alors ils la plient, ils la détruisent, ils remportent une victoire sur elle. Les pouvoirs publics réagissent face à cela par exemple en autorisant la pornographie. Si un viol ou un meurtre doit avoir lieu, autant que ce soit avec une femme en papier ! Posséder quelques feuilles de papier ne fait de mal à personne. Mieux vaut une photo sur papier que des acteurs live. Mieux vaut se défouler en piquant des aiguilles dans une poupée de cire qu'en poignardant un être vivant. Cela permet de se faire la même photo dans la tête, sinon meilleure. La pornographie n'est qu'un palliatif au problème de ces personnes, mais un palliatif socialement acceptable. Le court terme étant ainsi réglé, les vraies solutions, à long terme, passent par l'éducation, la culture, la communication, la découverte... faire évoluer les gens, leur donner les moyens de changer.

Dans les milieux intégristes le problème est aigu : les hommes sont fous de terreur face aux femmes. Ils cultivent des superstitions qui alimentent cette terreur. "Les femmes qui travaillent sont des salopes, elles aiment être harcelées sexuellement par leur patron." "Derrière chaque guerre, il y a une femme." Les autorités intégristes règlent le problème de deux façons. Primo, ils préservent les apparences, en interdisant sévèrement la pornographie et les coureurs de jupons et en tolérant les viols à conditions qu'ils soient fait discrètement, que seules des femmes viennent se plaindre et qu'il suffise de leur ordonner de se taire, de les culpabiliser. Secundo, en permettant à chaque homme de devenir "propriétaire" d'une femme. Ainsi chaque homme est satisfait : la féminité fait partie de son image de lui-même, certifié par contrat.

Une différence entre la pornographie et la réalité est que sur une image pornographique la personne photographiée se montre sûre d'elle-même. Elle manifeste avoir une bonne image de soi. C'est une composante très importante de l'image, cela joue un grand rôle dans l'excitation. Dans la réalité, au contraire, les personnes que l'on rencontre ne sont pas sûres d'elles-mêmes. Elles doivent être rassurées, il faut leur offrir, de plusieurs façons différentes, une amélioration de leur image de soi. (Si on a développé quelque chose en soi, il faut savoir l'offrir à l'autre. Il faut communiquer un talent, une pulsion, une vision des choses. Il faut aller à la découverte des particularités de l'autre. Il faut s'offrir en présent à l'autre pour qu'il considère que nous faisons partie de son image de soi.)

On se pose souvent une excellente question : pourquoi Hitler condamnait-il les individus petits et bruns aux yeux sombres alors qu'il est lui-même petit et brun aux yeux sombres ? La réponse est relativement simple : c'est parce qu'il était petit et brun aux yeux sombres. Quand il était jeune il a été très impressionné par des pseudo-intellectuels antisémites qui échafaudaient des théories virulentes. Ces "messieurs qui ont fait des études" lui ont exposé avec force des théories qu'il a pu comprendre (forcément, elles sont peut-être exprimées avec conviction et des mots prestigieux, mais elles sont plates, simplistes et très bêtes). Ces théories condamnaient les petits bruns aux yeux sombres. Il s'est alors senti chargé de cette énergie de conviction, il s'est sentit vivre. Il lui fallait accomplir l'idéal que ces personnes énonçaient. Problème : il pouvait à la rigueur se teindre les cheveux en blond, mais pour la taille et les yeux, c'est pô possible. Serait-il donc un traître ? Qu'à cela ne tienne, il a alors inconsciemment décidé d'imposer à toute l'humanité d'être grand et blond aux yeux bleus. Ainsi on ne peut pas lui reprocher de ne pas avoir fait de son mieux. Le jour où il comparaîtra devant ce qu'il croît être ses juges, il veut qu'on lui dise : "Tu n'es pas grand, tu n'es pas blond, tu n'as pas les yeux bleus. Mais il faut reconnaître que tu as bien fait la promotion des grands blonds aux yeux bleus. Allez, ça va, on te le laisse passer au paradis." Pendant tout le temps qu'a duré son travail, grâce à l'énergie et à la conviction qu'il a déployé lui-même il a trouvé un grand nombre de personnes aussi bêtes que lui pour le rejoindre dans sa démarche. Il a été très heureux, entouré de beaucoup d'amis, comme au paradis.

Supposons qu'une sangsue s'accroche à nous. Elle fusionne avec nous et tente ainsi de s'imposer à notre image de nous-même. La réaction normale d'un être humain est d'avoir une réaction de rejet vis-à-vis de la sangsue, de vouloir la retirer à tout prix. Elle ne fait pas partie de notre image de nous-même, elle est "incompatible". Sauf peut-être si nous sommes un biologiste "amoureux" des sangsues, qui les étudie, les comprends et peut se laisser pomper le sang pour les nourrir sans que cela ne lui pose de problème, comme une mère allaite son enfant. Les sangsues font partie de l'image de soi du biologiste tout comme un enfant peut faire partie de l'image de soi de sa mère. Il existe une affection mentale rare chez les êtres humains qui consiste à rejeter un membre de son corps. Par exemple les jambes. Certaines personnes ont un rejet vis-à-vis de leurs jambes, comme d'autres pourraient avoir un rejet vis-à-vis d'une paire de sangsues. Leur cerveau considère que les jambes ne font pas partie de leur corps. Ces personnes sont prêtes à payer pour qu'on les opère et qu'on leur enlève les jambes, tout comme d'autres seraient prêtes à payer pour se faire enlever des sangsues fermement implantées.

Les opiacés permettent d'anesthésier les douleurs à l'intérieur du cerveau. On peut donc les utiliser par exemple quand on veut opérer une personne. Elle ne souffrira pas des incisions pratiquées dans son corps, de ce qu'on y introduit et de ce qu'on en enlève. On peut les utiliser pour calmer les douleurs d'une personne qui a perdu un membre. On peut aussi les utiliser pour greffer ou retrancher des parties de l'image de soi d'une personne. C'est pourquoi ils sont utilisés dans certaines sectes et associations criminelles. Par exemple dans la prostitution. Les héroïnomanes, en particulier, sont des personnes qui s'amènent elles-même à croire des choses délirantes et à oublier des choses essentielles de la vie.

Il y a deux sortes de personnes. Il y a ceux qui se construisent en construisant les autres. Il y a ceux qui croient se construire en détruisant les autres.

Chacun se construit une image de soi, plus ou moins artificielle. "Connais-toi toi-même !". Ceux qui ne se connaissent pas, qui croient se connaître, sont potentiellement dangereux. Ils vont entreprendre, promettre ou imposer des choses irréalisables. Ou ne pas faire des choses qu'ils pourraient faire. Les gens qui les entourent, les parents et les éducateurs en particulier, jouent un rôle important dans ce fait. Celui qui croit être quelque chose mais qui ne l'est pas en réalité, dans le meilleur des cas s'en rendra compte et adaptera son image de soi. Mais il peut aussi persister et vouloir coller artificiellement à son image de soi. Cela peut lui causer de lourdes pertes en temps, en argent, en crédibilité, cela peut à terme ruiner son image de soi entière. Certains font une névrose : ils savent plus ou ou moins ce qu'ils pensent être mais souffrent de ne pas l'être réellement. Alors qu'ils pourraient être très heureux, à condition d'intégrer une image d'eux-mêmes plus proche de la réalité. Certains éducateurs vont tenter naïvement d'empêcher la névrose en critiquant sans cesse l'image de soi de la personne. Cela crée à son tour d'autres problèmes. La seule solution est d'apprendre à la personne à être honnête, en lui donnant le bon exemple, et la laisser elle-même décider de ce qu'elle est et de ce qu'elle n'est pas, en l'aidant à l'occasion à se mettre elle-même à l'épreuve.

Un individu a besoin que ce qu'il est, et qui pour lui ne se définit fondamentalement que par une émotion, soit reconnu par les autres. Tomber amoureux est une reconnaissance mutuelle intense des émotions. Mais certaines personnes ou certains organismes abusent de ce phénomène pour duper, capturer des personnes. Par exemple ils font passer des pseudo-tests psychologiques qui "révèlent" ou promettent de révéler des choses sur la personne. "Nous vous comprenons ! Vous êtes génial !" Ou ils font des analyses exaltées du prénom ou du signe astrologique de la victime. Ou encore ils donnent une position, un grade à la personne, qui n'a peu ou rien à voir avec ses capacités réelles. La personne se croit reconnue et en retire une intense jouissance. Alors qu'elle n'a fait que s'engluer dans les pétales d'une fleur carnivore.

Les sectes racontent à leurs membres des mythes fondateurs bien calculés. L'image de soi au sein du Monde que les membres vont se créer sera favorable aux intérêts de la secte. D'une façon générale les humains sont très sensibles à ce qu'on leur raconte, leur explique et leur impose pour se faire une image des choses et pour y trouver leur place. Un dogme répété un nombre suffisant de fois s'imposera à une personne même s'il est contraire à toute logique objective. Les dictateurs et les publicitaires en usent et en abusent. Il est assez difficile de former des gens pour qu'ils soient capables de s'abstraire de ce piège.
Chez certaines personnes, l'image de soi peut varier de façon totalement erratique au fil de la journée, passer d'un extrême à l'autre. Une voie possible pour résorber ces délires consiste à établir un dialogue entre les images de soi. Par exemple quand on est exalté on s'adresse à soi-même pour quand on était ou sera dépressif. Et quand on est dépressif on essaye de parler un peu avec la personne que l'on a été et que l'on sera quand on est exalté. Ainsi on établit des liens, on fait communiquer les vases entre eux et on résorbe l'amplitude des oscillations.
Certaines personnes vous félicitent et vous louent quand elles vous rencontrent. Elles vous expriment une image de vous-même flamboyante. Puis quelques temps après elles vous critiquent amèrement et vous reprochent de ne pas faire des choses comme il faut. Elles ont des idées très précises de comment les choses doivent être faites. Parfois ces idées sont réalistes, parfois totalement démentes. Ces personnes ont aussi parfois leur façon propre de s'exprimer, leur propre vocabulaire et considèrent que tout le monde doit comprendre et adopter ce mode d'expression. Instinctivement ces personnes essayent de vous dominer. Les compliments au début puis les reproches visent à orienter votre image de vous-même pour que vous deveniez une machine à leur rendre des services, pour que vos émotions vous portent à les servir. Ces personnes rêvent les choses et vous considèrent comme l'interface qui a le privilège de les réaliser. Si vous ne le faites pas, ou si vous ne comprenez pas ce que ces personnes vous expliquent, ou même simplement si vous ne faites pas spontanément les choses comme elles l'entendent, elles vous attaqueront verbalement ou physiquement avec plus ou moins d'agressivité. Le raisonnement est simple : si vous subissez de la douleur ou un stress chaque fois que vous ne faites pas les choses comme il faut, vous finirez bien par les faire comme il faut. C'est une recette très simple, qui donne de très mauvais résultats ou des résultats contraires. Mais des personnes peu cultivées peuvent adopter naturellement ce comportement. Certains systèmes d'éducation sont hélas basés sur ce mécanisme. On distribue des bons et des mauvais points aux élèves, des titres de premier et des étiquettes de raté... sur base des valeurs et des objectifs exigus des enseignants ou de la Société. Une tactique face à ces personnes consiste à refuser les compliments au départ, avec autorité.

On se demande souvent comment et pourquoi des organisations criminelles ou terroristes sont apparues. On recherche des influences de puissances étrangères, des systèmes idéologiques, des intérêts communautaires... Mais il peut arriver que la seule motivation sérieuse soit le fait que la création de l'organisation a permis à quelques personnes d'acquérir un statut. Vous étiez un simple commerçant de quartier ou un petit fonctionnaire. D'un coup vous voilà commandant en chef d'un groupe armé. Votre image de vous-mêmes devient flamboyante, magique. Les femmes veulent de vous et des sympathisants vous supplient d'accepter leur argent ou leurs services.

Un avare est une personne qui ne comprend pas son rôle dans la société. Elle ne voit pas le fait qu'elle est la pour gérer l'argent, pour en assurer un bon flux. Une personne équilibrée se doit d'éviter de gaspiller l'argent et les ressources que l'on peut acheter avec. Mais elle se doit en même temps d'investir l'argent pour le bien de son entourage, quitte parfois à en perdre ou à ne pas être sûr qu'il y a bien eu un gain. Un avare ne voit donc pas ce système sanguin des flux d'argent autour de lui, ni la position de régulateur intelligent qu'il se devrait d'occuper. Un avare a une image pauvre de lui-même. C'est peut-être pour cette raison qu'il dépensera un jour soudainement tout son argent pour une grosse chose inutile. Parce qu'il aura eu l'illusion fulgurante de pouvoir enfin devenir quelque chose en achetant cette chose. Le remède est l'éducation, la Culture. Quand on sait, comprend et sent comment gérer l'argent, on le fait.

Le mal-être provient de désaccords dans l'image de soi. Un exemple simple est le mal de mer, qui provient d'un désaccord entre l'oreille interne et les yeux. L'oreille interne dit au cerveau que l'on oscille tandis que les yeux disent que l'on ne bouge pas. C'est pour cette raison que l'on recommande de fixer le regard sur l'horizon. Car en regardant l'horizon les yeux concluent à un mouvement du corps conforme à ce que rapportent les oreilles internes. De même, un psychologue ou un gourou de secte, en bien ou en mal, en construisant l'individu ou en le détruisant, travailleront à donner à leurs clients une image cohérente d'eux-mêmes.

Les superstitions font partie de notre image de nous-mêmes au sein du monde. Par exemple le fait de croire que si l'on fait le bien on sera automatiquement récompensé (cette superstitions inclut une autre superstition : celle qu'il est possible de déterminer ce qui est le bien). Ou le fait de croire que si une personne vous critique c'est qu'elle ne vous aime pas. Ces superstitions en fonction desquelles ont vit peuvent nous détruire ou causer beaucoup de problèmes à notre entourage. Mais elles sont souvent adoptées faute de mieux, parce qu'elles sont imposées par des chefs spirituels abuseurs ou parce qu'elles offrent un confort mental primaire. En réalité tout le monde vit en fonction de superstitions. Mais les superstitions des personnes sages ou efficaces sont plus construites.

Pour certaines personnes les choses sont très simples : vous êtes pour eux ou vous êtes contre eux. En d'autre termes : vous rejetez leur image d'eux-mêmes ou vous l'acceptez. Si vous l'acceptez, alors en permanence vous êtes sensé être gentils et souriants avec eux. Ne jamais critiquer bien sûr, puisque si vous critiquez c'est que vous n'aimez pas ce qu'ils sont donc vous êtes contre eux. Si vous critiquez ce sera pris pour une déclaration de guerre. Vous recevrez donc en retour un déluge de haine et de reproches. Votre image de vous-mêmes sera dégradée et rejetée par tous les moyens, même les plus absurdes. Tout ce qui a trait à vous sera détruit.

Certaines personnes tentent d'obtenir une bonne image d'elles-mêmes en éliminant tout ce qu'elles considèrent comme "impur". Les sectes adorent jouer là-dessus pour faire se départir leurs adeptes de leur argent, leurs biens...

Certains essayent de devenir "bien" en possédant quelque chose de grand, de cher. J'ai une fois été dans un magasin avec une personne qui raisonne ainsi. Elle tâtait les objets d'un geste et d'une expression méprisante. Quand je lui ai montré l'étalage des objets pour lesquels on était venus, d'un mouvement gras de la bouche elle a dit "Je veux la meilleure." Le prix n'avait pas d'importance. Cette personne ne peut arriver à rien dans le vie et c'est bien ce qui se passe. Elle est obligée de travailler dans la prostitution pour à peine survivre.

Tout le monde veut inclure à son image de soi des choses qui sont fondées, vraies. Une technique très simple pour faire accepter une chose fausse à une personne est de lui raconter de nombreuses petites choses vraies. La lourde et grave chose fausse entrera en même temps que la nuée de petites choses vraies. Un de mes amis, chaque fois que je menace de réussir à lui expliquer qu'une chose qu'il pense est fausse, me lance automatiquement à la figure une chose qu'il pense vraie et qui n'a que peu de rapport avec ce dont nous discutons. Quand une personne honnête et une personne malhonnête luttent pour emporter le suffrage de la foule présente, le malhonnête peut vaincre rien qu'en appliquant cette technique : rebondir d'une ébauche de vérité à l'autre. Il faut un homme honnête très capable - ou une foule cultivée - pour lutter contre cette stratégie.

Un moyen simple pour détruire une personnalité est de se moquer régulièrement de ce qui est important pour elle. Toute chose peut être tournée en ridicule ou être relativisée. C'est même nécessaire dans une certaine mesure. Mais on peut en abuser et ainsi détruire l'image de soi d'une personne en se moquant de ce qui ne sont que des qualités, des avantages potentiels ou des particularisme nécessaires. Inversement, on peut louer et flatter à outrance des aspects d'une personne et la gonfler de fierté comme une baudruche.

Dans la vie, il faut faire des choix. On ne peut pas tout faire en même temps, on ne peut pas épouser toutes les femmes. Ces choix sont un travail, qu'il faut apprendre à faire. Il faut être capable de sentir quels choix peuvent nous apporter un chemin de constructions, de satisfactions, de réussites et de travail gratifiant. Il y aura toujours des embûches, le hasard peut même tout détruire, mais choisir un chemin cela a un sens. Le propre des démocraties est de tendre à ouvrir un maximum de chemins aux gens et de leur donner les moyens de choisir ce qui leur conviendra, ce qui leur permettra d'apporter le plus de choses aux autres. Dans les dictatures les chemins sont imposés, par la force ou par la ruse. Ils ne correspondent alors que rarement aux moteurs des gens, le rendement sera faible. Apprendre à faire les choix est un travail difficile, jamais parfait. Certaines personnes n'arrivent pas à faire de choix. Elles vivent en ayant un peu choisi pour tout et opté pour rien. Elles ont une vie faite d'ébauches, de commencements, de rêves avortés. Elles sont entourées de demi cadavres et des souffrances des personnes victimes de ces indécisions. Leurs images d'elles-mêmes est entaillée de coups de ciseaux inachevés, ce sont des dentelles chaotiques et douloureuses. Prendre des décisions fermes est pour elles une souffrance. Car elles devraient abandonner les autres choses, comme un enfant qui ne pourrait garder qu'un ou deux jouets. Pour des personnes adultes au contraire prendre une décision peut être une grande joie. Car c'est le début d'une construction ferme. Les personne indécises fantasment des dictatures, où on leur imposerait enfin un choix.

Un problème peut être très grave s'il est à la fois source de plaisir et de nausée. C'est un des aspects les plus destructeurs de la pédophilie. D'une part l'enfant rejette le contact du pédophile, il en éprouve un malaise. D'autre part il en ressent du plaisir car ce sont des caresses. Ou bien il tient au pédophile parce que c'est un parent ou une personne qui invoque ses bons sentiments. Cela engendre des paradoxes dans les pensées de l'enfant, des contradictions qui dégénèrent et le détruisent. Un adulte est plus ou moins capable de répondre point pour point à ces paradoxes, de les résoudre, de trancher les petits noeuds gordiens et de reformer lentement une image de soi acceptable. Il y arrivera certainement s'il est aidé par un bon psychologue. Mais pour un enfant l'effondrement psychologique est souvent inévitable. Le poids est trop lourd de cette charpente de contradictions, de culpabilités, des éléments imaginaires délirants nés des interrogations. Seul un dialogue rapide et prolongé de l'enfant avec un très bon psychologue, un adulte sage qui s'investit, peut espérer le sauver avant l'effondrement.

La "résilience" est un phénomène qui veut que même après les traumatismes les plus graves un esprit humain peut espérer retrouver une image de soi acceptable. Comme une feuille pliée qui reprend lentement sa forme, comme par magie.

L'exigence est une des pires maladies de l'image de soi. Si on dit et on explique à un enfant qu'une terre lui appartient, devenu adulte il concevra une grande frustration si soudain on lui dit le contraire. Il sera prêt à se battre et peut-être à tuer pour reconquérir "sa" terre. Si on ne lui avait rien dit, si on n'avait pas implanté cette terre dans son image de lui-même, il n'y aurait pas eu de problème. De même beaucoup de bandits n'attaquent une banque qu'après avoir longtemps rêvé de tout ce qu'il allaient faire avec cet argent. Ils ont inclus cet argent à leur image d'eux-mêmes, il leur appartient. Si une personne s'oppose au hold-up, c'est avec l'indignation du bon père de famille défendant son bien qu'ils abattront le gêneur.

Toute personne désire que son image soit approuvée par les autres, que ce qu'elle est soit jugé bien. En disant à une personne que son image est bien, on peut la combler de ravissement. Cela fonctionne comme une drogue. Cela demande aussi un certain talent. Si vous allez trouver une jeune fille et lui dites de but en blanc qu'elle est géniale, elle vous prendra pour un fou. Il faut d'abord vous faire accepter par elle, lui donner au moins l'impression que vous vous intéressez à elle et que vous avez une capacité d'appréciation objective, que vous êtes une autorité. Alors vous pouvez commencer à lui faire des compliments. Les escrocs, sectes et autres abuseurs jouent à fond de ce mécanisme. Ils vous rendent heureux compliment après compliment. Caresse après caresse, ils vous font entrer dans leur système tout chaud. Si vous passez quelques mois dans les feutres de l'abuseur, il devient votre seule référence, votre seule source d'approbation. Puis il vous dit que pour continuer à être approuvé il vous faudra faire ceci ou cela. Si vous êtes soudainement privé de l'approbation de l'abuseur, vous allez vous retrouver dans un gouffre d'angoisses, d'inquiétudes. Vous vous sentirez, moche, sale, défait, inadéquat, incomplet... Vous reviendrez vers l'abuseur en rampant, pour quémander un regard, une petite caresse.

Les examens, les concours, les mises à l'épreuve... sont partie intégrantes de l'Humanité. Je m'imagine mal confier ma vie à un médecin ou un pilote qui n'auraient pas passés de nombreux examens pour certifier leurs compétences. Le plus important dans un examen est la certification de son image d'elle-même que reçoit la personne examinée. Ensuite vient l'image d'elle-même de la société, fière des diplômés qu'elle recèle. Mais à mon sens les examens sont actuellement galvaudés :
On confie la conception et l'exécution d'un examen au professeur qui a donné ou supervisé le cours qui permet de passer ce examen.
On force les étudiants à avoir suivi les cours ou avoir passé les examens précédents pour pouvoir passer un examen.
On oblige les étudiants à passer des ensembles fermés d'examens. Etre mauvais dans une seule discipline implique de rater l'ensemble des examens.
Les examens sont de simples séances pour vérifier que l'étudiant a pu apprendre la théorie et les procédures par coeur, avec un minimum de capacité d'adaptation. Il n'y a pas ou peu de vérification d'usage intelligent de la matière. La capacité la plus intelligente demandée aux étudiants est d'avoir pu un peu organiser les mots et les phrases de la matière. Ils doivent en faire de schémas structurés, qui permettent de ne pas en faire un apprentissage par coeur strictement linéaire.
Souvent, la seule chose qu'un professeur demande à un étudiant à l'examen, c'est d'être capable de faire semblant de passer l'examen. Certains professeurs voient de façon très claire qu'un étudiant est totalement incompétent et récite la matière comme si c'était des vers dans une langue étrangère. Mais il donnera ses points à l'étudiant, parce qu'une personne de la rue qui aurait été présente à l'examen, aurait eu l'impression que l'étudiant est compétent. A l'inverse, des étudiants brillants, même s'ils ont une bonne connaissance de la matière, peuvent rater l'examen. Parce que le professeur les ressent comme une menace. Il existe toute une panoplie de trucs et astuces pour buser un étudiant compétent et même le persuader lui-même qu'il est incompétent.
Souvent, les questions d'examen sont même carrément disponibles à l'avance. L'étudiant se contente de bloquer par coeur les réponses à une trentaine ou une centaine de questions, en sachant que les questions d'examen seront trois d'entre elles. Certains professeurs vendent pour 10 € une disquette avec ces questions.
La raison principale de cette situation est que la société veut disposer d'une caste de gens prestigieux : les diplômés. Peu importe qu'ils soient compétents. Ce qui compte est qu'ils en imposent au peuple. Il faut faire semblant. Bien sûr il faut tout de même que certains membres de la caste soient compétents. Mais il suffit que quelques individus le soient. Les autres les suivront ou les exploiteront. Le système d'étude tel qu'il est, est même carrément un frein à la vraie compétence. Je connais quelques personnes très douées et diplômées. Mais elle n'ont pas acquit leurs compétences aux études. L'obligation de préparer les examens et de faire les travaux académiques les ont même plutôt empêché d'apprendre davantage de choses. Le système n'hésite pas à les utiliser en disant : "Regardez comme nos diplômés sont compétents !...". Pour arriver à faire semblant d'être compétents, certains professeurs n'hésitent pas à aller à l'encontre de la démarche scientifique : en faisant des cours volontairement incompréhensibles ou en retirant des bibliothèques les ouvrages contraires à leurs théories. La raison pour laquelle les examens sont organisés de la façon décrite ci-dessus, est que les professeurs eux-mêmes sont trop souvent des incompétents ou des personnes qui ne se soucient pas d'enseigner. Cette façon d'organiser les examens leur permet d'avoir un pouvoir immense sur les étudiants. Sans cela ils ne pourraient pas survivre, puisqu'il n'ont rien de concret à proposer. Les étudiants eux-mêmes prennent le moule de ce système. Si un professeur essaye de faire passer un examen intelligent, il se fera rabrouer par la masse des étudiants puis sera désavoué par ses collègues. Il a intérêt à rentrer dans le rang. Certains professeurs donnent même les points à leur examen en fonction des points obtenus aux autres examens. Ce système est une vaste hypocrisie, de la Haute Trahison institutionnalisée. Il entraîne des pertes colossales à l'échelle du pays et des individus. Mais presque tout le monde semble ne pas voir où est le problème. Le moule est pris. La meilleure défense des tenants de ce système, est que dans les pays où il n'existe pas, la situation économique et politique est souvent mauvaise. Il faut admettre que ce système n'est pas strictement négatif : les étudiants apprennent malgré tout deux-trois choses, ils se font des relations, certains professeurs sont réellement compétents et capables de rendre des services à la Nation... Et puis le peuple joue le jeu. Cela, c'est très important. Avec le système précédent, celui de la noblesse, chaque individu était condamné à vie à un niveau social. C'était une des causes des révoltes. Avec le système des études et des examens, toute personne, au moins ses enfants, peut espérer acquérir un statut. Avant, certains nobles recevaient ou achetaient de très hautes fonctions alors qu'ils étaient radicalement incompétents. Actuellement, il faut au moins être capable de faire semblant d'être compétant. C'est beaucoup. Cela en force plus d'un à être réellement un peu compétant. Si un jour la Société prend conscience du problème, à mon sens la seule solution est que les examens soient organisés par l'Etat. Le rôle des enseignants doit se limiter à préparer les étudiants à passer les examens. Le prestige des professeurs et des établissements doit découler de leur aptitude à préparer les étudiants à passer de vrais examens.

On peut s'étonner de voir des pays qui réussissent brillamment alors qu'ils ont une politique rudimentaire. D'autres pays, avec une politique pourtant exemplaire, se traînent douloureusement. Un éclairage sur la question est que l'être humain est fondamentalement un être familial. Une famille est une structure complexe. Un individu est fait pour vivre, penser et ressentir au sein de cette structure. Un pays ou une nation, c'est une sur-famille. On doit y retrouver les mêmes mécanismes que dans une famille : solidarité entre les membres, communication, défense du groupe, autorité et références communes, prestige partagé, respect de chacun, soin des petits... Beaucoup de théoriciens imaginent des structures de société qui devraient donner des rendements mirifiques. Mais si ces structures ne collent pas au schéma de la famille, cela ne donnera rien dans les faits. Parce que les moteurs des individus ne les feront pas vivre dans ces structures. Dans certains pays, comme la Belgique, presque chaque personne a au moins une expérience au cours de laquelle elle a ostensiblement été traité par le Système d'une façon contraire à l'esprit de famille. Dans ces pays là, cela devient le chacun pour soi, les arrangements et les petites corruptions... comme dans les mauvaises familles. Parce que dans l'image d'eux-mêmes les ressortissants de ces pays ne se sentent pas membres de la famille. Ils se défient de la famille. Cela fait perdre beaucoup de ressources au pays et crée un mal de vivre. Souvent, les gens sont maltraités par des fonctionnaires qui adhèrent à ces théories mirifiques énoncées par de brillants théoriciens. Prenons par exemple l'idée selon laquelle une personne qui n'a pas de travail doit être persécutée. Dans une vraie famille, on ne félicité pas celui qui n'a pas de travail, mais il reste un membre à part entière de la famille. Certains membres de la famille sont mêmes très appréciés alors qu'ils n'ont pas de travail, parce qu'ils rendent des services qui ne sont pas chiffrables en terme de salaire. L'esprit d'une bonne famille, ce serait par exemple d'adopter le système de l'Allocation Universelle. Actuellement, en Belgique pour reprendre cet exemple, on est soit travailleur et membre de la famille, soit chômeur et en marge de la famille. Des efforts ont été accomplis pour faire comprendre aux gens qu'un chômeur n'est pas forcément une engeance. Mais le clivage entre les deux mondes subsiste. Instaurer l'Allocation Universelle consisterait à considérer que tout le monde est à la fois chômeur et travailleur. On donnerait une allocation de "chômeur" à tout le monde, d'une valeur fixe. Le travail quant à lui serait imposé à un taux fixe, qui ne dépend pas du revenus annuel. Si on fait le calcul sur papier, le résultat financier est le même qu'actuellement : une personne qui a une activité donnée paye au final autant d'impôts qu'avant et dispose d'autant d'argent qu'avant. Mais l'image de soi que le pays donne à chacun de ses membres change radicalement. Chacun devient aimé et protégé à vie. En conséquence il y aura une plus grande loyauté des membres du pays envers le pays. Cela simplifiera également et radicalement le Droit du Travail. Actuellement le travail est presque criminalisé. Je connais nombre de personnes qui n'oseraient jamais travailler, de peur des ennuis que l'Etat va automatiquement et gratuitement leur inventer. Il faut légaliser le travail. Que penser de ces travailleurs qui manifestent pour maintenir une activité industrielle qui n'est plus rentable ? Ils exigent de devenir des sortes de chômeurs qui conservent le prestige du travailleur. Officiellement ils travaillent, en réalité ils sont chômeurs puisque leur travail est inutile et subsidié par l'Etat. Avec l'allocation universelle, chacun peut travailler dès qu'un travail se présente, librement. Il y aura une beaucoup plus grande mobilité des travailleurs, donc une plus grande souplesse du tissu industriel et un meilleur rendement. Un autre exemple, périphérique, est celui du système de pensions. Dans une vraie famille, les jeunes sont fiers de veiller aux besoins des ainés. Mais dans beaucoup de pays ce n'est pas ce qui se passe, ce n'est pas ainsi que les choses sont présentées. Que ce soit au travers d'épargnes privées ou de pensions d'état, chacun cotise pour sa propre pension. Une fois pensionné, il reçoit en retour l'argent qu'il a lui-même cotisé. Donc il n'a besoin de personne, il ne doit rien ni autres ni à la société. Cela a par ailleurs une lourde conséquence sur l'économie mondiale. Cet argent épargné par les travailleurs constitue ce qu'on appelle les Fonds de Pension. C'est une masse d'argent colossale, qui est généralement utilisée à des fins de prédation financière. Cela participe dans les problèmes économiques actuels et dans la ruine de pays pauvres. Il faut changer la philosophie du système. Il faut que les pensions des personnes âgées soient payées directement par les impôts des personnes plus jeunes. Eventuellement au prorata de ce que la personne âgée elle-même avait payé comme impôts du temps de sa jeunesse. Une fois de plus, on ne change pas vraiment les montants des pensions. Le résultat final est le même sur papier. Mais on change la vision que les membres de la société ont d'eux-mêmes. Le jeune est fier de payer la pension du vieux, dont il reconnaît l'importance. Le vieux se dit qu'il a peut-être encore un rôle à jouer dans la société, pour aider les jeunes. On peut supprimer les Fonds de Pension et leurs effets dévastateurs. Il faut composer avec les instincts avec lesquels les humains naissent. Alors on obtient une société plus performante, où chacun peut développer une meilleure image de soi, vivre mieux. Ces instincts sont irrémédiablement en nous. Pourquoi vouloir aller à leur encontre ? Ils ont été forgés par des millions d'années d'Evolution. Ils véhiculent des mécanismes qui ont fait leurs preuves et qui nous dépassent. Acceptons leur grandeur. On parle souvent des problèmes causés par les instincts. Pour moi ces problèmes étaient causés par l'ignorance d'autres instincts ou par une mauvaise harmonisation des instincts entre eux. On cherche des justifications économiques, politiques ou scientifiques à toutes choses. Par exemple pour aller sur Mars. Ne peut-on pas simplement accepter le fait que l'humain a l'instinct d'aller partout où il peut, d'explorer. C'est grâce à cela qu'il a survécu jusqu'à nos jours. Allons sur Mars et établissons-nous y, simplement parce que tel est notre instinct.

Certains systèmes sociaux se soucient peu de rendre la justice aux individus et ne s'occupent que de la paix sociale. En d'autres termes : pas de remous dans le peuple. Si un problème apparaît, on "tuera" les personnes qu'il faut pour que la situation se calme et que tout rentre dans l'ordre. Peu importe que l'on tue le coupable ou un innocent. Un des trucs utilisés dans ces systèmes est de faire croire aux gens qu'inconsciemment ils ont eux-mêmes choisi les problèmes qui leur arrivent. Par exemple à une personne qui se plaint des exactions commises par ses parents, on expliquera que son "âme" a elle-même choisi ces parents-là avant la naissance. On donnera même toute une argumentation. Par exemple que dans une autre vie son âme à causé des torts à ce qu'étaient les âmes de ses parents. Donc on a choisi ces parents-là pour expier ses fautes. Donc on n'a aucunement à se plaindre et même on se doit de courber l'échine avec reconnaissance. Cette argumentation est une escroquerie et une démission de la Société. Mais elle peut fonctionner de façon redoutablement efficace. Parce que même dans le subconscient d'un enfant maltraité les parents occupent une place très importante. Surtout dans les souvenirs diffus de la petite enfance, dont l'image de soi est impalpable mais profondément enfouie. A cause de ce lien fort qui existait, la personne sentira qu'il y a bien quelque part quelque chose en rapport avec ce qu'on lui explique. Les implications de cette vision du Monde sont également dévastatrices : les parents qui ont le droit, le devoir congénital, de se venger de leurs enfants. Les enfants eux, ont une faute à expier, une dette.

Une façon simple de corrompre une personne consiste à lui donner un grade élevé. Par exemple Directeur Général Adjoint. Elle tiendra beaucoup à cette nouvelle et superbe image d'elle-même. Elle se rend aussi compte du fait que cette image n'existe que grâce à la personne ou l'organisme qui le la lui donnée. Donc elle veillera scrupuleusement à protéger cette personne ou cet organisme. Car elle pourrait perdre cet image. Elle n'aurait aucune chance de la retrouver ailleurs puisqu'elle n'a pas les compétences requises. On peut s'étonner que l'on nomme ainsi une personne incompétente à un poste. Cela a des conséquences fâcheuses sur les rendements ou même sur la viabilité de l'organisme. Les humains sont ainsi faits qu'ils s'attachent parfois plus d'importance aux jeux de pouvoir à court terme qu'à l'efficacité à long terme.

Un chef peut avoir très peur de donner une image de soi trop forte à un de ses administrés. Un de mes amis était cadre dans une vieille entreprise. Les techniques étaient obsolètes, l'entreprise allait mal. Une restructuration a été décidée. Tout naturellement c'est mon ami qui s'est chargé de l'essentiel du travail : choix d'un nouveau système de comptabilité informatisé, nouvelles machines, nouveau système de gestion du personnel, locaux réaménagés... Quand la direction s'est installée dans les nouveaux locaux, une des premières décisions a été de nommer mon ami à un poste subalterne à l'autre bout de l'entreprise. Participer au conseil d'entreprise lui a été interdit. Pourtant sa présence aurait été précieuse, puisqu'il est la personne qui connaît le mieux la nouvelle structure. Mais tout le monde avait peur de lui. Il était trop fort, il menaçait leurs places, même celle du directeur. Actuellement il s'estime heureux de ne pas avoir été simplement mis à la porte.

Chacun essaye d'avoir l'image de soi la plus belle et la plus complète possible. C'est un moteur qui est en nous, avec lequel nous naissons. Globalement c'est positif. Il est bon pour un individu et pour la société qui le contient de chercher à être plus efficace, mieux équipé... Mais ce moteur peut aussi avoir des effets secondaires négatifs. Prenons par exemple une personne qui n'arrive pas à faire quelque chose. L'idéal serait qu'elle admette qu'elle n'en est pas capable. Ensuite de quoi elle peut trouver le moyen de devenir capable ou de composer avec son incapacité. Sommes toutes, être capable demande parfois des années de travail, de préparation. On peut devenir capable dans des choses qu'on aurait jamais imaginées auparavant. Et personne n'est fait pour être capable en toutes choses. Il n'y a pas de honte à être incapable. L'important est d'essayer d'admettre les choses telles qu'elles sont. Ensuite de quoi on peut éventuellement essayer de les changer. Malheureusement la réaction sera souvent d'inventer une autre explication au problème. De préférence une explication qui n'égratigne pas son image de soi, tout au moins une explication qui l'égratigne moins. La motivation peut même juste être de trouver une explication, n'importe laquelle. Parce qu'on préfère avoir une explication farfelue que pas d'explication du tout. Mieux vaut un sparadrap sur l'image de soi qu'un trou béant. Ces sparadraps impliquent trop souvent des blocages, qui empêchent les individus d'évoluer.

Un comportement fréquent consiste à cacher les choses. Par exemple on ne dit pas à un enfant que le médecin lui fera mal. Voire on lui affirme qu'il ne lui fera rien du tout. On espère ainsi, très logiquement, que l'enfant ne s'inquiétera pas. Un autre exemple : on ne lui dit pas que rouler en voiture est dangereux, que sa vie est en danger. Ces mensonges dégradent la qualité de vie de l'enfant. Au contraire il faut lui dire la vérité. Le médecin va lui faire mal et rouler en voiture présente en risque sérieux d'accident grave. Il faut lui expliquer aussi que le médecin fait cela par amour pour lui, pour sa santé. Rouler en voiture est un risque qu'il faut accepter, parce qu'on est obligé de se déplacer. Il y a moyen de créer un réseau de transport sans danger mais cela n'a pas été fait. Il faut expliquer à l'enfant qu'on sera là pendant que le médecin lui fait mal et qu'il aura un câlin après, que la voiture lui permet de retrouver sa famille et ses amis. Ainsi l'enfant a une image des chose complète, cohérente et objective : il va souffrir chez le médecin et la voiture est dangereuse. Sa famille est avec lui et gère les choses pour un mieux. Alors l'enfant ne ressent pas d'angoisses et accepte les choses. La douleur infligée par le médecin sera ressentie comme bénigne. Ce n'est pas la douleur ou la mort qui font peur, c'est l'inconnu et le mensonge : l'absence d'image des choses et des images faussées par ceux en qui vous devriez pouvoir avoir confiance.

La Thérapie Brève est une branche de la psychologie qui peut s'occuper des personnes qui ont des troubles de l'image de soi. Par exemple une personne qui panique dans un ascenseur, parce qu'elle ne réalise pas sa place dans ce petit milieu fermé. Le psychologue en Thérapie Brève va essayer de comprendre comment la personne se perçoit dans l'ascenseur. Ensuite il lui proposera de travailler la question, de diverses façons "actives, introspectives et prospectives". Un sujet de prédilection de la Thérapie Brève sont les personnes qui se sont enfermées dans un système. Par exemple une personne qui se dit victime d'une situation et qui prétend s'y être résignée. En faisant cela, elle entraîne les personnes autour d'elle dans son système. Le travail du psychologue en Thérapie Brève sera de comprendre ce système, de l'expliquer et d'expliquer comment en sortir, de proposer un travail pour changer l'image de ce système que chacun des protagonistes a en lui. Il peut paraître étonnant qu'une personne choisisse de construire un système autour d'elle où elle prend le rôle de victime. C'est peut-être parce que dans notre système culturel la victime est une personne privilégiée, qui mérite des égards. C'est une image de soi qui n'est pas la plus enviable, mais qui n'est pas inintéressante. Elle offre des facilités, des possibilités, des moyens d'action. Dans d'autres cultures les victimes sont considérées comme des déchets ou des fautifs. Là les systèmes sont donc sans doute bâtis autour d'autres sortes d'images de soi.

Il y a un moyen très efficace pour imposer quelque chose à quelqu'un : c'est de dénoncer cette chose. J'ai été très étonné de voir que dans des familles où on maltraite les enfants... on parle souvent des familles où on maltraite les enfants. Les parents pointent du doigt les autres familles. Ils dénoncent avec indignation et sous-entendus les mauvais traitements que les enfants y subissent. Leurs enfants écoutent attentivement. Ce truc fonctionne très bien. D'une part les enfants ne peuvent mentalement pas imaginer qu'ils sont eux-mêmes maltraités. Leurs parents dénoncent cela si bien... D'autre part ils croient sans s'en rendre compte que ce qu'on fait aux enfants dans les autres familles est vraiment atroce, puisque que c'est pire que chez eux. Donc ils n'iront jamais demander l'aide d'autrui, ils ne dénonceront jamais leurs parents. Ils sont bien enfermés. En général ce truc n'est pas utilisé de façon consciente par les parents maltraitants. En tout cas pas au début. Ce n'est que l'expression de leur paranoïa, qui prend forme et se structure en fonction de l'impact sur les enfants.

Supposons que vous voulez conseiller une chose à une personne. Par exemple le système Linux. Vous lui donnez de très nombreuses explications techniques et morales sur les raisons pour lesquelles elle a grand intérêt à prendre ce système et pas le système Windows. Vous lui parlez même de l'avenir de la planète, des flux d'argent mondiaux et de leurs conséquences... Elle semble avoir compris. Elle peut vous répéter vos explications de façon intelligente et structurée. Elle a également compris qu'elle n'a aucune raison pratique importante d'acheter le système Windows. Pourtant elle achètera le système Windows. Pourquoi ? Vous avez fait une grave erreur. Quand une personne imagine adopter ou acheter quelque chose, il faut qu'elle ait une image de cette chose. Dans son subconscient, il faut que cette image de cette chose puisse se greffer à son image de soi de façon enthousiasmante. La publicité de Microsoft montre simplement un chipendale en col-cravate qui est très content d'avoir en face de lui un ordinateur avec Windows. Ca, c'est une image qu'on assimile très bien. Donc on sent bien le produit Windows. Le produit Linux, par contre, on ne le sent pas du tout. Que voulez-vous que cette personne fasse avec la moralité et les flux d'argent mondiaux dans son ordinateur ? C'est insensé et bien trop lourd à porter. Avec tout ce que vous lui avez expliqué vous lui avez causé une défiance et même un rejet du système Linux. Vous me répondrez que, si, cela a un sens d'utiliser un système plus sain, plus efficace et conçu par des gens biens. Je vous donne raison. Mais essayez de comprendre que ce lien n'est pas direct. Il faut avoir un certain niveau intellectuel pour être capable d'apprécier ce que le système Linux représente, pour faire la traduction entre les flux d'argent mondiaux et la joie de faire bouger sa souris à l'écran. Beaucoup d'utilisateurs de Linux n'ont pas ce niveau non plus. Ils ont adopté Linux pour s'intégrer à un groupe. En somme pour la même raison que d'autres adoptent Windows. Si vous voulez faire du prosélytisme, répandre la bonne parole, apprenez au moins à parler à chacun dans son langage. Faites en sorte que votre interlocuteur puisse faire le lien entre son image de soi et les images que vous soulevez. Un bon critère pour voir si une personne a intégré un système à son image de soi, c'est si elle est prête à faire un effort pour cela. C'est à dire à payer de l'argent pour cette chose ou à la demander. Avant j'avais l'habitude d'installer systématiquement Linux à des amis utilisateurs de Windows. Cela me semblait une politique saine et démocratique. Mais les résultats sont nuls. Ils n'utilisent pas Linux et ne le montrent pas à leurs amis. Ce n'est pas parce que j'ai installé Linux sur leur ordinateur que dès lors cela fait partie d'eux-mêmes. Ce n'est qu'une sorte de sac à dos que j'ai déposé chez eux. Ils m'aiment bien alors ils supportent sans problème la présence de ce sac à dos. Mais ils ne s'en servent pas. Les rares fois où ils ont démarré Linux, ils ont simplement constaté qu'il y a une souris, un menu et des fenêtres, comme sous Windows. Quand ils essayent de l'utiliser, ils constatent que le mode d'emploi n'est pas exactement le même, qu'ils n'arrivent pas à faire tout de suite tout ce qu'ils ont l'habitude de faire sous Windows. Pourquoi se fatiguer à apprendre quelque chose de neuf qui est semblable à ce qu'on a déjà ? Linux représente et permet beaucoup plus de choses que Windows. Mais cela ils ne le voient pas. J'ai arrêté les installations sauvages de Linux. Je me contente d'en parler et de montrer que je l'utilise. Je dénonce les superstitions anti-Linux et j'apaise les craintes de l'inconnu. Je fais travailler les imaginations, je fais comprendre que c'est une marche vers un au-dessus.

Il est parfois amusant d'entendre des personnes discuter sans cesse de choses diverses et ne jamais pouvoir se mettre d'accord. Une raison à cela est que par définition le jeu de la conversation peut consister à prendre chacun un postulat différent et à essayer de le défendre. Le postulat le mieux défendable l'emportera, peu importe qui l'ait défendu. Une autre raison que je crois remarquer est que chacun tend à défendre des idées qui sont une projection de son image de lui-même. Que l'on parle champignons ou Politique Etrangère, on calque son propre mode de pensée sur le sujet et on le défend bec et ongles. En réalité on se défend soi-même. C'est une façon de faire qui est très discutable. Elle a un avantage, qui consiste à pouvoir soumettre son identité à autrui sans en avoir l'air. En recueillant les réactions des autres sur le sujet qu'on défend, on obtient par la bande des renseignements sur soi-même. C'est en général inconscient. On ne se rend pas soi-même compte qu'on est en train de faire cela. C'est une version sophistiquée du "Monsieur le psychologue, j'ai un ami qui a un problème...". Je crois malgré tout qu'il faut dénoncer cette pratique et encourager à aller droit au but. Des guerres de religions sanglantes ont eu lieu parce que chacun défendait sa vision de la Religion et des Mythes. C'est un jeu de masques parfois nécessaire mais qui est globalement peu rentable et sujet à bien des confusions. Sachons admettre ce que nous avons en nous et osons le dire explicitement aux autres. N'y mêlons pas les champignons ou la Vierge Marie. Fi de ceux qui se moquerons de nous. Ainsi on peut évoluer beaucoup plus vite et plus loin. Et devenir bien plus compétents dans les champignons ou la météo, débarrassés de l'empreinte de notre ego.

Le Destin est une notion qui me semble souvent mal utilisée. Chacun a une histoire, qui fait partie de son image de soi. Cette histoire remonte plus ou moins loin dans le passé. Pour certains elle remonte bien avant leur naissance, parfois jusqu'à l'époque mérovingienne. L'usage que l'on fait de ce passé est très divers. Certains s'y attachent trop et en font des extrapolations abusives. D'autres la négligent où la transforment suivant leur humeur... Peu importe : cette histoire a eu lieu et ses séquelles sont en nous. Même les transformations que nous rêvons à notre histoire font partie de cette histoire. Par contre ce qui est nettement moins tracé, c'est notre futur. Pour moi le destin a un sens, en ce sens qu'il y a des choses en nous (ou autour de nous) qui nous imposent des choix et des événements. Par exemple le cerveau de beaucoup de personnes est matériellement incapable de faire des mathématiques sophistiquées. Donc elles ont à la base le destin de ne pas devenir de brillants mathématiciens. Il faut bien faire comprendre cet aspect des choses, parce qu'il y a beaucoup d'abus. Certains groupes prétendent que l'aptitude aux Mathématiques est uniquement une question d'éducation, de scolarité. Cela cause beaucoup de malheurs, parce que les enfants croient que s'ils n'y arrivent pas c'est à cause d'eux-mêmes ou à cause de leurs parents. Pire : on se sert de ces enfants qui n'y arrivent pas, qui sont "en échec" pour faire peur aux autres enfants, pour les menacer. On se sert d'un principe d'Egalité qui semble noble pour imposer une petite dictature méchante. Dans ces groupes, les Mathématiques sont en plus assez limitées. Ils n'enseignent pas des choses complexes et importantes, que seule une petite minorité des enfants est capable de comprendre. Donc ces enfants n'en feront pas bénéficier la Communauté. Souvent, même les choses qui sont enseignées ne le sont pas vraiment. On fait semblant, on ne fait que des choses superficielles, pour que la majorité des enfants ait l'impression de suivre et de faire des Mathématiques. C'est une arnaque. Une autre conséquence est qu'on laisse facilement tomber des enfants en cour de route. Beaucoup d'enfants ont des aptitudes très riches en Mathématiques mais ils ont une "tare" juste dans un domaine des Mathématiques. Dans ces cas là, cela vaut la peine de s'investir pour permettre à l'enfant de passer le cap. Il faut le traiter comme un handicapé, juste pour ce domaine là. Cela forme une passerelle qui lui permet de déployer une brillante carrière de mathématicien par la suite. On doit avoir le droit de faire des mathématiques comme on doit avoir le droit de ne pas en faire. Les deux sont liés. Revenons à la notion de destin. Certains croient que notre futur est en nous exactement comme notre passé. Il est tout tracé et on n'y changera rien. Par exemple ils fument la cigarette en se disant que de toute façon le jour de leur mort est fixé. Comprenons-nous bien : une part du destin d'un fumeur est écrit, en ce sens que chacun a une sensibilité différente aux effets du tabac. Certaines personnes ont des muqueuses épaisses dans les poumons et un bagage génétique résistant au cancer. Elles ont donc un risque vraiment faible de développer un cancer ou de faire de l'emphysème. D'autres personnes au contraire sont très sensibles au polluants. Pour elles les risques sont très élevés : fumer ou vivre avec des fumeurs est un suicide. Cette résistance ou cette fragilité que l'on a au départ, cela pèse lourd sur notre histoire, cela va fortement contribuer à l'orienter dans certaines directions. Cela ne veut pas pour autant dire que le jour de notre mort est fixé. Si nous décidons de ne pas fumer, nous avons une forte chance de mourir à un âge avance et dans de bonnes conditions. Nous partirons en quelques jours, comme un rêve qui s'efface. Si nous fumons ou vivons avec des fumeurs, nous risquons fort de passer plus tard des dizaines d'années avec un emphysème aux poumons, perpétuellement en train d'étouffer. Nous allons mourir à un âge encore jeune, longuement et douloureusement. Le destin, c'est une chose que l'on peut influencer. On ne peut pas tout changer et on ne peut pas décider avec exactitude de ce qu'on change. Mais on peut mâcher du chewing-gum sans sucre au lieu de fumer. On peut aller chez un psychologue, pour résoudre les angoisses qui nous obligent à fumer pour se calmer (dans certains cas, arrêter de fumer sans avoir appris à gérer son stress peut augmenter le risque de cancer...). Pour certains, l'idée de prendre ainsi en charge leur destin, au moins partiellement, est source d'une profonde angoisse. C'est pour cela qu'ils la rejettent et affirment leur conviction du Destin absolu : tout est écrit, ils n'ont aucune responsabilité, réfléchir n'est pas nécessaire. Un destin ouvert, même partiellement, c'est l'inconnu, l'étranger, l'obscur, la source de toutes les terreurs... Il faut de l'amour et de la sagesse pour oser affronter cela, une forme de confiance en Dieu.

Les superstitions sont parfois presque des contrats que certaines personnes croient avoir passés avec l'Univers. Par exemple la superstition que s'ils sont gentils et généreux la Vie sera bonne et douce avec eux. Quelques années après on les retrouve tristes et meurtris : la Vie n'a pas respecté le contrat. Dans leur image d'eux-mêmes, l'Univers est une sorte de personne diffuse qui les entoure, qui les observe et fait des choses. C'est une attitude infantile qui coûte très cher. J'ai vu des personnes commettre des choses moches toute leur vie et pourtant être riche, respectées et avoir une mort douce. On peut se gagner une belle vie. Etre honnête et généreux est une bonne base. Mais c'est surtout une question de travail et de bon sens opiniâtre.

Changer ce que l'on est cause de la douleur. Ce que l'on est ne convient et cela cause de la douleur. On changera donc si la douleur de ce qu'on est devient supérieure à la douleur de changer. Un bon psychologue permet de réduire la douleur de changer et d'obtenir des changements plus intéressants.

Lors de l'adolescence on change profondément son image de soi. D'un petit enfant couvé par ses parents on devient un adulte part entière. Cela passe par de nombreuses remises en question, des drames intérieurs... Le piercing par exemple, très pratiqué les adolescent, sert à manifester le fait que leur corps leur appartient à eux et non à leur parents. Les adolescents ont besoin des accessoires propres à leur âge (vêtements, accessoires de loisirs...). C'est leur identité-même qui en dépend. Certains deviennent presque des assassins psychopathes pour arriver à mettre la main sur ces choses. Ils sont prêts à faire du piratage informatique, certaines filles se prostituent plus ou moins... Ils peuvent aussi avoir des réactions de rejet très fortes contre les personnes qui ne jouent pas leur jeu, qui ne les traitent pas en "élégant adultes". Dans leur esprit il peut y avoir l'horreur de l'infantilisme violent le plus obtus, dans les faits ils sont dépendant de leurs parents et ils seraient incapables d'assumer des responsabilités, pourtant ils veulent être traités en égaux par les adultes. Pour éviter que ce processus ne dégénère, il est de la responsabilité des adultes de faire des choses. Il faut qu'avant que le processus ne commence ont l'ait expliqué à l'enfant, pour qu'il comprenne ce qui lui arrive. C'est peut-être le plus important. Ensuite il faut prévoir un budget pour les accessoires dont l'adolescent a besoin. Ce besoin est réel et propre à la nature humaine. On peut éventuellement discuter pour réduire certains coûts, mais on n'y coupera pas. Enfin il ne faut peut-être pas traiter l'adolescent comme un adulte puisqu'il n'en est pas un, mais il ne faut pas non plus le prendre pour idiot. Beaucoup de parents ou de personnes ayant l'autorité sur un adolescent utilisent des combines pour essayer de manipuler l'adolescent : des enjeux impossibles à tenir, un endoctrinement, une autorité colérique, refuser des petits détails et accepter des grandes horreurs, garder une façade à tout prix, faire des chantages avec des choses qui sont vitales pour l'enfant... Il faut dépasser tout cela et aller droit au but : accompagner l'adolescent au fil de son développement, discuter de certaines choses de façon objective, refuser ce qui doit être refusé... Pas à pas les parents doivent accepter qu'ils perdent le contrôle, qu'ils n'auront plus de renseignements, que le petit s'en va...

Certaines personnes essayent de dominer les autres par tous les moyens. Dans leur image de soi inconsciente elles se voient tout en haut de la pyramide des personnes. Elles grimpent le long de cette pyramide de façon effrénée, tout le temps, jour et nuit. Elles collectionnent les moyens d'influencer les gens. Elles utilisent une personne pour en manipuler une autre. Si elle ne peuvent être le patron d'une personne elle lui proposeront d'être son esclave. Parce qu'un esclave peut influencer son maître. Si vous leur signalez une opportunité, elles vous donneront des ordres. Si vous avez le malheur de leur rendre un service, vous devenez leur propriété. Si vous expliquez ce qu'elle font, elles seront rabrouée quelques minutes ou quelques heures, puis la machine à escalader reprendra son mouvement, en utilisant d'autres méthodes s'il le faut. Ces personnes ne veulent pas le mal d'autrui. Elles veulent même en général le bien. Mais elles n'ont pas les compétences nécessaires alors elles font le mal, elles font des plans foireux. Certaines entreprises ou administrations adorent ce type de personnes parce qu'elles sont très faciles à manipuler. Il suffit de leur faire miroiter la possibilité de monter dans la pyramide. On leur explique qu'il faut être très travailleur et très fidèle. On peut ainsi faire travailler ces personnes au point que leur famille est en détruite ou qu'elles finissent par se suicider, vidées de leur énergie. La possibilité de réellement monter dans la pyramide est en fait rarement accordée. Les places intéressantes sont déjà attribuées, à des personnes moins faciles à manipuler, plus fiables.

Un moyen facile de gonfler son image de soi de nouvelles choses impressionnantes et flamboyantes, c'est de prendre des obligations. On accepte un travail, on prend un engagement, on se fait élire à une fonction... pour se sentir plus important. Le résultat est un overbooking létal. On se retrouve pétri d'angoisses, on développe des maladies somatiques, on manque de sommeil, on fait mal chaque chose et en prenant beaucoup plus de temps que nécessaire, on perd ses amis... Le cerveau de certaines personnes est équipé d'un mécanisme de protection qui consiste à oublier toutes les promesses faites. Cela peut sauver la personne mais cela n'arrange pas les autres. Il faut apprendre à gérer son emploi du temps et à ne pas prendre un engagement à la légère. Il faut prendre le temps de réfléchir, demander conseil, savoir retourner à l'école, prendre des marges de sécurité... Le plus important est d'apprendre à ressentir ce qu'il y a réellement au fond de soi. Si on a vraiment un enthousiasme pour faire une chose donnée, si on y trouve un rêve ou un sport, un rythme ou un plaisir, alors il peut être adéquat de prendre l'engagement de la faire. On aura chaque jour plein d'énergie pour la faire. En fin de journée on sera fatigué mais heureux. Il faut apprendre à déjouer toutes les mauvaises raisons de se coller un engagement : s'attirer l'estime d'autrui, obéir à un endoctrinement... Un bon engagement peut bien sûr un jour devenir moins bon. Dans ce cas à priori il faut tout de même continuer, au moins un temps. Par exemple le temps de former un remplaçant enthousiaste. Parfois la meilleure chose à faire est d'arrêter tout de suite, platement, sans même s'excuser.

Un enfant peut être dressé pour vivre dans le monde de l'illusion. Sa maman lui répète sans cesse qu'il est merveilleux et adorable, sans qu'il ait le moindre effort à fournir pour cela. Il doit juste bien se laver, sentir bon et porter les vêtements chics qu'on lui achète. Son papa rêve qu'il apprend à faire des tas de choses. Par exemple qu'il apprend à fabriquer des cerf-volants. Alors le papa achète des pièces de bois et de tissu et assemble des cerfs-volants. Tout en répétant sans cesse que c'est son enfant qui les construit et que regardez comme il fait ça bien. Tout le monde admire l'enfant pour les beaux cerf-volants qu'il fabrique. C'est surtout l'enfant lui-même qui s'admire pour cela. Dans les séries télévisées et les magasins, on lui propose des personnages ou des figurines colorées, dont on lui montre et lui dit qu'elles ont des pouvoirs magiques, de la force, des propriétés extraordinaires... Il bave pour les posséder et bien entendu on les lui offre. Il se gonfle du prestige et du merveilleux de ces petites choses. Il rêve qu'il est fort, honnête, doué de multiples talents... alors que pas la moindre connexion ne se fait en ce sens dans son cerveau. Il n'a pas de réflexe d'honnêteté. Aucune créativité ni habileté ne se développe en lui. On lui achète des boîtes d'assemblage chères et prestigieuses, qui permettent de fabriquer des petites machines de rêve, motorisées voire informatisées. Mais aucune imagination, invention ni adresse n'est nécessaire pour les assembler. Il suffit de clipser les pièces ensemble, suivant des plans détaillés. Il n'est même pas nécessaire de peindre l'objet ensuite. Il faut juste faire un peu attention à ce qu'on fait au moment du montage. Mais l'enfant se sent très fier de ce qu'il croit être sa Réalisation. A un moment donné il peut être confronté à des livres ou à des personnes qui expliquent la théorie des choses et les techniques, c'est à dire ce qui permet d'inventer des objets et de les construire. Au début il va se ruer dessus, il va les revendiquer. Puis il a un choc. Il a beau retourner le livre dans ses mains, aucune chose colorée ni prestigieuse n'en sort. Il ne peut rien tirer de ce livre puisque son cerveau n'a jamais été préparé au puissant effort et aux longues démarches nécessaires pour être capable de créer, encore moins au patient travail pour fabriquer une chose nouvelle de toutes pièces. Il sent confusément qu'il y a une arnaque quelque part mais il est sûr que cela ne peut pas venir de lui. Son rapport avec les gens créatifs, ceux capables de réaliser un objet ou une oeuvre d'art, est très ambigu. Il leur donne des ordres. Il leur dit qu'ils doivent créer des choses plus belles que tout, plus puissantes que tout ce qui existe. Il est très fier de ce qu'ils vont produire, de ce qu'il considère qu'il aura lui-même ainsi réalisé. Mais les créatifs n'obtempèrent pas. Au contraire ils se moquent de lui. Il en déduit que les créatifs sont une sale race qu'il faut écraser. Ils sont l'obstacle entre lui et le bonheur. Il n'en souffre pas vraiment, puisqu'il lui suffit d'aller chez sa maman. Elle le reconvaincra en peu de temps de son infinie grandeur, de son mérite ineffable. Elle lui parlera de toutes les bêtises, de toutes les erreurs que font ces créatifs. Ce sont des vilains, de pauvres gens, il ne faut pas les écouter. Lui par contre est chaud comme le Soleil, génialement parfait comme ses rêves. Un jour un de ces créatifs lui explique qu'il pourrait acheter une petite planche de bois fin et de la colle, pour fabriquer un petit avion qui vole vraiment. Le créatif essaye de lui expliquer qu'il peut construire son petit avion comme il veut à condition de respecter quelques règles d'aérodynamique. Il lui dit qu'il l'aidera quand il aura fait des erreurs, qu'il lui expliquera, pour qu'il apprenne, pour qu'il devienne libre de réaliser les avions qu'il rêvera. Il tente de lui montrer des techniques pour bien découper, sculpter et assembler des pièces. L'enfant le regarde d'un air narquois : "Bien essayé mon toto ! Tu as cru m'avoir, hein ? Si tu crois que je vais dépenser 5 € pour ta saloperie de petit avion terne.".

Un savant se fait souvent remarquer par le fait qu'il connaît beaucoup de choses. Qu'il ait autant de savoir en tête est normal. Au cours de ses recherches il est passé par de nombreux chemins. Il a été amené à lire beaucoup de textes et à parler avec un grand nombre de personnes. Il a longuement utilisé toutes ces données, il s'est en partie appuyé dessus pour créer de nouvelles choses. Il est normal qu'il ait gardé une partie de cela en tête. Mais ce savoir est secondaire. Ce qui est important, c'est que le savant est capable d'invention, de réflexes intuitifs, d'extrapolation, d'imagination, de raisonnement, de recoupement... Son cerveau est une prodigieuse architecture. L'Enseignement prétend transformer chaque étudiant en un petit savant. Il est écrit dans la Constitution que les Universités doivent former des personnes ayant des capacités de Chercheurs. En réalité on se contente presque exclusivement d'obliger les étudiants à apprendre des monceaux de données. Cela leur demande beaucoup de travail et tous n'en sont pas capables. On fait cela dans des cadres prestigieux, dans de grands amphithéâtres avec Son et Lumière. Celui qui ne se montre pas à la hauteur sera jeté au bas du talus. C'est très impressionnant. On se contente de faire en sorte que les étudiants soient capables de singer un savant. Il faut qu'ils ressemblent à des savants, en n'utilisant comme critère que le fait très superficiel que le savant connaît beaucoup de choses. Le travail des étudiants est dur. Mais l'architecture de leur cerveau ne dépasse pas les méthodes et réflexes de base, le minimum élémentaire. Une conséquence de cela est qu'ils ne retiennent même pas le savoir qu'on les a forcés à faire semblant de maîtriser. Dans beaucoup de cas, si vous interrogez une personne sortie depuis peu des études, elle ne se souvient presque de rien. Vous pouvez chercher un moyen de montrer "que cela a tout de même servi à quelque chose pour son cerveau", vous n'en trouverez pas. Vous êtes en face d'un édifice vide et improductif. Vous pourrez tirer beaucoup plus d'une personne qui n'a pas fait d'études mais qui a eu de la curiosité et de l'enthousiasme pour quelque chose. En prétendant former des savants sans prendre en compte la nature humaine, on ne forme pas des savants et on handicape la formation des quelques vrais savants.

Certaines lois existent non pour la raison qu'elles énoncent mais parce qu'elles permettent d'enfermer une partie de la population dans une certaine image. C'est une forme de propagande insidieuse. Par exemple les lois qui limitent les droits des femmes. Ces lois sont très difficiles à faire disparaître, parce que le changement d'image que cela implique terrorise proprement les "bénéficiaires" de la loi. Il existe un moyen assez simple pour leur faire accepter la disparation de la loi. Il faut leur fournir temporairement un autre moyen d'écraser leurs victimes. Supposons par exemple que l'on veuille abolir la loi qui interdit à une femme de posséder un compte en banque. Alors il faut par exemple proposer qu'une femme pourra disposer d'un compte en banque à condition de passer devant une commission d'hommes, qui décidera. Ainsi la loi a une chance d'être acceptée. Parce qu'un moyen est maintenu pour humilier les femmes et leur montrer qu'elles sont inféodées aux hommes. Quelques années plus tard, cette commission paraîtra à beaucoup de personnes comme étant une chose ignoble. Alors on pourra faire voter sa disparition et les choses rentreront définitivement dans l'ordre. Cette commission était en réalité bien moins ignoble que la situation qui précédait. Mais elle est plus visible, on ressent mieux ses effets. C'est pour cela que les oppresseurs des femmes l'ont acceptée et c'est pour cela que les humanistes la rejettent ensuite. C'est un tout de passe-passe entre les semblants et les non-dits, un détour pour arriver à la Justice.

On agit en fonction de l'image de soi qu'on a. Mais, même si l'image de soi qu'on a est à la base positive et utile à la Société, ce qu'on fait dans la pratique peut être mal. Il y a là un paradoxe. Malheureusement certains résolvent ce paradoxe en forçant sur le mauvais comportement. Il croient qu'ainsi ils affirment et même prouvent que ce comportement est bon. Par exemple un enseignant peut ressentir du remords parce qu'il a brutalisé un élève. Il l'a fait parce qu'il voulait mieux l'enseigner. Mais c'était une erreur. Pour se persuader qu'il a tout de même bien fait et qu'il est bien un bon enseignant, il va recommencer. Il va même développer toute une argumentation pour se justifier. Il doit continuer à brutaliser des élèves, pour "prouver" qu'il n'a pas eu tort de brutaliser le premier. Cette dérive peut être très difficile à arrêter.

Plus d'un croit que parce qu'il a une image d'une chose il maîtrise cette chose. Par exemple un jour j'ai proposé à un jeune informaticien de lui donner un CD avec un petit système "Linux" dessus. Il m'a répondu : "Non non pas besoin, je connais. Linux c'est un système avec une gestion "partitionnée" de la mémoire". Je connais...". Pour commencer sa définition est fausse en ce sens que tous les systèmes modernes gèrent leur mémoire de cette façon. Ce n'est pas une particularité de Linux. Ensuite, Linux c'est tout un Univers. Il y a des monceaux de choses géniales que l'on peut faire et qu'il faut donc apprendre à faire avec Linux. Tout cela, cet immense champ de découvertes, de compétence et d'efficacité, il l'a balayé par une simple définition qui tient en un petit paragraphe. Il sait ce qui est marqué dans le dictionnaire à la rubrique Linux donc il n'a pas besoin de s'intéresser à Linux... J'ai expérimenté la même chose en médecine. J'essaye régulièrement des tas de choses et je (re)découvre des effets peu connus et forts intéressants. Que ce soient les épices ou l'aspirine, il y a tout un monde de possibilités peu connues. Parfois j'en parle à des médecins, parce que cela peut résoudre des problèmes de certains de leurs patients ou même des problèmes que le médecin lui-même a. Assez systématiquement le médecin me débite de mémoire ce qui était marqué dans son cours sur ce chapitre et puis change de sujet. Il se souvient de la définition académique du produit ou de ses effets, donc je n'ai rien à lui apprendre. Deux ans plus tard il a toujours ses problèmes de santé. Il n'a même pas essayé ce que je lui expliquais alors que cela ne présente pas le moindre danger ni même de perte de temps.

On dit que les héros de romans et de films servent d'exemples à la jeunesse. J'ai vu un cas où cela me paraît douteux. Les films préférés d'un jeune adolescent de mes amis sont des opus héroïques comme "Gladiateur" ou "Le Dernier Samouraï". Dans ces deux films le héros est à la fois un brillant stratège militaire et un homme rompu au combat corps à corps. Quand on regarde cet adolescent, il a à peine assez de muscle pour se tenir debout. Pourtant il a une ossature qui ne demande qu'à se muscler. Il a une phobie de tout ce qui implique de la stratégie. Il ne joue qu'à des jeux vidéo pour lesquels une souris aurait assez d'intelligence : saute d'obstacles, conduite, baston... Chaque fois que j'ai essayé de lui montrer des jeux qui impliquent un peu de stratégie, par exemple des petits puzzles ou des commandes informatiques, quelque chose dans sa tête décide que ce n'est pas pour lui. Il refuse toute réflexion. Pourtant il en est parfaitement capable. C'est un enfant très intelligent. Physiquement et mentalement il est le contraire exact de ses héros préférés. J'ai un peu essayé de comprendre la situation. Ses parents ne "voient" rien. Pour sa mère il est un merveilleux gentil petit garçon absolument parfait. Ses amis à l'école sont comme lui. Il vit dans un milieu où aucun exercice physique ou intellectuel n'est jamais pratiqué. Les jeux vidéos et les séries télévisées servent à remplir le hangar vide qui lui sert d'esprit. Cela fonctionne comme une drogue. Il en va de même pour les films d'aventure. C'est une drogue hallucinogène pour compenser les choses qu'ils serait bien incapable de vivre. Ni les films ni les jeux vidéos ne sont mauvais en soi. Tout le problème est dans l'usage qu'on en fait. Dans d'autres familles les mêmes films servent de stimulants pour faire du sport ou des jeux d'esprit. J'en ai discuté avec l'adolescent. Le dialogue est possible avec lui, ce qui est déjà beaucoup. Il m'a répondu que c'est une question d'entraînement. Donc dans son esprit il y a : "Je peux être fort, adroit, cultivé et bon stratège", ce n'est qu'une question d'entraînement". En d'autres termes : "Je peux le faire quand je veux, c'est presque comme si je l'étais déjà, disons même que je le suis.". Grâce à ce bricolage de son image de soi, il ne sent pas qu'il y a un gros problème. Il a trouvé un stratagème pour s'anesthésier. J'essaye maintenant de lui expliquer que a) ce n'est pas une question d'entraînement mais d'apprentissage, b) l'apprentissage demande beaucoup de temps et il faut apprendre beaucoup de choses pour être capable d'apprendre, c) l'apprentissage n'est possible que quand on est enfant. Une fois qu'on est adulte on ne peut que mettre à profit et mûrir ce qu'on a appris étant enfant. L'entraînement est nécessaire pour parfaire et peaufiner ce qu'on a appris, voire pour apprendre de nouvelles choses. Mais c'est secondaire par rapport à l'apprentissage. Il va donc arriver à l'âge adulte en ayant appris peu de chose, comme la majorité des adultes hélas. La seule chose qu'il pourra développer sont ses muscles. Il pourra par exemple faire du bodybuilding. Il deviendra une armoire à glace mais totalement incapable de faire des gestes adroits ou par exemple de se défendre. Un gringalet qui aurait fait du karaté étant enfant pourra l'étaler en trois secondes. Ce qui peut sembler paradoxal est qu'il va dans une relativement bonne école. En théorie, l'école est précisément le lieu où on fait apprendre les enfants. Ses professeurs lui font faire de petits travaux manuels. Mais il n'en retire rien ou pas grand chose. Parce que l'école l'ennuie. Il expédie les travaux scolaires comme des corvées et se contente des notes qu'on lui donne. Pour qu'un apprentissage soit effectif il doit y avoir un enthousiasme de la part de l'enfant, un projet personnel dans lequel il s'investit ; une chose quelconque qu'il a décidé de construire. Alors il devient un aspirateur à apprentissages. En quelques années il peut atteindre des sommets. Les parents de cet adolescent sont en partie responsables de son manque d'intérêt pour l'Ecole. Ils se contentent de hurler quand il ramène de mauvaises notes. Ils n'ont aucun intérêt pour la matière elle-même ni pour les points de vue des professeurs. L'Enseignement et la Collectivité sont aussi responsables. Parce qu'ils se contentent de faire jouer aux enfants une comédie d'apprentissage. L'Enseignement belge est une grande pièce de théâtre où l'on se convainc les uns les autres que l'on fait de grandes choses. Une des pires crises de comédie a été "l'Enseignement Rénové" : on a forcé les enseignants et les enfants à faire semblant de mener de sympathiques et grandioses activités collectives. Tout était écrit mais il fallait faire semblant de découvrir les choses, de les classer avec passion dans un cahier et de partager son enthousiasme avec le reste de la tablée. Il faut aller dans les dictatures communistes pour trouver pire. Il faut des cours obligatoires. Par exemple pour apprendre à lire et à écrire ou pour apprendre les notions de base de la Loi. Mais cela ne doit prendre que quelques heures par semaines. Le reste du temps il faut laisser les enfants libres de leurs activités. Il faut des adultes autour deux, pour leur apprendre ce dont ils ont besoin pour mener à bien leurs activités, pour leur montrer de nouvelles choses, pour les surveiller et les empêcher de se mettre en danger... Les enfants ont un besoin vital de la présence des adultes. Il leur faut tout un panel d'adultes cultivés, habiles, adroits, fins psychologues, qui ont le don de l'enseignement, qui ont des choses à raconter, capables de structurer des projets collectifs des enfants... Mais c'est dans la tête des enfants que cela se passe, pas sur le tableau noir, ni dans les cahiers et encore moins dans la tête des adultes. Si on laissait les enfants ainsi vaguer à leurs passionnantes occupations, les talents et la souplesse d'esprit qu'ils développeraient leurs permettraient de suivre les cours obligatoire avec beaucoup plus d'acuité. Actuellement, avec huit heures par jour de cours obligatoires, à dix-huit ans les enfants sont juste capables d'écrire de façon lisible et de comprendre des textes pas trop compliqués. Si on réduisait à huit heures par semaine de cours obligatoires et si on fournissait les écoles en matériel de bricolage, en fauteuils, en livres, en pinceaux, en papier et en encre de chine, à dix huit ans on aurait des armées de calligraphes versés en philosophie et en hautes mathématiques ou capables de prouesses physiques hors du commun. En deux générations il n'y aurait plus de problèmes de guerres ou de pollution sur la Planète. Ces enfants devenus adultes seraient capables de produire beaucoup plus de biens tout en ayant beaucoup moins de besoins.

Dans la majorité des pays "modernes" il y a une hiérarchie. En haut de l'édifice il y a les ceux qui ont appris les Sciences Intellectuelles. En bas de la hiérarchie il y a ceux qui ont appris les travaux manuels. Cette image de société semble aller de soi. Pourtant quand on y regarde de plus près il y a des choses absurdes. Par exemple les intellectuels sont en général tout à fait incapables de faire ce que font les manuels. Ils ne sont donc pas "mieux" que les manuels. Il existe même des entreprises où les activités intellectuelles sont menées par les ouvriers. Les "intellectuels" ne sont là que pour le décors et sont même un handicap pour les ouvriers. Ce n'est pas la règle générale mais cela existe et cela montre que la structure de la société est artificielle. Plus amusant est le fait qu'il a existé et existe encore des collectivités où les manuels dominent les intellectuels. Les intellectuels y sont considérés comme utiles mais ne sont pas plus valorisés qu'un porteur d'eau. Un peu toutes les combinaisons sont possibles pour structurer une Société. Ce qui compte sont les "manipulateurs". C'est à dire les politiciens et les religieux. Ce sont eux qui créent les images de soi du peuple et engendrent ainsi les hiérarchies. Ils ont hélas souvent tendance à faire cela de la façon qui est la plus intéressante pour leurs intérêts personnels. C'est pour cela que les politiciens et les religieux sont au sommet de la hiérarchie de la plupart des pays. Mais ce n'est pas toujours le cas. Dans les pays où le peuple a un niveau spirituel élevé, beaucoup de culture et d'éducation, les politiciens et les religieux ont un pouvoir nettement moindre. Ils sont au service de la collectivité comme tout le monde. Dans ces pays aussi le salaire et les responsabilités d'un ouvrier sont beaucoup plus comparables à ceux d'un intellectuel. Réciproquement les intellectuels ont fait de la pâte à modeler et de la tapisserie quand ils étaient enfants et sont relativement habiles de leurs mains. En gros on peut scinder les manipulateurs en deux camps. Le camp de droite "n'a pas confiance en Dieu" et veille à maintenir une hiérarchie dans le pays. Donc de façon directe ou détournée ils vont limiter ce que les enfants apprennent à l'école. Le camp de gauche a confiance et essaye de d'augmenter au maximum le niveau de toute la population du pays. Ils savent que cela va limiter leur pouvoir sur le peuple mais ils se disent que si tout le pays s'élève, tout le monde s'élèvera y compris les manipulateurs.

Dans certaines dictatures la propagande d'Etat veille à ce que les jeunes se focalisent sur certaines activités. Par exemple le sport. Le dictateur va ainsi obtenir de meilleurs soldats, plus rapides et endurants sur le terrain. Si la propagande est bien faite, les jeunes considèrent le sport comme une "évidence" et toutes leurs préoccupations intellectuelles vont au sport. Leur vie sociale tournera autour du sport. Ils parleront entre eux des performances d'un tel et des problèmes de tibia d'un autre. Dans les démocraties on laisse les gens décider par eux-mêmes du monde d'activités dans lesquelles leurs enfants vivront. Dans les familles "culturellement développées" ces activités sont un véritable foisonnement : le grand-frère taille à la main les pièces en bois de son avion télécommandé pendant que la mère fait de l'horticulture, une tante de la littérature anglaise du 17ème siècle et un oncle de la balle-pelote. Cinq clubs de sport dans le quartier offrent des activités de groupe diverses. A dix-huit ans un enfant aura développé de nombreuses facultés d'habileté manuelle, de souplesse intellectuelle, de sens des responsabilités, d'endurance physique... Devenu adulte il se focalisera sans doute sur quelques activités précises mais en bénéficiant des dons qu'ils aura acquis dans toutes les disciplines pratiquées étant enfant. Cette liberté offerte par la démocratie connaît dans certains cas des dérives. Par exemple des parents décident que leur enfant sera champion de moto-cross, de violon ou d'échecs. Ils emmènent leur enfant dans un club ou chez un professeur dès l'âge de quatre ans. Ils ne lui offrent que des "cadeaux" en rapport avec le but recherché. Ils décorent sa chambre de posters orientés. C'est une situation de dictature à l'échelle familiale. Parfois l'enfant devient réellement bon dans la discipline visée et remporte au moins de petits succès. Il aura une personnalité déformée mais ne sera pas malheureux pour autant. Dans la majorité des cas c'est un échec. L'enfant se retrouve à l'âge adulte sans don particulier et estropié de tout ce qui n'avait pas de rapport direct avec le fantasme de ses parents. Certains commerçant aussi abusent de la situation. Ils proposent des jeux de cartes colorés ou des jeux vidéo, qui n'impliquent aucune activité intellectuelle véritable et un infime minimum d'aptitudes physique. J'ai de bonnes relations avec une souris sauvage qui vit dans mon grenier. Elle serait capable d'aller au bout d'une partie de ces jeux vidéo si on trouvait un moyen de l'y faire jouer en vrai. Son cerveau ne doit pas peser plus de quelques dizaines de milligrammes. Ces jeux sont tellement vides qu'ils devraient ennuyer les enfants en quelques dizaines de minutes. Les commerçants ont contourné le problème en les rendant hypnotiques : musiques répétitives, flashes, jolie couleurs, situations simples... Une partie des instincts et des réflexes humains sont détournés pour créer une passion pour ces jeux. Cela fonctionne comme une drogue, dans laquelle l'enfant se plonge corps et âme. Il évite ainsi les problèmes de la vie réelle. Ses relations sociales avec les autres enfants se bornent à échanger des jeux et à parler avec enthousiasme des personnages de ces jeux. On entend des phrases comme : "Ah oui Galactor il a dix-huit queues vertes sur sa tête il est génial !". J'ai vu un adolescent en arrêt devant une affiche publicitaire qui montrait un nouveau personnage de jeu. Il s'adressait à un ami : "Ah putain. Tu as vu son épée ?! Elle a un oeil. Ah putain !". Il était dans un état rare. Cette fascination est celle que les tribus sauvages ont pour les symboles et les divinités. C'est un réflexe humain, qui devrait d'ailleurs être davantage pris en compte dans le monde moderne. Dans les tribus, ces symboles et ces divinités accompagnent la structure de la tribu et l'apprentissage scolaire des individus. Il n'y a qu'à lire la Mythologie Grecquo-romaine pour se rendre compte de l'importance de ces symboles et de leur mythes. C'est ce qui permet à un individu de se comprendre et de comprendre les autres. C'est la culture. Dans les tribus africaines, des concepts mathématiques ou philosophiques avancés sont véhiculés par des symboles. Il est naturel et nécessaire que ces symboles exercent une fascination. Mais dans les jeux commerciaux il n'y a ni mythes ni apprentissages, encore moins de mathématiques ou de philosophie. Ou alors réduits à leur plus simple expression. Cela fonctionne comme un piège. On place un appas, quelque chose qui attire ou fascine. L'animal piégé ne trouve que la mort ou la servitude. Autre point commun avec les drogues : ces jeux sont vendus cent à mille fois le prix qu'ils ont coûtés pour leur création et leur fabrication. Il existe des jeux de cartes et des jeux vidéo extraordinaires. Mais ils n'intéressent que les familles "culturellement développées", où les enfants sont initiés pas à pas, de façon naturelle. Présentés aux enfants des autres familles, ils engendrent de la peur et un rejet. L'intelligence leur fait mal, exactement comme la perspective de responsabilités est ce qui fait le plus souffrir un toxicomane. A qui profite le crime ? La question doit être posée. Au Moyen Age il y avait deux sortes de gens de peuple : ceux qui avaient un métier et ceux qui n'en avaient pas. Si on était forgeron, maçon, tisserand... c'était parce qu'on l'avait appris dans sa famille. On avait vécu dans la profession depuis l'enfance. Ceux qui n'avaient pas de profession n'avaient rien appris dans l'enfance. C'étaient les traînes-misère, qui se contentaient de petites tâches voire versaient dans les petits délits. Cette situation du Moyen Age est critiquable : seuls les enfants des artisans avaient la possibilité d'apprendre un métier et ils ne pouvaient souvent pas choisir ce métier. Mais elle avait un avantage : les puissants étaient en partie soumis aux artisans. Si les artisans d'une ville refusaient de fournir un seigneur en matériel de guerre, celui-ci était bloqué. Les artisans sont des gens fiers de leur métier et conscients de leurs responsabilités. Au début de l'Ere Industrielle sont apparus le travail à la chaîne et la fabrication standardisée. C'étaient des révolutions, parce que cela permettait à des groupes d'ouvriers sans formation de produire en grande quantité des objets de qualité équivalente à ceux des artisans. Ainsi la société est devenue beaucoup plus riche et tout le monde avait un travail. Ce fut un miracle. Le hic, c'est que ces usines où l'on travaille à la chaîne sont gouvernées par les seigneurs des temps modernes : les industriels. Les "seigneurs" ont donc réussi à contourner le pouvoir des artisans. Ces seigneurs n'ont aucune envie que le temps des artisans revienne. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles on apprend si peu de choses véritables dans les écoles. On ne veut pas former des artisans. On veut des ouvriers, c'est à dire des personnes qui ont des capacités réduites et qui sont obligées de se plier au système pour avoir un niveau de vie acceptable. C'est vrai même pour les universitaires. C'est une situation dangereuse, parce que tous les seigneurs ne sont pas de bons maîtres. L'industrialisation sauvage nous a amené deux guerres mondiales, la pollution atmosphérique, le capitalisme sauvage, les délocalisations... Ce qu'il nous faudrait maintenant, c'est essayer de combiner le meilleur de deux mondes : l'artisanat et l'industrialisation. Il est évident que le travail à la chaîne est une atout. Parce qu'il peut être fait par des robots, parce qu'il donne la possibilité à tout le monde d'avoir un travail et parce qu'il permet de produire une même quantité de biens de façon plus écologique. Mais l'artisanat doit être réintroduit et partagé entre tous. Parce que l'artisanat est un puissant facteur de démocratie. Le système informatique Linux, par exemple, est la réaction des artisans contre le monopole des mauvais systèmes informatiques de Microsoft. Si nous étions tous des artisans, nous obligerions les industriels à produire des appareils un peu plus cher mais dont les pièces seraient plus solides et standardisées. Quand une télévision tomberait en panne, on se contenterait de changer ou de réparer soi-même la partie qui ne fonctionne plus. Si on désire améliorer sa télévision, on peut se contenter de changer soi-même la partie que l'on désire améliorer. Ainsi les objets vivraient beaucoup plus longtemps. Il faudrait donc en produire moins et il y aurait moins de déchets. Si l'humanité n'est faite que d'ouvriers, ils vivront dans la peur de l'inconnu et soumis aux puissants. Les artisans sont conscients de leur image d'eux-même et savent prendre les choses en main. Pour que l'artisanat se répande, il faudrait que les familles "culturellement développées" soient un peu plus militantes.

Des études scientifiques ont montré que la structures neurologique du cerveau d'un enfant porte les conséquences de ce que cet enfant a vécu. S'il a vécu dans un environnement sain, il aura un cerveau qui a une certaine composition. Si par contre il a vécu dans un environnement de guerre ou dans une famille détraquée, dans l'angoisse, ses neurones seront en parties atrophiés. Devenus adultes, ces enfants de la guerre sont beaucoup plus sensibles aux problèmes de stress et d'angoisse. Ils sont plus ou moins handicapés. En discutant avec des personnes qui ont de tels problèmes je me suis rendu compte qu'on peut aussi en parler d'une façon plus globale, en terme d'image de soi. Les enfants qui ont eu de bons parents ont quelque part en eux toujours cette image du bien-être et de la sécurité de l'enfance. On leur montrait et on leur expliquait les problèmes de la vie, tout en leur disant et en leur prouvant qu'ils en étaient protégés, qu'ils n'avaient pas à les affronter tout de suite. On leur donne des vrais câlins au moindre problème et à titre préventif aussi. C'est une formule équilibrée. D'autres parents vont vers un extrême ou vers un autre. Certains surprotègent leurs enfants, les isolent du monde. Une fois adultes, ces enfants sont obligés de rester chez leurs parents ou de consommer des drogues, pour continuer à vivre le bien-être et le confort de l'enfance. L'image du monde tel qu'il est, est trop atroce pour leurs cerveaux. Ils n'y ont pas été préparés. L'autre extrême consiste à importer dans la famille les problèmes du monde extérieur. Certains parents recréent dans la cellule familiale une atmosphère de guerre et de danger permanent. Devenus adultes ces enfants n'auront aucun souvenir d'enfance dans lesquels se réfugier. Ils seront des bêtes sauvages, obligés d'attaquer ou de fuir devant les problèmes. Ils se suicideront, de façon rapide ou en se détruisant lentement. Pourquoi certains parents font-ils cela ? Par bêtise, par insensibilité, par manque de culture, pour faire le contraire de ce qu'ils ont subi dans leur propre enfance... Parfois leurs intentions sont tout à fait structurées. Certains parents décident de faire sentir à leurs enfants qu'ils n'ont aucun droit, que toutes les méthodes de torture pourront être utilisées contre eux : coups, privations de nourriture, humiliations... Cela leur permet, pensent-ils, d'obtenir ce qu'ils veulent de leurs enfants. "On est bien obligés de sévir, sinon il n'en fait qu'à sa tête..." Certaines sectes organisent cela à plus grande échelle.

Tout le monde a en tête une image de la famille heureuse. On rêve à comment devrait être le papa, la maman et les enfants. On y rêve d'autant plus si on a soi-même eu une enfance douloureuse. Dans les familles réellement heureuse, ce qui permet le bonheur est la communication. Peu ou prou, tout le monde comprend tout le monde et attache de l'importance aux sentiments et aux besoin des autres. Ce que la famille est, l'image qu'elle forme, est le résultat de prise en compte des besoins de chacun. Mais une personne qui a eu une enfance dure n'a en général pas appris à communiquer. Elle se retrouve donc avec en tête une image très précise de la famille idéale mais peu ou pas d'aptitude à la communication. Si elle trouve un partenaire, elle va essayer de lui imposer son rêve tout en étant insensible aux besoin de l'autre. Cela mène a des situations cataclysmiques, à la rupture, parfois jusqu'au meurtre ou au suicide. En général les deux partenaires ont le même problème. Qui se ressemble s'assemble. Car une personne qui a appris à communiquer rejettera presque toujours une personne qui ne fait que rêver. Chacun des deux partenaires oscillera entre des tentatives pour imposer son rêve à l'autre et des tentatives gauches de se plier au rêve de l'autre. Les sentiments iront de la colère extrême à la culpabilité extrême. Chacun est réellement et sincèrement amoureux de l'autre. Ce qu'il fait, il le fait pour le couple, il le fait pour l'autre. Pour réaliser le rêve de ce qu'il croit être la source du bonheur. C'est en désespoir de cause qu'il se voit obliger de faire plier l'autre, de la casser pour le mettre dans le "bon" moule. A condition d'être pris en charge par des professionnels, certains de ces couples arrivent à surmonter cette situation de guerre. Ils réussissent à apprendre à communiquer. Parfois par des méthodes très détournées mais cela fonctionne. D'autres cas sont désespérés. Certains individus passent leur vie à créer des couples destructeurs. Ce problème se retrouve aussi dans les communautés, les entreprises, les gouvernements... ou concentré dans l'esprit d'une seule personne.

Une erreur que l'on pratique dans beaucoup de systèmes d'éducation est de croire que l'image de soi d'une personne est statique, comme les pages mortes d'un livre. Donc on apprend des centaines de milliers de choses aux enfants, des données et des procédures, comme si on supposait que chaque chose allait se loger à la bonne place dans l'esprit/classeur de chaque enfant. On se permet même de décider du futur de l'enfant en fonction de son aptitude et sa bonne volonté à retenir ces informations stériles. Cela nie les sentiments et l'intelligence de l'enfant. Les sentiments sont quelque chose qui ne s'apprend pas mais qui se développe. On naît avec mais il faut apprendre à vivre avec : à les connaître, les gérer, les combiner à d'autres sentiments... Une personne dont les sentiments sont mal gérés ou atrophiés est une enveloppe vide ou un danger. Nos sentiments sont le fondement de notre image de nous-mêmes. L'intelligence quant à elle sert à produire des images. Le cerveau d'un humain est capable de produire des images qu'il ne contenait pas la minute d'avant. Ce sont les inventions, les stratégies, les poèmes (qu'ils soient littéraires, musicaux ou picturaux)... Développer l'intelligence d'un enfant est un travail autrement plus ambitieux que ce que l'on fait actuellement dans les écoles. C'est une machine divine qu'il faut faire pousser, qu'il faut mettre en route. Elle se nourrit d'images, de procédures, de sentiments... Elle se nourrit de tout mais surtout elle apprend lentement à produire. Pour cela elle ne classe pas les images : elle les résorbe entre elles, elle les digère. Le cerveau d'une personne intelligente contient en réalité beaucoup moins de choses qu'on en a l'impression. Mais ces choses sont tissées entre elles, recoupées et associées. Elles sont à disposition de l'intelligence de la personne pour être associées et recoupée avec toute nouvelle donnée qui se présenterait. Ce développement exceptionnel du cerveau, cette image de soi vivante, ne s'obtient pas par la contrainte. C'est un enthousiasme que chaque enfant a et qu'il faut se contenter de nourrir. Certes il faut utiliser de brefs moments de contrainte, à l'occasion, pour cristalliser certaines choses dans l'esprit des enfants et leur faire faire certains progrès. Si c'est fait dans l'intention de laisser les enfants développer leur intelligence, ils s'y prêteront de bonne grâce. Les données et les contraintes sont donc nécessaires pour le développement de l'intelligence des enfants. Comme ce sont deux choses faciles à faire, l'Enseignement se contente de ne faire que cela, avec un résultat catastrophique. C'est comme si on enterrait une plante sous du fumier. Le fumier est très bon pour la pousse des plantes mais en petites quantités. Si on enterre une plante sous le fumier elle meurt en quelque jours. Elaguer un arbre fruitier est nécessaire pour qu'il donne de beaux fruits. Mais si on passe son temps à l'élaguer il restera petit et ne donnera qu'un ou deux petits fruits par an. Voire il mourra. Les Ministres se plaisent à dire que les enseignants sont libres d'enseigner aux enfants. On m'a proposé d'enseigner et j'ai reçu les documents du "Programme". Ma conclusion au terme de la lecture de ces documents est qu'il m'était interdit d'enseigner. D'autres personnes m'ont rapporté la même impression. Le système mis en place par l'Etat favorise les enseignants "moutons" qui se contentent d'ânonner les matières. Si un enseignant a des ambitions, soit il se plie au système soit il quitte l'Enseignement. Il existe des enseignants ou même des écoles qui font de la Résistance. Mais c'est très difficile. Il n'y a pas de menace de mort contre eux mais leur travail ressemble par bien des points à celui d'un groupe de Résistants contre une puissance d'occupation. On veut empêcher les enfants les enfants d'apprendre à réfléchir tout comme jadis on voulait empêcher les bretons de parler breton. On empêche au cerveau d'apprendre à se parler dans sa propre langue. Tout en faisant croire aux parents qu'on s'occupe super-bien des enfants et qu'on assure leur avenir. La seule partie de l'Enseignement où le développement des enfants semble officiellement accepté est la maternelle. Dans les bonnes écoles maternelles on fait de vrais efforts pour stimuler les enfants. Les enseignants ont le droit de réellement s'occuper des enfants. Comme par hasard les enseignants de maternelle sont les plus mal payés de la profession... Il m'arrive de tans à autres d'expliquer à un étudiant une chose qu'il n'a pas comprise aux cours. En une demi-heure je lui fais comprendre ce qui lui était resté radicalement obscur après 200 heures de cours. Ils en sont tout abasourdis. La recette est pourtant simple : même s'ils ont 20 ans je leur parle comme un enseignant de maternelle à un enfant. Je m'occupe d'eux. Au lieu de jouer une pièce de théâtre sur une estrade.

Dans la Nature certains insectes sont toxiques. Ils se parent de couleurs vives, pour se signaler aux prédateurs : "Youhou ! C'est moi l'insecte toxique ! Comme celui que vous avez essayé de manger il y a deux mois et que vous avez recraché !". Il existe des insectes non toxiques mais qui se parent pourtant aussi de couleurs vives. Ils jouent sur la réputation des insectes toxiques. Cela en coûte pour les insectes toxiques. Parce que comme il existe des insectes colorés non toxiques, il faut plus de temps aux prédateurs pour apprendre à se méfier des insectes toxiques. Donc ils tuent plus d'insectes toxiques avant de comprendre. D'une certaine façon il en va de même dans les administrations. Les administrations sont nécessaires pour la bonne marche d'un pays. Mais on crée en parallèle des administrations inutiles. Elles se trouvent dans des bâtiments, elles ont des statuts, elles contiennent des fonctionnaires qui touchent un salaire, elles remplissent des tâches... elles ressemblent tout à fait à des administrations. Mais ce ne sont pas des administrations, puisqu'elles sont inutiles à la population et à la bonne marche du pays. Pire : pour se rendre importante et par incompétence elles créent beaucoup de problèmes et de rancoeurs au sein de la population. On ne démantèle pas ces administrations parce que certains puissants y trouvent leur compte : elles forment une masse mobilisable pour les syndicats, elles offrent des emplois dont les élus peuvent se vanter en campagne électorale, elles justifient des mouvements de fonds que l'ont peut écrémer, elles permettent de donner des promotions à des relations... Un ami à qui j'en parlais me disait que l'on appelle une telle administration une "sinécure". C'est à dire un endroit où les personnes un peu sensées se rendent compte qu'on ne fait rien de réellement utile, on s'ennuie, mais on est prié de ne pas le dire et il faut que les choses continuent...

Certains parents n'apprennent pas de limites à leurs enfants. Cela arrive plus fréquemment quand c'est un enfant unique. Cela donne des enfants qui ne répondent pas quand on leur pose une question, qui prennent n'importe quel objet pour jouer avec, qui font du désordre n'importe quand... Ces parents ont une image bien précise de ce que deviendra leur enfant. Par exemple ils le destinent à succéder à la tête de l'usine familiale. Ils s'occupent beaucoup de l'enfant et le traitent presque comme un adulte. Il est l'animal familier de leurs rêves les plus profonds. Le principe est que tant que l'enfant ne fait rien qui aille à l'encontre des rêves de ses parents, il fait ce qu'il veut. Ces enfants sont peu sociabilisés et on appris peu de choses, parce qu'ils n'ont pas eu d'enfance. Quand ils grandissent ils deviennent des catastrophes ambulantes. C'est à ce moment que les parents se rendent compte que l'enfant ne peut matériellement pas réaliser leurs rêves. Alors ils deviennent d'une extrême cruauté avec lui.

Il est assez désagréable pour un éducateur d'expliquer des choses à des enfants et de les voir bailler d'ennui. C'est encore plus désagréable quand ces enfants sont venus trouver l'éducateur parce qu'ils veulent faire quelque chose et l'éducateur ne fait que leur expliquer ce dont ils ont besoin. Le problème est que les enfants ne perçoivent pas la connexion entre leurs rêves et ce qu'on leur explique. Ou pire : ils n'ont pas de rêves. Un enfant s'intéresse réellement à une matière quand il perçoit ce qu'il pourra faire avec. Certains se préoccupent de ce qu'ils pourront faire dans l'immédiat, d'autres pensent à plus long terme. Cela dépend des personnes. Le problème dans notre Société est qu'on veut éviter que les enfants aient des rêves. Parce qu'on veut qu'ils réalisent les rêves des puissants : les industriels, les chefs religieux, les politiques... Il est donc difficile de leur apprendre des choses. On utilise des palliatifs : menaces de punitions, promesses, chantages, chagrin des parents... Le rêve de l'enfant devient très simple : éviter les coups et/ou recevoir un nouveau jeu vidéo. Pour cela il ne lui sert à rien de comprendre ce qu'on lui enseigne. Il ne sert à rien de voir les liens de ce qu'on lui enseigne avec d'autres matières. Il ne sert à rien de devenir un inventeur ou un artiste. Il ne sert à rien de devenir compétent dans un métier. Il faut seulement mettre un peu d'ordre dans la matière qu'on lui enseigne, apprendre des mots et des procédures par coeur et retaper cela aux interrogations et aux examens. Au mieux, à la fin de ses études, il sera capable de mettre de l'ordre dans des idées simples et de comprendre des textes techniques pas trop compliqués. Tout élève ou étudiant qui sort de ce schéma sera éliminé.

Une personne qui a compris des choses, qui en a des images claires en tête, ne peut parfois pas comprendre que les autres ne les comprennent pas. Si les autres refusent ces idées elle croit que c'est par méchanceté. Elle ne comprend pas que pour eux ces idées sont du charabia, une langue incompréhensible. On n'achète pas un chat dans un sac. Le quiproquo est d'autant plus inévitable qu'ils font semblant de comprendre, pour ne pas perdre leur prestige. Dans certaines entreprises on met à la porte tout spécialement ces personnes qui ont des idées et qui dérangent. Le pire, aux yeux des dirigeants, est qu'ils savent que ces idées pourraient être bonnes. Si cela venait à être prouvé ils perdraient une part de leur prestige. Les personnes qui ont proposé ces idées pourraient leur monter dessus et prendre leurs places. C'est un dialogue de sourd entre les créatifs et les établis.

A priori chacun cherche à avoir la meilleure image possible de soi. Mais le plus important est d'avoir une image de soi. Si les seules personnes disponibles autour de vous vous donnent une mauvaise image de vous, vous allez pourtant rester auprès d'elles. Parce qu'elles vous donnent une image, quelle qu'elle soit.

Un enfant qui est négligé par ses parents ou maltraité peut avoir tendance à laisser traîner ses jouets partout dans la maison. Il fait cela pour signaler sa présence. Au travers de ses jouets, qui font partie de son image de lui-même, c'est lui-même qu'il étale dans la maison, pour tenter d'exister.

Un chirurgien sait que pendant une opération le patient ne doit surtout pas voir l'intérieur de son corps ni même en entendre parler. Il pourrait en résulter des problèmes psychologiques graves. Les informaticiens rencontrent le même problème avec leurs clients. Quand on répare ou aménage le matériel ou les logiciels d'un ordinateur, il vaut mieux ne pas commenter ce qu'on est en train de faire. Il faut dire au client que tout se passe bien et l'ordinateur fonctionne de mieux en mieux. L'idéal est que le client ne soit pas présent. Un client auquel on explique ce qu'on est en train de faire, les problèmes temporaires qu'on rencontre, peut devenir fou d'angoisse. Il ne supporte pas ce qui se passe. Ce problème que rencontrent les chirurgiens et les informaticiens tient peut-être à un manque d'éducation des patients et des clients : ils n'ont pas appris à vivre ces situations, à assumer les réalités.

Une certaine image de la famille veut que les membres de la familles sont liés entre eux. Ils s'entraident, travaillent ensemble, se comprennent, mangent ensemble... La Société de Consommation tend à briser ce nid. Par la publicité et diverses manipulations, les entreprises s'ingénient à devenir l'interlocuteur privilégié de chaque membre de la famille. On n'écoute plus ses grand-parents, on écoute la télé. On ne cuisine plus amoureusement de soupe pour ses enfants, on achète de la soupe en boîte. On ne s'occupe pas des enfants, on les envoie en parking à l'école où on leur apprend le minimum nécessaire pour être des rouages des entreprises. On ne se parle plus ni se prend dans les bras les uns des autres pour déstresser et être en bonne santé, on consomme les anxiolytiques vendus par les entreprises. On ne n'essaye plus de comprendre ses voisins, on se contente de gagner leur intérêt en leur prêtant un film DVD acheté au magasin. Tous les axes de communication entre humains se brisent pour se tourner et s'établir vers le Système.

Un scénario fréquent dans les familles où on maltraite les enfants est que les parents montrent en public qu'ils adorent les enfants. A leurs amis, ils racontent avec force détails combien ils aiment leurs enfants et sont prêts à faire des choses pour eux. Ils racontent les cadeaux qu'ils ont l'intention de leur faire, les assurances qu'ils vont souscrire pour eux... Parfois ils étalent une grande culture en matière de pédagogie. Ils ont lu des livres et on voit que cela les a passionnés. Les gens qui écoutent ces images d'amour parental sont très émus. Le soin d'un parent pour son enfant n'est-il pas la plus belle chose au Monde ? Quand un de ces enfants vient raconter qu'il n'a pas reçu à manger depuis une semaine et qu'il ne sent plus son pied droit depuis la dernière fois que ses parents ont utilisé des électrodes pour le torturer, les gens éprouvent de la haine pour lui. Comment peut-il dire de pareilles horreurs sur des parents aussi géniaux, aussi aimants ? Ce gosse est crapuleux ! Peut-être a-t-il été puni mais vraiment il le mérite. Ainsi certains enfants se font abuser et maltraiter toute leur enfance, virtuellement au vu et au su de tout le monde. L'entourage se joint aux parents pour rabrouer ces enfants, au nom de l'Amour. On peut se demander ce qui se passe dans la tête de ce type de parents. En gros il y a deux extrêmes. A un extrême il y a des parents qui ont parfaitement conscience de ce qu'ils font. Ils se défoulent sur leurs enfants en toute connaissance de cause et racontent des bobards aux voisins pour éviter les problèmes. Ces parents-là ont le sentiment d'avoir pleinement le droit de faire ce qu'ils font, ils le considèrent comme naturel. Ils peuvent même avoir des théories très construites pour tout justifier. A l'autre extrême on trouve des parents qui aiment réellement leurs enfants mais qui ne les voient pas. Ils rêvent sincèrement et profondément de bâtir une famille heureuse, où chaque enfant trouvera son épanouissement. C'est cette envie sincère qu'ils expriment devant les amis et la famille. Le problème, c'est que les enfants ne font pas exactement ce que les parents rêvent. Pire : comme on ne s'occupe pas vraiment d'eux, les enfants finissent par vivre de leur côté, avec leurs propres lois et préoccupations. Les parents se sentent alors obligés de "corriger" ces enfants, de les ramener dans le droit chemin de leur beau rêve. Mais ils ne savent même pas ce que le mot dialogue veut dire. Tout ce qu'ils arrivent à faire, c'est punir l'enfant, le frapper d'une façon où d'une autre jusqu'à ce qu'il se comporte "comme il faut" ou au moins qu'il ne fasse rien d'autre. Ces parents-là ressentent qu'ils n'ont pas le choix, que c'est l'enfant qui les force à faire cela. Alors ils construisent des théories, pour expliquer la particularité de leur enfant, pour justifier qu'il est est nécessaire de le torturer. C'est ainsi qu'ils dérivent vers l'autre extrême énoncé ci-dessus.

Un problème est que l'on peut se croire doué de talents que l'on a pas. On rêve à des choses extraordinaires qui sont pourtant inaccessibles. Le contraire existe aussi. Certaines personnes sont persuadées qu'elles sont incapables de faire certaines choses. On a beau leur expliquer que ces choses sont faciles, qu'on va les aider à y arriver, que ce n'est pas grave si cela rate au début... Elles répondent de façon obstinée qu'elles ne peuvent pas le faire. Il y a quelque chose en elle qui a décidé que c'est impossible. C'est un mur plus infranchissable que celui d'une prison. Ces deux comportement extrêmes ; les rêves exaltés et le mur de la bêtise, se retrouvent souvent en même temps chez les personnes qui en souffrent. Ces personnes sont en rupture avec la réalité. Elles ne savent pas se confronter à la réalité ou n'osent plus le faire. Elles rêvent qu'elles vont faire une chose extraordinaire qui va leur attirer l'amour de tous, tout en étant incapables ou refusant de donner de simples gestes d'affection aux autres. Elles se réfugient souvent dans la drogue, les sectes ou les jeux vidéos.

On est ce qu'on fait. La personne qui présente la météo devient "Monsieur Météo" ou "Madame Météo". Toute notre vie nous cherchons à recevoir ce type d'étiquettes. Nous en avons un besoin irrépressible. Un enfant a une grande valeur pour nous s'il nous appelle "papa", "maman", "tonton", "tata", "mamie", "papy", "parrain", "marraine"... Certaines personnes acquièrent le niveau nécessaire pour ne pas essayer d'obtenir ces étiquettes par la force. Elles résistent à la tentation ou lui deviennent transparente. Elles ne cherchent à avoir que les étiquettes qu'il est justifié qu'elles aient. Pour d'autres personnes hélas tous les moyens sont bons : manipuler un enfant, tricher aux examens, faire jouer des relations, pirater des banques de données, se doper... Dans une société, un certain pourcentage de personnes méritent raisonnablement leurs étiquettes et un certains pourcentage les usurpent totalement. Cette part d'usurpation est généralement tolérée. Par exemple aux examens universitaires les professeurs savent parfaitement que beaucoup d'étudiants n'ont pas les qualifications nécessaires pour leur vie professionnelle future. Tant que ces étudiants arrivent à faire semblant d'être qualifiés, on les laisse passer. Inversement il y a parfois des personnes qui remplissent une tâche sans en avoir l'étiquette. Un ami me racontait le cas d'une vénérable multinationale basée en France. Les directeurs de cette multinationale se réunissaient au dernier étage et débattaient des décisions à prendre. Ensuite les documents signés étaient transmis à la secrétaire qui travaillait l'étage au-dessous. C'était une vieille dame à permanente et lunettes. Tranquillement, elle faisait le tri dans les documents. Elle modifiait tout ce qui ne lui convenait pas et ajoutait ce qu'elle voulait. En fait c'est elle qui dirigeait la multinationale. Elle le faisait à merveille et de main de maître. Elle avait travaillé pour feu le fondateur de la multinationale et perpétuait son esprit. Elle était son clone. Les directeurs prenaient leur travail très au sérieux. Ils ne savaient pas qu'ils n'avaient d'autre importance que de faire croire au reste du monde que la multinationale est dirigée par un groupe d'hommes respectables. Dans le cas de cette multinationale il y avait une symbiose parfaite entre la tête pensante et le groupe des directeurs. En général les figurants ne supportent pas les têtes pensantes. Cela commence dès les études, où on élimine les fortes têtes. Si une personne qui a le sens des choses est obligée de s'entourer de figurants, il y aura un affrontement perpétuel. Elle devra sans cesse remettre les figurants à leur place. Dans un pays, tout revient presque à se demander quelle est la proportion entre les gens qui méritent leur étiquette, ceux qui la mériteraient et ceux qui l'usurpent. Si la proportion de personnes qui méritent leur étiquette est élevée, le pays se portera bien et sera résistant aux problèmes. Les quelques frimeurs présents ne dérangeront pas. On fera le travail à leur place et tout ira bien. Si la proportion de frimeurs augmente, les problèmes commencent. Les frimeurs passent leur temps à se battre et à se faire des relations pour obtenir des postes plus élevés ; des étiquettes plus ronflantes. Ils s'agglutineront aux postes clés pour faire partir les personnes capables et faire nommer plus de frimeurs encore. Qui se ressemble s'assemble.

J'ai rencontré un problème chez deux adolescents. Ce sont tout deux de petits intellos, fascinés par la Recherche Scientifique. Il y a en eux une angoisse profonde : "Que ce passera -t-il quand on aura tout trouvé ?". Pour eux, il arrivera un jour où on comprendra enfin totalement les lois physiques de l'Univers. Leur terreur est que ce jour marque la fin de la Recherche Scientifique et par extension la fin de la raison d'être de l'Humanité. C'est la fin du Monde. L'un des deux pensait presque au suicide pour ce jour fatidique. Je les ai rassurés en leur expliquant plusieurs choses. D'abord qu'il y a autre chose dans la vie que la Recherche Scientifique. Il y a aussi le fait de s'occuper des autres, de les comprendre. C'est une Recherche permanente. Ensuite, même si on comprenait enfin parfaitement l'Univers, ce qui n'est pas pour bientôt, il y aurait un travail sans fin pour mettre à profit ce qu'on aurait compris. Il y a une infinité virtuelle d'inventions à faire, de machines à dessiner et de nouvelles théories mathématiques à construire. Il y a du pain sur la planche pour jusqu'à la fin des temps.

Le pouvoir corromps. Une mère de famille de mes amis a décidé que le téléphone ne devait plus être utilisé. Elle a pris cette décision suite à la réception d'une très grosse facture de téléphone. Cette facture est due au fait qu'elle et son fils passent des heures au téléphone pour ne rien dire. Pour expliquer qu'elle a acheté un pain, elle commence par décrire la cravate d'un passant qui passait au moment où elle garait sa voiture pour faire un achat avant de se diriger vers la boucherie qui se trouve pas loin de la maison où habite la belle-fille du boulanger. Son fils ne peut même plus téléphoner à sa famille. Pourtant ce n'est pas cela qui a fait la facture. Et les coups de téléphone à la famille, c'est important. Elle est passée d'un extrême à l'autre : d'une logorhée de coups de fils inutiles à un interdit absolu même pour l'essentiel. Le montant élevé, effrayant, de la facture de téléphone, lui a donné le pouvoir, le poids nécessaire pour ordonner cela. Elle a maintenant l'image d'une autorité confirmée. La catastrophe de la facture puis l'interdit sont nécessaires pour affirmer sa stature. Le drame et le sacrifice confirment le pouvoir. Son fils a compris qu'il y a un jeu de pouvoir. Cela le stimule comme un prédateur qui flaire l'odeur du sang. Il donne des coups de fils éclairs pour dire à son interlocuteur : "Retéléphone-moi vite j'ai des choses très importantes pour toi !". Il se sert de l'interdit du téléphone pour essayer de plier ses interlocuteurs à son jeu. Coupée du monde, cette famille se replie sur elle-même. Cela confirmera encore le pouvoir de la mère sur le fils et du fils sur la mère. Il existe des abonnements de téléphone qui permettent de téléphoner gratuitement en heures creuses. Pour une somme ridicule de 12 € par mois on peut téléphoner à volonté. Techniquement, ce que font cette mère et son enfant est donc radicalement idiot. Ce qu'ils veulent, ce sont les jeux de pouvoir. Tous les prétextes sont bons, jusqu'au ridicule. Humilier leurs interlocuteurs ne les dérange pas, que du contraire. C'est une caractéristique des dictatures. Tous les prétextes sont bons pour permettre à la police de perquisitionner chez les gens et leur imposer des charges. Les individus eux-mêmes se sentent gonflés de prestige quand la police leur demande d'espionner leur famille. Le pouvoir détruit la famille.

Parfois, pour un individu déséquilibré, tuer une chose est la seule façon de la garder vivante. Tout au moins de la garder vivante comme il la rêve. Si la réalité s'éloigne trop de ses rêves il en souffre. Alors il préfère tuer, détruire la chose réelle pour n'en garder que ce qu'il rêve dans son image de lui-même.

Un ami et moi jouions avec un petit garçon. Sans faire exprès nous lui disons une chose qui lui fait peur et il se met à pleurer. Nous arrêtons tout de suite le jeu et essayons de comprendre le problème et de le rassurer. La question est vite réglée mais le petit garçon est toujours triste et part dans un coin. Je le laisse faire. Mais mon ami le rejoint et commence tout un cinéma pour le mettre de bonne humeur, le faire rire, lui proposer que son problème est fini... C'est une erreur. Il demande à l'enfant de jouer une comédie sociale, la comédie du bonheur. Je sais que l'enfant a une blessure et qu'il faut lui laisser le temps de cicatriser. Cela ne dure que quelques dizaines de minutes. C'est beaucoup plus rapide qu'une blessure au bras. Mais il faut tout de même laisser le temps. Ce temps écoulé, l'enfant est redevenu joyeux. C'est vers moi qu'il est venu, pas vers mon ami.

Dans certaines familles un enfant peut faire des efforts considérables pour être aimé sans jamais y parvenir. Alors qu'un autre enfant est adoré sans fournir le moindre effort. Il y a plusieurs raisons possibles à cela. Une des explications est que l'enfant mal aimé fait des choses que les parents ne comprennent pas, des choses auxquelles ils ne sont pas sensibles, qui ne peuvent pas être casées dans leur image d'eux-mêmes. L'autre enfant par contre fait des choses auxquelles les parents sont très sensibles. Comme simplement leur sourire par exemple. Ou être un garçon.

Quand il se trouve dans son groupe d'amis ou de lieutenants, un adolescent à problèmes ou un dictateur est obligé de s'en tenir à l'image qu'il veut avoir au sein de ce groupe. Donc il se montrera violent, narquois ou toute autre attitude négative. Pour discuter raisonnablement avec l'adolescent ou le dictateur il faut essayer de le prendre à part. Une fois qu'il n'est plus visible de son groupe il y a plus de chances de pouvoir discuter avec et se mettre d'accord sur des choses sensées. Beaucoup de crises se résolvent ainsi. Une bonne option est de prendre chaque membre du groupe à part, l'un après l'autre. Ainsi on arrive parfois à changer l'orientation du groupe en bloc.

Certaines personnes, en particulier des adolescents, sont en famine de recevoir des marques de considération. Leur rêve, c'est que la voiture d'une vedette s'arrête devant leur porte et qu'ils soient invités à embarquer. S'ils voient qu'une personne rend un service à un de leurs amis et qu'ils trouvent que c'est chic, les manipuleront et ramperont pour que ce service leur soit rendu aussi. Peu importe si ce service leur est inutile. C'est le geste qui compte, la marque d'attention associée au service rendu. Si une personnalité locale leur téléphone un jour, ils en ressentiront un kick qui approche l'orgasme. Ils n'auront de cesse de faire recommencer cette expérience éblouissante. Ils geindront et arrangeront pendant des mois dans l'espoir de recevoir un deuxième coup de fil. Les vendeurs par correspondance ou certains marchands de jeux vidéo connaissent bien le phénomène et jouent dessus. Ils leur envoient des lettres "personnalisées", leur parlent des privilèges "exceptionnels" qu'ils leur accordent... Cela fonctionne très bien et les conforte dans leur maladie mentale. Ils sentent que certains reconnaissent leurs grand mérite et haute importance. Cela vaut bien d'acheter les produits proposés par le vendeur... Pour qu'il y ait un tel appel d'air il faut bien entendu qu'il y ait un grand vide à l'intérieur de ces personnes. Elles ont un solide complexe d'infériorité, elles se sentent mal dans leur peau tout en le niant en permanence. Les frasques que font ces personnes les détournent de ce qui pourrait réellement les rendre importantes. Par exemple un ado va s'adonner à fond aux jeux vidéo en ligne, qui lui pompent son temps et l'argent de ses parents. Il n'aura plus de temps pour l'école, il fera le strict minimum pour expédier ses devoirs et ses leçons au jour le jour. Pourtant l'école est la seule voie solide à sa disposition pour obtenir un diplôme élevé et un statut social important. Il vit les rêves de gloire qu'on lui vend et laisse pourrir tout ce qui peut donner un vrai prestige. Peut-être parce que cela demande du travail et d'apprendre à travailler. Une mère de famille va se consacrer à ses achats par correspondance au lieu de s'occuper de sa famille. Elle est charmée par les compliments que lui font les vendeurs. Elle se vante auprès de ses voisines. Elle ne voit pas que ses enfants sont sa seule voie pour être réellement importante, être une personne qui compte et que l'on estime. Hélas, pour s'occuper des enfants il faut faire des efforts, il faut les aimer. Elle n'en est pas capable. Les organisateurs d'attentats suicides au Proche Orient comptent beaucoup sur ce phénomène. Le processus d'occupation israélien a détruit le tissu économique palestinien. Nombre de jeunes palestiniens n'ont plus d'avenir, ils ne sont plus rien. Le Hamas leur offre la possibilité de devenir en un éclair une personnalité de premier plan, qui aura joué un rôle important dans l'histoire du pays. Ils jouent aussi sur le fait que ces jeunes désespèrent de ne pas pouvoir aider leur famille. Le Hamas propose de payer une forte somme d'argent à leur famille après l'attentat.

Un problème est quand une personne ne sait pas ce que représente une chose qui fait partie de son image de soi. Par exemple un chef d'entreprise peut ne pas avoir conscience du travail qui a été nécessaire pour créer un logiciel utilisé dans son entreprise. Si un escroc lui en demande une copie gratuite, il donnera l'ordre à ses informaticiens de la lui donner. Il veut se montrer grand prince avec l'escroc, s'attirer son estime. L'escroc n'a d'estime pour personne. Il se contentera de revendre le logiciel à la concurrence. Les informaticiens peuvent développer un profond ressentiment de voir leur travail ainsi jeté en pâture. Inversement un autre autre chef d'entreprise peut croire qu'un logiciel de son entreprise est la quatorzième merveille du monde et la jalouser jusqu'au morbide. Ce logiciel est par exemple un petit machin recopié dans une revue, quelque chose de tout à fait standard et de bon sens. Il n'a aucune valeur et n'a demandé aucun travail. Mais le chef d'entreprise va acheter deux ordinateurs sécurisés et quatre portes blindées pour le protéger. Il va rendre la vie impossible à tout le monde, se montrer très désagréable.

Un de mes amis chef d'entreprise fait une sorte de blanchiment d'argent. Ce que sont entreprise lui rapporte, il le joue au jeu. Simplement dans les machines à sous des cafés. Il y perd ainsi au moins la moitié. Ce que lui rapporte son entreprise semble ne pas être de l'argent pour lui. C'est de l'argent sans valeur. Le peu que lui rendent les machines à sous, ça par contre c'est du bel et bon argent, qui lui permet d'acheter avec délice ce qui lui plaît. Cela devient vraiment "son" argent. A cause de cela il ne paye pas très bien ses employés. Tout part dans les machines à sous. Certains de ses employés savent cela et en conçoivent une certaine aigreur, ce qui baisse d'autant leur rendement. Tout le monde y perd, sauf les propriétaires de machines à sous. Une explication possible est que cet homme a été très pauvre quand il était jeune adulte. Il a rêvé de gagner sa vie au jeu. C'est un des mythes qui circulaient dans son milieu social : le jeune homme prodigue qui gagne sa vie au jeu, sans effort, parce qu'il a la "baraca". Il a rêvé de cela à en devenir malade. Il a essayé des martingales au casino, sans succès bien sûr. Il a fini par trouver un travail et est devenu patron d'une petite entreprise, avec des rentrées d'argent honnêtes. Cela lui a en quelque sorte permis de réaliser son rêve : gagner sa vie au jeu... Tout est faux et honteux mais il a l'abstraction d'esprit nécessaire pour vivre des moments enchantés devant ses machines à sous. Quand il fait un gros gain, il en frétille de joie rentrée. "Hi hi, je les pille littéralement ! Peut-être vont-ils me demander de partir mais il faut au moins d'abord qu'ils me payent mon gain !". Le tenancier du café n'a certainement aucune envie de lui demander de partir puisqu'en un an de jeu mon ami lui a peut-être payé de quoi refaire la décoration du café... Mon ami ne fait rien d'illégal et il n'est pas le mauvais bougre avec ses employés. A une autre échelle, un problème planétaire sont les chefs d'entreprise et directeurs de multinationales qui jouent l'argent de leur entreprise en Bourse. Ils investissent l'argent de leurs employés dans la concurrence. Ils ont des rêves mirobolants de gains fabuleux et ne se soucient pas de leurs employés, de leurs familles... Un très petits nombre de groupes ou de personnes s'enrichissent démesurément dans ce système. Toujours les mêmes. Ils font beaucoup de publicité pour leur gagne-caviar. Ils font rêver les plus petits qu'eux, les poussent à perdre plus d'argent. Globalement tout le monde y perd. Dans ces jeux de Bourse, une bonne part des ressources en matières premières et en nourriture sont virtuellement jetées à la poubelle. Des entreprises rentables sont dynamitées. Dans la sphère familiale aussi ce comportement peut se retrouver. Par exemple chez ces parents qui amassent une petite fortune en banque pour leurs enfants mais qui ne leur achètent pas de livres, leur donnent de la nourriture bon-marché et ne leurs permettent pas de voyager.

Une illusion est que tous les outils se valent. Certaines personnes croient qu'il suffit d'apprendre à se servir d'un outil pour en tirer le meilleur parti. Si un outil permet de faire une chose, il suffit d'apprendre à s'en servir et on pourra faire ce qu'on veut avec. Rien n'est plus faux. En informatique par exemple, si on compare deux systèmes logiciels, on peut constater que sur papier qu'ils permettent en gros de faire la même chose. A l'usage ils peuvent pourtant être complètement différents. L'un demandera des mois d'apprentissage et ne permettra jamais de travailler proprement. Il faudra des semaines de travail pour vaguement ficeler quelque chose avec. L'autre s'apprend en deux semaines et de là on peut produire d'excellentes choses à la chaîne. Certains chefs d'entreprise sont obtus à la chose. Ils imposent à leurs employés d'utiliser un mauvais système. Ils leur disent : "Oui ou non y a-t-il moyen de votre travail avec cet outil ? Alors apprenez à l'utiliser et mettez-vous au travail !". J'ai vu le cas sordide d'un chef d'entreprise à qui ses employés essayaient désespérément de faire comprendre que leur outil était inutilisable. Il se faisait conseiller par un professeur d'informatique, qui lui disait avec ostentation que c'est l'outil approprié. L'entreprise a fait faillite... A l'autre extrême il y a les personnes à la recherche de "l'outil ultime". S'ils n'arrivent pas à produire des résultats, c'est parce qu'ils n'ont pas encore trouvé le bon outil... Ils en ont déjà achetés ou empruntés plusieurs, chaque fois en prétendant que ce serait le bon. Quand ils ont dépensé tout leur argent à acheter des outils, ils certifient que le bon outil est cette merveille qu'ils voient en vitrine, hélas trop chère pour eux... J'ai déjà vu une personne compétente débarquer chez un tel rêveur, lui demander à pouvoir utiliser un de ces "mauvais" outils et en tirer en quelques minutes des choses merveilleuses. Cela ne touche pas le rêveur. Il persiste à dire que tous les problèmes viennent du fait qu'il lui manque le bon outil. La bonne attitude est d'apprendre à se servir des outils. Alors on devient capable de juger un outil pour ce qu'il vaut et d'utiliser chaque outil pour ce à quoi il est bon. Un bon artisan sait scier avec une lime et limer avec une scie mais il préférera utiliser une scie pour scier et une lime pour limer. Il écartera d'emblée les mauvaises limes et les mauvaises scies.

Un travers qui apparaît chez certains groupes de personnes peu cultivées est de croire que le chef doit être infaillible. Le chef lui-même le croît et en conçoit une profonde angoisse. Il s'ensuit tout un jeu de réécriture de l'histoire, d'assassinats réels ou virtuels... En particulier dans ces groupes ont tend à ne plus rien faire, à rendre les choses immuables. Le chef n'ayant plus de décisions à prendre, il ne peut donc plus non plus se tromper. Il ne reste alors que des jeux de domination et de hiérarchie. C'est par exemple ainsi que des facultés universitaires entières se vident de sens. Il n'y circule presque plus aucun savoir et les étudiants se font maltraiter. Un étudiant ne réussira que dans la mesure où il assure la position des professeurs dominants, donc qu'il croit ou fait semblant de croire à leur infaillibilité.

Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles un enfant peut bien travailler à l'école. Il y a des matières qui conviennent naturellement à la façon dont son cerveau travaille, il les retient donc sans faire d'efforts. Certains enfants prennent l'école comme un jeu et obtiennent des points par amusement. Dans ce cas ils peuvent même préférer les matières dans lesquelles ils ont plus de difficultés, parce qu'elles permettent un jeu plus intense. Certains enfants ont des rêves, des objectifs. Ils considèrent l'école comme un moyen de les réaliser et s'en trouvent motivés pour bien travailler. D'une façon générale, les enfants à qui on a appris à travailler pour l'école obtiennent de meilleurs résultats, parce que leurs cerveaux ont les leviers en main et voient ce qu'il y a à voir. Ils évitent les efforts inutiles. Le cerveau s'applique toujours mieux quand il à l'impression de comprendre les règles du jeu et qu'il sent qu'il fournit des efforts ordonnés et rentables. Un des moteurs principaux pour les enfants reste l'idée de faire plaisir à leurs parents. Quand des parents sont câlins et s'occupent de leurs enfants, les enfants acceptent très bien les ordres et la discipline des parents. Surtout, ils ont une forte envie de leur ramener de bons points de l'école, pour leur faire plaisir. J'ai vu des enfants étudier avec passion, à la simple idée de la joie qu'une bonne note allait bientôt procurer à leurs parents. On n'a pas besoin de dire à ces enfants-là qu'ils doivent travailler pour l'école. Il faut juste les consoler quand ils ont une mauvaise note. Un adolescents de mes amis a hélas des parents qui se contentent de crier et de menacer. Ils ne lui donnent pas de temps, aucun câlin. Ils se montrent même offusqués à cette idée. Ils lui donnent beaucoup d'argent de poche. J'ai demandé à cet adolescents s'il préférerait moins d'argent de poche et plus de tendresse, il est inutile que je donne sa réponse. Il a de mauvais points à l'école. Il est pourtant très intelligent. Il a développé un blocage à l'idée d'avoir de bons points. Son problème est que s'il a de bons points, ses parents diront que c'est grâce à leurs méthodes autoritaires. C'est une image de lui-même qu'il ne peut accepter, qu'il n'acceptera jamais. Pour lui, c'est une question de dignité que d'avoir de mauvais points. Je lui ai expliqué qu'il se mettait dans un cercle vicieux : plus il a de mauvais points, plus il permet à ses parents de justifier des punitions et des mauvais traitements à son égard. Rien n'y a fait. Il avait un dégoût à l'idée d'avoir de bons points. Je lui ai alors proposé la stratégie suivante, qui semble l'avoir intéressé. Je lui ai proposé de simplement expliquer aux personnes autour de lui sa situation, la façon dont ses parents le traitent. Ainsi, ces personnes sauront que s'il a de bons points ce n'est pas grâce à ses parents. Cela résout son problème... Je lui ai même proposé de dédier ses points aux personnes qui lui donnent de l'affection, de leur dire qu'il a eu un bonne note en Français ou en Mathématiques pour elles et pas pour ses parents. Plus tard, quand il sera plus fort et capable d'affronter ses parents, il pourra leur dire cela en face...

Dans une vraie famille, les enfants reçoivent tout le temps des câlins. Il y a le câlin s'asseoir l'un contre l'autre pour lire une histoire ensemble, le câlin mettre les têtes à la même hauteur et passer la main dans le cheveux pour écouter l'enfant, le câlin prendre sur les genoux pour expliquer qu'une chose n'est pas bien, le câlin sandwich entre les deux parents pour fusionner, le câlin serrer très fort et faire une grosse poutoune pour exprimer son enthousiasme, le câlin dormir ensemble quand il y a de l'orage et du tonnerre dehors, le câlin va méditer cinq minutes... Ces câlins sont primordiaux pour le développement de l'enfant, en particulier dans la petite enfance. Il permettent à l'enfant de sentir qu'il existe et qui il est. Cela lui permet d'accepter sa place dans la société, de réclamer ce qui lui est dû et de donner ce qu'il est bon qu'il donne. Cela lui permet d'accepter les injonctions à faire des efforts et le respect des règles. Il pourra avoir une vie heureuse. Dans certaines familles les enfants ne reçoivent pas de câlins, ou très peu, ou des câlins de façade. A la place ils reçoivent des leçons de morale, des punitions méchantes ou beaucoup d'argent de poche. Souvent, dans ces familles, on apprend aux enfants à mépriser leur prochain. En grandissant, ces enfants vont aller vers un extrême ou l'autre. Un extrême est une fermeture sur soi. Cela donne des personnes égoïstes, insensibles, très imbues de leurs privilèges. Elles votent typiquement pour l'extrême droite. L'autre extrême sont des personnes qui ont l'impression de n'avoir aucune valeur. Elles feront des efforts démesurés, souvent totalement creux, pour amener les autres à les aimer. Elles sont incapables de voir comment pensent les autres. Elles ne peuvent pas simplement s'asseoir et aimer et se laisser aimer. La société occidentale est construite sur l'interaction entre ces deux extrêmes. Les personnes égoïstes prennent le pouvoir et essayent de drainer un maximum d'argent et de moyens vers elles. Les personnes qui croient n'avoir aucune valeur, quant à elles, travaillent comme des bêtes en espérant recevoir un peu d'affection des personnes égoïstes. Schématiquement, c'est le rapport entre un maquereau et une prostituée. Le maquereau ne voit que son bénéfice en fin de journée. La prostituée, elle, est folle amoureuse de son maquereau, au point d'avoir accepté de se prostituer pour lui. C'est ce couple infernal qui est parti à la conquête du monde et a ravagé toutes les civilisations rencontrées. La quantité de travail et de sacrifices que les européens ont consentis pour coloniser la Planète sont gigantesques. Les bénéfices engrangés ont été colossaux mais aussitôt dépensés et gaspillés par les égoïstes.

Jouer avec les images d'autrui est un art. Dans ma ville il y a des centres de formation pour chômeurs. La majorité des personnes qui y travaillent font très bien leur travail. Mais un professeur est une vraie calamité. Ses cours consistent à s'asseoir négligemment sur une table et raconter ses mérites. Il fascine les trois quarts de l'auditoire et désespère les autres. Il a instauré un examen d'entrée pour sélectionner les personnes qui seront autorisées à son cours. J'ai lu ces questions. Bien que je sois expert dans cette matière j'aurais été incapable de répondre. Elles portaient sur des détails techniques très précis et totalement inutiles. Ce professeur donne les réponses aux questions à l'avance, aux personnes qui lui plaisent... Il a tout organisé pour avoir la vie facile et se faire vénérer. Vous obtenez votre diplôme si vous avez joué son jeu. Une autre technique, rencontrée à l'université, consiste à donner un très grand nombre d'exercices à faire aux examens. Les étudiants n'ont que deux heures pour faire une dizaine d'exercices alors qu'il me faudrait ces mêmes deux heures pour résoudre un seul de ces exercices. A priori, il est évident qu'une personne capable de résoudre dix pareils exercices en deux petites heures n'est pas n'importe qui. Les professeurs jouent là-dessus pour impressionner les étudiants. "Comment, vous n'avez pas été capable de résoudre ces dix petits exercices ? Mais untel et untel, eux, ils y sont arrivés...". Les étudiants qui réussissent bien ces examens sont vénéres par les autres. Tout cela est un montage. Dans ma vie professionnelle je n'ai jamais rencontré un seul cas où un ingénieur, un physicien ou un chimiste ait été tenu de résoudre un aussi grand nombre de problèmes en aussi peu de temps. Ou de résoudre un seul problème en cinq minutes. Cela arrive peut-être à l'armée ou dans certaines industries où il y a des activités dangereuses. Mais pour 99% des universitaires cela ne sert à rien. Je serais très favorable à ce qu'on fasse des concours de rapidité dans les universités et que l'on donne une mention spéciale aux étudiants qui en sont capables. Mais empêcher de réussir ceux qui n'y arrivent pas, c'est absurde. Le rôle d'un universitaire est de comprendre les choses, pas d'abattre dix exercices en deux heures. De surcroît ces exercices sont téléphonés. Ils sont simplement des réarrangements des exercices vus aux cours. Etre capable de faire ces exercices rapidement ne prouve en rien que vous serez capable de trouver et de calculer rapidement la solution à un problème inattendu dans une usine en alerte. Ce système d'examens a trois avantages : il demande peu de travail aux professeurs et à leurs assistants, il impressionne les petits étudiants et il sélectionne les étudiants qui se consacrent aveuglément aux cours. Il force les étudiants à s'entraîner à faire des exercices toute la journée. Si vous êtes un étudiant qui s'intéresse aux choses, qui cherche d'abord à comprendre les cours, à les situer par rapport aux autres cours, qui lit des livres et des publications, qui fait des expériences de physique ou de chimie par lui-même, qui discute de Science avec d'autres... vous serez fortement désavantagé aux examens. Les professeurs cherchent à éliminer ce type d'étudiant. Ils veulent des étudiants qui savent frimer, qui savent faire semblant d'être des scientifiques. Ils ont très peur des étudiants qui sont de vrais scientifiques. J'ai beaucoup d'amis qui sont des professionnels capables et qui ont poussé leurs études universitaires jusqu'au bout. Tous affirment que la quasi totalité des professeurs ont un niveau très bas. Certains le disent avec diplomatie, d'autres les traitent expressément de "minables". Les professeurs ont très peur de cela et cherchent dès le début des études à éliminer un maximum de ces étudiants compétents. D'un autre côté ils ne veulent pas non plus des étudiants qui auraient l'air trop mauvais. Ils mettent en place des mécanismes qui sélectionnent leur modèle d'étudiant favoris : des étudiants qui plaisent en public et qui sont capables d'abattre des travaux simples.

Quand on désire quelque chose, que ce soit un objet ou une personne, il faut se demander si on désire cette chose elle-même ou si on désire ce qu'on croit qu'elle représente. Par exemple on peut se marier avec une personne parce qu'on croit qu'elle représente l'amour ou le bonheur. C'est voué à l'échec. L'amour ou le bonheur sont des choses qu'il faut développer en soi. On se marie avec une personne parce qu'on a appris à connaître cette personne et qu'on a des sentiments forts pour elle. Cela peut donner du bonheur mais ce n'est pas le bonheur en soi. De même, une personne jalouse est une personne à laquelle il manque quelque chose à son image d'elle-même. Réussir à obtenir l'objet de sa convoitise ne la satisfera pas. Elle voudra immédiatement un deuxième ou un troisième objet. Elle ne sera apaisée que quand elle aura réussi à développer en elle-même ce que ces objets représentent pour elle. La Société de Consommation joue là-dessus : les personnes qui ont un niveau spirituel faible seront promptes à sans cesse acquérir des objets. Elles ont une soif insatiable, alors qu'un moine qui ne possède rien de matériel peut se trouver trop riche de milles choses.

Nous préférons parfois être confronté à l'image d'une chose qu'à cette chose elle-même. Par exemple une souris sauvage mise en cage peut être amicale avec votre main si elle est placée contre la cage, à l'extérieur. Elle se sentira particulièrement à l'aise si la parois de la cage est une vitre en plastique. Eventuellement elle aimera avoir de petits trous dans la vitre pour sentir l'odeur. Elle viendra dire bonjour à votre main, fera des risettes... Par contre si vous plongez la main dans sa cage, la souris sera paniquée ou agressive. De même, les jeunes hommes préfèrent parfois voir des filles en images plutôt que d'être confrontés à de vraies filles.

Un ami m'a raconté un conflit d'image dans son entreprise. Les cadres de l'entreprise ont décidé de sous-traiter une partie d'un travail à une firme réputée. Problème : cette firme fait tout de travers et de surcroît livre en retard. Résultat : les techniciens de l'entreprise ont dû tout faire eux-mêmes, en heures supplémentaires. Les cadres de l'entreprise décident pourtant de payer la firme, sans discuter. Il s'agit d'une très grosse somme. Mieux : ils ont signé un deuxième contrat avec la firme. D'après mon ami, son entreprise jette ainsi son argent par les fenêtres pour donner une bonne image d'elle-même : elle sous-traite à des firmes de luxe, elle paye rubis sur l'ongle et il n'y a jamais de problèmes... Le gros problème là-dedans, c'est qu'en même temps l'entreprise vient de décider une baisse du salaire de ses techniciens. On jette l'argent par les fenêtres et on demande aux techniciens de se serrer la ceinture... avec des heures supplémentaires en sus. D'après mon ami les techniciens le prennent très mal. Il sent qu'ils vont "moins prendre à coeur les inétrêts de l'entreprise".

Dans une grande usine sidérurgique un travail d'envergure a été confié à une équipe d'ouvriers. Il sagissait de construire un arbre de transmission pour un navire géant. C'est un travail difficile, qui demande beaucoup d'expertise. Les ouvriers ont vraiment dû "s'y mettre". Ils ont réussi leur mission et dans les temps. Des représentants du client ont débarqué et ont fait des mesures sur l'arbre, pour vérifier s'il était conforme au cahier des charges. Il l'était, et même très bien. Les ouvriers avaient fait un travail remarquable. L'arbre a été payé. Puis un ordre simple est venu : "découpez l'arbre en tranches et revendez les morceaux au prix du kilo de ferraille". Pourquoi ? Parce que le client avait demandé à trois usines sidérurgiques différentes de construire le même arbre. Ils avaient pris le meilleur des trois. Le problème, c'est qu'on a fait découper l'arbre en morceaux par les ouvriers-mêmes qui l'avaient construit. C'est inhumain. Il fallait soit refuser de le détruire et le revendre à un autre client, soit au moins le faire détruire par une autre équipe d'ouvriers, dans une usine différente...

Les occidentaux croient que pour être heureux, donc pour avoir une bonne image de soi, il faut être beau et en pleine forme. Ils croient également qu'il faut réunir autour de soi de telles personnes belles et en pleine forme. C'est une réflexe infantile, qu'on leur a inculqué pour mieux les manipuler. Pourquoi ressentons-nous du bonheur ? Plus précisément : pourquoi la Nature nous a-t-elle ainsi conçus que nous puissions ressentir du bonheur ? Le bonheur est une sorte de salaire qui nous est versé pour accepter des choses. Par exemple une lionne ressent du bonheur à l'idée de s'occuper de ses lionceaux, plus de bonheur qu'à l'idée de les manger pour se nourrir. C'est ce qui assure que cette lionne aura une descendance. De même, nous ressentons du bonheur si nous acceptons quelqu'un qui a un handicap ou une tare quelconque. Si nous n'acceptions que des personnes parfaites, nous ne pourrions pas constituer de groupe et nous ne nous accepterions même pas nous-mêmes. La nature nous rend donc heureux d'accepter des personnes imparfaites, ce qui nous permet de constituer un groupe capable de défendre chaque membre du groupe. On se moque parfois des personnes qui sont fascinées par les handicaps ou les malformations, qui éprouvent une attirance ou de l'amour pour cela. On les qualifie même de pervers. En réalité c'est le contraire : ce sont ces personnes qui sont normales, naturelles. Evidemment il ne faut tomber dans l'excès contraire. Ce n'est pas en recherchant spécifiquement les personnes estropiées que l'on deviendra heureux. Il faut garder en tête le but premier de la Nature : constituer un groupe ou une famille capable de défendre chacun de ses membres. Si on s'estropie en espérant être aimé, on risque fort d'être rejetté. Par contre une personne même gravement malade ou handicapée peut être acceptée. Soit parce qu'elle peut guérir et redevenir utile, soit parce même diminuée elle peut rendre des services, quels qu'ils soient. Il ne faut pas chercher de raisonnement ou de structure précise derrière cela. Simplement, nous sommes génétiquement programmés pour ressentir du bonheur si nous acceptons une personne telle qu'elle est, avec ses particularités et ses handicaps.

Certaines personnes considèrent qu'acheter un objet leur donne des droits. Par exemple si elles achètent un 4x4, elles considèrent que cela leur donne le droit de défoncer les sentiers protégés dans la nature. Il s'agit réellement d'un sentiment de droit, comme la redevance que l'on paye à un club et qui donne le droit d'utiliser les tables de billard du club. Si on veut faire respecter les règlement et leur interdire le passage dans les sentiers protégés, ces personnes se fâcheront et feront par exemple valoir le prix que leur a couté le 4x4. Elles font un amalgamme entre la Société de Consommation et la Protection de la Nature. J'ai vu ce problème se poser dans un cas aussi simple qu'un ballon avec lequel un enfant joue. L'enfant invente une façon de jouer particulièrement dérangeante pour des voisins. Les voisins se sont plaints. La mère de l'enfant leur a répondu qu'elle avait payé ce ballon 5 € et qu'elle comptait bien en avoir pour son argent...

Quand elle avait cinq ans, une amie rêvait d'aller à l'école. Sa mère lui a laissé croire qu'elle y irait à la rentrée prochaine. Le jour de la rentrée, quand les aînés de la famille se sont mis dans les rangs à l'école, elle les a suivis, convaincue qu'elle rentrait à l'école avec eux. Sa mère à rigolé et l'a tirée par le bras pour la ramener à la maison. A trente ans elle vivait encore ce souvenir comme un traumatisme. Sa mère lui avait laissé miroiter une certaine image d'elle-même et l'avait brisée d'un éclat de rire. Cette amie a su toute son enfance qu'elle ne pouvait pas faire confiance à sa mère. Ladite mère n'a pas manqué de le lui confirmer au fil des ans. C'était une personne immature, très irritée pour ses petits avantages mais insensible à la douleur d'autrui.

Des bibelots sont chargés de souvenirs. En général ils ont une forme qui rappelle ce dont quoi ils sont le souvenir. Un objet peut aussi être chargé de souvenirs sans avoir aucun rapport avec eux. De la musique également. J'ai appris à jouer à un jeu vidéo assez dur en écoutant très souvent le même CD de musique. Plusieurs années après, en réécoutant ce CD j'éprouve à nouveau les tensions et l'état d'esprit particulier que j'avais en jouant à ce jeu. Une autre anecdote est plus intéressante encore : quand j'emprunte un film sur DVD j'en fais une copie dans mon disque dur. Cela me permet de rendre le DVD immédiatement. J'efface bien entendu le film de mon disque dur après quelques jours, au plus tard quelques semaines, sans en faire de copie. A un moment donné j'ai eu de graves problèmes de voisinage, qui m'ont plongé dans un stress et des angoisses assez douloureux. Un palliatif que j'avais trouvé était de regarder quelques films. Je me les repassais presque en boucle. Quand les problèmes se sont résolus, je me suis rendu compte que regarder ces films me rappelait les angoisses de la mauvaise période. Au point que les regarder était franchement désagréable. Ces films étaient devenus chargés de mes angoisses. En les effaçant de mon disque dur j'ai éprouvé un véritable soulagement. On peut transférer des problèmes ou des angoisses dans un objet puis les détruire en détruisant cet objet. Je suppose que la destruction efficace de l'objet ne peut se faire que quand le problème a évolué et atteint le degré de mûrissement nécessaire.

C'est curieux : une connaissance (ce ne peut être un ami) vous propose quelque chose. Vous n'en avez pas besoin et vous refusez donc poliment. Elle insiste, elle veut absolument vous donner cette chose. Elle vous en vante les mérites, elle vous supplierait presque d'en avoir besoin. Le lendemain, il se passe quelque chose d'inattendu qui vous donne besoin de la chose. Vous allez donc trouver la personne et vous la lui demandez. Elle refuse. Pourquoi cette attitude exactement contraire d'un jour à l'autre. En réalité il s'agit de la même attitude : le besoin de représenter quelque chose, d'avoir une utilité. Le premier jour, la personne vous supplie d'accepter son bidule, pour pouvoir se sentir utile. Le deuxième jour, c'est en vous refusant le bidule qu'elle sent le mieux combien vous avez besoin d'elle.

Dans les vrais couples, chacun des deux s'intéresse à ce que l'autre pense, à ce qu'il voudrait, à sa façon de voir les choses. Cela ne veut pas dire qu'il y adhère ni qu'il va le réaliser. Mais il en tient compte. Dans ces couples, un désaccord complet n'est souvent pas un problème. La seule chose que chacun demande est que l'autre ait compris son point de vue. Qu'il agisse ou non en fonction est secondaire. Un acte d'amour consiste à demander à l'autre d'exposer son point de vue en détail même si on sait qu'on ne pourra pas en tenir compte. Dans les faux couple, chacun se bat pour imposer son point de vue à l'autre. Cela va jusqu'à choisir exprès un point de vue opposé. Ce chacun veut dans un faux couple est amener l'autre à lui, au lieu d'aller vers lui.

Un ami vivait avec sa petite amie depuis de nombreuses années. Ils sont étudiants et pauvres. C'est la galère. Il leur faut parfois chercher des heures entières pour trouver de quoi payer un ticket de bus. Mais dans quelques mois mon ami terminait ses études. Il avait déjà une place qui l'attendait, très bien payée. Il était heureux d'en parler avec son amie. Surprise : elle devient aigrie. Elle se fâche, elle menace de le quitter. Certes elle a de bonne raisons d'être mal dans sa peau. Outre leur pauvreté et leur vie difficile, il passe beaucoup de temps loin d'elle. Il est obligé de faire des stages de fin d'études. Mais il ne comprend pas : c'est le bout du tunnel... Encore quelques mois à attendre... Il faut tenir jusque là... Pourquoi choisit-elle ce moment-là pour menacer de tout casser et partir ? Alors qu'elle avait tout supporté pendant des années ? Je lui ai proposé l'explication suivante, qui après coup semble être la bonne. Son amie se rend compte qu'il va devenir un homme respecté. Il va fréquenter des gens importants. Par rapport à ces gens, elle n'est rien du tout. Elle est une petite souris. Cela la met très mal à l'aise. J'ai donc suggéré à mon ami de donner une image d'elle-même plus concrète à son amie. En un mot : lui faire des déclarations. Il faut qu'il lui dise qu'il a travaillé toutes ces années pour elle et que cela ne l'intéresse pas de profiter des avantages s'il ne peut pas en profiter avec elle. Il n'est rien si elle n'est pas avec lui... C'est bien ainsi qu'il ressent les choses, mais il ne le lui avait jamais dit... Maintenant qu'il le lui a dit, elle sait qu'elle est quelqu'un. Quand elle rencontrera les nouvelles relations de son homme, certes elle n'aura pas leur intelligence, leur conversation et leurs diplômes, mais elle aura une chose qu'ils ne peuvent pas avoir : lui. Elle est sa femme, ce qui la place à une position enviable. Ainsi dotée de cette image valorisante, elle se sent bien dans sa peau et il n'y a plus eu de problèmes.

Une amie a de gros problèmes avec son ami. Il passe son temps à répéter autour de lui tout ce qu'il sait d'elle. En plus il déforme les choses. Il cause de gros dégâts. Beaucoup de personnes sont maintenant fâchée contre mon amie, à cause de ce qu'ils ont entendu. Parfois à raison, le plus souvent à tort. Cet ami est un gros nul. Chaque fois qu'il faut prendre des responsabilités il recule et il s'en vante. Il devient agressif et méprisant. Le reste du temps, il se construit un personnage en "prouvant" à tout le monde qu'il est bien l'ami de mon amie. En racontant tout de la vie de mon amie aux autres, même des détails intimes, il "prouve" qu'elle lui appartient. Il construit son identité "d'ami". A cause de lui beaucoup de personnes se sont éloignées de mon amie. Elle est donc d'autant plus à lui. Il tourne autour d'elle pour l'enlacer de ses fils de soie tout en faisant fuir tout le monde par la puanteur qui se dégage maintenant d'eux. Cette personne a un problème psychiatrique grave. Un âge mental de six ans, une absence froide de morale ou de scrupules, une bêtise empreinte de petits traits de génie aveugles et malfaisants... J'ai vu un tel comportement chez plusieurs parents aussi, qui dénigrent leurs enfants, racontent tout d'eux y compris des détails intimes, à leurs camarades, au reste de la famille... Ils obtiennent ainsi que leurs enfants perdent le statut d'êtres humains. On se moque d'eux, on éclate de rire s'ils demandent de l'aide... Chez un couple de tels parents j'ai même compris qu'ils considèrent cela comme de la légitime défense. Leur enfant est un gentil garçon qui ne demande qu'à être aimé. Mais dans la tête de ses parents il est une menace, une chose insoutenable, tout en étant leur propriété. Ils estiment avoir le droit de faire de lui ce qu'ils veulent.
La sagesse

Comparaison n'est pas raison. Le sage ne compare pas son image à celle d'un autre pour en déduire une hiérarchie. Il n'est jaloux de personne. S'il contemple l'image d'un autre, c'est pour des raisons utilitaires constructives.

Il faut des garde-fous, des protections, des tampons. Une image de soi solide ne peut changer que lentement. Faites attention à cela quand vous dites quelque chose à quelqu'un : il est normal qu'il évolue lentement, votre remarque ne peut pas porter immédiatement ses fruits. (Les maîtres peuvent comprendre tout de suite en quoi leur image va changer, puis intègrent ce changement sur une période assez courte.)

Celui qui est libre est celui qui a les moyens de décider/sculpter lui-même son image de soi. Il a besoin des autres pour le faire, du monde entier, mais il reste seul décideur.

Le sage tend à avoir une image de soi appropriée aux circonstances. Il s'adapte. Mais il a aussi une image de soi unique, synthèse abstraite de toutes les images de soi, qui le définit en tout temps, à tout endroit et face à toute autre personne. Cette sur-image prime sur toutes les images de circonstance. Elle n'est sensée être teintée d'aucune idéologie, d'aucun drapeau, d'aucune appartenance.

Le sage est prêt à redéfinir son image de soi. Quelle que soit l'image de soi que l'on ait, donc les choses que l'on fait dans la vie, il peut toujours arriver un moment où cela devient inadéquat. Ou bien cela a toujours été inadéquat, et on s'en rend compte. Prenons par exemple le cas de quelqu'un qui a pris sous son aile une personne faible et fragile. Après quelques temps, peut-être grâce à la protection reçue, cette personne a acquit de la force et du savoir. Il n'est donc plus nécessaire de la protéger. Au contraire, il vaut maintenant mieux l'encourager à aller de l'avant. Il faut donc cesser d'être un protecteur et devenir un support. Tout le monde n'est pas capable de faire cela. Beaucoup de protecteurs immatures, quand l'oisillon menace de grandir, vont le casser psychologiquement ou compromettre ses chances de succès. Pour qu'il reste un oisillon, pour que le protecteur garde son statut de protecteur. Une personne aimante acceptera au contraire la modification de statut et la favorisera. Il peut sembler naturel de faire cela, en pratique c'est souvent très dur, associé à une souffrance. Car cesser d'avoir une image de soi de protecteur, c'est tuer ce qu'on est, c'est renoncer à le faire vivre. Le sage accepte ce sacrifice, par amour. Et puis aussi il sait que souvent il renaîtra, différent, sans doute meilleur encore. Par exemple avec une image de soi d'encourageur, de promoteur, de supporter... Il y a un très grand nombre de cas où l'on peut ou doit accepter de mourir et de renaître. On peut être un bandit qui se croyait Robin des Bois, comprendre qu'on a causé beaucoup de malheurs et désirer renaître honnête travailleur... La Passion du Christ est un symbole de ce processus de mort et de Résurrection. Dans la philosophie Alchimiste, héritée de la Chine Antique, le processus est décrit très en profondeur. Les longues phases traversées par la personne en mutation sont minutieusement décrites, de façon symbolique. Parfois ce processus peut prendre des années.

L'ami du sage est celui qui le critique.

Le sage sait que rien n'est intrinsèquement impur et que tout peut être nécessaire à toutes choses. Il amène donc toutes choses à lui, mais travaille longuement à en tisser des ensembles cohérents, efficaces, utiles. Une des phases les plus importantes est le choix judicieux de la quantité de chaque chose : la pondération. Un sage est une grande bibliothèque parsemée de machines qui ronronnent doucement. L'efficacité de cet ensemble dans le vie pratique est sensée être extraordinaire. Le sage est capable de faire des choses.

Il n'y a plus de problèmes dès l'instant où les images ont été énoncées, qu'elles ont été officialisées et perçues par tous. Prenons par exemple une personne qui a un handicap et qui parle difficilement. Ou une personne surdouée qui s'exprime dans des termes que personne ne comprend. Tous deux ont un problème de communication. Tous deux vont énerver leurs interlocuteurs, peut-être les fâcher. Si on explique à ces interlocuteurs la raison du problème, si on leur dit ce que ces deux personnes sont, alors ils ne s'énerveront plus. Ils prendront le temps d'écouter la personne handicapée et diront au surdoué de se calmer un peu. On pense parfois qu'il ne faut pas dire qu'une personne est handicapée, parce que c'est humiliant. Ou qu'il ne faut pas dire qu'une personne est surdouée, parce qu'elle sera rejetée ou vénérée ce qui revient au même. C'est idiot. Bien sûr ces problèmes existent, mais uniquement avec les personnes qui ont des problèmes d'éducation. De toute façon, tout le monde finira bien par se rendre compte que le handicapé est handicapé et le surdoué est surdoué. Mais si cela n'a pas été dit, énoncé, il subsistera toujours un problème, un inconfort. Que l'on soit handicapé ou surdoué n'est pas la question. Ce qui compte, c'est d'être un personne et avoir l'affection des autres personnes parmi les autres personnes. Le vrai privilège est là. Cela implique d'être reconnu pour ce que l'on est et de recevoir ce dont on a besoin. Alors on est ni mieux ni moins bien qu'un autre. On est. On fait ce qu'on a à faire.

On agit suivant l'image qu'on est. Améliorer et connaître cette image est donc primordial. Mais trop de personnes restent prisonnières de cette image. Elles sont comme piégées à l'intérieur. Elles vivent cette image mais elles ne la voient pas. Elles souffrent si quelqu'un critique une partie de cette image, comme une personne dont on a heurté une partie du corps. Le sage, lui, est capable de contempler son image de soi. Il peut devenir comme une personne externe, qui regarde calmement cette image, qui en voit les parties et les liens. Il peut donc gérer cette image avec beaucoup plus d'intelligence. Il souffre aussi beaucoup moins quand cette image est attaquée. Par exemple, le sage est capable de plaisanter sur ce qu'il est, il est capable d'en rire. On se moque parfois d'un nouveau venu. C'est souvent uniquement pour voir si c'est un sage ou non. Si c'est un sage, il surenchérira sur la plaisanterie, il en rira plus fort encore. Si ce n'est pas un sage, il sera vexé et blessé.

Que ce soient deux individus ou deux ethnies, chacun a son image de soi et des choses. Cela pose des problèmes quand ces deux individus ou ces deux ethnies sont obligés de vivre sur le même territoire. Comment concilier les actes et les ambitions de chacun dès lors que chacun pense les choses suivant des images différentes ? Il y a en gros trois gradations dans la confrontation. Au stade le plus bas il y a la guerre. On ne supporte pas le point de vue de l'autre. Alors on le force à partir ou on le détruit. On peut aussi le réduire en esclavage ce qui est une façon plus productive de le détruire. Au deuxième stade il y a les marchandages. On essaye de négocier, de s'arranger, de partager les ressources de façon plus ou moins équilibrée. Chacun présente ses arguments et dit ses priorités. On essaye de trouver le terrain d'entente le moins mauvais possible. C'est le travail des commerçants, des diplomates et des parlementaires. Pour que ce deuxième stade soit possible, il faut un pays avec un bon enseignement, où l'on apprend à parler et à calculer. Au troisième stade chacun essaye de comprendre et surtout de ressentir quelles sont les rêves et les émotions de l'autre. Chacun essaye de satisfaire au mieux les besoins et les espoirs de l'autre. Ce troisième stade demande un niveau culturel et spirituel très élevé.

On est parfois étonné de voir un sage imposer quelque chose de très dur à une personne et cette personne l'accepter. Alors que venant d'autrui elle ne l'aurait pas accepté. Une première raison est bien sûr que l'on peut supposer que le sage sait ce qu'il fait. Soit il est juste de faire ce qu'il fait, soit il y a un bénéfice à en escompter plus tard. Il y a une autre raison à laquelle on pense moins : le sage sait et ressent ce qu'il inflige à la personne. Il sait quelle sera la douleur de la personne ou ses angoisses. La personne le sait et c'est pour cette raison qu'elle l'accepte. Le sage a en lui l'image de ce que la personne ressent. Autrui n'aurait pas eu cette image et aurait imposé ses décisions sans tenir compte de ce que ressent le personne.

Les personnes pour lesquelles nous avons le plus de dépendance affective sont celles qui nous comprennent, qui ont en elles une image de nous-mêmes. Par exemple des parents peuvent avoir passé des années à s'occuper d'un enfant. Si à l'adolescence ils cessent de comprendre leur enfant, celui-ci considérera ses parents comme inintéressants voir comme des ennemis, des personnes à éviter. Par contre il suivra sans hésiter une personne qui ne lui donne rien mais qui le comprend. Le Dalaï Lama est très aimé des tibétains alors qu'il ne leur donne rien. Parce qu'ils savent qu'il les comprends, qu'il pense à eux et qu'il se tient au courant de ce qui leur arrive. Un poète qui révèle des choses que les gens sentent en eux, sera vénéré comme aucun chef d'état ne pourrait l'être. Un chef d'armées qui sait parler à ses hommes et réveiller en eux la pulsion du guerrier, pourra être aimé peut-être autant qu'un poète.

Ce qui est inconnu attire. Cela recèle des choses que nous pourrions ajouter à notre image de nous-mêmes. Cette attirance peut autant se manifester par de la fascination et une envie irrépressible que par de la peur et de la répugnance. L'inconnu engendre des sentiments extrêmes. Le sage n'a pas ces sentiments extrêmes. Il a visité l'inconnu, en personne ou par une poésie créée par un autre sage. Pour lui ce n'est plus l'inconnu. Il comprend et ressent cet inconnu, il est capable de dialoguer avec lui et de le vivre. Un sport national dans beaucoup de milieux consiste à essayer de se faire passer pour un sage. On dit de l'inconnu : "Oui oui je connais !". On croit savoir ce qu'est l'inconnu. A cause de cela on engendre le mal. On prend des décisions pour des choses que l'on ne connaît pas.

Le sage est prêt à la mort de toute chose. Il l'accepte. Cela lui permet de vivre, de faire vivre et de laisser vivre. Si on n'accepte pas la mort possible des choses, on passe son temps à trembler, on commet des lâchetés. Si un époux n'accepte pas la mort possible de son couple, c'est à dire la possibilité du divorce, la vie de ce couple sera un enfer. Il y aura des tensions, des doutes, des menaces... Il n'y aura pas de vraie vie de couple, le couple n'est pas vivant. Si la possibilité du divorce est acceptée cela veut dire que l'on reconnaît l'autre comme un individu à part entière, qui pourrait vivre seul. Alors on peut vraiment s'intéresser à lui, on peut réellement l'aimer, lui donner ce dont il a besoin, vivre une vraie vie de couple. On est libre de ses idées et on offre cette liberté à l'autre. Si un parent n'accepte pas la mort possible de son enfant il va enfermer cet enfant. Cela causera de graves problèmes à l'enfant, qui peuvent le mener à la maladie ou au suicide. Si le parent accepte la mort possible de l'enfant, l'enfant pourra vivre. Le sage ne souhaite pas la mort. Il fera tout pour éviter les morts que l'on ne désire pas. Mais il les accepte. Il ne laissera pas un enfant faire des choses trop dangereuses mais il respectera le besoin d'exploration de l'enfant. Accepter la mort possible d'une chose et apprendre à aimer cette chose sont des démarches liées. On apprend à la connaître pour l'aider à vivre. Si elle meurt, on gardera des souvenirs. Ainsi elle ne disparaît pas vraiment de notre image de nous-mêmes, elle reste vivante en nous. On dit que les femmes recherchent des hommes qui n'ont plus peur de la mort. Ce sont des hommes qui n'ont pas peur de vivre, qui ne pleurnichent pas pour des bêtises. Devenir une personne qui craint moins la mort n'est pas simple. Il y a des pièges. Certains en meurent. Une femme peut être attirée par un rêveur ou par un drogué. Ils donnent l'impression de ne pas avoir peur de la mort alors qu'au fond d'eux-mêmes ils sont terrifiés.

Le sage est entraîné au mordant. "Entraîne au mordant" est un terme qu'utilisent les éleveurs de chiens. Ils expliquent qu'il faut apprendre à un chien à mordre. Quand le chien est petit il faut jouer avec lui avec des objets qu'il peut mordre. Par exemple une vieille serviette ou un anneau en plastique. Le chien mord dans l'objet d'un côté et vous tirez de l'autre côté. Vous jouez ainsi avec le chien à vous battre pour tirer l'objet. Plus tard il faut apprendre au chien à attaquer, à se servir de sa gueule pour tenir un ennemi en respect. On peut avoir l'impression que les éleveurs fabriquent ainsi des chiens monstrueux, prêts à attaquer le premier enfant qui passe. C'est tout le contraire. Ces chiens entraînés sont extrêmement fiables. Un enfant est bien plus en sécurité à côté d'un tel chien que si le chien n'était pas là. Un chien est génétiquement programmé pour protéger les personnes autour de lui, en particulier les enfants. Mordre un enfant n'aurait pas plus de sens pour lui que pour un garde du corps sortir son arme et abattre son client. Par contre il s'imagine bien donner sa vie pour sauver celle de son client. Ces chiens entraînés sont bien dans leur peau parce qu'ils ont une image précise en tête de leur gueule et de leurs dents. Ils savent que leur gueule est dangereuse et ils savent l'utiliser avec mesure. Les chiens dangereux, ce sont ceux qui n'ont pas d'image de leur gueule, qui n'ont pas appris à l'utiliser. Ces chiens-là se sentent en danger, ils ne comprennent pas ce qui se passe autour d'eux. Ils se sentent menacés et paniquent pour un rien. S'ils mordent, ce sera de toutes leurs forces. Attention : certains chiens, tout comme certains humains, ont des problèmes nerveux d'ordre médical. Dans ces quelques rares cas, apprendre le mordant peut empirer la situation. Mais ce sont des exceptions.

Un sage a en général un point de vue assez équilibré sur les choses. Il comprend les rouages du monde et les contemple de façon placide. Les autres personnes par contre voient le sage souvent de façons extrémistes. Certains adorent le sage, parce qu'ils savent que lui seul les comprend. D'autres au contraire sont effrayés par le fait que le sage les comprends et le détestent.

Il est parfois étonnant de voir la facilité avec laquelle un sage obtient des choses d'autrui. Il ne manipule pas, ne menace pas ni n'essaye de corrompre... pourtant il obtient tout ce dont il a besoin et avec le sourire. Une raison importante à cela est que le sage demande en général des choses raisonnables et qui sont bonnes pour tout le monde. Mais il faut chercher plus loin. Quand le sage s'adresse à une personne, il a en lui un sourire pour cette personne. Il connaît, au moins un peu, l'image de soi de son interlocuteur. Même inconsciemment, la personne sent que le sage la comprend et la respecte.



Conclusion

J'espère avoir réussi à montrer en quoi la construction de l'image de soi est un mécanisme de base du cerveau. Il sous-tend les événements les plus anodins de la vie tout comme les plus importants. Nous agissons en fonction de l'image que nous avons de nous-mêmes et nous essayons perpétuellement de modifier cette image. Parfois nous la modifions avec sagesse, parfois nous faisons n'importe quoi. Parfois nous négligeons des choses qui auraient été très intéressantes.

Une compréhension des mécanismes de l'image de soi devrait vous permettre d'éviter certains pièges et de comprendre des situations apparemment illogiques.

Les images ont bon dos. Méfiez-vous des images que l'on vous donne ou que vous vous donnez pour tel ou tel fait ou problème. Pour un même fait concret peuvent être proposées des images très différentes. Parfois certaines de ces images reviennent in fine au même. Parfois elles sont complémentaires. Souvent elles sont fausses et induisent des culpabilités ou des remèdes tout à fait déplacés. Essayez de trouver des images qui collent réellement aux situations. Peu importe que ces images soient poétiques, techniques, académiques, libres, répertoriées, relatives ou sensitives. Ce qui compte est qu'elles aient un rapport au moins indirect avec la réalité. Acceptez le fait que parfois on ne trouve pas de bonnes images. Même si des images correspondent raisonnablement bien à des faits, les conclusions que l'on peut en tirer ne sont pas forcément bonnes. Parce que si l'on tient compte d'images supplémentaires, plus larges, cela peut complètement changer la perspective. Comparez les images que donnent des livres de physique, chimie, médecine, psychologie, religion ou poésie, de lieux ou d'époques différents, pour des faits identiques. Cela ne veut pas dire qu'un seul de ces livres a raison. Ou pire qu'aucun de ces livres n'a raison. Cela veut juste dire que vous devez être prudent. Les images sont le support de notre intelligence. Elles sont notre bien le plus précieux. Mais sans esprit critique elles ne valent pas grand chose.

Note : ce texte contient des remarques acides contre le système Universitaire. Des amis qui sont passé par là m'ont dit qu'elles n'étaient pas exagérées. Mais il s'agit d'une Université belge en particulier. Des amis qui l'ont quittée et qui sont allés poursuivre leurs études dans une autre université belge m'ont dit que c'était le jour et la nuit, radicalement différent : des professeurs compétents, un respect des étudiants, une bonne atmosphère, un environnement de travail performant, des choses utiles à faire...


De l'oeuf et la poule, qui est le premier ? Il faut un oeuf pour faire une poule. Il faut une poule pour faire un oeuf. Il y a des milliers d'années, qui a été le premier ? L'oeuf ou la poule ? Si c'est l'oeuf, qui l'a pondu ? Si c'est la poule, de quel oeuf est-elle sortie ?

En gros cinq réponses circulent :
C'est Dieu qui a créé la poule, lors de la semaine où il a créé le Monde. Il aurait pu créer l'oeuf d'abord. Mais l'Ancien Testament est formel : Dieu a créé les oiseaux. Donc ensuite ces oiseaux ont pondu des oeufs pour se perpétuer. La première poule, créée par Dieu, à pondu le premier oeuf. Ce premier oeuf a donné naissance à la poule suivante. (Monsieur Jean-Pierre Martin me fait remarquer que Dieu a forcément créé en même temps le premier coq, nécessaire pour féconder cette première poule. Cela rejoint le thème du Déluge ; les couples d'animaux embarqués par Noé. Si cette hypothèse est bien sûr la plus sensée, notons qu'elle a un biais : Dieu aurait aussi pu créer uniquement des poules mais qui portent en elles des oeufs féconds, dont au moins certains, après avoir été pondus, donnent naissance à des coqs. Dans cette hypothèse qui pourrait fâcher par son son analogie avec les Evangiles, la poule et l'oeuf ont été créés en même temps...)

D'après la tribu africaine des Tsoghos, a l'origine le Ciel et la Terre étaient collés ensemble, comme l'écorce d'un arbre plaquée sur le tronc de l'arbre. A l'intérieur rampaient les êtres, sous formes d'embryons et d'oeufs, un peu comme les insectes qui vivent à l'intérieur de l'écorce des arbres. Un jour le Ciel a été arraché de la Terre et est monté en haut, là où ne le voyons de nos jours. Alors les embryons et les oeufs se sont développés et sont devenus, les uns des hommes et des mammifères, les autres des oiseaux. Donc, d'après les Tsoghos, l'oeuf était là en premier, au sein du Ciel-écorce originel. Puis la première poule est issue du premier oeuf qui s'est développé.

Le Monde a toujours existé, immuable. Dès lors la question n'a pas de sens. Puisque le Monde n'a pas de début et ne change pas, les poules et les oeufs non plus n'ont pas de début. Aussi loin que l'on remonte dans le temps on trouve des oeufs qui ont été pondus par des poules qui sont sorties d'oeufs.

Le Monde tourne en rond. Il serait ainsi fait que l'an 100.000.000.000 ressemble exactement à l'an 0. Donc l'an 1 sera l'an 100.000.000.001. Et Ainsi de suite. A la fin de l'année 99.999.999.999 une poule pond un oeuf qui éclôt au début de l'an 0 qui est aussi l'an 100.000.000.000. On pourrait dire que donc l'oeuf est le premier. Mais non, parce que si on avait décidé que l'an 0 commence quelques semaines plus tôt, on aurait trouvé la poule qui allait bientôt pondre l'oeuf. De simples hasards de calendrier ne peuvent pas décider d'une question aussi importante. La date anniversaire de l'an 0 peut être choisie à n'importe quel moment de la boucle. On pourrait choisir arbitrairement un jour plutôt que l'autre et imposer la réponse. Si on choisit le jour où l'oeuf a été pondu, alors on décide de même que l'oeuf était le premier. Cela devient une vérité constitutionnelle. De même qu'on aurait pu imposer la poule. Malheureusement il n'y a pas une poule ou un oeuf au Monde mais plusieurs. A tout moment un grand nombre de poules et d'oeufs cohabitent. On trouve des poules de tous âges et des oeufs de tous les degrés de couvaison. Il est impossible de choisir une date de référence. Si l'Univers est cyclique, les oeufs et les poules existent de tout temps.

La cinquième réponse est assez récente. Elle est fournie par la Théorie de l'Evolution. Pour commencer cette théorie amène à la conclusion que les poules sont les descendantes des dinosaures. Ce n'est pas qu'un jour un dinosaure a donné naissance à une poule, non. Mais lentement, au fil des centaines de milliers d'années, un type de petits dinosaures s'est transformé en poules. Ils ne l'ont pas fait exprès. Ils se sont modifiés petit à petit et finalement cela les a menés à devenir des oiseaux. Chaque fois qu'ils ont eu une caractéristique de plus qui les rapprochait des poules, et bien cela leur a profité. Bon, cela ne répond pas à la question, puisque les dinosaures aussi pondent des oeufs. Du dinosaure ou de l'oeuf de dinosaure, qui est le premier ? Si on remonte encore dans le temps on arrive aux reptiles. Les dinosaures descendent des reptiles. Les reptiles aussi pondent des oeufs. Avant les reptiles, il y avait les poissons. Les reptiles sont des poissons qui ont eu de plus en plus tendance à sortir de l'eau, au fil de centaines de milliers d'années et qui ont fini par rester vivre sur la terre ferme. Plus un poisson ressemblait à un reptile, mieux cela lui profitait pour rester sur la terre ferme. Les poissons pondent des oeufs. Et avant les poissons ? Quels sont les ancêtres des poissons ? Ce sont de petits animaux rudimentaires qui vivaient dans l'eau des océans, comme les anémones... et qui pondaient des oeufs. Avant cela encore il y avait des organismes multicellulaires indifférenciés. La grosse différence entre les animaux rudimentaires et les organismes multicellulaires indifférenciés, c'est que l'animal rudimentaire est composé de cellules qui ont des fonctions différentes. Par exemple certaines cellules vont s'occuper de faire bouger l'animal. D'autres cellules vont s'occuper de digérer la nourriture... Dans l'organisme indifférencié par contre toutes les cellules sont les mêmes. C'est juste un agglomérat de cellules identiques, un petit paquet plus ou moins structuré. Cet agglomérat de cellules aussi pond des oeufs. Mais cette fois ci il y a une chose remarquable : un "oeuf" est simplement une cellule quelconque de l'agglomérat qui se détache et qui se multiplie pour reformer un nouvel agglomérat. Comment une cellule de l'agglomérat fait-elle pour se multiplier ? Elle se nourrit bien, elle devient grosse, puis elle se coupe en deux. Ces deux moitiés sont des copies conformes de la cellule initiale. Elles vont de nouveau bien se nourrir, devenir grosses, puis se couper en deux. Ce qui fait quatre cellules. Et ainsi de suite. Et quand le tas est fait d'un grand nombre de cellules, il en laisse échapper quelques unes pour qu'elle deviennent d'autres tas à leur tour en proliférant. Fort bien, mais ces tas de cellules identiques pondent des oeufs. Des oeufs qui ressemblent exactement à une cellule du tas, mais des oeufs quand même. Qu'est-ce qu'il y avait avant les agglomérats de cellules ? Et bien il y avait des cellules toutes seules, des unicellulaires. Une seule cellule vivante, qui se débrouille dans l'océan. Quand une telle cellule veut se multiplier, elle gonfle en mangeant, elle se coupe en deux et cela donne deux cellules identiques, qui vont à leur tour gonfler en mangeant. Cette fois-ci il y a quelque chose de fondamental : l'oeuf et la poule sont identiques. On peut dire si on veut que la poule est une cellule grosse et que les oeufs sont deux petites cellules issues d'une grosse cellule qui vient de se diviser. Mais ce sont des cellules, toujours les mêmes. On ne va pas discuter pour une différence d'embonpoint. Donc, l'oeuf n'est pas venu avant la poule ni le contraire. La réponse est que si on remonte assez loin dans le temps, l'oeuf et la poule deviennent identiques. Le premier, c'est l'oeuf-poule, c'est l'unicellulaire.
Cette cinquième explication est beaucoup plus fatigante que les quatre premières. Ce qui ne plaide pas en sa faveur. Mais elle a un gros avantage : quand on inspecte les rochers qui contiennent les fossiles des animaux et des unicellulaires qui ont peuplé la Terre depuis des centaines de millions d'années, ont voit que c'est cela qui c'est passé.

Bon, mais d'où viennent les unicellulaires ? Certains proposent qu'ils viennent d'une autre planète. Des rochers de cette lointaine planète auraient été arrachés par la collision d'un énorme astéroïde. Sur ces roches il y aurait eu des unicellulaires. Ils auraient été congelés par le froid de l'espace. Des millions ou des milliards d'années après ils auraient pénétré l'atmosphère de la Terre. On a prouvé que si le bout de rocher est assez gros des unicellulaires peuvent survivre à la friction de l'entrée dans l'atmosphère de la Terre ainsi qu'au choc de l'impact et arriver intacts dans les océans. Puis ils auraient proliféré sur Terre. Cela semble possible, mais cela ne fait que reculer la question : comment les unicellulaires sont ils apparus sur la planète initiale ? Venus d'une troisième planète ? Pourquoi pas. Et ainsi de suite, si on accepte que l'Univers a toujours existé et qu'il y a toujours eu des planètes avec de la vie, des unicellulaires. Mais cela ne semble pas être le cas. Tout porte à croire que notre Univers est apparu dans une gigantesque explosion il y a quatorze milliards d'années. Donc, il y a forcément une planète sur laquelle la Vie est apparue à un moment donné. Comment des unicellulaires peuvent-ils apparaître sur une planète, par exemple la nôtre ? Par hasard ? Les bonnes molécules passaient par là et puis patatras il y a eu un coup d'éclair et elles se sont soudées ensemble pour former un unicellulaire ? C'est impossible. Un unicellulaire est quelque chose de très compliqué, fait de milliers de molécules très différentes les unes des autres qui jouent chacune un rôle clé. Cela ne s'assemble pas par hasard. Il y a forcément quelque chose de plus simple qui a existé avant les unicellulaires. D'après les géologues, à l'époque où la Vie est apparue sur Terre il n'y avait pas de continents. La Terre était entièrement recouverte d'eau. Donc la Vie est apparue dans l'eau. Cette eau devait être une véritable boue chimique, brassée et enrichie par les cheminées volcaniques sous-marines. Toutes sortes de molécules existaient dans cette boue, même des molécules qui à priori ne peuvent pas se former naturellement, parce que la lumière du Soleil frappait la Terre et la violence des rayons ultra-violets peut forcer des réactions chimiques. Il y avait aussi des orages, dont les éclairs peuvent souder ensemble ou briser toutes sortes de molécules. Créer un être humain par une monstrueuse décharge électrique, comme le monstre du Docteur Frankenstein, c'est de la fiction. Mais il est bien possible que les simples premières molécules du vivant aient été le produit de décharges électriques. Toutes ces molécules chimiques brassées dans ce grand bain réagissaient ensemble. Elles s'associaient et se brisaient continuellement. De grosses molécules capturaient de plus petites. Et de très petites brisaient des grosses. Certaines molécules ne réagissaient pas ensemble mais s'agglutinaient l'une contre l'autre, formant d'infimes petits flocons. On peut y voir les ébauches inertes des premiers unicellulaires. Il y avait aussi un type particulier de molécules, qui sont les catalyseurs. Ce sont des molécules qui favorisent des réactions chimiques. Elles ne font pas partie de la réaction, mais leur présence la déclenche ou l'accélère. Par exemple supposons deux molécules A et B qui peuvent réagir ensemble pour former une molécule C. Et bien un catalyseur peut être une molécule D, qui a la propriété que quand elle rencontre une molécule A et une B, elle stimule leur réaction pour former une molécule C. La molécule D sort intacte de l'opération. Mais sans sa présence la réaction n'aurait probablement pas eu lieu. On suppose, schématiquement, qu'une de ces molécules catalyseur a eu la propriété de déclencher une réaction chimique qui produisait une copie d'elle-même. C'est à dire que quand une molécule A et une B rencontrent une C, la C sert de catalyseur pour faire se souder ensemble la A et la B et former une deuxième molécule C. Cette molécule C serait donc le départ de la Vie. Elle n'est qu'une simple molécule, mais elle se reproduit. Elle "mange" des molécules A et B pour former de nouvelles molécules C. Elle crée des copies d'elle-même. On ne sait pas encore à quoi ressemblait cette molécule C et on ne le saura peut-être jamais. Il est bien possible aussi que la réaction qui menait cette molécule à faire des copies d'elle-même soit plus complexe qu'une simple réaction A + B. Il y avait peut-être des réactions intermédiaires ou des interactions avec des agglomérats de molécules. Toujours est-il que cette faculté de souder des molécules ensemble s'est développée. Ces molécules qui se reproduisaient ont grandit en taille et se sont entourées à demeure d'un agglomérat de molécules. Pas à pas, les ensembles de molécules qui étaient les plus performants pour engendrer des copies d'eux-mêmes se sont développés, améliorés. Un nombre incalculable de ces petits agglomérats a peuplé l'océan qui recouvrait la Terre. Pendant un milliard d'années, si une petite différence survenue par hasard rendait une formule d'agglomérat un peu plus performante que les autres, elle les supplantait. Des familles d'agglomérats différents ont coexisté, se sont fait la concurrence. La complexification et la qualité des agglomérats est devenue telle qu'on pouvait parler d'unicellulaire. La molécule catalyseur centrale était devenue gigantesque. C'était de l'ADN. L'agglomérat autour était devenu une robuste parois cellulaire de molécules soudées ensemble. Une collection de petits mécanismes moléculaires faisaient fonctionner les entrailles de l'unicellulaire. On en est finalement arrivés aux unicellulaires complexes que nous connaissons actuellement : une membrane extérieure fermée, la présence d'organelles, de vacuoles, de pompes à ions... Il existe un nombre inimaginable d'unicellulaires différents, de tailles très diverses, qui "mangent" des choses très différentes ou qui mangent d'autres unicellulaires. Certains ne sont même pas capables de grossir et de se diviser eux-mêmes en deux copies identiques : ce sont les virus. Certains unicellulaires sont capables de fabriquer des molécules ou de vivre dans des circonstances impossibles pour d'autres. Toutes les combinaisons possibles semblent exister. Leur seul point commun est qu'ils sont capables de se dupliquer ou de se faire dupliquer. Il existe même une simple grosse molécule qui crée des copies d'elles-même dans les cellules qu'elle colonise : le prion, responsable de la maladie de la vache folle. Tout cela est la Vie. L'origine de cette vie est donc semble-t-il cette boue chimique en réaction dans l'Océan, alimentée par les gaz de l'atmosphère et des cheminées volcaniques sous-marines, il y a quelques milliards d'années. C'est là que sont nés les premiers unicellulaires-oeufs-poules ultra-rudimentaires, faits de quelques molécules seulement. De nos jours les unicellulaires continuent à proliférer et parsèment la Terre. Les animaux sont des unicellulaires qui se sont assemblés pour devenir leur propre petit océan auto-transportable. Ces mini-océans sont à leur tour peuplés d'autres unicellulaires. L'importance de cette Vie est telle qu'elle a changé la destinée géologique de la Terre. Elle a causé des sédimentations, créé l'oxygène, changé la température de la surface, changé la couleur de la planète vue de l'Espace...

La dernière variation en date de cette vie est l'Homme. En ce moment il bouleverse les cycles de réaction de la Vie et a un impact de plus en plus grand sur la Terre. Mais il ne dérange pas vraiment les unicellulaires. Et même il pourrait un jour les emmener dans ses vaisseaux spatiaux pour s'implanter sur d'autres planètes. Il pourrait créer de toutes pièces les océans dont ils ont besoin, sur d'autres mondes.

Dernière dépêche : un
ami me fait remarquer qu'il existe une façon de voir les choses, compatible avec la Théorie de l'Evolution, qui répond à sa façon à la question. Les poules sont les descendantes des dinosaures, fort bien, mais les dinosaures ne sont pas des poules. Imaginons qu'on puisse observer au fil des millénaires la petite population de dinosaures qui a lentement évoluée vers l'identité de poule. Il est impossible de dire objectivement à quel moment précis ils sont devenus des poules. Les modifications se sont faites tellement lentement. On peut juste voir qu'ils ressemblent de plus en plus à des poules au fil des centaines de milliers d'années. Mais rien n'empêche, en toute sympathique subjectivité, de désigner un de ces animaux comme étant "miss poule" : le premier à vraiment donner l'impression d'être une poule. Peu importe quel animal on désigne et à quelle époque. On en désigne un. Il est la première poule. Ce qu'il est, était défini par son ADN dans son oeuf. Mais cet oeuf qui a donné naissance à la première poule, est-il un oeuf de poule ? A priori c'est difficile à dire. Si on pose qu'un oeuf de poule est pondu par une poule, ce n'est pas un oeuf de poule. C'est un oeuf de dinosaure. Par contre si on pose qu'un oeuf de poule est un oeuf qui donne naissance à une poule, alors c'est un oeuf de poule. Allons voir au dictionnaire, à "oeuf". Il est marqué : "Corps arrondi, [] que produisent les femelles des oiseaux []". Le dictionnaire est formel : ce n'est pas un oeuf de poule. C'est un oeuf de dinosaure. Il a été pondu par un dinosaure. Donc, le premier, de l'oeuf ou de la poule, c'est cette première poule. Ensuite elle pondra le premier oeuf de poule, d'où sortira la deuxième poule. La poule était là la première. Par contre si c'était un coq, il n'a pas pondu le premier oeuf de poule, bien sûr. C'est une de ses descendantes. Mais cela ne modifie pas le verdict.

La cinquième proposition et la dernière dépêche sont toutes deux scientifiquement et linguistiquement valables. A vous de décider laquelle vous plaît. Ne vous laissez influencer par personne dans votre choix. Vous pouvez aussi prendre une des autres explications, en fait, si vous en avez envie. Sauf à votre travail, si vous êtes médecin ou biologiste. Pour éviter de faire des bévues, vous devez travailler en fonction de la théorie la plus techniquement au point. C'est une responsabilité.

Hervé Daniel ( ) fait remarquer que les dinosaures ne sont pas devenus des poules. Ils sont devenus des oiseaux. Ensuite, une variété particulière d'oiseaux est devenue les poules. L'oeuf dont est issu la première poule a été pondu par un oiseau. Et non par un dinosaure. Cela rend le débat tendu. Si l'on utilise la définition stricte du dictionnaire, comme quoi les oeufs sont pondus par les femelles des oiseaux, alors l'oeuf était là avant la poule. L'oeuf d'oiseau contenait la première poule... Par pure mauvaise foi, essayons de garder notre approche de départ. Si on dit "un oeuf de grenouille", à quoi reconnaît-on le fait que c'est un oeuf "de grenouille". Au fait qu'il a été pondu par une grenouille, ou au fait qu'il donne naissance à un tétard qui deviendra une grenouille ? Il y a déjà là un embryon de réponse : l'oeuf donne naissance à un tétard, pas à une grenouille. De même l'oeuf d'oiseau (ou de poule) donne naissance à un poussin... Plus fort : imaginons que l'oeuf soit stérile, ou qu'on le modifie génétiquement pour qu'il donne naissance à un parcmètre. On continuera à l'appeler un oeuf de grenouille... Donc, l'oeuf d'oiseau qui contenait la première poule n'était pas un oeuf de poule... C'était un oeuf d'oiseau-non-poule. Donc la poule est la première. Question : que fait-on si on utilise une autre langue, peut-être le Chinois ou l'Apache, dans laquelle le nom de l'oeuf désigne ce à quoi il donne naissance ? Réponse scientifique : il faut faire des statistiques. Il faut compter le nombre de langues du premier type et du deuxième type. La majorité l'emporte. A condition que les peuples qui parlent ces langues respectent les Droits de l'Homme, bien sûr. Il faut donc que ce soient des gens de bonne foi.

Olivier Couture nous envoie le témoignage ci-dessous. Les vapeurs éthyliques n'ont pas un cote chamanique très élevée mais toute démarche visant à permettre une libre expression du subconscient doit être prise en compte :




J'ai longtemps cru que les sacrifices humains étaient des actes immondes, propres aux populations arriérées. On sacrifie un individu par bêtise superstitieuse ou pour raison politique... On fait couler le sang pour impressionner la populace, pour lui donner des émotions... Je ne suis à présent plus si convaincu que le sacrifice humain soit un acte de stricte sauvagerie. Tout d'abord, beaucoup de tribus dites sauvages ne feraient jamais une chose pareille. Elles tiennent trop affectueusement à chacun de leurs membres. Ensuite, certaines personnes se suicident. On peut assimiler cela à un sacrifice humain volontaire. Le propos est douteux mais je trouve que le cérémonial dont se sont entourés certains suicidés rappelle les fastes des sacrifices humains que l'on reproche aux premières civilisations. On croit qu'une personne qui se suicide est désespérée et met fin à sa douleur. Oui... mais pas si simple... des intellectuels qui ont été tentés de se suicider racontent qu'il sentaient un véritable appel de la mort. La mort est séductrice. Dans certains cas, ces personnes n'avaient même aucune raison objective de se suicider, elles n'étaient pas désespérées. Il y a dans le cerveau humain un mécanisme qui à un moment donné rend la mort chaude et joyeuse, presque sereine.

Nous sommes les animaux de la création les doués pour apprendre et nous adapter à toutes circonstances. Un humain peut parfois changer radicalement de mode de vie en quelques heures, tout en développant des réflexes spécialisés extrêmement performants pour sa routine de tous les jours. Ces capacités ahurissantes se sont développées en seulement quelques millions d'années. C'est extrêmement court. J'ai l'impression que le cerveau humain est encore à l'état d'ébauche, de prototype. Nous sommes bourrés de bogues et de dysfonctionnement mais les capacités globales sont à ce point fabuleuses que nous avons survécu malgré tout. Nous étions condamnés à disparaître ou à dominer la planète. Un élément clé de notre capacité d'adaptation est la souffrance causée par les remords et les frustrations. Un humain névrosé souffre de ne pas être devenu ce dont il rêvait, tout comme une personne qui se sent coupable souffre de ne pas avoir fait ce qu'elle croyait devoir faire. En toute généralité, on souffre d'être dans des circonstances qui ne conviennent subjectivement pas, que cela soit organisé par soi-même ou par autrui. La souffrance n'existe que parce qu'elle doit entraîner une réaction. Elle pousse l'individu à progresser, à changer. Le changement en question dépendra des circonstances et des individus. Parfois une personne guérira de sa névrose en renonçant à devenir ce dont elle rêvait. On arrête de souffrir quand on a résolu son problème. Une personne tombée dans une crevasse arrête d'angoisser quand elle a trouvé le moyen d'assembler une corde et quelque chose qui peut tenir lieu de grappin. La solution la plus complexe à réaliser consiste à se changer soi-même. C'est aussi la solution la plus prometteuse. On se transmute en quelque chose de différent, de mieux adapté. Se transformer, c'est faire disparaître une partie de ce qu'on était avant. C'est tuer ce qu'on était avant, symboliquement parlant. Renoncer à ce qu'on était est une souffrance. On le fera si la souffrance que l'on subit est plus forte. Une fois la décision prise, une fois la mort symbolique acceptée, on se sent tout de suite mieux, voire on se sent même très bien. Quand une personne est harcelée de partout, quand elle ne s'en sort plus et tombe dans une profonde détresse, je crois qu'elle peut développer l'impression que sa mort physique, sa véritable mort, est la solution. Cette confusion entre la mort symbolique et la mort physique est surprenante. Le suicide semble alors une porte qui mène vers la satisfaction des aspirations de la personne. Elle a l'impression qu'elle va obtenir ce qu'elle désire en se suicidant. Je ne connais pas les raisons de ce mécanisme idiot. Est-ce purement un défaut de construction du cerveau ou bien l'évolution a-t-elle permis l'émergence de ce mécanisme parce qu'il a une utilité quelconque ? A certaines époques récentes en Europe ou dans le Japon Médiéval, une personne qui échoue dans ses ambitions pouvait se suicider. Elle rachetait son honneur, disait-on. La personne a-t-elle l'impression d'obtenir au travers de son suicide ce qu'elle a raté de son vivant ? Est-il utile à société que ceux qui échouent disparaissent ? Je ne sais pas exactement ce qu'il faut penser scientifiquement et moralement de cela mais je crois que c'est profondément en nous et que nous devons apprendre à composer avec. La vague de suicides après le suicide d'une personnalité donne l'impression qu'en quelque sorte elle a "montré le chemin". Nous devons nous méfier de ce mécanisme parce qu'il est un puissant levier pour nous manipuler. Un dresseur se contente souvent de développer chez l'animal un réflexe naturel. Je suppose que les gourous qui mènent des personnes à commettre des attentats suicide les entretiennent dans une atmosphère de désespoir, en les focalisant sur l'oppression de l'ennemi supposé. Ils font miroiter ce chemin vers un paradis halluciné. Pour leur armée les gaulois avaient développé une religion qui promettait une vie paradisiaque sur une île merveilleuse, après une mort valeureuse au combat. Les gaulois étaient des guerriers impressionnants mais passé l'effet de surprise et la terreur des premières attaques, les romains ont appris à les laisser venir s'embrocher...

Dans une tribu, l'entraide est un fondement. Chaque membre de la tribu est important. On se serre les uns contre les autres, pour se protéger de la Nature et des tribus ennemies. On trouve son réconfort dans la tribu. Si les chefs du village sont mauvais, on peut changer de village (c'est la démocratie externe : on vote avec ses pieds). Dans une civilisation primitive, quand on commence à construire des ville et des édifices, la donne change. Les individus sont davantage en concurrence. Les personnes que vous côtoyez dans les rues et dans les temples sont à la fois vos ennemis et des alliés potentiels. Il n'y a qu'une seule ville. Quand bien-même il y en aurait d'autres, elles sont aussi dures. Le pouvoir est une dictature. La pression est énorme sur les individus. Il y a sans doute un désespoir général de la population au sein d'une ville primitive. Quand les temps sont durs, il doit y avoir beaucoup de suicides... Dans cette atmosphère, si le pouvoir prend un individu en particulier et "le suicide", cela ne doit pas être vu comme un meurtre ou une exécution mais comme un privilège. "Suicider" une personne en grande cérémonie permet peut-être d'éviter que d'autres se suicident. Il part à leur place... On doit considérer le sacrifié comme un élu. Organiser cette cérémonie assoit le pouvoir des chefs et des prêtres. Ils s'affirment en gardiens des portes qui mènent au bonheur. Pour le sacrifié, l'autorité des prêtres et le cérémonial garantissent le succès de son "voyage" et témoignent de l'importance qui lui est donné... La victime part avec les aspirations et les bons voeux de tous, parfois chargée de messages pour les divinités. A priori il se passe exactement l'inverse lors de l'exécution publique d'une "sorcière" ou d'un "hérétique". La victime n'est pas consentante et elle part chargée de la haine et des frustrations de la population. Je crois que fondamentalement ces deux extrêmes se rejoignent. La sainte inquisition exécutait ses proies "pour leur bien" et les populations étaient calmées après. Quand les victimes ne sont plus consentantes, c'est que la civilisation est en progrès. La population elle-même acceptera de moins en moins bien les exécutions. Il deviendra de plus en plus difficile aux superstitieux assoiffés de pouvoir d'organiser des exécutions publiques. Ils devront déployer des stratagèmes et des subterfuges de plus en plus complexes et se contenter de victimes moins valorisantes.

S'il n'y avait pas la peur de souffrir, beaucoup de personnes se suicideraient tout de suite. Cette peur est un blocage pour ceux dont le désespoir n'est pas trop profond. Elle est également utilisée par les gourous. Une connaissance s'était persuadée que si l'on vit en obéissant à la religion, on aura une mort douce. Tandis que si l'on vit en désobéissant, on souffrira atrocement le jour venu. Fort de cette superstition et conscient de cette peur enfouie en chacun, il essayait d'effrayer ses interlocuteurs. Il se présentait comme la personne à même de leur enseigner la bonne religion... On aurait dit un enfant infect qui a trouvé une arme par terre et qui court vers une foule en jouissant à l'idée que tous vont le craindre et le respecter. Il n'y a qu'un seul remède à cette peur : mourir soutenu par une personne aimante. C'est peut-être pour cette raison que les enfants ont de meilleurs résultats scolaires quand ils reçoivent de la tendresse. Cela leur permet de mieux mourir tous les jours pour s'adapter à l'évolution des cours. Certains parents croient que s'occuper d'un enfant consiste à le menacer s'il ne ramène pas de bons résultats scolaires. D'autres croient qu'un enfant est intrinsèquement génial et qu'il suffit de le laisser vivre comme une plante pour qu'il s'épanouisse. Donner de la tendresse à un enfant, c'est lui prêter votre beau cerveau d'adulte tous les jours. Parfois ce prêt consiste à lui interdire des choses que vous vous interdiriez à vous-mêmes si vous aviez son âge, parfois lui apprendre des choses qu'il n'aurait pas apprises par lui-même, parfois simplement jouer à ses jeux, parfois ne rien faire mais ensemble... Si vous lui prêtez votre cerveau, il prendra en lui une partie de vos motivations, par osmose. Par exemple l'idée que l'école c'est important. Faire ses devoirs à sa place, ce n'est pas lui prêter votre cerveau. Pendant que vous faites les devoirs vos cerveaux ne sont pas en communication. Prendre le temps de lui expliquer les devoirs, par contre, est un prêt de cerveau fort utile.

Le suicide d'un jeune est sans doute particulièrement dur pour sa famille parce qu'elle sent qu'il ne l'a pas considérée comme une tribu accueillante où il aurait pu venir se réfugier. D'autres familles affirment voir les choses de façon opposée... le jeune qui a refusé de se plier à des règles s'entend dire "on aurait préféré que tu sois mort(e) !"

Dans la traite des esclaves, un élément fort est le suicide des individus capturés. Les méthodes employées font froid dans le dos, comme se gaver de terre pour déclencher une infection généralisée. Se suicider, c'est refuser l'esclavage. On se suicide quand on a compris qu'il est impossible de s'échapper. Cela devient la seule porte pour rejoindre ceux qu'on aime, ceux qui vous connaissent et vous comprennent. Tout au moins en a-t-on l'impression au fond du désespoir. C'est la dernière chose que l'on peut se donner à soi-même, la dernière tendresse. La mort des individus capturés fait partie du métier de marchand d'esclaves. Avant d'embarquer la "marchandise" sur les bateaux de transport, certains marchands les enchaînaient pendant quelques jours en plein air, exposés au soleil et aux intempéries. Ceux qui mourraient n'auraient de toute façon pas supporté la traversée... et ils auraient pu développer des maladies qui auraient contaminé les autres. Quand un individus capturé se suicidait, je suppose que les marchands considéraient qu'il n'était de toute façon pas viable pour l'esclavage. Il aurait posé des problèmes... Je suppose que dans certains manuels de la traite des esclaves on trouve des conseils à ce propos, comme empêcher un esclave de se suicider dans tel cas, par contre laisser faire dans tel autre cas... Les vieux routards devaient se moquer des débutants qui essayaient de garder un maximum d'individus en vie. Le métier, cela s'apprend... A mon avis, on devait interdire le suicide aux esclaves qui avaient déjà survécu un certain temps, qui devenaient rentables. Ainsi qu'aux individus nés en esclavage.

En Afrique les marchands d'esclaves avaient appris à ne pas perdre leur temps à s'attaquer à certaines tribus. Les personnes de ces tribus se laissaient mourir en captivité, en quelques jours, inexorablement. Ce n'était pas un acte de revendication ou une stratégie quelconque. Ils ne se suicidaient pas par un acte précis. Simplement ils restaient prostrés et ne mangeaient pas. Ils s'éteignaient...

Un homme libre est une personne qui choisit, donc qui change. Un esclave n'a plus de choix à faire. Il obéit à un maître. Pour une personne qui accepte l'esclavage, ce dernier changement, la vie peut devenir un long fleuve tranquille. Si le maître est raisonnablement humain et si on accepte sa condition, tout ira bien... L'abandon du statut d'homme libre implique de renoncer à sa famille. Les marchands séparaient les familles. Les propriétaires revendaient des esclaves nés dans leurs exploitations. Quand des lois sont votées par la métropole pour réguler puis interdire la séparation des familles, cela annonce la fin de l'esclavage. Un propriétaire qui n'est pas assez fort pour séparer les familles perd son statut. S'il se laisse attraper par l'émotion que les esclaves ont des sentiments familiaux, il est perdu. Un endoctrinement existe donc pour se persuader que les esclaves ne sont pas des humains, ni même des animaux. Même une poule ou une jument tient à ses petits... Un esclave est un outil. Un outil jetable, éminemment remplaçable... qui n'a donc aucun moyen de revendiquer quoi que ce soit. On retrouve cet endoctrinement encore de nos jours chez des descendants de coloniaux.

Si l'on traduit littéralement certains prénoms musulmans, ils signifient "Esclave de Dieu". Il ne s'agit pas d'une forme religieuse d'esclavagisme... Etre l'esclave de Dieu, c'est s'intégrer à l'oeuvre de Dieu, donc à la vie. C'est n'être l'esclave de personne d'autre : ni du diable tentateur, ni d'un maître humain. Cet état d'esprit est à rapprocher de l'idéal américain qui veut que l'individu soit autonome, libre et instruit, tout en étant un protecteur de sa communauté. On s'étonne de voir les israéliens et les palestiniens se déchirer alors qu'il y a tant de valeurs communes à leurs religions. Le paradoxe est le même dans l'affrontement larvé entre les USA et les pays musulmans. Ils sont beaucoup plus proches l'un de l'autre qu'ils ne le croient. C'est peut-être ce qui a contribué à les pousser à s'affronter... Ils ont les mêmes bases, tout en ayant fait des choix de vie superficiels différents. Ils se reconnaissent sans s'admettre... Si les américains et les musulmans avaient un niveau culturel plus élevé ils auraient pu accepter leur attirance réciproque et entamer un dialogue constructif. Revenons à l'esclavage. Dans le même esprit, une personne amoureuse peut ressentir un bonheur immense à se sentir l'esclave de l'être aimé. Cela veut dire qu'elle fait le choix supposé définitif de se consacrer à elle. Cette émotion est comparable à celle que ressent un musulman qui comprend sa religion et qui "s'approche de Dieu". Nul délire religieux dans mon propos : ce ne sont là que les instincts et les réflexes humains naturels. Nous sommes faits pour tomber amoureux, nous sommes faits pour tenir à notre communauté... Cela s'accompagne de sentiments forts, d'émotions et de choix... Certains en parleront avec les mots de la religion, d'autres avec des symphonies laïques... peu importe. Chez un esclave aussi ce sentiment de dévouement peut exister. Il est connu dans l'Antiquité que certains esclaves avaient un amour et un dévouement sans faille pour leurs maîtres. En général ce type d'esclave était privilégié, choyé en retour... On retrouve cela chez certains domestiques des 18ème et 19ème siècles européens. Notez que ce que j'écris ci-dessus à propos de l'Islam ne concerne que les vrais musulmans. Pour un intégriste, par contre, un croyant est sensé être soumis au commandement direct de Dieu. C'est en parfaite contradiction avec la parole de Mahomet (la Paix sur lui). Il a bien spécifié qu'il n'y aurait plus de prophètes après lui, donc plus de lien direct avec Dieu. L'intention diabolique d'un intégriste -quelle que soit sa religion- est de réduire son prochain en esclavage, donc l'éloigner de Dieu. Le fondamentalisme est parfois confondu avec l'intégrisme mais est en réalité très différent. Le fondamentalisme consiste à reproduire le mode de vie et de pensée d'une certaine époque. Pour des juifs, par exemple, cela consistera à reproduire le mode de vie des tribus juives originelles ou de certaines périodes clé de l'histoire juive. Pour des scouts cela consistera à vivre quelques jours suivant les règles énoncées par Baden Powell... C'est un excellent exercice historique, culturel, philosophique, religieux et identitaire. Cela vous rapproche de vous-mêmes, des autres et de vos ancêtres, donc de Dieu. Si on vit de façon fondamentaliste en permanence, sans plus aucune remise en question, cela devient de l'intégrisme...

Je crois que la majorité des gamins qui consomment régulièrement de la drogue le font parce que ces produits sont anxyolitiques. Ils souffrent des pressions que l'on exerce sur eux et qu'ils n'arrivent pas à satisfaire. On leur fait sentir en permanence qu'ils ne font pas ce qui est nécessaire, sans même leur donner les moyens de s'adapter, sans se demander s'ils pourraient s'adapter. Ils sont comme les esclaves parqués en plein air. Survivra, survivra pas... peu importe. Il y aura du déchet, le reste se montrera coopératif... La drogue permet de tenir le coup. Elle permet aussi de se sentir à l'aise en compagnie d'individus que l'on ne connaît pas réellement. Ils ne sont pas de votre clan mais en prenant de la drogue vous ressentez le bien-être et l'ouverture que l'on ressent quand on rencontre un membre de son clan. Vous n'avez pas de clan... vous n'en avez jamais eu... vous êtes né en esclavage... mais il y a ce besoin en vous de frayer. Vous ne le comprenez pas, parce qu'on ne vous a rien expliqué. Il n'empêche que c'est une pression importante sur vos choix... Les drogues qui permettent cela, comme l'alcool où la cigarette, sont en général tolérées dans les civilisations primitives. Elles détruisent l'individu mais elles le tiennent calme et favorisent son exploitation. Pour certains, la drogue a un rôle plus complexe. Elle est un instrument pour sonder l'esprit. Elle permet de découvrir des émotions inconnue ou de voir les choses sous des perspectives différentes. Elle est un moteur d'intelligence et de liberté, donc un aliment des choix. Dans les sociétés tribales cette fonction des drogues peut être relativement bien comprise et gérée correctement. Dans les civilisations primitives, par contre, il règne une confusion meurtrière. Des jeunes prennent de la drogue comme "médicament à changer sans souffrance". Cela n'a pas de sens. Ils se retrouvent dans un cycle, à reprendre sans cesse de la drogue, sans même être physiquement dépendants du produit. Ils vivent dans le mirage qu'après la prochaine dose les choses vont aller mieux, les bons changements se seront opérés... Insister sur le fait que la drogue peut les tuer n'est pas forcément une bonne idée, puisque l'idée de mort est justement associée à l'idée de changement, d'adaptation, de renaissance amélioré... Les éducateurs ne comprennent pas pourquoi ils sont en rage contre les étudiants qui se droguent, contre ce produit qui leur fait la concurrence ou qui les empêche d'exercer des chantages. Toutes ces personnes sont victimes de mécanismes simplement humains mais qu'elles ne comprennent pas, qu'elles subissent. Il s'ensuit des heurts et des pertes inutiles, des gaspillages monstrueux et des décès. Le rôle d'un véritable enseignement est de faire comprendre ces choses aux jeunes. Alors ils peuvent faire des choix plus intelligents et éviter de se faire détruire par la civilisation et par leurs propres instincts mal assumés.

Une amie m'a expliqué : "j'ai réussi a arrêter [la drogue] car j'ai des amis autour de moi qui m'ont aidée, j'ai trouvé une nouvelle famille en quelque sorte, de vrais amis qui ont été là dans les moment difficiles. Et surtout un homme qui a cru en moi, qui ne m'a pas jugée, qui m'a écoutée et qui m'a soutenue. Je pense que c'est ce tout qui a fait que je m'en suis sortie." Dans un registre plus sombre, le piège tendu aux jeunes par les mafias et les groupes de la rue est de leur faire croire qu'ils entrent dans une famille, plus humaine que leurs propres familles ou que les administrations. Aussi nuisible soit-elle, cette pseudo-famille tient parfois réellement ses promesses. Un homme de main qui respecte l'omerta sera mieux protégé en prison par sa "famille" que par l'administration pénitentiaire... On dit que la mafia recrute en prison. Ce recrutement se fait en grande partie en offrant aux personnes une sorte d'humanité, un environnement qui semble digne d'allégeance pour un esprit simple. L'héroïne fait des ravages en prison. D'après les critères moraux de notre civilisation, qu'est-ce qui est préférable : qu'une personne entre dans la mafia ou qu'elle soit détruite par une toxicomanie ?

Plusieurs phénomènes neurologiques contribuent à la superstition que la mort est un passage. Quand les fonctions vitales sont sévèrement endommagées et que le cerveau est en train de mourir, l'état de choc procure une sorte d'anesthésie et de bien-être. Les neurones de la vision meurent l'une après l'autre et donnent l'impression visuelle que l'on se trouve dans un tunnel. Quand le cerveau cesse de gérer la notion de temps, on peut avoir une impression d'éternité. Comme le cerveau est isolé du monde extérieur, il génère ses propres images en se servant des souvenirs. On peut alors croire revoir des parents décédés. Ce phénomène survient également dans une circonstance moins dangereuse : quand on prend un produit qui coupe le cerveau des sens. Une personne qui prend de la kétamine ou de l'iboga, par exemple, empêche son cerveau de recevoir les informations des oreilles, des yeux, du toucher... Ce phénomène est utilisé dans certaines religions africaines, qui utilisent l'iboga pour faire soi-disant visiter "le village des ancêtres" à leurs adeptes. (L'iboga serait un outil efficace dans le traitement contre les toxicomanies...) Tous ces phénomènes : l'euphorie de l'anesthésie, le tunnel, la perte de la notion du temps, l'impression de voir des personnes décédées... font que des personnes qui ont survécu disent en toute sincérité que la mort semble être un passage et qu'il y a un paradis paisible au-delà, où séjournent les ancêtres et les amis décédés.

"J'aime pas les mecs gentils" me disait une amie.
Cela peut sembler paradoxal de la part d'une fille de ne pas apprécier la gentillesse. Pour comprendre ce qu'elle a voulu exprimer, il faut revenir à l'enfance :
Garçon ou fille, un enfant joue avec des poupées. Ces poupées peuvent être féminines, masculines, animales ou machines.
"Jouer à la poupée" est une activité fabuleuse. L'enfant rêve des situations, des histoires, que vivent ses poupées. Ces histoires sont simples : il donne à manger à sa poupée, sa poupée s'endort, il habille sa poupée, sa poupée rend visite à une autre poupée, sa poupée attaque une position ennemie, sa poupée vole dans les airs, sa poupée se marie, sa poupée habite une maison... L'enfant rejouera indéfiniment ces situations, avec des variations ou des combinaisons différentes.
A quoi servent les jeux de poupée ? Ils sont très importants ! Tous les animaux évolués ont dans leur cerveau une "représentation" du monde extérieur. Vous savez que à tel endroit se trouve tel objet. Vous savez que passé huit heures du soir il faut mettre un enfant au lit et vous savez quel rituel il faut suivre pour le faire. Mais, toutes ces choses que vous avez en tête demandent un certain travail de classement, de préparation, d'apprentissage. Il faut "malaxer" ces choses dans votre tête pour qu'elles prennent consistance. Les jeux de l'enfance sont un tel malaxage. Les poupées leurs servent de support palpable. Le jeu est un droit fondamental de l'enfant. Prendre à un enfant son droit de jouer, c'est l'empêcher de devenir un Etre Humain.
Le jeu a un point commun avec les autres activités vitales : il procure du plaisir.
Il y a une différence très importante entre les jeux purs et la vie réelle :
Quand un enfant agit sur des poupées, il est libre d'imaginer ce qu'il veut, vivre n'importe quel rêve.
Mais quand il interagira avec des personnes, il faudra qu'il tienne compte des particularités et de la situation propre de ces personnes.
La nuance est de taille.
Cela n'a pas de sens de donner à quelqu'un une chose dont il n'a pas besoin.
Cela n'a pas de sens de demander à quelqu'un une chose qu'il ne peut pas donner.
Connaître toutes les choses dont les autres pourraient avoir besoin. Etre à même de voir quand ils en ont besoin. Demander aux autres les choses dont nous avons besoin. Pour être capable de tout cela il faut être cultivé et avoir beaucoup de pratique. interagir avec les autres est un art majeur.
Ou est le problème ?
Le problème est total :
Une fois devenus adultes beaucoup de gens continuent à jouer à la poupée. Au lieu de jouer à la poupée avec des poupées en plastique ils jouent avec des poupées en chair et en os : avec d'autres personnes.
Les gens ne se "voient" pas les uns les autres. Ils ont leurs petits rêves dans leurs petites têtes et tentent d'utiliser les autres comme autant de poupées pour vivre ces rêves. Les rêves sont de toutes natures; ils rêvent de ce qu'ils vont donner à l'autre, ils rêvent de ce que l'autre va leur donner, ils rêvent de ce qu'ils vont faire ensemble... Cette situation est une atteinte aux Droits de l'Homme permanente. Il en résulte des conflits perpétuels et beaucoup de dégâts.
Nous sommes confrontés à une véritable toxicomanie. Les "drogués" peuvent se montrer ultra-violents avec leurs "poupées" si elles refusent de coopérer, si elles refusent de mettre les rêves en pratique.
Rares sont les personnes qui disposent du socle culturel et la souplesse d'esprit nécessaire pour percevoir et accepter les autres tels qu'ils sont. Donner à autrui ce dont il a réellement besoin... qui peut se targuer d'en être capable ? En d'autres termes : qui est capable d'aimer ? (Et plus humblement : qui, dans le doute, est capable de s'abstenir ?)
Nous pouvons maintenant revenir à cette amie qui "n'aime pas les mecs gentils". Il y a deux façons d'expliquer sa position :
Elle est dérangée par les hommes qui veulent l'utiliser comme poupée pour leurs rêves. Elle n'a pas envie de se faire servir et chouchouter par un rigolo qui en réalité ne fait que vivre ses fantasmes de vie de couple, sans réellement s'occuper d'elle.
Elle veut que ce soit elle qui joue à la poupée, et que ce soit l'autre qui serve de poupée. (Ceci est une très mauvaise raison.)
Voila, vous avez compris pourquoi, à mon avis, elle n'aime pas "les mecs gentils".

Voici quelques considérations pour broder sur le sujet :

Les joueurs ont toujours une très bonne opinion d'eux-mêmes. Ils sont très fiers, ils ignorent toute forme de remise en question. Si vous tentez de leur expliquer qu'ils font de grands dommages à leur poupée, ils se demanderont vraiment de quoi vous voulez parler. Ils en concluront que vous êtes jaloux ou que vous avez un problème quelconque. Le voile qu'ils ont devant les yeux est très épais. Devant leur troisième oeil, ce n'est pas un rideau mais une tôle de blindage antinucléaire vissée avec des boulons de 12.
L'identité des "poupées" est niée, effacée. Des civilisations entières ont institutionnalisé ces pratiques.
Le cas le plus pointu est sans doute celui des enfants que leurs parents considèrent comme leurs poupées. Alors que le rôle des parents est au contraire d'essayer de percevoir leurs enfants tels qu'ils sont. Et surtout de leur apprendre à percevoir les autres tels qu'ils sont, tels que sont leurs besoins, leurs préoccupations, leurs dons...
Il existe des joueurs qui ont conscience d'être des joueurs. Ils continueront à le faire, soit parce qu'ils croient que c'est cela la vie normale, soit parce qu'ils ont clairement, criminellement, décidé de vivre ainsi, aux dépends d'autrui. Attention, le fait d'être joueur peut cacher une grande détresse : certaines personnes ne savent tout simplement pas ce qu'elles pourraient ou devraient réellement faire avec leurs poupées. C'est un problème d'incompétence, de manque d'éducation et de culture. Avec ces personnes là, la manière forte serait déplacée. Mieux vaut simplement leur expliquer, leur donner les moyens concrets pour agir autrement.
Certains joueurs proposent leur poupée à d'autres joueurs. Ils la livreront avec le mode d'emploi. Par exemple ils vont parler de leur poupée en disant "Vous comprenez, elle est très fragile. Elle a des problèmes de personnalité. Parfois elle raconte n'importe quoi. Soyez patient, occupez vous bien d'elle." Les autres joueurs vont alors traiter la poupée de la même façon, comme si elle était un enfant irresponsable. Dans d'autres cas le joueur propose sa poupée pour qu'elle rende un service. Il allèche l'autre joueur en lui faisant miroiter tout ce que sa poupée-domestique va faire pour lui. Si la poupée ne joue pas le jeu l'autre joueur en sera offusqué. Il cautionnera toute représailles contre la poupée. Elle est manifestement folle !
Autant le joueur est dément dans son rêve, autant il peut être froid et précis quand il s'agit de défendre ses intérêts. Ses talents de manipulateurs seront mis à contribution. Si par exemple une personne lui fait remarquer que sa victime pourrait très bien se débrouiller seule dans la vie, il répondra "Est-on jamais vraiment sûr qu'une personne peut se débrouiller seule ?". Si on lui reproche d'avoir estropié sa victime, il répondra "Croyez-vous qu'elle est la seule personne estropiée au monde ?". Si on lui reproche de dicter sa conduite à la victime, il répondra "Mais vous-même, que sauriez-vous faire dans la vie si on ne vous avait jamais dit ce que vous devez faire ?". La majorité des personnes se contentent de ces réponses et vont même les répéter à la victime pour la convaincre du bien-fondé des intentions du joueur et affirmer que le critiquer n'est pas très constructif. "Mais enfin, ta maman est si gentille, pourquoi dis-tu ainsi du mal d'elle ?" Ces personnes n'ont pas le sens des proportions, sont subjuguées par l'aplomb du joueur et préfèrent les solutions de facilité. Elles deviennent les collaborateurs du joueur, elles glissent sur sa pente. Bientôt elles auront besoin du joueur pour continuer à gérer la situation, pour éclairer les choses. Elles dépendront de lui. Elles peuvent finir par considérer la victime comme leur ennemi, comme la source des problèmes.
Quand une poupée finit par fuir son joueur, le joueur en conçoit une grande amertume. Il se dit par exemple "Je lui ai donné tant de choses, regardez le résultat ! Quelle ingratitude. Le monde n'est fait que d'ingrats !"
Comme tout être humain, le joueur a des besoins. Des besoins à la fois vitaux et souvent très simples. Parfois, sa poupée serait tout à fait à même de lui donner ce qu'il lui faut. Mais il ne la laissera pas faire : dès l'instant où cela ne cadre pas avec ses rêves il cassera net toute tentative de sa poupée.
Dans les couples le jeu va souvent dans les deux sens. Chacun est en même temps joueur et poupée de l'autre. Jusqu'au jour où le jeu se brise, alors le refus de continuer à jouer est interprété comme une offense ultime méritant toutes les punitions.
Certains enfants développent une grande dextérité avec leur poupée. Ils savent la faire tenir en équilibre sur une arrête, ou ils savent comment lui faire tenir des objets divers... Les joueurs adultes peuvent parfois aussi faire preuve d'une dextérité particulière avec leur "poupée". En lui parlant, ils savent mettre leur poupée dans un état d'esprit bien précis ou lui faire faire des choses.
Parfois le joueur est perçu tout de suite comme un manipulateur par l'entourage de la victime. Mais généralement c'est le contraire : il sera très apprécié. On le louera pour sa gentillesse, sa générosité. Si la victime se plaint, on la regardera d'un air étonné.
Au final le joueur donne à sa victime moins qu'à une personne qui lui est indifférente. Voire il lui prend tout pour le donner à d'autres. Avec des personnes neutres, il peut avoir des relations relativement normales. Il peut par exemple prêter de l'argent, dont une personne a réellement besoin, et oublier d'en réclamer le remboursement. Mais il accordera difficilement un prêt à sa poupée et il ne manquera pas de s'en servir comme moyen de pression si nécessaire. Quand il est "généreux", c'est en donnant des choses dont il a rêvé et dont la poupée n'a en réalité pas besoin... Les "cadeaux" que le joueur fait à sa poupée sont toujours liés à ses rêves. La robe dans laquelle il aimerait la voir, un téléphone portable pour mieux la contrôler...
Les vrais besoins de la poupée sont considérés comme quelque chose d'impur, qui ne peut être nommé qu'avec dégoût. Certains joueurs sont néanmoins suffisamment manipulateurs pour feindre de prendre en considération les besoins de leur poupée.
Les prostituées sont des poupées professionnelles. Quelques-unes d'entre elles réussissent à sortir bénéficiaires du jeu : elles se font payer très cher et investissent intelligemment leurs gains. Hélas la majorité sont perdantes, comme toutes les poupées, parce qu'elles perdent leur argent aussitôt après l'avoir gagné. Parce que cet argent est de l'argent de poupée. Il n'a pas de valeur à leurs yeux, pas plus que la poupée ne se donne de valeur à elle-même.
Le harcèlement dans le monde professionnel est un exemple de jeu de poupées. On engage une personne parce qu'on rêve du travail qu'elle va fournir et des bénéfices qu'elle va engendrer. Si par la suite il s'avère que la poupée ne se conforme pas au rêve ou que le rêve était dès le départ mal pensé, on procédera comme tout mauvais enfant qui veut un nouveau jouet et à qui ses parents font remarquer qu'il en a déjà un : on casse le jouet. On va rendre la vie dure au jouet, on va le détruire psychologiquement par les actions les plus ignobles et les plus sournoises, pour qu'elle se suicide physiquement ou au moins professionnellement. Rares sont les entreprises où on dit simplement, naturellement, à une personne que son poste ne convient pas et qu'elle est licenciée avec des remerciements pour les services rendus et une bonne prime.
Souvent la poupée est pour le joueur le "complément" de sa propre personnalité. Il a besoin de la poupée pour se sentir lui-même, entier et complet. Il part du principe qu'il en va de même pour la poupée. Il est évident pour lui qu'elle a besoin de lui.
La poupée devient souvent dépendante du joueur. Il est une drogue pour elle. Il rêve la vie, il mène le jeu, il rend les choses plus simples, il prétend protéger, il a des témoignages "d'affection"... On a plus d'une fois vu une poupée revenir vers son joueur en rampant.
Un des trucs qu'un joueur peut utiliser pour garder sa poupée est de lui expliquer que le monde extérieur est méchant, que les gens sont mauvais. Il faut parfois plusieurs années à une poupée qui a échappé à son joueur pour comprendre qu'il existe des gens positifs dans le Monde. Elle comprend que l'enfer est le joueur et que le paradis existe, ailleurs et en elle-même.
L'outrance peut être le meilleur camouflage du joueur. Certains joueurs infligent des choses à ce point atroces ou inutiles que personne n'arrive à croire la poupée quand elle essaye d'en parler. La poupée elle-même n'arrive parfois pas à y croire. Les joueurs impunis sont ainsi aussi parmi les plus détraqués ou les plus criminels.
Le joueur est un rêveur. Un rêveur qui se paye le luxe d'un support en chair et en os pour ses délires. Le joueur rêve la vie de sa poupée et il rêve sa propre vie. Il est détraqué de la réalité, il ne perçoit pas les besoins et les souffrances qu'il n'a pas envie de percevoir. Tout se passe dans sa tête, où il se construit de belles images. C'est la raison pour laquelle les joueurs sont aussi convaincants et affirmatifs pour nier qu'ils auraient fait quoi que ce soit de mal à leur poupée. Ils rêvent qu'ils sont fiers et sans reproches et ils l'affirment. C'est ce même mécanisme du rêve perverti qui les fait abuser de leur poupée et qui leur permet d'être aussi "sincères" pour nier toute responsabilité et clamer leur intégrité.
Le viol est souvent le fait d'un joueur qui va un cran plus loin dans le passage à l'acte. Réciproquement, même s'il n'y a pas de viol physique le comportement d'un joueur est toujours un viol : une négation et une destruction de la personne que la poupée est.
Certaines situations de jeu de poupée ne peuvent trouver leur terme qu'en portant l'affaire en Justice. Beaucoup de joueurs sont incurables et ne cèdent que par la force. Même le fait de leur expliquer concrètement les choses et s'assurer qu'ils ont compris ne suffit pas : systématiquement, après quelques heures ou après quelques semaines, la machine néfaste se remet à fonctionner dans leur tête et ils repartent à l'attaque. Sans doute parce qu'il sont confrontés à une grande difficulté de vivre. Ils ont besoin du jeu de poupée pour survivre, comme des drogués.
Vous aurez certainement envie de faire en sorte que les gens autour de vous cessent de jouer à la poupée. Faites attention : tenez compte du fait qu'ils jouent peut-être à la poupée parce qu'ils n'ont pas eu l'occasion de le faire quand ils étaient petits. Ils ont un vide à combler. Il ne faut donc pas leur interdire de le faire, sous peine de les fermer sur un manque intérieur. Au contraire : il faut leur apprendre à le faire ! Ainsi ils pourront aller plus loin, dépasser le jeu. Je le dis toujours : "Si vous donnez 10 € à un enfant, qu'il les dépense d'un coup pour acheter des bonbons et qu'il se colle une indigestion avec, vous aurez dépensé 10 € et 24 heures pour lui apprendre qu'il faut savoir gérer l'argent. Les enfants apprennent très vite et pour pas cher. Mais s'il n'a pas eu l'occasion d'apprendre étant enfant, devenu adulte il lui faudra gaspiller 1.000.000 € de salaire, endurer 20 ans de problèmes et causer la faillite de 5 personnes avant de commencer à comprendre."
La littérature, l'histoire... nous fournissent la culture, la base nécessaire pour comprendre, pour rêver, pour vivre. Les arts nous apprennent à communiquer et à aller plus loin dans nos rêves, au delà de la réalité, pour mieux construire la réalité. Ils sont le véhicule de sentiments qui peuvent nous amener à faire des choses grandes. Jouer dans des pièces de théâtre amateur est une excellent thérapie sinon la meilleure pour les joueurs et les poupées. Mais qu'en est il des sciences exactes ? Certains croient qu'elles ne sont que des outils, des considérations pratiques secondaires. Ils se trompent lourdement. La Science est un enseignement, une initiation. Les physiciens sont statistiquement les maris les plus appréciés. Dans leur métier ils sont tous les jours confrontés à la nature "telle qu'elle est", mais en plus ils sont confrontés à des phénomènes très différents les uns des autres. Cela leur donne un bon entraînement en matière de souplesse d'esprit, sens des réalités et capacité d'adaptation. Offrir une boîte de chimie à un enfant est une grande idée. Les produits chimiques ne réagissent pas comme l'enfant veut qu'ils réagissent. C'est l'enfant qui devra s'adapter aux produits chimiques, apprendre à les connaître. Alors seulement il saura ce qu'il peut obtenir d'eux, imaginer des combinaisons réalistes.
La culture n'est pas un gage de sanité d'esprit. Je connais le cas d'une famille d'universitaires. L'un des parents a fait des études scientifiques, l'autre des études littéraires. Ils ont lus et ressassé des milliers de livres d'Histoire, de psychologie, de pédiatrie, de philosophie... Ils sont enseignants et en général fort appréciés. Mais quand ils ont eu un enfant et se sont tout de suite mis à fantasmer sur ses capacités, sur ce qu'il allait devenir plus tard. L'enfant avait réellement des capacités, mais son caractère le disposait plus à devenir un prêtre ou un poète qu'un universitaire. Alors ils l'ont torturé pendant toute son enfance pour le forcer à prendre "le droit chemin". Plus l'enfant souffrait, plus sa mère sentait ses rêves se réaliser. C'était sa drogue, sa forme de sexualité. Il a été passé à tabac, privé de nourriture deux jours par semaine pendant des années, avait la possibilité de dormir quelques heures par nuit les jours d'école, subissait des lavages de cerveau tous les jours... Il a fini par se comporter comme les enfants des rues. Il sniffait des sachets de colle pendant que ses parents regardaient distraitement. Après, pour éliminer les solvants de son sang il faisait de l'hyperventilation, retenait sa respiration et causait des chutes de tension en se levant brutalement, ce qui déclenchait des sortes de crises d'épilepsie. Personne dans l'entourage n'a compris la gravité de la situation. Quelques personnes se sont inquiétées sur base du peu de choses qui étaient apparentes et ont essayé de raisonner les parents. Leur réaction a été de rompre toute relation avec ces personnes. Devenu adulte l'enfant a commencé à raconter ce qui c'était passé. Les parents l'ont vécu comme une atteinte scandaleuse et répugnante à leur honneur et ont contre-attaqué. Avec certaines personnes ils se sont montrés des parents très aimants, préoccupés pour leur enfant qui semble un peu bizarre. Avec d'autres ils l'ont tourné en ridicule, ont fait en sorte qu'il ne puissent plus le voir sans pouffer de rire. Ils ont prévenu le reste de la famille : "On ne comprend pas ce qu'il a, il raconte des horreurs sur nous... essayez de l'écouter et de voir ce qu'il dit, on essayera de faire quelque chose.". Quelques personnes ont tout simplement été achetées. Elles ont reçu des avantages en échange de leur fermeture d'esprit. Soit des avantages en nature, soit la possibilité de profiter eux aussi de l'enfant, comme un esclave que l'on prête. Sur une trentaine d'amis, de grands-parents, d'oncle et de tantes, l'enfant n'a trouvé rigoureusement personne pour le comprendre. Il est simplement parti.
Certains joueurs utilisent des otages. Un ami me racontait le cas d'une amie héroïnomane. Dans l'absolu cette amie a une relativement forte personnalité est n'est pas du tout destinée à devenir toxicomane. Mais elle a eu une enfance avec une personne exceptionnellement toxique qui est sa mère. Lors de son adolescence elle a par exemple été attachée sur une chaise et brûlée avec des mégots de cigarette par sa mère et quelques membres de la famille. Elle aurait dû quitter ce milieu. Mais elle tient à son père. Régulièrement sa mère l'invite à un repas en famille. Elle y va, pour voir son père. Pendant le repas sa mère la détruit psychologiquement à coups de remarques et d'allusions. Quand elle rentre le soir chez elle, elle est réduite à l'état de loque. Son "petit ami", qui est dealer, passe alors la voir et lui propose une dose, qu'elle accepte. Elle prend de l'héroïne pendant plusieurs jours, le temps d'oublier un peu, puis va voir son médecin pour une cure de désintoxication. On peut presque dire qu'elle a fait autant de cures de désintoxication que de repas de famille. Sa mère n'a jamais été inquiétée. On aurait même plutôt tendance à la plaindre et à la féliciter. Après des années de galère cette amie a fini par un peu comprendre la dynamique orchestrée par sa mère et à prendre ses distances. Son corps, qui était superbe quand elle avait dix-huit ans, est une ruine.
Il y a des joueurs dans tous les milieux. Ce n'est pas une question de situation ou de classe sociale. Mais dans les milieux riches on a les moyens de cacher les choses. On parle souvent des pays pauvres où des enfants traînent dans les rues, vivent de façon précaire et se font abuser. Cette destruction des enfants existe aussi dans des pays riches. Mais elle est occultée. Il existe des pays riches où les enfants sont bien traités tout comme il existe des pays pauvres où on aime les enfants. C'est une question de niveau spirituel global des habitants du pays. L'argent et les technologies sont des moyens qui peuvent permettre la promotion de l'Humanité. Mais ils n'en sont pas des gages en soi. Ils peuvent tout aussi bien être utilisés pour obtenir l'effet contraire. Apprendre à aimer est d'abord un question de volonté.
Un joueur est une personne patriarcale qui mime un comportement matriarcal. Son mode de pensée est patriarcal puisqu'il établit une hiérarchie et il utilise des moyens de pression. Mais il prétend s'occuper de sa poupée et savoir ce qui est bon pour elle. Il essaye de s'approprier le bien-être du matriarcat.
Beaucoup de joueurs ne touchent pas leur poupée. Parce que le contact physique force à percevoir les émotions, les envies, les besoins et la personnalité de la personne que l'on prend dans ses bras. Ce que le joueur veut éviter à tout prix. Il veut continuer à rêver dans sa tête les émotions et la personnalité de son choix pour sa poupée. Donc il ne doit pas toucher sa poupée. Certains joueurs touchent leur poupée en public, mais c'est du théâtre, le joueur exerce sur lui-même un contrôle mental pour ne pas réellement toucher sa poupée. Il veut juste imposer aux autres une façade, une image de sa bonne entente avec sa poupée. Il veut aussi imposer cette façade à sa poupée. Il se sert du public pour enfoncer sa poupée dans son jeu, pour enlever à sa poupée la possibilité de se plaindre ensuite auprès de membres de ce public. Dans des cas extrêmes, quand le joueur est très fort et la poupée faible, un vrai contact physique peut avoir lieu. Il permet au joueur d'imposer son ordre à la poupée. C'est un contact unilatéral, du joueur vers sa poupée, pour travailler la poupée dans sa chair. Parmi ces contacts on retrouve les attouchements sexuels ou les coups et blessures. Les attouchements sexuels sont les plus destructeurs.
Le rêve n'est pas à proscrire des relations humaines. Au contraire : les amants imaginatifs sont les plus appréciés. Se faire imposer certaines choses, par moment, peut procurer énormément de plaisir. Rien n'est plus merveilleux qu'un rêve absurde emportant deux partenaires. Il n'y a plus d'Humanité sans poésie, sans imaginaire gratuit. Mais il importe que dans le passage à l'acte tout soit toujours adapté aux personnes qui en bénéficient.

L'hypnose
L'hypnose est un état du cerveau où il "regarde" ce qu'il a en lui au lieu de regarder le monde extérieur. Passer en état d'hypnose, c'est un peu comme un gant que l'on retourne. L'intérieur du gant, qui était caché, devient le monde où l'on se déplace. Une personne en état d'hypnose est parfaitement consciente, mais elle est dans un autre monde : son monde intérieur. Elle n'a que peu ou plus de contacts avec le monde extérieur. En état éveillé on voit, sent et entend le monde extérieur mais on a peu ou pas conscience de ce qui se passe à l'intérieur du cerveau. En état d'hypnose, c'est l'inverse. L'état d'hypnose n'est pas du sommeil, même si cela y ressemble.

Pour entrer en état d'hypnose on recourt généralement à l'aide d'un hypnotiseur. Mais cela peut aussi arriver "par accident", quand les circonstances s'y prêtent. Voici par exemple les conditions nécessaires pour que je puisse passer en état d'hypnose. (Il convient à chacun de développer sa propre méthode mais l'expérience d'autrui est une source de renseignements et d'indications.) :
Avoir l'esprit à ça. Je "sens" quand je pourrais entrer en hypnose. C'est assez peu fréquent, une à deux fois par mois en moyenne. Toujours le matin tôt, peu après le réveil.

Pour que le passage vers l'hypnose soit possible, il faut s'isoler du monde. Il faut se mettre en isolation sensorielle. Par exemple dans un lit, en recouvrant l'entièreté du corps et en prenant la position la plus confortable possible. Il est indispensable pour moi de recouvrir la tête avec des coussins (tout en laissant un chemin à l'air). Il faut qu'il n'y ait aucun bruit (je mets des boules dans les oreilles, en veillant à ne pas sentir leur présence) et que mes yeux ne reçoivent aucune lumière (fermer les paupières ne suffit pas, je bande mes yeux ou je les recouvre d'un coussin). Certaines personnes utilisent une musique douce. D'autres utilisent un support visuel ; un objet ou une image, comme en méditation (mais avec une intention différente de la méditation : en méditation l'objet est là pour engendrer des pensées, le but est de laisser venir ces pensées comme des nuages et en prendre distraitement conscience, alors qu'en hypnose l'état d'esprit engendré par l'objet ou les images n'est qu'un accessoire utilisé pour passer en état d'hypnose). Je suis une fois passé très facilement en ayant les yeux entrouverts et en contemplant distraitement les reflets flous d'un peu de lumière sur le tissu du coussin.

Il faut se détendre, relâcher patiemment tous les muscles, se laisser aller, ne penser à rien. On peut se concentrer sur sa respiration (respirer calmement et profondément, sans forcer) ou sur les phosphènes (ces faibles formes jaunes qui dansent devant les yeux).

Il faut avoir l'intention d'entrer en état d'hypnose, avoir conscience du fait qu'on a est là pour ça. Mais essayer de forcer les chose ne sert à rien, cela bloque le processus. Il faut se laisser emmener.
Le passage est un peu comme un court et imperceptible tunnel noir, avec des moments d'inconscience. On "arrive" alors dans un monde imaginaire, un décor. Dans mon cas c'est souvent le jardin dans lequel j'ai vécu étant enfant, mais transformé : l'herbe est plus drue, les arbres ont une autre forme, parfois il y a de très grandes fleurs...

La première fois que je suis passé intentionnellement en état d'hypnose, j'ai eu affaire à deux "gardiens", un peu comme ces monstres que le héros des histoires fantastiques doit affronter pour arriver à l'endroit qu'il recherche (la série des Thorgal, par exemple). Le deuxième "gardien" a été le plus effrayant : j'ai "vu" quelqu'un entrer dans ma chambre et me mettre un sachet en plastique sur ma tête pour m'étouffer. C'est en gardant mon calme, en me disant que c'était faux et en "continuant ma route" que je suis arrivé dans le jardin.

Ce qui se passe en hypnose ressemble à un rêve. On se promène dans un décors changeant. On rencontre des choses que l'on connaît, on peut voir de très beaux paysages. On peut voler au-dessus d'une forêt d'automne éclairée par le soleil couchant. (La série Olivier Rameau et Colombe Tiredaile en est la meilleure visualisation que je connaisse.) Parfois les objets sont très bien reproduits, avec une quantité incroyable de détails, de textures, de parfums... Je me souviens d'un tableau au-dessus d'une cheminée : les méandres d'une rivières sous le couvert d'une foret tropicale, à l'aube ou au crépuscule. J'ai pu voir la scène en trois dimensions, comme si elle était réelle dans le tableau et percevoir l'humidité et la fraîcheur qui montent du sol. Parfois des parties du décors sont un peu floues, comme si le "générateur d'images" du cerveau se reposait.

Il ne faut pas vouloir décider ce qui se passe en hypnose. Il faut se laisser aller. Un contrôle de se qui se passe est possible, mais de façon feutrée. Toute volonté de contrôler fermement le déroulement des choses amène un retour instantané à la réalité, on est véritablement "éjecté". Si on a envie qu'il se passe quelque chose, on peut y penser ; "penser distraitement l'envie", et cela peut se "réaliser" un peu après. Je me souviens avoir voulu passer au travers d'une vitre comme un fantôme et finalement avoir rebondit après m'être un peu écrasé contre elle, parce qu'au dernier moment j'ai eu peur que cela ne fonctionne pas.

L'état d'hypnose présente plusieurs intérêts pour moi :
Un beau voyage.

La possibilité de voir les images que mon cerveau a mémorisées au cours de ma vie et les symboles qu'il utilise. C'est un peu comme une visite de musée.

Une sensation de détente et de bien-être après.

La possibilité de finaliser un processus de guérison. Prenons par exemple le cas d'une culpabilité. J'ai fait quelque chose de mal, que je regrette. J'ai eu le temps d'analyser mon erreur et de bien décider que cela ne se reproduirait plus. Pourtant je continue à souffrir de la culpabilité. C'est en étant en état d'hypnose que cette culpabilité va éclater comme une bulle. Je vais "pleurer" un bon coup et ensuite j'en serai définitivement débarrassé. De ce point de vue, l'état d'hypnose est un peu comme une voiture à l'arrêt dont on ouvre le capot pour régler de l'intérieur ce qui ne va pas.
Les sources que j'ai pu consulter tendent à montrer que l'hypnose est un vaste domaine, avec des états différents et des degrés plus ou moins avancés d'hypnose. Mon expérience personnelle se limite à ce que je raconte ici.

L'hypnose est utilisée dans divers domaines :
L'anesthésie. Une fois le patient en état d'hypnose, dans son monde intérieur, il ne perçoit plus ce qui se passe autour de lui et ce qui arrive à son corps. Il peut donc être opéré sans utiliser d'anesthésie générale. Les résultats de cette méthode sont très importants : le patient est en bien meilleure forme après l'opération et guérit mieux. J'ai pu expérimenter la chose : je m'étais une fois mis dans une position très confortable pour "passer", mais au "retour" un de mes bras me faisait un mal de chien. Je l'avais plié d'une façon où il devait forcément développer une crampe. Cette crampe était là depuis longtemps, mais je n'avais rien senti du tout. Ce n'est qu'au "retour" que j'ai poussé un "Haw !" douloureux.

La psychothérapie. Les possibilités de guérison intérieure que permet l'état d'hypnose sont un outil extraordinaire. Peurs, phobies, angoisses, tics, complexes, réactions somatiques... peuvent être définitivement résolus grâce à des passages sous hypnose. Il faut que le thérapeute et le patient abordent les problèmes d'abord en état d'éveil. Des passages en état d'hypnose permettront ensuite de finaliser certaines choses. Parfois il n'est même pas nécessaire de plonger jusqu'à l'hypnose. Il suffit de demander au patient de fermer les yeux quelques instants, de respirer calmement et de visualiser ce qu'il voudrait.

L'enseignement. Prenons par exemple un élève qui bute sans arrêt sur la même erreur. Mettons qu'il prononce "spychologie" au lieu de "psychologie". Il sait qu'il doit prononcer "psychologie", mais quand le mot vient dans la conversation il dit systématiquement "spychologie". Cette mauvaise prononciation est "câblée" dans son cerveau. Un passage sous hypnose peut permettre rapidement le "recâblage" adéquat : du jour au lendemain il se mettra à prononcer "psychologie" parfaitement, sans effort.

La police. Parfois une personne n'arrive plus à retrouver un souvenir (un visage, un renseignement...). La mettre en état d'hypnose lui permet d'avoir accès au "contenu" de son cerveau, "de l'intérieur".
Il existe plusieurs "états" possibles du cerveau. l'hypnose est l'un d'entre eux. On appelle ces états des "transes". Quelques exemples de transes :
Un danseur est totalement parti dans ses mouvements.
Un état d'intense méditation.
La fureur ou le "mode de combat" d'un guerrier.
Toute personne change un peu d'état d'esprit tout au long de la journée mais on ne parle de transe que quand il s'agit d'un état vraiment différent, avec des propriétés caractéristiques. Chaque transe implique une perception différente des choses. Par exemple la méditation implique un isolement par rapport au monde réel présent tout en amenant un travail approfondit, à la fois intuitif et logique, sur les souvenirs du monde réel. Le "mode de combat" implique un oubli de la douleur et des souvenirs mais une perception aiguë et accélérée du monde réel. L'hypnose implique un isolement total par rapport au monde réel et une déambulation dans un monde intérieur aux allures imaginaires. Chaque transe a sa motivation et ses rites. Pour me mettre dans la transe appropriée quand je dois faire un long travail répétitif, par exemple, je me mets à siffloter n'importe quoi.

Un ami me recommande une importante source de renseignements sur l'hypnose : les livres écrits par Carlos Castaneda. Cet auteur a été initié par un shaman indien d'Amazonie. Il décrit tout un apprentissage. Au début, il faut se contenter de se dire, avant d'aller dormir, que l'on voudrait se souvenir de ses rêves au réveil. Ensuite, au fil du temps, il faut souhaiter pouvoir se déplacer à volonté dans ses rêves, voir ses mains, voir son corps, pouvoir saisir des objets... On finit paraît-il par être capable d'aller dans la chambre où l'on est en train de dormir et de se voir en train de dormir.

J'ai pu aller dans un univers hypnotique un peu différent. Il n'y avait aucun décors, pas même de notion de dimension. J'étais dans le noir complet. Mais les idées, les concepts, étaient très présents. J'ai pu traiter des problèmes ardus avec une grande facilité et obtenir des réponses claires. J'ai fait cela en buvant une grande quantité de café avant d'aller dormir. L'intuition de procéder ainsi m'est venue après avoir lu la bande dessinée "âromm" de Pellejero et Zentner (Casterman). Ce qui s'est passé lors de cet état d'hypnose ne ressemblait pas à ce qui est raconté dans la bande dessinée, sauf sur un point : le fait d'obtenir des réponses.

Les sorciers africains disent circuler la nuit. Ils se réunissent, commettent des actes de magie, se battent... Après avoir lu le récit de ces nuits de sorciers, il me semble tout à fait qu'ils sont en état d'hypnose. Ces sorciers sont en réalité en train de dormir. S'ils arrivent à faire des choses ensemble dans ce monde hypnotique, c'est sans doute parce qu'ils partagent la même culture ou parce qu'ils en parlent entre eux avant d'aller dormir. La suggestion et l'auto-persuasion font le reste. Le monde hypnotique dans lequel ils évoluent a comme décor leur village et ses alentours. Ils ont conscience d'évoluer dans un monde parallèle calqué sur le monde réel. Ce qu'ils y font a des répercussions dans le monde réel. Réciproquement, les villageois n'hésitent pas à placer des pièges, un peu comme des tapettes à souris, pour blesser les sorciers qui se permettraient d'entrer chez eux. Ce petit univers de sorcellerie peut sembler amusant raconté ainsi. Le problème, c'est que les africains prennent cela au sérieux. Par exemple pour eux toutes les maladies ou autres inconvénients sont la conséquence des actes, batailles ou transactions que les sorciers font la nuit. La maladie d'une personne est due au fait qu'un sorcier est venu prendre son énergie la nuit, par un acte de vampirisme. Il s'ensuit des terreurs, des prises de pouvoir, des dépenses d'argent et de temps énormes... pour quelque chose qui en réalité n'existe pas. Les vraies causes des problèmes sont négligées. Dans ces histoires de sorciers africains j'ai pu reconnaître une anecdote qui m'est arrivée : un jeune garçon malade depuis longtemps mais dont les médecins ne comprennent pas la maladie. D'après les tests médicaux il est en parfaite santé. Conseillée par un médecin, sa mère demande l'aide d'un sorcier. Le garçon passe une nuit chez ce sorcier. Le lendemain il se sent beaucoup mieux, presque guéri. Officiellement parce que le sorcier s'est battu pour lui toute la nuit, contre les sorciers qui avaient pris son énergie. Une amie avait de gros problème avec un voisin. Elle était au bout du rouleau. Elle est venue dormir chez moi et le lendemain elle avait retrouvé toute sa vivacité. Je n'ai pas le moindre souvenir d'avoir posé de quelconques actes hypnotiques cette nuit là. Mais ceci montre que l'univers de la sorcellerie colle en apparence à des faits concrets que l'on peut rencontrer. Cela montre aussi que la maladie peut parfois être due davantage à des problèmes sociaux qu'à un véritable microbe.

Dans ce texte plusieurs utilisations de l'hypnose ont été citées. Etre en transe hypnotique permet de débloquer des traumatismes dans le cerveau ou d'aborder certains problèmes avec plus d'intelligence sous la main. Mais il me semble que l'hypnose à une importance plus fondamentale pour les êtres humains. Au fil de sa vie un humain connaît plusieurs mutations et évolutions. J'ai un peu l'impression que certaines transformations ou éclosions dans le cerveau ne peuvent se faire que lors de passages sous hypnose. Ce serait une explication du fait que l'on retrouve aussi souvent l'hypnose dans les rites initiatiques ou shamaniques. Mon expérience personnelle de la question est qu'après des passages sous hypnose je me suis découvert plus de souplesse d'esprit, plus de facilité à traiter certains problèmes, un plus grand confort intellectuel. Mais à aucun moment lors de ces moments d'hypnose je n'ai eu conscience d'être confronté à la question ou de pousser un quelconque interrupteur. En tout cas je n'en ai pas de souvenir. Il me semble aussi qu'on y gagne en maturité. On aborde le Monde sous un angle plus serein et responsable. Cet élément-là me semble très important. Le Monde Occidental est en partie basé sur le maintien des gens en enfance. La Consommation à outrance est un réflexe infantile. Ce n'est pas Freud qui me contredirait. Un certain nombre de choix politiques me semblent également faits par des gens infantiles ; imbus d'eux-mêmes et peureux. Je n'ai pas l'impression qu'actuellement cela soit voulu ou organisé par quiconque. Les gens immatures auront tendance à empêcher les autres de devenir matures, certes. Mais il n'y a pas quelque part sur la Planète un groupe de personnes ricanantes en train de se frotter les mains. Par contre je crois que dans le passé cela a été organisé, par exemple par certaines églises. Elles détournent à leur profit les connaissances dont elles disposent. L'enseignement que j'ai reçu à l'école me semble conçu de cette façon. Il me semble maintenent que cet enseignement est un traitement conçu pour empêcher l'hypnose chez les enfants. Durant toute mon enfance je me suis demandé à quoi pouvaient bien servir ces bon dieu de cours interminables dont les élèves ne retiennent quasiment rien. L'Ecole est une chose très importante. Elle fait la différence entre un paisible pays riche et un pays pauvre en guerre. Mais si on se limitait à la partie utile de l'école cela ne prendrait pas plus de quelques passionnantes heures par semaine. Si on prend l'école comme moyen de contrôle des esprits, alors tout ce que j'ai observé et subi me semble prendre un sens. Les mauvaises églises permettaient l'hypnose, mais de façon très contrôlée. Elles endoctrinaient d'abord les personnes avec leurs symboles et leur système de valeurs. Ensuite seulement elles permettaient un peu d'hypnose. Ainsi elles obtiennent des individus qui ont un certain degré de maturité et de responsabilité, mais entièrement dévoués à l'église, prêts à soutenir les thèse les plus aberrantes avec une grande conviction. Ce système a été cassé et c'est ce qui a permis l'essor de la Modernité et des Droits de l'Homme. Mais il serait malvenu de jeter le Petit Jésus avec l'eau du bain. L'hypnose n'est pas une technique de sectes mais c'est un outil important qui peut être détourné par les sectes. La meilleure parade, c'est d'apprendre l'hypnose à tout le monde. Séance chez l'hypnotiseur-shaman remboursée par la Sécurité Sociale. Libre Choix de ses pensées et préoccupations, sur base de catalogues dodus et pluralistes. Ainsi chacun pourra se développer dans toute la nature que Dieu lui a conféré (si les athées me pardonnent le bref usage strictement littéraire de ce symbole) et non dans les restrictions planifiées par une secte ou un gouvernement immature.

Il existe des pratiques violentes en hypnose. La façon d'entrer en transe consiste parfois à pousser le cerveau dans ces derniers retranchements, à le faire dérailler : par la douleur, les privations et l'épuisement. Par exemple chez les indiens d'Amerique du Nord on s'inflige des douleurs atroces, on se prive de nourriture pendant des jours ou on s'isole pendant des semaines. Sans parler de la consommation de substances diverses. Dans certaines tribus africaines on frotte du piment dans les yeux des candidats initiés. Des scientifiques suggèrent que s'il y a eu autant de grands initiés au Proche Orient et au Tibet, c'est parce que les conditions de vie y sont extrêmes : insolation, déshydratation, manque d'oxygène... La Nature vous impose l'initiation malgré vous. Je ne suis pas expert mais mon avis est que tout cela est inutile, dangereux et sous-productif. Ce qui est essentiel en hypnose, c'est d'avoir compris de quoi il s'agit et d'être d'accord. Alors il suffit de s'y laisser glisser, en tout confort. C'est l'idéal. Les tortures que l'on s'inflige dans les tribus servent en quelque sorte à obtenir cet accord du cerveau, par démission. Ce n'est pas très responsable et souvent les gens prennent ce qui s'est alors passé sous hypnose trop au sérieux. Dans une bonne pratique d'hypnose il peut y avoir un peu de travail, surtout au début. Si une personne est trop nerveuse il faut prendre le temps de la fatiguer un peu, en passant quelques heures avec elle. Il ne faut pas avoir mangé trop lourd. Un peu de lecture, de recueillement ou de méditation peuvent être indiqués. Si vous n'arrivez pas à entrer en hypnose, demandez l'assistance d'un professionnel : psychologue ou psychiatre. A la rigueur un père abbé amoureux des Droits de l'Homme ou un moine tibétain reconnu par les autorités du Tibet Libre. N'allez pas trouver un quelconque gourou qui irait vous imposer une pratique violente ou abuserait de vous. Vous risquez de vous retrouver avec une hépatite, des problèmes rénaux ou un quelconque handicap. Un exemple d'abus moins graves mais qui représentent tout de même une sérieuse perte de temps : les personnes qui prétendent vous mettre en hypnose simplement en vous faisant pratiquer par exemple le yoga. Il est évident que le yoga est un bon outil pour faciliter l'hypnose. Il est tout indiqué pour beaucoup de personnes. Mais le yoga en soi ne fait pas l'hypnose. Vous pouvez passer des années à faire du yoga alors qu'un psychologue formé vous mettrait en était d'hypnose en moins d'un quart d'heure.

Si Salvadore Dali a peint des oeuvres aussi extraordinaires, c'est peut-être parce qu'il passait du temps sous hypnose. L'hypnose produit des symboles. Réciproquement, les symboles ne peuvent être vraiment assimilés que sous hypnose. Il faudrait se mettre en hypnose après avoir contemplé une oeuvre de Dali. Ainsi un transfert s'opère de l'hypnose de Dali à la vôtre. Dans les viles comme Rome ou Jérusalem les hôpitaux sont habitués à recevoir des touristes complètement hébétés, mis dans un état second par ce qu'ils ont vu. (Il est bien dommage que les responsables israéliens et palestiniens soient hermétiques à cela. La paix serait signée depuis longtemps.) Un de mes amis s'est vivement intéressé aux symboles et aux choses de la foi. Mais il en a fait un usage plat et idiot. Il est devenu intégriste, autoritaire... Il était envahi par les symboles mais ne les a jamais assimilés. La clé de son problème est peut-être qu'il n'a jamais réussi à passer en hypnose. Il ne savait pas que c'est nécessaire. S'il l'avait su, je crois qu'il y serait arrivé. Au fil du temps il est devenu asocial, aliéné à la vie. Vivre était une souffrance pour lui.


La suggestion
La suggestion est la possibilité qu'a une personne de prendre le contrôle du cerveau d'une autre personne. Par exemple si je dis à une personne avec autorité et insistance que sa main est très froide, elle finira par réellement avoir l'impression que sa main est glacée.

Les possibilités de la suggestion sont très importantes : on peut rendre des parties du corps d'une personne insensibles à la douleur, on peut amener une personne à développer des maladies somatiques, on peut lui faire faire des choses spéciales comme commettre un vol, on peut la mettre dans un certain état d'esprit, on peut changer l'image qu'elle a d'elle-même... On "endort", "masque" ou "déconnecte" une partie du cerveau de la personne (son esprit critique, son centre de la douleur, ses souvenirs...) et on prend le contrôle d'autres parties. La personne devient une marionnette dont on tire une ou plusieurs ficelles. Il y a moyen "d'attacher une ficelle" à presque toutes les différentes parties du cerveau d'une personne : perception de température, vision, ouïe, décisions, état d'esprit, métabolisme, souvenirs... Les cas les plus spectaculaires seraient des personnes qui développent carrément des blessures par suggestion (?). Des brûlures au deuxième degré, par exemple, alors que rien ni personne n'a approché la zone "brûlée". (Je ne crois pas que la personne se soit réellement "brûlée elle-même de l'intérieur", je crois plutôt que son organisme a mis en route les mécanismes de réaction à une brûlure, suite à un ordre du cerveau déclenché par suggestion. Tout le processus de guérison d'une brûlure va donc se dérouler, même s'il n'y pas réellement de brûlure.)

La suggestion n'est pas nécessairement un acte violent. On peut aussi prendre le contrôle du cerveau d'une personne "en collaboration" avec elle. Cela peut être un acte d'amour. C'est souvent ce qu'un parent fait vis-à-vis d'un jeune enfant. (Un parent qui recoure à la violence, à la contrainte, parce qu'il n'arrive pas à utiliser la suggestion est un parent en échec : un parent qui ne comprend pas les besoins de son enfant, qui n'arrive pas à communiquer avec lui. Les résultats de la violence sont très mauvais.)

La suggestion peut être directe ou détournée. On peut explicitement formuler ce que doit faire le cerveau de la personne, comme dans l'exemple de la main froide ci-dessus. On peut aussi y aller par la bande : souffler des choses à la personne pour amener son comportement dans une certaine direction. Par exemple un employé habile peut amener son patron à avoir une bonne idée en lui donnant quelques renseignements bien ciblés. Le patron est convaincu que l'idée vient de lui, en réalité elle est strictement l'oeuvre de son employé, qui de surcroît a su implanter dans le cerveau du patron les pensées adéquates pour que cette idée en découle automatiquement. Il existe toute une panoplie de méthodes de suggestion, une véritable boîte à outils...

La suggestion peut aussi provenir d'une image, d'un objet. La publicité et la propagande sont basés la-dessus. C'est pour cela aussi que les personnes qui pratiquent la méditation attachent une grande importance à l'objet ou à l'image qui leur sert de support de méditation. Une image pieuse, un arbre, le reflet d'une bougie dans l'eau, un mandala, de la musique... ces objets amèneront des pensées et des émotions différentes. Il est par exemple comique de voir une personne qui médite vous dire que tel objet est "vide" (il ne suscite aucune pensée) ou qu'un autre est "mauvais" (il suscite des pensées négatives). Un artiste est une personne capable de fabriquer des objets ou des images "riches" (qui amènent beaucoup de pensées, des pensées très élevées, profondes ou des pensées très belles).

Les messes, les meetings politiques, les manifestations, les concerts, sont autant de "séances de suggestion collective".

Si la suggestion est à priori un acte d'une personne (ou d'un objet) vers une autre personne, il est également possible de se suggérer des choses à soi-même. C'est l'autosuggestion. Si l'on se répète avec insistance "il fait chaud", on finira par avoir réellement l'impression qu'il fait chaud. Une partie du cerveau prend le contrôle d'une autre partie du cerveau, d'une façon qui a priori n'était pas prévue par la Nature. Notre cerveau peut même pratiquer l'autosuggestion sans s'en rendre compte. Une personne qui sait qu'elle ne peut pas faire une chose peut en quelques heures ou quelques jours se convaincre inconsciemment qu'elle peut quand-même. C'est l'autosuggestion inconsciente.

La suggestion est le moyen de la manipulation, à bon escient ou à mauvais escient.

Les suggestions les plus nobles sont celles qui font jaillir notre richesse intérieure, qui nous amènent à créer ou mettre en route de nouvelles choses. (Que pensez-vous de cette suggestion ?)


Hypnose et suggestion
On fait souvent un amalgame entre l'hypnose et la suggestion. Ce sont en réalité deux choses qui n'ont rien a voir entre elles, comme vous avez pu vous en rendre compte au travers des deux chapitres précédents. L'hypnose est un état du cerveau alors que la suggestion est le fait de prendre le contrôle d'un cerveau.

Le seul rapport entre les deux est que l'état d'hypnose peut être amené par suggestion. Amener une personne en état d'hypnose fait partie des très nombreuses choses qui peuvent être faites par suggestion... C'est le rôle de l'hypnotiseur. Il prend le contrôle du cerveau de l'hypnotisé pour l'amener en état d'hypnose.

Il est également possible, toujours par suggestion, d'avoir un certain contrôle sur le monde intérieur que parcours la personne en état d'hypnose. C'est ce que va mettre à profit un psychothérapeute pour amener son patient à aborder concrètement le problème qu'il veut résoudre, une fois qu'il est en état d'hypnose.

Le fait qu'en état d'hypnose le cerveau d'une personne soit "à nu", qu'il y ait moyen d'y faire des changements en profondeur, le fait qu'il y ait moyen de contrôler l'hypnose d'une personne par suggestion, cela constitue évidemment un cocktail explosif. D'une façon générale, il ne faut accepter les suggestions que des personnes en qui on peut avoir confiance. Alors quand il s'agit d'hypnose... Il y a eu des cas de personnes ayant eu de sérieux problèmes à cause d'un hypnotiseur malintentionné ou gaffeur.

La déontologie de l'hypnotiseur moderne lui interdit tout autoritarisme vis à vis de son sujet. Son rôle doit se limiter à "proposer des suggestions".


J'ai écrit de nombreuses versions de ce texte. Je vais essayer de résumer les points intéressants. Certaines parties du texte tournent un peu au discours de secte sur le rapport entre le corps et l'âme mais cela fait partie de mes observations.

Tout d'abord : il y a des différences entre les individus. Certaines personnes digèrent n'importe quoi et conservent une bonne forme. Pour d'autres l'alimentation est de l'équilibrisme et les chutes sont douloureuses.

Le point le plus important à mon sens est qu'il faut se méfier comme de la peste des "recommandations" que l'on vous donne. Surtout des recommandations officielles. Voici quelques exemples :
"Buvez du lait ! Mangez du fromage, c'est plein de calcium !". Plusieurs amis avaient de graves problèmes de maux de têtes. Ces migraines ont disparues le jour où ils ont arrêté de boire du lait et de manger des produits dérivés du lait. Seule exception : un ami qui avait des problèmes avec le lait peut continuer à manger certains fromages : ceux qui sont bien faisandés comme le camembert ou le fromage de Herve. On dirait que les bactéries ou les levures présentes dans ces fromages "digèrent" les molécules qui rendent mon ami malade. Un ami a fait une grave ostéoporose à 65 ans. Il l'attribue au fait qu'il a bu beaucoup de lait tout au long de sa vie ; le lait contient du lactose, qui se transforme en acide lactique et cet acide rongerait les os chez certains personnes... Plus généralement, beaucoup d'adultes ne sont pas capables de digérer le lait. Ils perdent cette faculté qu'ils avaient étant enfants. Souvent, le lait ne les rendra pas vraiment malades mais ils se sentiront moins bien que s'ils n'en avaient pas bu...
"Mangez une grande quantité de glucides le matin !" C'est peut-être vrai pour certaines personnes mais pas pour tout le monde. Un adolescent de mes amis avait de gros problèmes à l'école. Ils se sont fortement améliorés quand je lui ai recommandé ne plus manger de pain, de sucré ni de céréales le matin mais plutôt de la viande, de l'huile et des légumes. Il est reconnu que manger des protéines le matin a un impact sur l'humeur de la journée.
"Il faut manger un peu de tout. Un bon repas est constitué de viande, de glucides (pain, pâtes, riz...), de graisses (huiles, beurre) et de légumes !" Si je mange de la viande et des glucides au même repas j'attrape d'horribles angines et de je fais de graves crises d'allergie quand les arbres sont en fleur. Je suis obligé de manger les viandes et les glucides séparément, lors de repas différents.
"Evitez de manger des graisses !" Depuis que je ne me nourris presque plus que de graisses (ou plutôt de bonnes huiles végétales) j'ai arrêté de prendre du poids. Je ne dois plus faire de régimes. Par contre pendant une période j'ai évité les graisses et je me suis concentré sur les glucides : j'ai eu de graves problèmes de dépression et je prenais du poids comme une baudruche qui gonfle.
Ces recommandations officielles sont sans doute bonnes pour beaucoup de personnes mais certainement pas pour tout le monde. De même, les avis et les exemples que je donne sont à mettre en balance suivant les individus. Ce sont des choses qu'il faut essayer par soi-même, éventuellement aidé par un médecin ou un nutritionniste. Je mange un peu de tout, en écoutant mon instinct quand c'est possible, mais j'ai compris que je dois me tenir à certaines règles si je veux rester en bonne santé.

Lisez les étiquettes des produits dans les magasins. On trouve en gros trois sortes de substances dans les aliments :
Lipides : ce sont les graisses, les huiles... Le beurre, l'huile en bouteille, le gras du lard, la margarine, sont presque uniquement des lipides et un peu d'eau. On en trouve de grandes quantités dans les viandes grasses, les poissons gras, les noix, le chocolat...
Protéines : le symbole des protéines est la viande. On trouve des protéines en grande quantité dans le lait, les fromages, les noix et les noisettes (surtout les amandes), les oeufs...
Glucides : ce sont les sucres et les amidon. Sucre de fruits, sucre blanc, sucre de canne, le lactose du lait... Les amidons sont principalement dans le riz, le pain, les pâtes, les pommes de terre... On dit des amidons qu'ils sont des "sucres lents" parce que lors de la digestion ils sont transformés lentement en sucres.
La majorité des aliments contiennent ces trois types de substances.

Il faut distinguer les substances animales et les substances végétales. En gros, les lipides et les protéines animales sont plus difficiles à digérer et peuvent causer plus de problèmes de santé mais elles sont plus riches. Si vous faites un repas de viande et d'un peu de légumes, vous êtes sûr d'avoir absorbé la majorité des protéines et des vitamines nécessaires. Les protéines et les lipides végétales sont beaucoup faciles à digérer et risquent moins de vous rendre malade. Mais il faut s'y connaître pour faire des repas végétaux qui contiennent bien toutes les sortes de vitamines et d'acides aminés nécessaires. Une recommandation qui semble facile et qui donne de bons résultats consiste à manger moitié protéines animales et moitié protéines végétales. Pour les lipides je crois qu'il faut plus de végétales que d'animales mais ce n'est qu'une impression. Attention : il ne faut pas forcément manger ce rapport moitié-moitié sur un même repas.

Notez qu'il existe différentes sortes de graisses, différentes sortes de protéines et différentes sortes de sucres. Certaines graisses sont dangereuses si vous en mangez de grandes quantité, d'autres graisses sont nécessaires à votre santé... La sacharose est un sucre qui peut poser de gros problèmes de santé tandis que le fructose est moins nocif.

En dehors de ces trois grandes classes de substances, il y a des substances dont il faut manger très peu mais qui sont vitales pour être en bonne santé : les vitamines, les minéraux, les oligo-éléments, les antioxydants, les huiles essentielles... Un peu tout en contient mais avoir la panoplie complète il est essentielle de manger des légumes. Les fruits sont intéressants aussi.

Certaines personnes sont allergiques à certaines substances. Par exemple à la fraise, aux cacahuètes... Elles doivent alors éviter d'en manger. (Il existe des traitements pour diminuer les problèmes d'allergie dans certains cas.) Les aliments peuvent poser aussi d'autres problèmes que les allergies :
Cela dépend des personnes mais par exemple certains aliments irritent les intestins. Alors les intestins ne digèrent plus rien et se contentent d'éliminer ce qu'ils devaient digérer. On se sent faible. Après quelques repas irritants consécutifs on peut se retrouver sur les genoux. Exemples : le pain complet mal préparé, le chocolat, le jus d'orange...
Chez certaines personnes des aliments sont mal digérés et ils passent directement dans le sang. C'est par exemple le cas de la protéine de gluten du blé et de la protéine de caséine du lait. Une fois dans le sang, ces protéines agissent comme de la morphine sur le système nerveux. Cela a des conséquences lourdes. C'est assez difficile à admettre mais pour certaines personnes le pain ou le fromage sont presque une forme d'héroïne.
Les mauvaises fermentations. J'ai compris cela en essayant de décoder des textes sur les "Low Carbohydrates Regime" américains. Vous avez certainement déjà senti l'odeur de quelque chose qui pourrit. Votre nez vous a dit très explicitement que ce n'est pas sain. Quelque chose qui pourrit de façon "choisie", comme par exemple du camembert, sera excellent pour la santé. Mais quelque chose qui pourrit n'importe comment produira une grande quantité de toxines, c'est à dire des poisons. Chez beaucoup de personnes, si elles mangent du pain, des pâtes, du riz... cela va se mettre à pourrir dans les intestins et produira des toxines. Si en plus elles ont mangé de la viande, cette viande se mettra à pourrir aussi, à cause des glucides, et produira des toxines encore beaucoup plus dangereuses. C'est là raison, j'en suis presque certain, pour laquelle le fait de manger de la viande et des glucides me cause de graves problèmes immunitaires (angines...). Je ne serais pas étonné que cela contribue aux problèmes d'eczéma ou par exemple d'arthrite chez certaines personnes. Une bonne digestion, c'est un peu comme si vos intestins étaient une cave à vin ou à fromage où tout se passe bien.
Une autre chose qui j'ai apprise est que le système digestif a son propre système nerveux, son propre cerveau en quelque sorte. C'est un cerveau rudimentaire mais qui accomplit tout de même des tâches complexes. Il doit actionner les muscles des intestins, déclencher les glandes de sucs digestifs, etc... Tout ce qui assomme notre cerveau, assomme aussi ce cerveau de la digestion. Donc par exemple si votre digestion produit des toxines, non seulement cela vous rendra patraque mais cela rendra aussi patraque votre cerveau de la digestion. Il va donc moins bien gérer la digestion et elle produira encore plus de toxines. C'est un cercle vicieux. Il aura par exemple comme conséquence une mauvaise gestion de l'énergie donc un stockage massif de graisses (une prise de poids), ou au contraire un amaigrissement malsain. J'ai l'impression que le sucre, surtout la saccharose, a un effet assommant sur les systèmes nerveux. Chez les personnes chez qui le gluten et/ou la caséine ont un effet de morphine, l'effet assomant peut avoir des conséquences redoutables.

Il me semble que les glucides posent encore un autre problème : c'est une source d'énergie "facile". Il suffit de manger des glucides et quelques minutes ou dizaines de minutes après du glucose arrive dans le sang. Notre organisme peut s'habituer à cela et ne plus compter que sur cela. Chaque fois qu'il a besoin d'énergie il réclamera quelque chose de sucré ou du pain, des pâtes... Il utilisera ce dont il a besoin comme énergie et le reste il le stockera bêtement. Il se place ainsi dans un système où on ne peut que grossir. Les graisses au contraire sont beaucoup plus complexes à gérer par l'organisme. Elles doivent par exemple d'abord être transformées en glucose par le foie avant de pouvoir être utilisées par les muscles et les autres organes. Si on ne mange que des graisses, l'organisme doit s'habituer à les gérer. Il doit stocker la graisse puis la déstocker pour la transformer en sucre. Comme cela fait fonctionner la gestion des stocks de graisses, cela semble rendre l'organisme plus sérieux en ce qui concerne lesdits stocks. Il évite donc d'en stocker de trop... Quand j'ai fait l'expérience de ne plus manger que des graisses, au début je me suis trouvé assez faible, comme si les graisses ne m'apportaient aucune énergie. Mon organisme c'est habitué, il a réapprit assez rapidement à gérer les graisses, et maintenant je peux faire du sport ou des travaux lourds en n'ayant pourtant mangé aucune sorte de glucides. Cela se discute, je ne serais peut-être pas capables de performances extrêmes comme certains sportifs. Mais clairement les glucides ne me sont plus nécessaires et je m'en porte mieux.

Une chose semble pire que ne manger que des glucides : manger des glucides et beaucoup de graisses en un même repas. Cela semble impossible à gérer correctement pour l'organisme. Certaines personnes expliquent qu'elles sont incapables de manger du gras ou de l'huile, que cela les rend malades au point de les faire vomir. Je me demande si le problème ne vient pas plutôt du fait qu'elles mangent ce gras ou ces huiles en même temps que des glucides : pain, pommes de terre... Un changement radical de leur philosophie de nutrition pourrait peut-être leur permettre de manger beaucoup de bonnes huiles et de bonnes graisses... Note : le citron est un produit magique pour aider à digérer un peu n'importe quoi. Une heure avant le repas, pressez un citron dans un verre, remplissez le verre d'eau et buvez le tout.

Il y a poisons et contrepoisons. Les toxines peuvent être éliminées en prenant des dépuratifs. Par exemple du jus de radis noir. C'est très efficace. De même, certains produits comme le millepertuis ou le ginseng, qui soutiennent et régulent le système nerveux, peuvent être efficaces pour favoriser une meilleure digestion. (Le millepertuis est en vente libre mais c'est un puissant antidépresseur, il ne peut être associé à certains médicaments et il rend la peau plus sensibles au Soleil. Renseignez-vous, idéalement demandez conseil à votre médecin.)

Votre organisme a besoin d'un grand nombre de substances différentes : vitamines, minéraux, huiles essentielles, oligo-éléments... Pour cela il faut manger des légumes, des fruits, varier l'alimentation et préférer ce qui contient plus de bonnes choses comme par exemple les produits bio. Mais il ne faut pas tomber dans la paranoïa. On peut se rendre malade à vouloir manger sans cesse des choses inattendues. Tous les produits bio ne sont pas forcément meilleurs que les produits industriels.

La façon de cuire les aliments est importante. Pas cuits, les aliments contiennent plus de vitamines mais ils sont moins digestes. Les légumes crus, par exemple, contiennent une substance qui détraque la digestion. Un organisme normal s'y habitue mais par exemple une personne qui mange peu de légumes crus et qui soudainement en mange une grande quantité, peut en subir les conséquences. Inversement, certaines substances bénéfiques sembleraient être mieux assimilées si ce qui les contient a été bien cuit. Par exemple la tomate contient un puissant antioxydant et il s'assimile mieux si la tomate est bien cuite. On recommande la cuisson au wok parce qu'elle laisse certaines choses presque crues et d'autres seront presque brûlées. Cela fait un bon mélange... Un ami ne peut manger du porc que s'il a longuement été cuit à l'eau. Par contre il ne digère la viande de boeuf que si elle est crue ou presque crue...

Certains adultes ne digèrent pas les protéines du lait. Ces protéines sont des "caséines". Les haricots, le soya et d'autres graines contiennent des protéines qui sont chimiquement proches des caséines, pour beaucoup d'adultes ce sera un bon remplacement pour les protéines du lait. Mais certains adultes ne digèrent pas non plus les "caséines" végétales... Pour d'autres personnes encore, les caséines ne posent pas de problèmes de digestion ou d'allergie dans les intestins mais comme mentionné plus haut elles passent dans le sang et auraient un effet de "morphine" comparable à celui du gluten... avec des effets secondaires néfastes sur la digestion. Je me demande si ce n'est pas à cause de cet effet "morphine" que certaines personnes mangent de grandes quantités de fromage le soir. Avec des effets catastrophiques sur la ligne... C'est le soir que les angoisses et les dépression latentes remontent à la surface. (Il semblerait que la viande a aussi un effet antidépresseur, ce qui pourrait expliquer l'abus de viandes par certaines personnes.)

J'évite de manger n'importe quoi n'importe quand. Par exemple j'évite de manger (surtout des choses difficile à digérer) si mon estomac n'a pas finit de digérer le repas précédent.

L'inconvénient de beaucoup de produits industriels est qu'ils ne sont pas conçus pour être bien digérés. Ils sont fait à partir de fruits ou de légumes qui n'étaient pas murs, ils contiennent des additifs qui ont des effets sur les systèmes nerveux, etc...

Il faut prendre le temps de bien manger. Il faut se préparer à manger. Manger n'est pas simplement le fait d'absorber des nutriments. C'est toute une machinerie qui se met en mouvement pour les digérer correctement, avec des processus et des timings bien réglés. Il faut préparer le moment du repas dans les règles, comme pour aller dormir et faire de beaux rêves. J'ai appris à mastiquer ce que je mange pour le réduire au plus fin. Au début cela semblait une insupportable perte de temps, maintenant je ne peux plus m'en passer.

Je mange de tout, mais j'ai appris à ne pas manger n'importe quoi. Je sais par exemple que si j'ai fait un bon repas de viande et de légumes, donc des protéines et des graisses animales, j'ai intérêt à manger des noix le repas suivant, donc des protéines et des graisses végétales. Je suis mon instinct, mais je sais que s'il me donne envie d'un gâteaux il recherche en réalité l'effet assomant des sucreries ou leur énergie trop facile, donc je refuse. C'est un amalgame de règles et d'instinct, qui me réussit à merveille. Il ne faut pas trop essayer d'être logique. Par exemple j'explique qu'il faut éviter les fermentations indésirables dans les intestins et chacun sait que rien ne fermente mieux dans les intestins que les haricots. Un de mes meilleurs repas est pourtant un boîte de thon à l'huile avec un bocal de fèves géantes...

La qualité de chaque aliment compte, c'est particulièrement vrai pour les graisses. Certaines mayonnaises industrielles me rendent malade et d'autres me réussissent très bien. Cela dépend du mélange d'huiles qu'elles contiennent. Certaines margarines chères sont un aliment raffiné, au point que j'en fais parfois une cure. Ce sont ces margarines à l'huile d'olive, aux Oméga 3, anti-cholestérol, bio... J'en achète plusieurs raviers et je les finit en deux semaines. Parfois, une épaisseur d'un centimètre de margarine de qualité sur un toast de riz suffit à résoudre de lourds problèmes psychologiques qui trainaient depuis des jours. Toutes les margarines chères ne sont pas équivalentes... A l'inverse, les margarines bon-marché me sont toutes répugnantes au goût. Mon organisme me dit tout de suite "recrache !"

Comme pour les alcools, l'alimentattion est un peu une question de "bons mélanges" et de "mauvais mélanges". Réciproquement, si on a mangé quelque chose à un repas, on peut avoir tout intérêt à manger une autre chose à un autre repas. Pourtant, mangées en même temps ces deux choses auraient posé problème... Par exemple si je mange de la viande je n'ai pas intérêt à boire du jus de fruit. Mieux vaut manger un peu de légumes cuits. Mais au repas suivant, plusieurs heures après, je vais me saoûler de jus de fruits... avec un peu de fruits secs et des noix pour parfaire.

En résumé, le nutrition peut vous rendre patraque de plusieurs façons :
Mauvaise assimilation de la nourriture, par exemple parce que les intestins sont irrités.
Effet assomant des toxines. Cet effet assomant peut aussi produire son inverse : une personne dont le cerveau n'arrive plus réfléchir à cause des toxines peut devenir violente, parce qu'elle a peur, elle ne comprend plus ce qui se passe autour d'elle.
Effets allergènes, nerveux ou hormonaux de certaines substances naturelles ou artificielles.
Mauvaises associations. Par exemple de la viande et des glucides lents ou des graisses et des glucides.
Manque de certains nutriments. Manque de magnésium, par exemple, ou de vitamine B12...
Tout cela dépend de personne en personne. Il y a aussi un effet boule de neige ou chateau de carte : un seul manquement et c'est un peu tout l'édifice de la digestion qui s'écroule. C'est une machine à tenir en équilibre par un peu tous les côtés.

Il existe des moyens de contre-attaque :
Les antioxydants, qui neutralisent certaines des toxines les plus dangereuses que sont les radicaux libres. Les antioxydants les plus connus sont les vitamines A, C, E et les colorants naturels des fruits et des légumes. (Ne pas abuser de vitamines : cela n'apporte rien et peut être nuisible.)
Sélectionner les "bons" produits industriels. Par exemple ceux qui contiennent des légumes en bocal en verre avec seulement un peu de vitamine C ou de jus de citron ajoutés (acide ascorbique et acide citrique). Eviter ceux qui sont faits à partir de poduits inadéquats (pas murs) ou qui contiennent des additifs douteux : conservateurs ou colorants toxiques, métaux de la boîte de conserve, PCB ou dioxines...
Les dépuratifs, comme le jus de radis noir ou de sureau. Ne pas abuser...
Voir un psychologue, un psychiatre et/ou vous développer culturellement. Beaucoup de personnes sont piégées dans un cercle vicieux entre des problèmes personnel et une alimentation délétère. Elles ont "trouvé instinctivement" comment mal se nourrir pour s'assomer et moins souffrir de leurs problèmes. Réciproquement cela ne fait que renforcer leurs problèmes. Si on essaye d'améliorer le psychologique, le mode de vie et la nutrition empêcheront les progrès. Si on essaye d'améliorer la nutrition, la souffrance causée par le psychologique sera trop intense et la personne trouvera n'importe quelle excuse pour continuer la malbouffe. Il faut jouer sur les deux plans en même temps.
Pour certaines choses le corps a des réserves qui peuvent durer plusieurs mois. C'est par exemple le cas de certaines vitamines. Il est donc inutile de chercher à manger de ces vitamines à tous les repas ni même tous les jours. Pour d'autres choses, par exemple les antioxydants, il n'y a pas de vraiment de réserves et il faut donc se recharger toutes les quelques heures. C'est pour cela qu'on recommande un fruit ou un légume cinq fois par jour.



Eric Brasseur - 17 avril 2006 au 22 avril 2006 [
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La migraine





Le présent texte est une compilation des observations de mes amis sujets aux migraines. Tenez compte du fait que certaines associations de médicaments sont à éviter. Demandez conseil à votre médécin ou à votre pharmacien.

La "vraie" migraine n'est pas un simple mal de tête. C'est une douleur extrême. Elle peut assommer une personne ou justifier une semaine d'invalidité-maladie. Une personne sujette à la migraine a besoin d'un accompagnement médical sérieux.

Il existe plusieurs manifestations très différentes de migraines. Dans un type de migraine seule une moitié de la tête fait atrocement mal. Dans un autre type de migraine c'est la zone autour d'un oeil qui fait horriblement mal, comme un coup de poing virulent. Certaines migraines sont accompagnées de visions déformées, d'autres de vomissements... Je ne suis même pas sûr que toutes ces manifestations sont bien appelées "migraines" par les scientifiques.

La migraine semble être causée par un resserrement des vaisseaux sanguins à la base du crâne. La tête est alors trop peu irriguée en sang donc en oxygène. Des vaisseaux sanguins de la tête (y compris ceux du cerveau ou ceux de la peau) vont se dilater, dans un effort pour améliorer le passage du sang. Cette dilatation s'apparente à une inflammation et s'accompagne d'un phénomène propre aux inflammations : la douleur. L'inflammation cause une sensation de douleur dans les zones enflammées et libère une molécule dans le sang qui augmente la perception de la douleur par le cerveau.

Une autre explication, plus récente, implique un désordre chimique qui se propage à l'intérieur du cerveau. Le resserrement et la dilation des vaisseaux sanguins dans la tête n'en serait qu'une conséquence. Cela explique peut-être pourquoi un des médicaments efficace contre certaines formes de migraines est un antiépileptique. L'épilepsie elle aussi est un désordre neurochimique qui se propage dans le cerveau...

Dans certains cas la migraine ne semble pas se déclencher pour des raisons précises. Dans d'autres cas les facteurs observés sont les suivants :
Boire du lait ou manger des produits qui contiennent du lait ou qui en sont dérivés.
Manger des produits dérivés du blé. Le blé contient une protéine, le "gluten". Chez certaines personnes cette protéine assome le système nerveux qui contrôle les intestins. Elle peut aussi avoir un effet sur le cerveau, un peu comme la morphine. Chez les personnes qui ont ce problème, les suites des effets du gluten peuvent être des maux de tête, des névralgies...
Un temps de pluie.
Boire de l'alcool ou fumer du tabac.
Un temps très froid.
Le stress, la fatigue.
La lumière intense, en particulier quand elle traverse une fine couche de nuages ou quand elle se réverbère sur la neige.
Il y a parfois des signes annonciateurs, comme des zébrures devant les yeux ou un resserrement du champ visuel. D'autres signes sont moins évidents mais un migraineux apprend à les reconnaître.

D'autres douleurs peuvent apparaître en plus du mal de tête. Par exemple des douleurs dentaires ou une forte nausée.

La migraine est un phénomène "divergent". Plus les vaisseaux sanguins se resserrent dans le crâne, plus encore cela les fait se resserrer. Quand une migraine commence, elle tend à s'aggraver elle-même.

Deux amis qui ont des migraines graves me disent que beaucoup de solutions semblent les aider mais la seule vraie solution est d'utiliser plusieurs solutions en même temps. Ils font de la prévention, ils soignent leur hygiène de vie, ils utilisent plusieurs méthodes en même temps quand la migraine commence ; par exemple de la glace sur la zone migraineuse et de la relaxation.

Une solution qui aide une personne n'est pas forcément utile pour une autre... Il faut essayer un peu toutes les approches pour déterminer ce qui a un effet positif.

La migraine peut être un problème héréditaire ; de famille. Renseignez vos antécédents familiaux à votre médecin et partagez vos expériences et découvertes avec les membres de votre famille.

La première approche consiste souvent à combattre la douleur. L'aspirine ou le paracétamol peuvent suffire pour un mal de tête modéré. Attention : à fortes doses ces produits sont toxiques. Ils peuvent être destructeurs voire mortels. Dans les cas de migraines fortes, parfois seuls les opiacés peuvent soulager, par exemple la codéine.

Une deuxième approche consiste à traiter le resserrement des vaisseaux sanguins. J'ai peu de renseignements sur la question. Un ami migraineux me dit que le cannabis est relativement efficace mais avec un désavantage : dans les premières minutes il empire fortement la migraine... Il n'ose pas prendre des vasodilatateurs comme par exemple le ginko biloba. Ce vasodilatateur a comme effet secondaire de faire se resserrer les vaisseaux sanguins une fois son effet terminé... Un autre ami confirme l'effet du cannabis et précise qu'il en faut très peu et qu'il ne faut pas utiliser le cannabis de mauvaise qualité qui circule communément en Europe.

Une troisième approche consiste à augmenter la capacité du sang à transporter de l'oxygène :
En fluidifiant le sang. Par exemple en prenant une petite quantité d'aspirine. Le sang passe donc mieux dans les vaisseaux resserrés. Un ami allergique à l'aspirine consomme de la reine des prés. Cette fleur contient de l'acide acétylsalicyliques aussi, comme l'aspirine, mais ne déclenche pas d'allergie chez mon ami et est je suppose moins dangereuse pour l'estomac.
Une amie a pendant longtemps utilisé des bombonnes d'oxygène pur. En respirant cet oxygène le sang est plus chargé en oxygène, ce qui compense le resserrement. De simple exercices respiratoire peuvent suffire. Un ami réussit parfois à arrêter des débuts de crises de migraine par des exercices respiratoires bien appliqués. Les bonbonnes d'oxygène présentent des risques. L'oxygène pur peut abîmer les poumons et fausser les réflexes respiratoires. Il faut absolument respecter les doses et les durées prescrites par le médecin.
S'hydrater. Si je suis déshydraté je peux faire une légère migraine, accompagnée de douleurs dentaires. Un ami migraineux me confirme qu'une déshydratation déclenche une migraine chez lui. La solution est à priori simple : boire. Cela ne fonctionne pas forcément, à cause de la vidange gastrique. Imaginons que vous êtes déjà un peu déshydraté à midi. Cela ne porte pas encore à conséquence. Vous mangez, ce qui ferme le fond de votre estomac. Pendant le repas vous buvez mais cette eau va rester dans l'estomac. Si votre digestion dans l'estomac se termine six heures plus tard, vous allez passer six heures pendant lesquelles votre corps perd de l'eau et ne bénéficie que lentement de l'eau contenue dans l'estomac. Pire encore : plus vous buvez d'eau, plus vous retardez la vidange gastrique (ceci n'est pas sûr)... Il faut donc boire une bonne quantité d'eau avant le repas. Je ne sais pas combien de temps exactement avant le repas. Je suppose qu'une heure avant le repas doit être parfait. Et boire peu pendant le repas lui-même. Quelques heures plus tard, quand la digestion est terminée, il est bon de se remettre à boire.
La prévention. Une fois la migraine déclarée elle peut être inexpugnable. Le mieux est de l'éviter. Les exercices respiratoires augmentent la quantité d'oxygène dans le sang mais ils ont d'autres effets aussi, sur le système nerveux. Ils sont calmants, régulateurs. Tout au moins s'ils sont bien faits... cela s'apprend. Dans certains cas, on peut apprendre à contrôler les débuts de migraine sous hypnose. Le yoga quant à lui est une sorte d'intermédiaire entre les exercices respiratoires et l'hypnose. C'est apprendre le contrôle de soi, pour des choses que l'on ne comprend pas bien. Cela donne des résultats. Les exercices de relaxation sont efficaces.

Un élément semble efficace : les omega 3, ces huiles spéciales que l'on trouve maintenant à profusion dans certains aliments de luxe. Je ne sais pas si ce sont les oméga 3 qui sont efficaces contre la migraine ou d'autres acides gras qui les accompagnent généralement. Je ne sais pas non plus quel est leur mode d'action. Est-ce que cela fluidifie le sang ? Est-ce que cela nourrit les vaisseaux sanguins ? Est-ce que cela stabilise le système nerveux ou le système hormonal ? Mystère. Mais les effets sont nets. Un ami ne peut pas avoir de migraines graves s'il a mangé du saumon. Je sais que je peux arrêter une rage de dents en mangeant une bonne quantité de margarine riche en oméga 3. L'huile d'onagre est réputée contre la migraine des femmes qui ont leurs règles. Peut-être grâce aux oméga 3 qu'elle contient ? Un ami me dit qu'elle est efficace contre la migraine. Son impression est qu'il faut suivre la même posologie que pour les règles : il faut en prendre un peu tous les jours. C'est un traitement de fond. Pour revenir aux margarines : il faut éviter les margarines bas de gamme. Elles me sont toxiques au goût. Il faut plutôt prendre les raviers de margarines de qualité. Elles sont plus chères mais elles ne contiennent que du bon. Ma préférée est la margarine Bio de la marque Delhaize. Un ami me dit qu'il est bon de changer régulièrement de marque de margarine. Un autre ami se fait de la mayonnaise avec de l'huile de tournesol, de l'huile de colza, de l'huile d'olive... Il se fait un repas d'une grosse quantité de cette mayonnaise sur une salade. Après cela il ne peut plus rien lui arriver...

Quand une crise devenait horrible au point de le faire penser sérieusement au suicide, un ami téléphonait à un taxi et se faisait conduire le plus doucement possible à l'hopital le plus proche, au service des urgences. Là on lui injectait aussitôt un produit dérivé de l'ergot du seigle (un "ergoté"). L'effet est immédiat. On le laissait se reposer dans un coin, avant de le laisser repartir chez lui avec des cachets à prendre. C'est miraculeux malheureusement les effets secondaires sont lourds. On est comme assommé pendant plusieurs jours et les reins en prennent un coup.

Il existe un médicament malheureusement très cher, de l'ordre de 70 €. Il est efficace pour un ami. Il utilise la variante nommée "Almogran". C'est un "triptan".

Un ami migraineux utilise un ioniseur chez lui. Cela réduit le risque de migraine. Attention : un ioniseur doit être adapté au volume de la pièce. Sinon il peut devenir toxique. Une hypothèse est que le temps de pluie produit des ions +. Tandis qu'un ioniseur produit des ions -.

Une amie a résolu définitivement son problème de migraine en renonçant aux produits contenant du lait ou des dérivés du lait.

Pour diminuer le risque de migraine il faut avoir une bonne hygiène de vie : ne pas fumer, dormir à heures régulières, dormir assez, avoir une alimentation de qualité, savoir décompresser après le travail... Un ami me dit que dormir trop augmente aussi le risque de migraine chez lui.

Un ami applique une grande masse glacée sur la partie de sa tête où commence la migraine. Il utilise ces réservoirs de froid pour glacières portatives. Cela fonctionne bien pour arrêter la migraine, surtout si c'est fait tout au début, quand elle ne fait que commencer. C'est inconfortable : appliquer une grande masse glacée sur le visage est un peu douloureux et il y a de l'eau de condensation qui dégouline. Mais cela fonctionne. Attention : n'appliquez pas un conteneur qui sort tout juste d'un surgélateur. Il peut coller à votre peau à cause du froid extrême et vous causer des brûlures. Utilisez un conteneur dont la température est de 0 °C, celle de la glace fondante. Si un conteneur est trop froid, passez-le sous l'eau pour le "rechauffer" un peu. Je suppose que vider un ou deux bacs de glaçons dans un grand sachet solide, ajouter de l'eau puis appliquer bien largement le sachet sur la zone de la migraine est une bonne solution d'urgence. Eventuellement préparez à l'avance tout le nécessaire pour pouvoir intervenir rapidement à chaque fois.

Il existe un traitement contre la migraine qui dure un mois, à base de "tiapride". Il améliore la situation mais les effets secondaires du traitement sont durs à supporter.

En cas de migraine une amie applique sur ses tempes une huile chinoise. Elle en avale aussi une goute sur un sucre. L'effet est rapide et radical. Cette huile est vendue dans les magasins ésotériques.

Un ami apprécie l'effet du chocolat contre la migraine.

Se placer dans l'obscurité absolue aide certaines personnes.

Un ami attribue la quasi disparition de ses migraines à son usage quotidien du millepertuis. Il absorbe quelques comprimés par jour, au fil de la journée. Attention : le millepertuis est en vente libre mais il a de petites contre-indications et ne peut pas être associé avec certains médicaments. Demandez conseil à votre médecin.

Un ami constate une baisse franche de la douleur de ses migraines en buvant des quantités modérées de "Coca-cola light". Pendant ses périodes de migraine il en boit de petites doses au fil de la journée. Le café ne lui convient pas parce que cela lui dérange le transit intestinal et l'affaiblit. Il évite le Coca-cola normal à cause du sucre, pour éviter de prendre du poids bêtement. La caféine est un antimigraineux reconnu depuis longtemps mais faites attention. Si on absorbe beaucoup de caféine en une fois (surtout à jeun), le contrecoup quelques heures plus tard peut être douloureux. Soyez prudents. Le fait que la caféine donne de bons résultats dans certains cas ne veut pas dire qu'elle est bonne dans tous les cas.

Les alpinistes qui arrivent à de très hautes altitudes rencontrent des problèmes respiratoires qui peuvent parfois être mortels : oedème pulmonaire, saignements, maux de tête, vomissements... C'est dû à la raréfaction de l'air donc de l'oxygène. Certains alpinistes ne présentent pas ou peu ces problèmes tandis que d'autres en souffrent rapidement et très fort. Il est alors impératif pour ces derniers de redescendre à plus basse altitude ou d'entrer dans un caisson hyperbare. Une étude scientifique a montré ce qui semble faire la différence entre ceux qui tiennent le coup et ceux qui doivent arrêter de monter : le someil. Ceux qui respirent bien pendant leur someil, qui sont bien oxygénés, résistent mieux. Je me demande si cette observation ne serait pas utile aux personnes qui souffrent de migraine. Pour mieux s'oxygéner en dormant il faut par exemple moins manger le soir, dormir sur le ventre, avoir une chambre correctement aérée, etc... Les personnes qui ronflent voire qui font des crises d'apnée manquent d'oxygène pendant leur someil. A tel point que certaines sont obligées de se reposer pendant la journée pour récupérer. Elles ne deviennent actives que les soir.

Voici des problèmes qui peuvent causer des maux de tête vifs mais qui ne sont pas à priori des migraines :
Les douleurs exophtalmiques. Elles sont causées par les yeux. Par exemple si vous portez des lunettes qui ne vous conviennent pas. Certains opticiens font des erreurs en plaçant les verres dans les lunettes. En quelques minutes, quelques heures ou même parfois quelques jours, cela peut vous causer des douleurs insupportables sans que vous compreniez vraiment pourquoi. Le mieux à faire est de retourner chez l'opticien pour qu'il ajuste la monture. Une autre source de douleurs exophtalmiques sont les rayons UV. En plein soleil je n'ai pas de problème, je n'ai besoin d'aucune protection. Par contre s'il y a une fine couverture nuageuse, la proportion d'UV augmente. Je dois alors impérativement porter des appliques solaires anti-UV. Sinon j'attrape un fort mal de tête persistant, des nausées... Un ami me décrit le même problème si le sol est couvert de neige.
Un accident vasculaire. C'est à dire un vaisseau sanguin qui éclate dans le cerveau ou qui se bouche. C'est relativement rare mais cela requiert une hospitalisation en urgence. Cet accident est souvent dû à un mode de vie sédentaire. Il peut simplement être déclenché en restant assis devant la télé pendant des heures. Le sang ne circule plus dans les veines des jambes, on se déshydrate... le sang coagule et forme des caillots. Plusieurs heures plus tard un caillot arrive dans le cerveau...
Une tumeur. En grossisant elle exerce une pression sur le cerveau. On procède donc parfois à des examens en ce sens en cas de migraines anormales. Avec à ce propos un cas extrême : des personnes auxquelles on fait un toucher rectal parce qu'elles ont des migraines. Cela semble complètement idiot et criminellement humiliant si on ne vous a pas expliqué le pourquoi : un cancer de la prostate peut engendrer des métastases au cerveau. En diagnostiquant la tumeur au niveau de la prostate, par un toucher rectal, on évite bien des problèmes par la suite.
La gueule de bois. Le lendemain d'une beuverie à l'acool... Plusieurs solutions existent. Tout d'abord la prévention. Si on boit des alcools de bonne qualité et si on évite de faire des mélanges, le risque de gueule de bois diminue. Un bon truc semble être de boire beaucoup d'eau avant d'aller dormir le soit-même de la beuverie. Le mal de tête est en effet en partie dû à une déshydratation. Le lendemain, quand la gueule de bois est installée, boire une petite quantité d'alcool peut soulager. Le jus de radis noir est très efficace. Cela se vend en ampoules, en pharmacie. C'est un dépuratif, ce qui veut dire que cela nettoye le foie et l'organisme de ses toxines. En Angleterre sont vendus des comprimés "Recover" qui seraient efficaces mais qui sont interdits sur le continent.
Des problèmes dentaires. Consulter un bon dentiste peut résoudre vos problèmes de migraine. Attention : certains charlatans profitent de votre détresse pour vous aracher ou dévitaliser des dents inutilement et/ou vous facturer des travaux inutiles et hors de prix.
Des problèmes de l'ossature du corps, voire des problèmes de marche ou de choix des souliers. Consultez un spécialiste. Tout est lié dans le corps. Une amie avait des maux de dos causés par une mauvaise disposition de la mâchoire.
Une page en anglais intéressante :
http://en.wikipedia.org/wiki/Migraine

Un produit a un effet radical sur les migraines de trois amis : l'orotate de manganèse. Pour l'un d'eux, c'est le deuxième produit capable de couper complètement ses migraines. Depuis qu'il prend de l'orotate de manganèse tous les jours, il n'a plus de migraines. Un miracle... Pour le deuxième ami, qui a des migraines pour une raison tout à fait différente, l'orotate de manganèse ne coupe pas ses migraines en cours. Par contre s'il en prend préventivement les migraines n'apparaissent pas. L'effet est très graduel, ce qui est une raison supplémentaire pour en prendre à titre préventif. Stricto sensu, l'orotate de manganèse n'est pas un médicament. C'est un complément alimentaire, en vente en pharmacie (sur prescription en France). Il faut toutefois être prudent. Autant le manganèse est nécessaire à la vie (comme le fer, le calcium, le magnésium...), autant il peut avoir des effets toxiques graves et irréversibles s'il est pris en trop grandes quantités. Demandez donc impérativement une prescription à votre médecin et des explications précises. L'idéal est de demander à un pharmacien de fabriquer des gélules, contenant chacune 2 mg (deux millièmes de grammes) d'orotate de manganèse dihydrate. Ensuite, prendre une gélule à chaque repas, soit trois par jour. Cela fait une dose journalière de manganèse d'un peu plus de 1 mg. La dose journalière recommandée de manganèse est entre 2,5 et 5 mg. La dose journalière maximale préconisée est de 10 mg. En prenant ces trois gélules on ne court donc en théorie pas de risque. On peut même ajouter une ou deux gélules par jour si le besoin s'en fait sentir... Je ne comprends pas pourquoi une dose aussi faible de manganèse a un effet aussi énorme sur les migraines. Ces deux amis mangent sainement et absorbent par la nourriture une quantité de manganèse plus élevée. Plus fort : ils ont essayé des comprimés multivitamines & minéraux & oligo-élements, qui contiennent 3,5 mg de manganèse. Trois fois plus que les trois gélules ! Ces comprimés du commerce n'ont aucun effet sur leurs migraines... C'est mystérieux. (Un léger excès de gélules entraîne de légers problèmes nerveux.) Le rôle de l'orotate est de permettre au manganèse d'être bien assimilé. Peut-être cette action de l'orotate est-elle essentielle... Le rôle du manganèse dans l'organisme est de servir de précurseur d'enzyme et de co-enzyme. En particulier il joue un rôle clé dans le métabolisme de l'énergie. Je suppose que la présence efficace du manganèse permet au cellules de mieux gérer ce qui se passe, d'être "plus musclées", donc de pouvoir s'organiser pour éviter la migraine. D'une façon générale, la prise d'orotate de manganèse résout beaucoup de petits problèmes du corps, j'en ai fait l'expérience. Un de ces amis préfère diluer les gélules dans une gourde, qu'il boit au fil de la journée, en sentant approximativement le nombre de gorgées qu'il lui faut. Deux personnes ont encore eu une forte migraine après avoir commencé à prendre de l'orotate de manganèse et cessé graduellement leurs autres médications. Ensuite elles n'ont plus eu de migraine...

Le lithium est utilisé à titre préventif contre certains types de migraines.

Certains médicaments contre l'épilepsie sont efficaces contre certaines formes de migraine. Deux connaissances en ont pris, avec succès :
La
Carbamazépine (vendue entre autres sous le nom de Tegretol) a comme effet secondaire une prise de poids.
Le
Topiramate (vendu entre autres sous le nom de Topamax) a comme effet secondaire un engourdissement de la mémoire pour les mots peu utilisés.
Un lecteur me signale le remède suivant :

"C'est un professeur d'un hôpital, migraineux lui-même, qui me l'a affecté la première fois. Depuis lorsque j'ai une grosse migraine (nausée, vertige, sautes d'humeur, aiguilles qui s'enfoncent dans mes tempes, côté droit ou gauche du visage insensible...), je me rends dans un hôpital (urgences) et très calmement je leur dit que je suis migraineux, je décline mon identité (si j'y arrive car plusieurs fois il m'a été impossible de me souvenir de mes propres noms et prénoms) et je leur donne la recette :

En Intraveineuse (goutte à goutte) :
Primperan ou équivalent.
Vitamine C
Paracétamol liquide (ne se trouve qu'en milieu hospitalier, d'où l'obligation de se rendre à l'hôpital).
Quelques fois les soignants sont dubitatifs, argumentez et croyez-moi, dès les premières gouttes du goutte à goutte, vous vous endormez pour vous réveiller quelques 30 minutes plus tard. Il vous suffit d'attendre la fin du goutte à goutte (environ 1 heure) et vous repartez sur vos jambes complètement remis avec simplement un Tricosteril dans le coude."

Ma pharmacienne me signale un vieux remède : un comprimé de 400 mg de vitamine B2 par jour, à titre préventif. Cela fait s'espacer les migraines jusqu'à les faire disparaître. En toute généralité, de fortes doses de vitamines B peuvent être efficaces contre les douleurs chroniques. Voyez votre médecin. Les vitamines B sont peu dangereuses mais n'exagérez pas. Renseignez-vous sur la dose journalière recommandée pour chaque vitamine B. En général, si vous prenez de 10 à 100 fois cette dose, vous ne risquez rien de grave, tout au plus un peu de fatigue. A partir de 1.000 fois la dose tous les jours pendant des semaines, certaines vitamines B vous exposent à des risques graves : destructions d'organes, problèmes neurologiques...

Le mercure serait à envisager comme facteur déclencheur ou aggravateur de maux de tête :
Le mercure : un tueur du 21ème siècle

Une amie s'est vue prescrire un
bêta-bloquant par son médecin. Je n'en connais pas encore les résultats.

Une lectrice me signale le médicament
Lamaline. Il contient du paracétamol, de la caféine mais aussi de l'opium et doit donc être réservé aux épisodes de migraines intenses.



Eric Brasseur - 4 août 2005 au 20 février 2008 [
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LE MONDE
L’homme est en vie et il est au monde ; il naît au monde par le langage. Il n’y a pas de monde pour l’animal qui n’est pas humain, pour l’animal qui n’est pas débrayé, pour l’animal(ité) sans oralité. L’animal parlant ou le parlêtre est l’être-au-monde et l’être-à-la-mort. Le monde (de l’ennui) de l’homme n’est pas le milieu (de la stupeur) de l’animal. Le monde est le poids de la vie, soit sa surface et son volume, en même temps que sa vitesse ou sa trajectoire, son pouvoir : son importance ou son influence, sa volonté ; mais c’est la vie qui est la puissance du monde. Ou bien l’homme change le monde, ou bien le monde change l’homme…
LES CONCEPTIONS DU MONDE
Encore mythologique, la théologie est une conception ou une compréhension surnaturelle du monde : le monde a été créé par un dieu ou des dieux, que ce soit le Dieu de l’Ancien testament , le (Fils de) Dieu du Nouveau Testament, le premier moteur immobile d’Aristote ou quelque autre divinité. Pour la cosmologie, le monde n’est qu’une infime partie de l’Univers, qui n’est lui-même qu’une partie du cosmos : nous ne sommes rien dans l’infinité cosmologique des astres et des planètes, qui tournent sans nous, avant et après nous, jusqu’à l’extinction du Big Bang ! Autant alors chercher la vie sur Mars…
Selon la physique, le monde est gouverné par des lois physiques (relativité, gravité, quanta, vitesse de la lumière, etc.) qui sont d’essence mathématique : algébriques ou géométriques dans le pire des cas, topologiques dans le meilleur des cas. La physis y est synonyme de nature. Pour la chimie, le monde est le produit de la matière inerte ou inorganique ; c’est un monde de particules qui peut être résumé par le tableau de la classification périodique des éléments de Mendeleïev. Avec la biochimie, le monde est le produit de la matière vivante ou organique ; mais on ignore tout du passage de l’inorganique à l’organique et de l’apparition de la vie sur la Terre (ou ailleurs) : on parle d’une « soupe prébiotique » qui aurait assuré la continuité du règne minéral au règne végétal, parce que l’on croit ou pense que s’il y a discontinuité entre les deux, cela impliquerait une intervention divine et donnerait raison au fondamentalisme : Dieu, qui n’est qu’un nom propre ou un non-concept, est une très mauvaise réponse à la meilleure des questions – la question de l’origine, qui est l’origine de la question !
La biologie est capable de penser le règne végétal, par la botanique, et le règne animal, par la zoologie ; elle a justement montré et démontré que l’humain appartient au règne animal et qu’il ne s’en distingue pas par l’âme (l’animé) ou par l’esprit (déjà présent chez d’autres primates). Cependant, pour la biologie, l’homme n’est qu’un maillon de la chaîne de la vie, qui est souvent réduite au code génétique, au génome : l’espèce humaine appartient au genre humain et elle ne se distingue en rien des autres espèces et des autres genres. La vie est donc d’essence génétique (et non généalogique) et on cherche encore « le chaînon manquant », même en sociobiologie…
L’idéologie réduit le monde à la culture (conscience, esprit, éducation, formation, imitation, tradition, etc.). Elle peut être religieuse, morale, folklorique (superstition, sens commun, bon sens), littéraire ou autrement artistique ; en plus d’être culturelle, elle peut aussi être cultuelle et avoir quelque chose de liturgique et de fiduciaire, la liturgie étant affaire de croyance et la fiducie, de confiance.
Avec l’économie, qui est l’aménagement ou le traitement de la nature par la culture et du temps par l’espace, apparaissent les conceptions sociales ou historiques, socio-historiques, du monde. L’économie se voudrait une science naturelle, pure et dure, exacte et appliquée ; selon un ancien directeur du département d’Économie à l’Université Memorial, on devrait l’enseigner comme un langage, comme une langue seconde. Or, l’économie est une langue étrangère à la vie et à l’homme [cf. Henry] : de l’échange ou de la libre circulation des biens, tout lui échappe, parce qu’elle ignore l’échange des personnes et l’échange des paroles et l’échange en tant que don. Comme l’écologie, elle ne comprend pas que l’échange – même quand il y a parasitisme – n’est pas affaire de besoin, mais de demande et de désir. Marx a réglé le cas de l’économie politique il y a 150 ans ! La mondialisation et la globalisation n’y changent strictement rien [cf. Debord dans La société du spectacle (en 1967, 100 ans après Le Capital), JML dans La signature du spectacle (en 1983) et Agamben dans Moyens sans fins (en 2002), ces deux derniers ouvrages ayant en commun d’être dédiés à l’auteur du premier].
La politique est la continuation de la guerre par d’autres moyens. Elle a raison de réduire les rapports sociaux à des rapports de force ou de pouvoir, à des rapports polémiques de contrats et de conflits, de contacts et de contraintes ; mais elle a tort de limiter le pouvoir à la lutte des pères : à la lutte entre les classes sociales, entre les générations, entre les États ou les pays. Lui échappe la lutte des mères, c’est-à-dire la lutte entre les sexes et entre les langues ; la lutte des religions, comme la lutte des races, se situe entre la lutte des pères et la lutte des mères ou à la jonction des deux… Pour la politique, le monde est la société, qui est un problème dont elle a la solution ou une question dont elle a la réponse. La politique n’est pas une science, mais la biopolitique ou la bioéthique d’un biopouvoir : c’est le schéma et l’usage de la décision…
Le droit est une entreprise ou une tentative de légiférer sur le monde et de le légitimer ; c’est le monde de la loi, des lois et des règles : aux lois du monde de la physique, le droit cherche à substituer le monde des lois ; il tâche de régir l’univers individuel par l’univers collectif et d’ainsi gérer la liberté et la propriété (privée ou non) et de remplacer avec raison la vengeance par la justice. Mais le monde de (par) la justice n’est pas la justice du (pour le) monde.
Comme la grammaire, l’histoire est à la fois un objet (les événements : ce qui se passe et passe) et un sujet, une discipline, un point de vue sur les événements : ce qui ne passe pas et ne se passe pas. Dans la langue allemande, on distingue ainsi l’histoire comme ‘’Geschichte’’ et l’histoire comme ‘’Historie’’. L’histoire est l’écriture du (par le) monde et le monde de (pour) l’écriture. Avec l’histoire et surtout la préhistoire, apparaît le temps et donc la mort : l’anticipation de la mort par la faculté de présentation qu’est l’imagination. L’histoire monumentale (monument, édifice, statue), selon Nietzsche et Foucault, se distingue de l’histoire documentaire (document, archive, statut) : l’histoire monumentale, c’est l’histoire des mouvements et des changements ; l’histoire documentaire, c’est l’histoire des annales et des manuels – comme l’histoire littéraire…
Anticipée au XVIIIe siècle par Jean-Jacques Rousseau et fondée au XIXe siècle par un écrivain comme Honoré de Balzac et par Auguste Comte, puis refondée au XXe siècle par Émile Durkheim et Max Weber, la sociologie est, selon Mario Tronti, l’idéologie de l’économie ; c’est la philosophie spontanée du journalisme. Au mieux, c’est la science des règles et des institutions sociales, le problème étant toujours de définir ce qu’est une règle ou une institution et ce qu’est le social : quelle est la nature ou l’essence du lien social, quel en est le ciment ? La sociologie ne peut concevoir le langage que comme un moyen ou un instrument de communication entre les humains et entre l’homme et le monde : le langage y est un effet, un reflet, une image, de la société ; le monde de (par) la sociologie n’est jamais que la sociologie du (pour le) monde : un monde sociologique bien plus que social ou socio-historique, un monde d’enquêtes et de sondages.
La psychologie est l’envers de la sociologie : plutôt que d’expliquer l’individu par la société, elle explique la société par l’individu, la personne, le moi, la conscience, la motivation, la volonté, la personnalité, le caractère, le comportement, etc. Pour elle, l’être du sujet se définit par la conscience du moi ou par l’instinct du soi (« ego psychology », « psychology of the self », « psychologie évolutionniste » de la sociobiologie). La psychologie est le monde de (par) l’individualisation et l’individualisation du (pour le) monde. C’est possiblement la conception ou la vision du monde la plus courante ou la plus commune, le bon sens du sens commun : c’est la conception biographique du monde. Les psychologues sont des biographes !
La géographie a l’avantage scientifique de la géologie et de la géométrie ; c’est-à-dire qu’elle est autant une science naturelle qu’une science sociale ; c’est la science de l’espace humain, de l’espace mondain. Doublée ou couplée, avec la démographie, elle peut justement rendre compte non seulement de l’espace statique mais de l’espace dynamique : des mouvements des populations, des migrations et du peuplement en général. C’est donc dire qu’elle est en mesure de voir comment le temps envahit l’espace, comment le temps est spatialisé et comment l’espace est temporalisé, le temps étant à l’espace ce que le travail est au capital : le travail est le devenir-espace du temps ou espacement des marchandises, tandis que le capital est le devenir-temps de l’espace ou temporalisation, temporisation (le temps, c’est de l’argent ; l’argent, c’est du temps acheté, accumulé). Le tourisme est devenir-espace du capital, de la nature à la culture, du paysage de la contrée au visage du musée par l’image de la photographie ; mais il est aussi devenir-temps du travail à travers le voyage qui donne du « bon temps »…
L’ethnologie est l’étude des sociétés dites primitives ; sa méthode est l’ethnographie, c’est-à-dire la discipline des enquêtes sur le terrain et non pas de simples sondages d’opinion à des fins économiques ou politiques, mercantiles ou parlementaires. Les premiers ethnologues, ce sont les explorateurs et les découvreurs, les colonisateurs aussi (comme les Jésuites en Nouvelle-France au XVIIe siècle) ; ils ont souvent été coupables d’ethnocentrisme, d’européocentrisme et d’anthropocentrisme ; mais l’ethnologie a le grand mérite de la nuance : le monde est multiple ou divers, autrement diversifié, diversement peuplé et occupé ou préoccupé, même s’il est structuré : le monde est une structure ; ce n’est pas comme « tout le monde » !
L’anthropologie est la science de l’être humain, de l’évolution de l’être humain ; mais c’est une science particulière et singulière et non générale et fondamentale ou radicale. Elle devrait pourtant au moins inclure ou comprendre l’ethnologie et la sociologie, ainsi que la préhistoire (ou la paléoanthropologie) ; et, si on considère que l’être humain est aussi un animal, elle devrait elle-même faire partie de l’éthologie humaine comme science ou étude des mœurs des animaux – ce que ne font même pas les médecins et les vétérinaires. Pour l’anthropologie, le monde est culture et structure plus que nature.
Avec Platon et Aristote, la philosophie se veut être la science des sciences, la science première à base mathématique (géométrique ou logique). De la métaphysique à l’éthique, en passant par l’esthétique et la politique, la philosophie est la science du logos (raison ou esprit, pensée ou langage). Elle se présente comme la conception ou la vision du monde par excellence. Elle cherche à être une gnoséologie, soit une théorie de la connaissance, et une épistémologie, soit une théorie de la science. De l’ontologie (de Platon et d’Aristote), qui est une théorie de l’être, à la phénoménologie (de Husserl et Cie), qui est une théorie du phénomène (comme apparaître de l’être), la philosophie est la définition même du Discours maître à la Hegel, du Discours du Maître, que celui-ci se (con)fonde ou non avec le Discours de l’Universitaire – autrement dit, que le philosophe soit ou non un politicien et un professeur ou que l’intellectuel devienne ou non un (intellectuel) professionnel…
LA PSYCHANALYSE
Au Discours de Maître, la psychanalyse appose – et non oppose – le Discours de l’Analyste. La psychanalyse n’est pas une conception ou une vision du monde, que ce soit une science ou une « contre-science » [Foucault] ; c’est une ‘’abscience’’ : c’est une théorie du monde, un récit théorique ou scientifique du monde individuel et du monde collectif, du monde naturel et du langage naturel, et donc aussi de tout le monde : de la sexualité du monde et du monde la sexualité – mais ce n’est pas une sexologie ! Sigmund Freud en est l’inventeur à Vienne au tournant du XXe siècle ; il a été suivi par Sandor Ferenczi, Ernest Jones, Karl Abraham, Melanie Klein et Donald Winnicott et surtout par Jacques Lacan et Françoise Dolto en France dans la seconde moitié du XXe siècle.
La psychanalyse est la science de l’inconscient, que l’on appelle parfois « psychologie des profondeurs » ; c’est-à-dire que pour elle le sujet ne se définit pas par la conscience ou le seul moi (imaginaire), mais par l’inconscient, du ça (réel) au surmoi (symbolique). Le matériel ou le matériau qui a servi à Freud et qui lui a permis de découvrir l’inconscient – il ne l’a pas inventé – est le suivant : le rêve (qui est la « voie royale de connaissance de l’inconscient », les lapsus et les mots d’esprit, les légendes et les mythes, la littérature et l’art en général, la folie (surtout les névroses, les psychonévroses ou les « grandes névroses » que sont l’hystérie et l’obsession) et la sexualité infantile. La psychanalyse est une clinique ou une thérapeutique, une thérapie, où la cure est fondée sur le transfert ; ce n’est pas seulement une théorie du monde, mais un récit théorique ou scientifique qui (re)lie l’homme, le langage et le monde.
Selon la psychanalyse, « trois blessures narcissiques » ont été infligées à l’humanité :
1°) la physique (Copernic, Kepler, Galilée) a démontré que le monde, c’est-à-dire la Terre, n’est pas le centre de l’Univers ;
2°) La biologie (Darwin, Mendel) a (dé)montré que l’homme n’est pas le centre du monde ;
3°) la métapsychologie (Freud) a montré que le moi, c’est-à-dire la conscience ou la raison, n’est pas le centre du sujet : le sujet est décentré et divisé.
Le décentrement ou la division du sujet en fait un dispositif inséparable de l’objet en son projet et son trajet, en la trajectoire de la subjectivité et surtout de l’affectivité. Ces trois blessures sont des débrayages énonciatifs initiaux - et pleins d’initiations et d’initiatives !… Pour l’éthologie de Lestel, il y aurait une quatrième blessure narcissique : l’homme n’est pas le seul sujet […]
La psychanalyse est une métapsychologie (comme l’ontologie et la phénoménologie), une métaphilosophie (ou une non-philosophie) et une métabiologie.
La métapsychologie
La métapsychologie est le triple point de vue de la psychanalyse : économique, dynamique et topique.
L’économique
Au point de vue économique, il y a une énergétique des zones érogènes et une mécanique des stades ou des phases : stade oral (ou cannibale et respiratoire), stade anal (ou sadique), stade phallique (ou urétrale) et stade génital ; il y a de multiples combinaisons et recombinaisons entre les phases. L’énergétique et la mécanique conditionnent la sexualité humaine, de l’enfant à l’adulte, et elles sont conditionnées par la bisexualité psychique plutôt que biologique. Dès le jeune âge ou la prime enfance, le petit de l’homme est aux prises avec la libido et avec les pulsions et les fantasmes : c’est un « pervers polymorphe ».
La pulsion est un concept limite entre le somatique et le psychique, entre le corps et l’âme ; elle est économiquement psychosomatique. La pulsion a une poussée (force, énergie, impulsion), une source (zone du corps), un objet et un but (satisfaction). La pulsion est la cause du sujet, la cause de la division du sujet en sujet de (ou « subjectum ») et en sujet à (ou « subjectus »), entre l’individuation et la désindividuation, entre l’individu et le ‘’dividu’. Les destins des pulsions sont le renversement dans le contraire, le retournement sur la personne propre, le refoulement (inhibition, frustration, privation, régression, répression, réparation, restauration, somatisation), qui est à la source de la névrose (hystérie, obsession, phobie), la scotomisation ou la forclusion (du Nom-du-Père), qui est à la source de la psychose (paranoïa, schizophrénie, manie dépressive), et la sublimation (qui n’est pas l’idéalisation de l’objet mais le détournement ou le retournement de la pulsion quant au but, alors que la perversion est le détournement de la pulsion quant à l’objet). Les ‘’enclins’’ de la pulsion sont l’ancrage et le frayage qui mène à l’étayage ou au clivage.
Grâce à son étude du narcissisme (fondamental ou primordial) et du masochisme (originaire ou primaire), Freud est passé d’une première théorie des pulsions à une seconde. Il avait d’abord distingué les pulsions du moi ou d’auto-conservation (sans objet) et les pulsions sexuelles (avec objet pour la libido) ; puis il a distingué les pulsions de vie et la pulsion de mort. Les pulsions de vie ne correspondent pas aux pulsions sexuelles. La pulsion de mort est la pulsion de retour à l’animal ou à l’inorganique et à l’inertie (le repos, le sommeil) ; elle est aussi sexuelle (agressive : active dans le sadisme ou passive dans le masochisme) que les pulsions de vie : elle conditionne donc la vie sexuelle. C’est la pulsion de mort qui fait de la psychanalyse une métabiologie : sans pulsion de mort, il n’y aurait pas de vie humaine !
La compulsion de répétition est inséparable de la pulsion de mort ; elle est automatisme de répétition (rites, rituels, cultes, passages à l’acte, actes manqués, oublis, tics, etc.) et compulsion d’aveu (confession, quête de la punition, épreuve de la peine). La (com)pulsion de mort (ou de meurtre), comme impulsion et répulsion, est la source objective du sentiment de culpabilité, qui est lui-même la source subjective de l’angoisse.
Le fantasme est le substitut de ou le résidu de l’angoisse et il est le « représentant psychique » de la pulsion. Se distinguent les fantasmes conscients (ou les fantaisies et les rêveries), les fantasmes inconscients (où dominent les scénarios sexuels) et les fantasmes originaires, les deux principaux étant la scène primitive (où l’enfant fantasme le coït des parents comme un acte sadomasochiste) et le mythe du meurtre du père de la horde primitive.
La dynamique
La dynamique de la métapsychologie comprend les processus et les principes, ainsi que le désir. Les processus primaires sont des processus de transposition, les deux principaux étant la condensation conduisant à la métaphore et le déplacement conduisant à la métonymie ; les processus secondaires sont des processus de position : mécanismes de défense et formations psychiques (réactionnelles) ou formations de substitut, de compromis ou de symptôme, à la suite du refoulement et du retour du refoulé. Les processus primaires sont formateurs d’images par la condensation et le déplacement et les processus secondaires sont formateurs de symboles par la comparaison et l’association… Le principe de réalité est le principe de l’effectivité, de la soumission du moi au surmoi et de l’univers individuel à l’univers collectif ; le principe de plaisir, dont la pulsion de mort est « l’au-delà », est le principe de l’affectivité, de soumission du moi au ça et de l’univers collectif à l’univers individuel.
Il existe trois principales théories du désir :
1°) La théorie machinique ou mécanique du désir (Spinoza, Schopenhauer, Nietzsche, Lyotard, Deleuze-Guattari, Adler) postule que le désir est tout-puissant, omnipotent : le désir est réel et il se confond donc plus ou moins avec la libido ; c’est une force, une énergie, une volonté de puissance : c’est un instinct ; c’est le désir du (par le) sujet, avec ou sans objet.
2°) La théorie mimétique ou métaphysique du désir (Aristote, Girard) (Jung ?) considère que le désir est faible : parce que l’homme est un animal mimétique et politique, le désir est triangulaire et imaginaire ; c’est une médiation entre le sujet et l’objet : c’est un apprentissage par le mimétisme (qui fonde la psychologie et la pédagogie du comportement) ; c’est le désir selon le désir de l’autre sujet (à l’objet).
3°) La théorie dialectique ou dynamique du désir (Platon, Hegel, Freud, Lacan) conçoit le désir comme loi du désir (force, énergie) et comme désir de la loi (interdit, tabou) : le désir est symbolique, le signifiant du désir ou le symbole des symboles étant le phallus ; c’est une force comme libido, mais une faiblesse comme pulsion : c’est un dispositif antagonique et agonique, une lutte conduisant à la division ou au décentrement du sujet ; c’est le désir du (par et pour le) désir de l’Autre, le sujet (énonciatif, génitif, proprioceptif) étant sujet de l’objet et sujet à l’objet : c’est la « croix agonique » ou agonistique S-O-S…
Le rêve, qui est le gardien du sommeil, est un récit ; c’est le récit du désir, qui est essentiellement sexuel ; le travail du rêve consiste à transformer les restes diurnes de la veille ou de l’avant-veille en pensées nocturnes du sommeil à partir de souvenirs oubliés ou refoulés, tandis que le travail du récit consiste à transformer de la même manière un contenu latent (profond, inconscient) en une expression manifeste (superficielle, consciente) partir de rêves et de fantasmes. Dans le rêve, comme dans le récit, le rêveur est un narrateur – c’est le regard(ant) symbolique – et il peut s’identifier avec l’acteur qu’il est et qui voit et parle – c’est le narrateur homodiégétique ou autodiégétique – ou il peut s’identifier avec l’acteur qu’il voit et qui parle – c’est le regard(é) imaginaire par le narrateur hétérodiégétique. Le travail du rêve et le travail du récit sont le travail du désir.
Le rêve et le récit sont une question ou un problème d’identification. L’identification peut être secondaire ou consciente : c’est l’identification de ; elle peut être primaire ou inconsciente : c’est l’identification à. C’est par l’identification et donc par le désir qu’il y a les processus primaires et secondaires et les deux principes. Dans l’identification, il y a projection imaginaire du sujet (moi idéal) ou introjection symbolique de l’objet (idéal du moi) dans l’ambivalence du moi… L’identification est le moteur du brayage et du repérage, de l’embrayage et du débrayage et ainsi des états d’âme et des états de chose, des états du moi et des états du monde. Aussi y a-t-il des états d’âme plutôt embrayés : l’amour, l’envie, l’angoisse, l’ennui (l’ennui de personne, l’ennui tout court), l’enthousiasme, l’espoir (du je émergé), la solitude (du je immergé), la mélancolie, l’égoïsme, la timidité et le narcissisme, et des états d’âme davantage débrayés : la haine, la jalousie, l’anxiété ou la peur, la fatigue ou le stress, l’ennui (l’ennui de quelqu’un, les ennuis), l’étonnement, le désespoir (du je submergé), la compagnie (du je ‘’rémergé’’), la nostalgie, la générosité, la curiosité et l’altruisme.
La topique
Dans l’évolution de la métapsychologie, il y trois topiques des instances du sujet. La première topique proposée par Freud est celle de l’inconscient, du préconscient et du conscient : l’inconscient est le lieu du refoulement sexuel et des représentations de choses ; le préconscient est le (mi)lieu de la mémoire, des souvenirs et des oublis ; le conscient est le milieu de la perception et des représentations de mots. La deuxième topique, aussi proposée par Freud, est celle du ça, du moi et du surmoi : le ça est le réservoir ou la réserve des pulsions ; le moi est la caserne de la conscience individuelle ou personnelle ; le surmoi est l’instance de la conscience morale ou collective. La troisième topique, qui ne correspond pas nécessairement à celles de Freud, est celle de Lacan : réel (impossible), imaginaire (spéculaire) et symbolique (spectaculaire). Le neurologue Damasio y substitue, consciemment ou inconsciemment : le « proto-Soi », le « Soi-central » et le « Soi-autobiographique » ou l’émotion, la motivation et la cognition.
Ce qui suit peut être associé avec les correspondances de l’introduction et celles de la conclusion :
FREUD / LACAN
Trois instances du sujet
préconscient ----– conscient
­
inconscient
moi –---- surmoi
­
ça
imaginaire ----- symbolique
­
réel
[Pour toute la métapsychologie, cf. JML : Le sujet ; Première partie : « Le sujet de l’inconscient » (p. 7-76)].
La métaphilosophie
« L’envers de la psychanalyse », ou sa sémantique telle que définie dans le Livre XVII du Séminaire de Lacan (en 1969-1970), est sa métaphilosophie ou sa non-philosophie, sinon son « anti-philosophie ». C’est la théorie des quatre Discours (ou archidiscours) : le Discours du Maître, qui est lié à la politique, à la religion et à l’obsession ; le Discours de l’Hystérique, qui est lié à l’art, à l’art de la grammaire qu’est la littérature et à l’amour ; le Discours de l’Universitaire, qui est lié à la philosophie, à la science et à la paranoïa ; le Discours de l’Analyste, qui est évidemment lié à la psychanalyse et à la sublimation [cf. JML : Le sujet (p. 71-74 et p. 179, note 63] :
DISCOURS MAÎTRE DISCOURS UNIVERSITAIRE
(gouverner) (éduquer)
X
DISCOURS ANALYSTE DISCOURS HYSTÉRIQUE
(analyser) (aimer)
Métabiologie
Selon la métabiologie psychanalytique, le fondement du lien social est l’interdit de l’infeste qui, au niveau de la phylogenèse, est le tabou du sang (l’idéologie et le pacte du sang selon Testart), et, au niveau de l’ontogenèse, le complexe de castration. Qui dit interdit veut dire interdiction et castration (symbolique). Le petit de l’homme passe par une série de castrations, dès sa naissance et aux divers stades de développement de sa sexualité (sevrage, dressage, élevage, apprentissage, etc.) ; la castration orale précède, accompagne ou succède à la descente du larynx et la castration génitale procède aussi de la chute des dents de lait. Le complexe de castration est l’angoisse de castration (par le père ou son représentant) chez le garçon et l’envie de pénis chez la fille ; cette envie peut être centripète : avoir un pénis à elle, ou être centrifuge : recevoir un pénis pour elle [cf. Dolto]…
Le tabou du sang et le complexe de castration incluent ou impliquent l’interdit de l’inceste et l’interdit du meurtre, celui-ci ayant sans doute précédé celui-là. L’interdit de l’inceste (ou le tabou du sang maternel dans la prédation sexuelle), c’est-à-dire l’interdit du sang que l’on partage (le sang du totem, de la tribu, du clan ou de la famille), est l’interdit ou le tabou, la loi ou la règle, de l’univers collectif et il conduit à l’exogamie ; c’est l’aspect collectif de l’interdit de l’infeste. L’interdit du meurtre (ou le tabou du sang criminel dans la prédation alimentaire), c’est-à-dire l’interdit du sang que l’on verse ou qui coule (de la chasse à la guerre), est l’interdit ou le tabou, la loi ou la règle de l’univers individuel et il conduit au totémisme, qui est un pré-art, un pré-droit et une pré-religion et qui peut inclure ou intégrer l’animisme et le shamanisme ; c’est l’aspect individuel de l’interdit de l’infeste. Le totem est au tabou ce que le rite est au mythe, ce que le totémisme est à l’exogamie et ce que la sexualité est à la parenté […]
Le tabou du sang menstruel (maternel, matriciel), qui frappe les sociétés primitives et les sociétés modernes, est à la fois un aspect du tabou du sang et un aspect du complexe de castration (de la virginité et de la puberté à la maternité) ; ce tabou est donc le lien entre l’univers collectif et l’univers individuel et entre la phylogenèse et l’ontogenèse. C’est ainsi que ou pourquoi les menstruations de beaucoup de femmes sont vécues dans une extrême douleur ; c’est-à-dire qu’elles sont vécues inconsciemment comme un avortement, dans le sentiment de culpabilité d’un crime contre l’espèce (la phylogenèse) et d’un crime contre l’individu (l’ontogenèse). Il faudrait aussi voir s’il y a un lien ou un rapport entre les menstruations (qui sont synonymes de travail, d’ordre et de propreté) et la perte de l’oestrus (qui, lui, est synonyme de loisir, de désordre et de malpropreté). Enfin, alors qu’il y a la perte de l’oestrus en amont des menstruations, il y a la ménopause en aval, les deux pouvant être signifiées ou relayées par la parure (vêtements, ornements, bijoux, tatouages ou peintures corporelles) comme signal, signe ou symbole d’ethnicité acquise ou conquise par l’Homme de Cro-Magnon au détriment de l’Homme de Néandertal [cf. Arsuaga] – ce qui pourrait expliquer de manière évolutive (ou évolutionniste) le très grand succès de la mode (vestimentaire ou autre) et de la haute couture…
L’interdit de l’inceste concerne en outre les relations duelles de la parenté, les « structures élémentaires de la parenté » selon Lévi-Strauss, alors que l’interdit du meurtre concerne aussi la division sexuelle du travail ; il s’agit donc de la différence sociale et de la différence sexuelle, qui conditionnent le partage sexuel d’un sexe à l’autre et le partage alimentaire d’un groupe à l’autre.
Il est invraisemblable, ou tout au moins très peu vraisemblable, que la connaissance du rôle de la copulation dans la fécondation ait été connue avant le langage et donc avant l’homme ; surtout qu’il y a encore des aborigènes qui l’ignorent ou le dénient et qui vont jusqu’à nier le rôle de la mère ; en outre, il y a toutes sortes de mythes et de légendes entourant « les mystères de la vie » qui renient le sens commun ; enfin, il faut à l’enfant l’apprendre des adolescents que sont ses frères, ses sœurs ou ses camarades, ou des parents pour qu’il cesse d’imaginer toutes sortes de scénarios avant d’en arriver à imaginer le coït : il faut donc un véritable coup de force de l’imagination pour relier l’accouplement et l’accouchement et passer d’un solo ou d’un duo (avec la mère) à un trio (avec le père) ou à un quatuor (avec le phallus).
Le meurtre du père de la horde primitive, par le meurtre du chef par la bande de frères et pour la troupe de sœurs – que ce soit un événement historique, un mythe social ou un fantasme psychique importe peu ; ce qui importe, c’est qu’il y ait (eu) répétition et donc récit d’un meurtre –, est la fondation de la paternité : le père devient père en mourant ; le père mort est le père symbolique (du désir) : ce que Lacan appelle le Nom-du-Père et que d’autres appellent (le nom de) Dieu (de Moïse au Christ, le Messie ne pouvant être que le fils confirmant le meurtre du père)… Le père réel (du besoin) n’est jamais que le géniteur (inconnu, impossible à l’origine), tandis que le père imaginaire (de la demande), c’est bien souvent la mère (génitrice ou non)… La fondation de la paternité, la présomption de paternité » [Legendre], est inséparable de l’interdit de l’infeste et donc de l’interdit de l’inceste et de l’interdit du meurtre : c’est l’origine (l’émergence, l’apparition, la naissance) de l’homme, du langage et du monde ; c’est le mythe de l’origine à l’origine du mythe. Le père parle par le fils ; peut-être qu’il ne parlait pas ou qu’il a été tué parce qu’il parlait et qu’il savait, lui, ce qu’il en était de la paternité – à moins que ce ne soit le meurtre lui-même qui donne la parole aux meurtriers, qui ne sont donc pas des transgresseurs mais des fondateurs d’interdits…
Le meurtre (pré)historique, mythique ou fantasmatique du père, suivi du « festin totémique » (la ‘’dévoration’’ cannibale de son cadavre), est l’occasion ou le lieu de l’ambivalence entre l’amour et la haine pour le père mort (qui est un modèle et un rival), entre le bien et le mal et il conduit au sentiment de culpabilité, qui est le « péché originel de l’humanité » et la source de l’angoisse [voir plus haut : Métapsychologie/Économique] !
[Pour la métabiologie, voir le site de JML : Autres études : « Psychanalyse, sciences humaines et biologie ou Des grands récits » (2002) et « Darwin and Freud : Sociobiology or Metabiology ? » (2003)].
LA PRAGRAMMATIQUE
La pragrammatique est la pragmatique du regard et la grammatique de la voix comme récit et comme rythme, la grammatique étant donc une narratique (et non une narratologie) et une rythmique (et non une stylistique). La pragrammatique concilie ou réconcilie la grammaire (linguistique et sémiotique) et la psychanalyse ; c’est ainsi qu’elle fait de la valence (la valeur de la valeur, l’investissement thymique de la deixis) l’équivalent grammatical, l’étalon, de la pulsion ; la valence est la proprioceptivité, l’extéroceptivité et l’intéroceptivité et il n’y a pas d’actance sans valence. En (ré)conciliant la grammaire (du texte) et la psychanalyse, la sémiotique du récit et l’analyse textuelle, l’analyse et la synthèse, la pragrammatique est la science générale (fondamentale et radicale) de l’homme et la science subjective du sens (de la vie); elle implique une théorie du sujet et donc de l’actance. Enfin, c’est une théorie impersonnelle de la ponctuation de la personne, de l’espace, du temps et de la vitesse ou une théorie de la ponctuation de la deixis (ou du « Dasein »)…
- Mais la pragrammatique n’est pas un archirécit !
JML/4 février 2004
Qui gouverne le crime?
Certainement ce n'est pas la police. Le crime n'est pas quelque chose nouveau, mais ce que est nouveau c'est la concentration de l'activité criminelle répandue partout aux mains d'un groupe spécifique.
Depuis des années avant les Rothschilds jusqu'à aujourd'hui tous les fortunes des Juifs ont été basées sur le crime d'une sorte ou d'autre.
L'homme d'affaires Juif, Joseph Seligman, occasiona l'infâme "Vendredi Noir", le jour de la faillite de la Bourse au fin des années 1800.
En 1885 le projet basé en la France à construire le Canal de Panama s'écroula et encore Seligman était impliqué avec un financier Juif basé à Paris, Jacques de Reinach.
Leon Weiss était engagé dans la machine corrompue politique de Huey Long en les États Unis dans les premier jours du vingtième siècle.
Selon le "Jerusalem Post" en 1908 "Vingt-cinq pourcent des quatre millions des habitants du Nouveau York étaient Juifs mais ils étaient cinquante pourcent des occupants des prisons."
Quelques unes des fortunes "respectables" des Juifs étaient fondées sur des liens avec le monde criminel pendant le temps de la Prohibition. La fortune de la famille Bronfman de l'alcool du Seagram était basée sur une "arrangement" de la distribution du liqueur avec le malfaiteur Meyer Lansky.
La famille Pritzker de Chicago aussi avaient les liens avec le crime organisé.
En 1999 le journal anglais, le "Daily Mail" publia un récit sur les jumeaux Kray, Ronnie et Reggie , qui gouvernèrent le monde criminel à Londres par leur réseau des brigands et des voleurs jusqu'a leur détention pendant 1960.
L'israelien Nachum Ben David rapporte 91 assassinats commis par les Juifs en Palestine/Israel de 1882 à 1988.
Sans rendu compte des meutres occassionés par les malfaiteurs judaiques sous les auspices du communisme russe.
C'était les Juifs et non pas les italiens qui ont creé ce qu'on a appelé plus tard le "Mafia". Pendant les années 1920 les italiens ont commencé à remplacer les Juifs dans l'industrie du crime organisé à Nouveau York mais même en 1940 le Lepke Buchalter , aussi connu comme "Le Meutre Incorporé", encore tenait une position saillante.
Les Juifs étaient les premières qui réalisaient le lien entre le crime organisé et la polítique organisée. Ils ont mené le chemin à corrompre la police et les conseils municipal des villes. Ils ont reconnu le valeur d'un sindicat criminal et ils étaient des monopoleurs du premier ordre.
À Londres les Juifs ont été engagés toujours dans les activités criminelles de toute sorte. Ils ont commis des vols, la falsification et la distillation illicite de la liqueur. Quelques uns d'eux sont allés à l'Europe d'orient et ils ont convaincu les jeunes filles que pour elles à l'Angleterre il y avait du travail et les célibataires et ensuite ils les ont envoyées à l'Inde ou à l'Argentine aux marchés des esclaves blanches.
La loi"Jackson Vanick", un projet de loi pressait fortement dans les vestibules du Congrès par les Juifs americains, a permis que les immigrants "Russes" pouvaient entrer facilement dans les États Unis. qui a donné au KGB l'opportunité à déposer les malfaiteurs plus difficiles aux États Unis. Parmi eux, Marat Balagula, qui agit comme un fonctionaire des organisations criminelles pour le KGB qui l'a installé comme le chef de la plus grande coopérative de la nourriture en l'Ukraine.
Il a devenu le plus important criminel Juif et il a operé en collusion avec les agences sionistes et le groupe des femmes, Hadassah. Il a acheté un restaurant à Brooklyn à Nouveau York, que a devenue le vrai centre du pouvoir dans aquel endroit.
Cette operation criminelle était multi-nationale. Ils tenaient une flotte des bateaux énormes pour transporter de l'essence. Tous possedaient par les Juifs fidèles aux malfaiteurs. Balagula a fondé un empire criminel redoutable, étendrant de l'Áfrique du nord à l'Arabie Saoudite à la Venezuela à Brooklyn. Ils ont construis une infrastructure dedans le commerce de l'essence que les faisaient invincibles.
Yuri Brokhin était un autre criminel Juif del USSR. Les deux, Brokhin et Balangula, pouvaient transférer leur richesse à l'Amerique par voie des sionistes et les organisations "charitables" judaiques.
Une importante connexion entre la politique americaines et le "Mafia" juif est le rabbin, Ronald Greenwald, qui jouait un important rôle dans la campagne de Richard Nixon en 1972, et on l'a donné la position du conseiller à Nixon sur le programme de "l'indigence judaique". Sans doute Nixon était redevable à Greenwald.
Aussi Greenwald a protegé Marc Rich, un billionaire spéculateur judaique con les liens au "Mafia" qui avait un importante position dans l'administration de Clinton.
Quant à Las Vegas - les spéculateurs judaiques se chargeaient d'elle.
Le conseiller de George W. Bush, Natan Charansky, tient les liens profonds avec le crime organisé. Le Congrès, le département d'État et le CIA, tous ont les dossiers étendus sur Charansky qui jouait le rôle du pont entre le parti republicain et les malfaiteurs judaiques.
Charansky, connaissant son pouvoir, a refusé couper ses liens avec le crime organisé, infusant le Mafia Judaique dans les échelons plus hauts de l'administration de Bush.
L'influence du Mafia judaique joue une part essentielle sur le prix de l'essence par lequel le Mafia fait un accord entre Mossad et le royaume Arabe.
Le 28 avril 2002 un helicoptère militaire a brisé en el sur de la région de Krasnoyarsk de Siberie. Un important dignítaire russe, el general Lebed, le gouverneur de la région, était tué dans la chute. Immediatement le Media international (Judaique) a blâmé "brouillard pesant".
Néanmoins, chaque membre de l'armée russe connait que la mort de Lebed n'était pas un accident mais un autre assassinat par le Mafia international des Juifs, une organisation que a pris empire sur beaucoup de l'économie de Russie.
Le fait que le Mafia judaique, souvent nommé improprement le "Mafia russe", pouvait cacher complètement ses traces pendant que tout le monde (en Russie) fusse convaincu de leur complicité, est une preuve de sa puissance.
Ce Mafia est sans exception judaique. La situation unique en l'ancien USSR et le fait que les Juifs prédominés dans la bureaucratie sovietique donne l'indice au avancement du Mafia judaique.
L'homme-clé dans ce marais est un Juif ukrainien, né en 1946, nommé Semion Mogilevich qui trafique dans les materiels nucléaires, les drogues, les bijoux precieuses et les beaux-arts volés et qui domine tout qu'arrive et que parte de l'aéroporte international de Moscou.
Il a acheté une compagnie aerienne en faillite d'une passée asiatique republique sovietique pour quelques millions de dollars, payé en éspeces de sorte qu'il pouvait tirer héroine du "Triangle d'or".
Ses premières operations étaient basées en Israel, où il a écorché les réfugiés judaiques de Russie. Ensuite il a obtenu la citoyenneté hongroise. Il domine les bordels en Israel, où les filles ukrainiennes et russes sont forcées à l'esclavage. C'est legal en Israel si les filles ne soient pas juives.
Mogilevich domine le commerce de vodka en Russie et en l'Europe central, mais en dépit de tout cela son nom est presque inconnu et jamais il apparaît dans les récits de la Presse ou de la television en Israel, en Ukraine ou en les États Unis. Une preuve du pouvoir du Media controllé par les Sionistes et de leurs efforts incessants supprimir toute investigation du crime judaique.
Il a fabriqué un réseau énorme des communications globaux et il emploie beaucoup de gens pour faire marcher son empire financier. Il a penetré chaqu'un des Bourses et il gouverne beaucoup de négoces là-dedans.
Il était aussi l'ésprit superieure d'un plan du lavage de l'argent le plus grand dans l'histoire de les États Unis, où sept billion de dollars étaient "lavés" par la Banque de New York, qui est une succursale importante de la Réserve Federale et sa banque preferée.
Il domine l'équipement militaire qu'on fabrique en la Hongrie. Il a sa propre armée. NATO a dit qu'il est une menace à la stabilité de l'Europe bien que son nom ne soit pas bien connu.
Il a des agentes dans tous les agences d'information de tous les pays européens, que signifie qu'on jamais peut le poursuivre. La television allemande a rapporté que la Service allemande de l'information, le BND, avait entré dans des negotiations sécrétes avec Mogilevich, par lesquelles ils le donneraient de l'information sur ses rivaux en Russie. Il a un arrangement semblable avec l'Agence de l'information française. Il a les liens bien fermés avec Mossad, qui a detruit son dossier criminel, que le fait immun de la poursuite et que le permet voyager sans restriction.
Il domine le marché noir de l'Europe central jusqu'a Russie. Il a une liaison avec les Rockfellers. Son conseilleur économique en chef, Igor Fisherman, était un consultant de Chase Manhattan.
L'état d'Israel est un facteur très important dans l'avancement du pouvoir du Mafia judaique, les pourvoyeurs des drogues, les entrepreneurs de la pornographie des enfants et les commercants des esclaves. Le CIA a dit qu'il n'y a pas d'un membre important du Mafia "Russe" qui ne possède pas un passeporte Israelien mais l'État d'Israel refuse à prendre aucune action contre les malfaiteurs. Le pouvoir des bandes criminels des Juifs est plus impitoyable que les autres bandes criminels. Tous sont libres de la poursuite en Israel. Israel ne pense pas que ces activités soient criminelles si les victimes ne soient pas Juifs et l'État d'Israel n'extradera ses citoyens aux pays non-Juif.
Qui gouverne le monde?
Je me suis permis de copier le ce message du
blog de Guy Sorman.

J'avoue que le juridisme onusien à la française promu par le duo villepino-chiraquien m'inspire honte et dépit. Et le fait qu'il semble soutenu par une majorité de Français accroit mon désarroi.

C'est donc avec joie que j'ai accueilli ce texte, dont je me suis contenté de mettre en évidence les passages les plus significatifs pour les pressés et pour les paresseux.

J'avoue éprouver un plaisir certain à savoir que je suis du bon coté du manche, je veux dire, du bon coté de la morale. Car, si il m'arrive de douter de bien des choses, il y a du moins une chose dont je suis sûr : je me sens plus près de Bush et de Blair que de Ahmadinejad, de Poutine, de Khadafi et de Hu Jintao.

Que ceux qui font objectivement le jeu de ces derniers y réfléchissent à deux fois : rien ne nous sera épargné au nom de je ne sais quelle complaisance pour tel ou tel dictateur, aucune compromission n'éloignera de nous le calice quand viendra l'épreuve.

Car l'épreuve viendra, l'histoire est tragique, faut-il que nous l'ayons oublié ?

Bien trop tard, les artisans du désastre regretteront-ils de s'être rués à la servitude, suivant l'expression de Tacite ?

Car, il faut être bien naïf ou bien lâche pour ne pas comprendre que tous ces gestes onusiens que nous croyons si raisonnables, si intelligents (mais nous tromponns nous vraiment nous-mêmes ?) sont interprétés par ceux qui se considèrent comme nos ennemis comme autant d'aveux de faiblesse, de symptomes de soumission.

Qui gouverne le monde?


Le gouvernement mondial n’est pas pour demain, Dieu merci. Assemblée générale annuelle de l’ONU: me trouvant à New York, aux premières loges, pour écouter tous les chefs d’Etat pérorer à la tribune, je me réjouis du peu de pouvoir de cette assemblée.

Mon regard serait-il superficiel? Certains, dans la diplomatie française en particulier, pratiquent une vision transcendantale de l’ONU: oui, ces chefs d’Etat sont pour la plupart des tyrans et des kleptocrates, mais tous ensemble, leurs vices particuliers se métamorphoseraient en une sagesse générale.

En ce moment, à New York, les vices sont tout de même plus évidents que la sagesse: en profitent directement les hôtels, restaurants, boîtes de nuit et services d’escorte payés par les impôts , les razzias et la confiscation de l’aide internationale. Ces exactions sont infligées par les kleptocrates aux peuples les plus pauvres; le président de la Banque mondiale a dénoncé la facture d’hôtel d’un million de dollars du président du Congo, pays qui ne parvient pas à rembourser ses dettes. Mais il y a pire que la corruption.

À la tribune de l’ONU, la Palme de la clownerie et du mensonge aura cette année été fort disputée. On s’attendait à ce que le président iranien l’emporte ; mais, malgré un regard quelque peu allumé, sa dénonciation lancinante, répétitive de l’injustice de l’ordre mondial, anesthésia la salle et la presse. La surprise vint donc de Chavez, le Vénézuélien, qui, grimaces à l’appui, dénonça l’odeur de soufre qui planait encore sur l’estrade où le diable Bush avait parlé la veille. On sait aussi que converti en agent littéraire, il brandit un livre de Noam Chomsky qui, selon Chavez, révélait bien le complot de l’Amérique contre le monde. Les ouvrages délirants de Chomsky sont à peu près aussi scientifiques que le fut en son temps le Protocole des sages de Sion, qui dénonce l’emprise juive sur la planète. Mais Chomsky étant juif lui-même, c’est à l’Iranien Ahmadinejad que revient le prix spécial de l’antisémitisme.

S’étonnant de l’importance excessive que l’on accorde à l’extermination des Juifs d’Europe, Ahmadinejad a demandé la création d’une instance indépendante pour vérifier l’existence ou non de l’Holocauste! S’il est prouvé qu’elle a eu lieu, ajoute le Président iranien, les Européens en sont responsables et il convient que les Israéliens s’en retournent en Europe, où ils seront logés et nourris. Inutile de se demander pourquoi le gouvernement iranien cherche à se doter d’une bombe atomique? Sinon pour rayer Israël de la carte du Proche-Orient: nul d’ailleurs dans les couloirs de l’ONU ne doute de ce projet iranien. Comme l’a observé l’ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, l’Iran disposant de quatre siècles de réserve de pétrole et de gaz, n’a aucun besoin de centrales nucléaires pour produire de l’énergie.

Face au délire et plus grave, face à la détermination de ce gouvernement iranien, Jacques Chirac aura aussi créé une surprise qui mérite une mention spéciale du jury. Alors que la France, jusque-là, était d’accord avec les Etats-Unis pour sanctionner l’Iran et bloquer, si faire se peut, son programme nucléaire, le Président français annonça à la tribune qu’il ne croyait pas aux sanctions ; si le Conseil de sécurité en adoptait, précisa Chirac , il fallait qu’elles soient douces.

Les Américains , apparemment pas prévenus de ce volte-face, ont fait bonne figure, considérant sans doute que Chirac, en fin de parcours, était « irrelevant » et les Français de vrais faux alliés.

La presse américaine en conclut que des entreprises françaises, soutenues par Jacques Chirac, devaient réaliser de bonnes affaires en Iran: une interprétation quelque peu superficielle – à mon sens – qui sous-estime le désir véritable de Jacques Chirac de se poser en leader des pays non alignés et en défenseur des grandes civilisations menacées par l’américanisation culturelle. Chirac fut d’ailleurs, pour son ultime prestation à l’ONU, aussi chaleureusement applaudi que Chavez et Ahmadinejad.

La réception la plus glaciale, on le devine, fut réservée au Président des Etats-Unis.

Les Etats-Unis ont tout pour déplaire à l’assemblée des kleptocrates. Tout d’abord, le contribuable américain paye l’essentiel des frais de fonctionnement de l’ONU et de la réception à New York. Nul invité n’a le désir de remercier son hôte. Ensuite, les Américains n’ont que le mot démocratie à la bouche, une insulte permanente pour les trois quarts des délégués. Enfin, George W. Bush a fait appel à l’ONU pour une mission concrète et urgente: stopper le génocide au Darfour . Un massacre qui bouleverse actuellement l’opinion publique américaine mais a laissé l’Assemblée générale des Nations Unies totalement indifférente. Les représentants russes et chinois au Conseil de sécurité s’opposent d’ailleurs à une intervention au Darfour; perpétuant leurs propres massacres contre les Tchétchènes, les Tibétains et les Ouïgours, ils ne veulent pas créer de précédent humanitaire. Chacun ne doit-il pas rester boucher chez lui?

Cette passivité de l’ONU face au Darfour ou à l’Iran se drape dans les deux alibis majeurs de la communauté internationale : souveraineté nationale et respect des civilisations. La plupart des génocides sont conduits sous couvert de la souveraineté nationale, exercée par des tyrans, à l’abri des frontières arbitraires. Mais ces tyrans sont maintenant confrontés au droit d’ingérence humanitaire qui conteste la souveraineté nationale.

C’est là qu’intervient la Civilisation. Cet alibi, plus chic, a pris le relais de la souveraineté. Au nom de la Civilisation ( en général définie , proclamée et incarnée par des personnages peu civilisés eux-même), on va refuser la liberté d’expression (Chine) ou la liberté religieuse (Arabie, Soudan ) . Paradoxe des paradoxes: l’ONU, qui est en principe l’assemblée de l’humanité, dénie aux peuples leur appartenance à la nature humaine. Vu de l’ONU , un Chinois est chinois avant d’être un homme doté de droits naturels.

Les Américains sont à peu près les seuls, en compagnie de quelques Anglo-saxons, à estimer qu’il existe, par-delà les frontières et les civilisations, une humanité qui a droit – entre autres – à la liberté. Mais, par chance, l’ONU n’est pas le gouvernement du monde : dans la mesure où ce gouvernement existe, il est américain.

C’est un fait , que l’on aime ou non... Même Chavez, Ahmadinejad, les Chinois, les Russes et les Français sont – de fait – des sujets involontaires de la Pax Americana.Chavez ? Il traite les Américains de fascistes mais à qui vend-il le pétrole du Venezuela ,sinon aux Etats-Unis ? Les Chinois ? Si la flotte américaine disparaissait de l’Océan Pacifique, combien de containers d’exportations chinoise atteindraient-ils, sans être piratés, les côtes de Californie et les consommateurs américains ? Et combien de tankers pétroliers navigueraient-ils sans obstacle des côtes iraniennes aux ports chinois ? Tout le système mondial de communication et d’échanges est, en réalité, garanti par la présence physique des forces américaines sur l’ensemble de la planète.

Ce qui vaut pour les communications physiques est tout aussi vérifiable pour la circulation de la monnaie , le Dollar ( géré par le Federal Board ), des capitaux (régulés par Wall Street) ou des informations (Internet géré aux Etats-Unis ).Mais une lourde menace pèse sur la Pax americana : Chavez ? Non. Ahmadinejad ? Pas plus. La menace véritable vient du contribuable américain. Imaginons que celui-ci fasse ses comptes et en déduise que la Pax americana lui coûte plus qu’elle ne rapporte aux Etats-Unis : il apparaîtrait alors que pire que la Pax Americana, bien pire que l’impérialisme américain, serait leur disparition. Imaginez un monde dirigé depuis l’ONU!

Guy Sorman, New York 25 septembre 2006

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